Liberté et prospérité : le poids de la culture

Liberté et prospérité : le poids de la culture

Un nouveau domaine s’est trouvé ouvert pour la pensée économique au cours de la dernière décennie, un domaine qu’on pourrait désigner du nom de « capital culturel ». Le premier à avoir défriché ce domaine a été, il y a longtemps, Max Weber. Il y eut plus récemment mon ami Michael Novak et ce grand livre fondateur que fut « The Spirit of Democratic Capitalism », traduit en France sous un titre mutilé : Une éthique économique. Il y eut, bien sûr, La révolution capitaliste de Peter Berger, livre que j’ai traduit et édité voici une douzaine d’années. Sont venus ensuite des ouvrages cruciaux que tout « honnête homme » du xxie siècle commençant devrait avoir dans sa bibliothèque : la trilogie de Thomas Sowell, « Race and Cultures », « Conquest and Cultures », et « Migrations and Cultures », et, bien sûr, l’ouvrage de David Landes, « Richesse et Pauvreté des Nations ». Pour que la liste soit provisoirement complète, il faudrait ajouter, bien sûr, « Trust », de Francis Fukuyama, « Le conflit des civilisations » de Samuel Huntington, et les livres de Lawrence Harrison, « Underdevelopment is A State of Mind » et « Who Prospers ».
Ce qui est au cœur de ce domaine est la découverte graduelle de ce que les règles qui permettent prospérité et liberté sont connues, et peuvent être définies en termes de droit et d’économie, mais ne peuvent se trouver appliquées dans une société et y fonctionner de manière optimale sans que d’autres paramètres ne soient pris en considération. Dans certaines sociétés, les règles pourront fonctionner pleinement, dans d’autres sociétés, le fonctionnement sera plus difficile, dans d’autres sociétés encore, le fonctionnement s’avérera impossible. La culture compte.
Weber a montré les liens qui liaient l’émergence du capitalisme à l’esprit protestant. Novak a précisé que le catholicisme aussi pouvait servir de substrat à cette émergence et au déploiement de ce qu’il a appelé le « capitalisme démocratique ». Berger et Fukuyama ont expliqué de leur côté que la conception confucéenne de l’ordre permettait diligence et confiance, donc diminution des coûts de transaction. Landes a expliqué, lui, que si certaines sociétés étaient devenues riches, c’est parce que leur substrat culturel était un catalyseur de création de richesses, alors que si d’autres sociétés sont restées pauvres, c’est parce que leur substrat culturel y rend difficile, voire impossible, cette même création de richesses…
Sowell expose, minutieusement et implacablement, qu’il existe des constantes, des invariants, que les êtres humains emportent avec eux où qu’ils se trouvent ensuite, et qui les conduisent à reproduire des comportements ancestraux.
Huntington et Harrison, dans la même direction que Sowell, définissent des aires civilisationnelles et disent que le développement est possible dans certaines de ces aires, presque impensable dans d’autres aires. Dans un livre collectif dont ils sont les maîtres d’œuvre (et qui s’appelle précisément « Culture Matters », « la culture compte »), ils font un tour d’horizon d’où il ressort que l’Europe et ses extensions, Amérique, Australie, Nouvelle-Zélande ont été des lieux de l’essor économique pour des raisons logiques, tandis qu’Afrique sub-saharienne et monde musulman sont dans le sous-développement endémique pour des raisons tout aussi logiques. Entre les deux : l’Asie qui, si elle a su s’adapter remarquablement au capitalisme industriel devrait avoir bien davantage de difficultés à s’adapter au post-capitalisme en cours d’émergence…
Harrison et Huntington définissent, en fait, plusieurs paramètres indispensables pour que le développement ait lieu. La définition légale des droits de propriété ne suffit pas, l’existence d’instances judiciaires stables non plus : il faut que les droits de propriété apparaissent légitimes aux populations concernées, et il faut que le juge se conçoive au service d’un idéal plus haut. La démocratie, bien sûr, ne suffit pas, elle non plus, et peut se transformer en plébiscite irrationnel au service d’un démagogue si l’idée de bien commun est absente. Il faut, en supplément, que l’être humain se conçoive comme un individu s’appartenant à lui-même et qu’il se conçoive comme un être capable de rationalité, d’efficacité et de responsabilité vis-à-vis de ce qui l’entoure. Il faut que l’être humain se conçoive capable de créer, donc capable d’autonomie et de critique. Il faut que l’être humain puisse se situer dans la durée et se projeter dans le futur.
Les sociétés où tous les paramètres sont réunis sont rares. Celles où de nombreux paramètres manquent ont de profonds handicaps, et devront impérativement passer par un ajustement.

David Saul Landes
Jean-François Sené
Richesse et pauvreté des nations
Albin Michel

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Comments (26)

  • T.Larger Répondre

    Que la France soit contre les usa oui, qu’elle soit encore une puissance non; je la classerais plutôt du côté des impuissances. En tout cas c’est la culture chrétienne, aiguillonnée par la réforme qui est à l’origine de la société moderne, et ce n’est pas un hasard

    16 juillet 2004 à 22 h 28 min
  • Rameau Répondre

    “Votre paragraphe racial est basé sur des supputations que vous me permettrez de juger pour le moins hasardeuses. Vous trouverez au Front National des personnes telles que Farid Smahi, un harki qui s’est battu pour la France en Algérie.” Et bien j’aurais vécu suffisamment longtemps pour recevoir un cours d’antiracisme par un partisan du Front National ! C’est une remarque amusée mais pas ironique, je vous prie de le croire (mais vous connaissez bien les méchancetés que les medias disent sur vous)… Peut-être ma nature désabusée me rend-elle moins “généreux” que le partisan d’un rôle ambitieux pour la France et d’une mission digne de son Histoire. Je voudrais préciser une chose à toutes fins utiles, (peut-être pour me couvrir lâchement…). Lorsque j’ai dit… “Donc la réalité serait peut-être encore moins universaliste que ce qu’imaginaient les anthropologues des XIXème et XXème siècles, égarés par un esprit de système “scientiste” et généralisant. Comme vous le dites : pas de “solidarité” blanche.” … je n’entendais pas défendre une conception de la nation “encore moins généreuse” que le racisme nazi. Mon propos était simplement d’abonder dans votre sens en constatant qu’aucune “solidarité raciale” ne transcende les nations. Je ne prétend pas réfuter qu’inversement des éléments de race distincte de la ou des races majoritaires dans une nation ne puissent pas s’y intégrer avec succès (mais le Front National attire tout de même notre attention sur les difficultés qu’il s’agit de surmonter pour faire de cette intégration un succès, n’est-ce pas ?). mon affirmation selon laquelle la réalité serait “moins universaliste” que certaines théories qui le sont déjà très peu était effectivement malheureuse. En conséquence, je prie tout ceux qui auraient pu se sentir offensés par mes propos de bien vouloir etc.

    16 juillet 2004 à 21 h 24 min
  • Pangloss Répondre

    “Il ne faut pas se lancer dans des combats que nous ne pouvons que perdre. La priorité des priorité c’est l’économie, sinon nous allons être définivement distancé par les USA.” Votre affirmation n’est-elle pas “performative” ? Etant vous même, sans doute, pro-américain, vous invoquez l’impossibilité pour la France de s’opposer avec succès aux Etats-Unis. Vous avez peut être raison dans l’absolu mais comme, indépendamment du rapport de force objectif, vous ne souhaitez pas que la France tente quoi que ce soit contre les USA, on pourrait vous accuser de travestir, au moyen d’un discours pseudo-objectif, votre volonté d’influencer les Français dans un sens qui vous convient. Nénmoins, indépendamment de vos préférences personnelles, il se peut que vous ayez raison sur le fond : la France ne pourrait ainsi que perdre un bras de fer avec les USA. S’ensuit-il qu’en renonçant à contrer les USA sur le terrain politique et en restreignant notre rivalité au terrain économique (cas de figure normal puisque les individus et les nations alternent concurrence et coopération dans la sphère économique), nous aurions davantage de chance de ne pas nous laisser “distancer” ? Ce n’est pas non plus garanti, car, même dans le cadre d’une loyale compétition économique, il existe des gagnants et des perdants (que le jeu soit ou non “à somme nulle”, ce n’est pas la question); et il ne suffit pas de faire allégeance au “règne du droit” et au libéralisme pour réussir. Il faut, en plus, justifier en permanence de l’utilité de son travail pour autrui. Nénmoins, il n’est pas certain qu’en s’affranchissant des règles du Droit, les “perdants” puissent trouver la place qu’ils n’arrivaient pas à obtenir alors qu’ils s’y conformaient. En effet, les “gagnants” pourraient s’opposer avec succès à la vindicte de ceux qui voudraient les spolier. Peut-être les “perdants” ne disposent-ils finalement que de mauvaises solutions : soit accepter les règles de l’état de droit et ne pas réussir à justifier d’une utilité dans la vie économique (donc mourrir), soit tenter de survivre en violant la liberté des “gagnants” et être vaincus par la force légitime de ceux-ci (donc mourrir également). Si les “perdants” pensent à tort ou à raison qu’une de ces deux attitudes leur sera moins défavorable, ils l’emprunteront certainement. Ce qui m’apparaît toutefois, c’est que le discours des gens exhortant autrui à se conformer au cadre d’une compétition économique (respectueuse du droit) n’est pas forcément d’un grand profit pour tout le monde. En effet de nombreux libéraux contestent que chacun puisse connaître l’intérêt d’un autre mieux que ce dernier ne le ferait lui même (c’est pourquoi, disent-ils, l’intérêt général n’existe pas). Von Mises juge que seul les actes (et non les paroles) donnent une indication sur les préférences de chacun. Il en conclut qu'”on” doit laisser les individus libres pour que l’information puisse circuler de manière optimale. Mais, ce faisant, il préjuge déjà du choix que fera chacun de violer éventuellement la liberté d’autrui par le biais de l’Etat (par exemple en votant pour des politiques redistributrices et spoliatrices lors des éléctions octroyées par la “mafia étatique” -pour adopter le registre libéral/libertarien). En effet, l’information qui importe ne consiste-t-elle pas en ce que de nombreux individus ne sont pas intéressés par les informations optimales qu’ils recueilleraient si seulement ils respectaient la liberté d’autrui (au lieu de plebisciter la “spoliation étatique”) ? Or, disions-nous, on ne peut sans doute pas savoir, mieux qu’un partisan de la spoliation étatique, ce qui serait bon pour lui (si l’on ne croit pas à l’intérêt général). Toutefois, les partisans de la liberté peuvent très bien vouloir lutter contre leurs oppresseurs afin de défendre leurs propres intérêts et non ceux des autres. Le fait qu’ils en soient réduits à argumenter avec les tenants de la “spoliation étatique” (en prétendant les éclairer sur leurs intérêts bien compris) n’est-il pas susceptible d’être accueilli avec méfiance par les bénéficiaires des “larcins” de l’Etat ? Hobbes distinguait les “conseils” des “exhortations” : les premiers émanent de gens dont l’intérêt n’est pas atteint par la décision qui sera prise à la suite du conseil donné. Les secondes sont le fait de ceux qui, au contraire, bénéficieraient d’une décision prise conformément auxdites exhortations. Le discours pro-américain et/ou libéral, fût-il même raisonnable dans l’absolu, ne relève-t-il pas davantage de l’exhortation que du conseil ? Tenter d’influencer le jugement d’autrui en faveur de vos intérêts (et de vos idées, en l’occurence) serait de bonne guerre. Mais croyez vous que les idées libérales seront mieux acceptées à présent, alors que les Français les ont toujours snobées, même lorsque l’Histoire semblait leur sourire encore plus qu’aujourd’hui – à l’époque de la chute du mur – ?

    16 juillet 2004 à 18 h 41 min
  • Florent Morlan Répondre

    Il n’y a pas de vocation anti-américaine de la France, il y a une vocation de la France à lutter contre toute hégémonie qui menace d’anéantir les civilisations de notre monde. Sommes-nous maître de notre antagonisme aves les Etats-Unis ? N’est-ce pas plutôt le fait de quelque fatalité ou déterminisme qui nous pousse à nous opposer presque malgré nous aux Etats-Unis ? Ne subissons-nous pas un destin plus que nous n’accomplissons une mission ? Des hommes éclairés comme le général De Gaulle ont toujours été au fait du destin de la France. Bizarrement, un président d’aussi piètre facture que Chirac, qui a signé les traités européistes, n’a pas hésité à s’opposer aux états-unis lors du conflit en Irak, laissant l’europe politique pour ce qu’elle est. La France ne subit pas son destin, elle l’accomplit. Ce sont ceux qui la gouvernent qui peuvent subir ce destin, mais en aucun cas ils ne peuvent empêcher son accomplissement. Le Front National a toujours été partisan d’une solidarité nationale qui s’exerce à l’intérieur des frontières de la France et entre français, dans un cadre économique protégé par nos frontières. Ainsi doit fonctionner toute nation saine. Croire que l’universalisme de la France passerait par l’abolition de nos frontières et l’accueil irraisonné de hordes immigrées qui n’en veulent qu’à nos allocations est une erreur grossière. La générosité de la France doit être une générosité d’état à état, pas une veule charité qui dépouille notre nation. L’universalisme passe par le rayonnement culturel et doit s’appuyer sur une bonne santé économique. Oui, pour répondre à Adolphos, la culture précède l’économie et non l’inverse. C’est l’hégémonie culturelle des Etats-Unis qui leur permet de dominer le monde économiquement. Entre les gauchistes anti-américains et nous il n’y a aucune ambiguïté. Je pense même que ceux-ci préfèrerait un Alain Madelin à Jean-Marie Le Pen. Mais quoiqu’il en soit, le Front National est contre le libéralisme sauvage qui ne fait le jeu que du plus fort, il est pour le rétablissement des frontières économiques nationales, pour protéger les entreprises françaises des méfaits du mondialisme. Votre paragraphe racial est basé sur des supputations que vous me permettrez de juger pour le moins hasardeuses. Vous trouverez au Front National des personnes telles que Farid Smahi, un harki qui s’est battu pour la France en Algérie. S’il est absurde de prétendre faire un français d’un étranger par quelques formalités administratives, il l’est tout autant de refuser de considérer comme français quelqu’un qui au bout de longues années à prouvé qu’il s’était bien intégré à la nation française, parfois en prenant les armes pour la France comme c’est le cas pour les harkis. Etre français, ça se mérite ou ça s’hérite. Il est évident que par les temps qui courent des milliers d’immigrés ont pu bénéficier de la nationalité française en toute illégitimité. Pour pallier cette situation, le Front National propose l’abolition du droit du sol et la suppression de cette monstruosité juridique qu’est la double nationalité. L’union européenne nous a dépossédé de notre monnaie, de notre indépendance politique, économique, petit à petit elle nous dépossède de notre langue, de notre drapeau, de notre hymne national, bientôt de notre constitution, pour moi l’union européenne est un sida qui tue la France. Aurons-nous assez d’argent pour donner une dimension politique à la francophonie et pour aider économiquement les pays d’où provient l’immigration ? Si on aide ces pays c’est justement pour qu’ils mettent fin au déferlement d’immigrés chez nous. Avec les milliards que nous coûte l’immigration, croyez-moi, on peut financer bien des choses. Vous pensez que la France n’est pas assez forte pour se sauver elle-même. Mais que nous apporterait l’aide d’autres états ? Et de quels compromis devront nous payer cette aide ? La France est affaiblie militairement. Quelles forces militaires conjuguées à la notre pourrait nous faire rivaliser avec l’armée américaine ? A quoi sert d’être plusieurs David, qui se chamailleront inévitablement, contre Goliath ? La France doit seule montrer la voie, les autres nations suivront.

    16 juillet 2004 à 14 h 46 min
  • Rameau Répondre

    “Pour vous répondre Rameau, il me semble que l’hypothèse de la France comme contre-puissance à l’hégémonie américaine se vérifie de plus en plus.” Oui. Je suis d’accord avec vous sur ce point. Mais sommes-nous maîtres de notre antagonisme avec les Etats-Unis ? Avons-nous entrepris tout-à-fait consciemment de “lancer un défi” à l’Amérique ? N’est-ce pas plutôt le fait de quelque fatalité ou déterminisme qui nous pousse à nous opposer presque malgré nous aux Etats-Unis ? Ne subissons-nous pas un destin plus que nous n’accomplissons une mission ? La vocation “anti-américaine” de la France n’est-elle pas tout de même liée à un certain anti-capitalisme (ou anti-libéralisme, comme on voudra) ? Même si vous vous réclamez de “la droite nationale”, reconnaissez que certains Français s’opposent à l’hégémonie américaine avec un argumentaire différent du vôtre (certains prétendrons que tous les anti-Américains sont secrêtement unis par une commune laideur d’âme et un ressentiment fondamentalement semblable. Nous ne nous aventurerons pas dans une telle discussion). Si l’on admet que certains Français sont devenus anti-américains par défiance envers le capitalisme, on peut même conjecturer qu’ils y ont été incités par les difficultés qu’ils subissent dans leur vie de tous les jours (ils auraient ainsi entrepris d’en vouloir à l’Amérique plutôt qu’à “Seillère” ou aux bourgeois, par exemple, ce qui est plus responsable, dans un sens, puisque l’Amérique est le pays au sommet du système économique mondial, de telle sorte que “nos bourgeois” sont obligés de répercuter sur le tissu social français la “contrainte extérieure”, même si, dans l’absolu, ils auraient été d’accord pour “lacher du lest” en faveur des “travailleurs” français). Une telle inimitié vis à vis des USA ne serait ainsi pas choisie mais subie. Il s’agirait plus d’une réaction que d’une action, plus du réflexe vital de celui qui veut se préserver d’une nuisance que de l’acte gratuit et noble du guerrier qui lance un défi son adversaire. La “nécessité” de s’opposer aux USA serait donc liée à un déterminisme économique. On peut tirer certaines conséquences si l’on admet cela : nous n’avons pas “tort” de nous opposer aux USA car nous n’avons tout simplement pas le choix (ce n’est pas matière à débat, dans une telle hypothèse). En revanche, nous ne pouvons dire que nous nous engageons dans cette voie en position de force ; au contraire, nous ne sommes pas maîtres du calendrier puisque nous obéissons à une pulsion qu’il nous incombe de canaliser afin qu’elle ne nous détruise pas. En revanche, ce déterminisme économique, puisque l’économie concerne tous les hommes, ne saurait se limiter à la France mais revêt au contraire une dimension universelle. C’est pourquoi ce qui dans l’absolu est une faiblesse (ne pas supporter les rigueurs de la mondialisation encouragée par les USA) confère paradoxalement à notre pays un rôle de leader (nous sommes comme toute l’humanité, c’est-à-dire fragiles dans le système économique américano-centré, mais un peu plus “râleurs” que les autres, ce qui nous donne la responsabilité de dire tout haut ce que les autres pensent encore tout bas. ce sont les “dysfonctionnements” plus avancés de notre économie qui nous qualifient pour le “leadership” de la fronde antiaméricaine, “dysfonctionnements” qui doivent toutefois impérativement être subis par les autres nations, même avec retard, car sinon, notre “originalité” serait perçue comme un caprice incongru. Ce scénario des dysfonctionnements français précurseurs des problèmes subis par d’autres s’est réalisé avec l’Allemagne, autrefois donnée en exemple mais aujourd’hui dans un état qui la force à se solidariser avec la France. Autre pays candidat au rôle de laboratoire défectueux du libéralisme : l’Italie berlusconienne) Evidemment, les raisons que je viens d’évoquer ne sont pas celles pour lesquelles vous vous opposez aux Etats-Unis. Vous le faites parce que, pour vous, la France doit être “à la hauteur” de sa mission et ne saurait viser d’autre but que “la Grandeur”. Je ne veux pas vous dissuader de nourrir une si noble ambition pour la France mais seulement vous mettre en garde contre les malentendus que vous pourriez entretenir avec d’autres Français animés comme vous du souci de s’opposer à “l’hégémonie américaine”. Dans leur lutte contre les USA, ces derniers seront peut-être plus enclins à privilégier soit leur intérêt personnel, soit un chimérique intérêt de l’humanité plutôt que “l’intérêt de la France”. L'”union sacrée” des Français (que les visiteurs de ce site perçoivent comme une communion intense et suspecte) risque donc de faire long feu si l’on n’en saisit pas le caractère contingent et si l’on ne cherche pas à la consolider en dissipant d’éventuels malentendus. Si, en revanche, on entreprend l’effort de se demander sur quel projet les Français pourraient être unis au delà de la défiance envers les USA, alors une hypothèque sera levée. Exemple : la vocation universelle que vous confieriez à la France pourrait-elle faire bon ménage avec l’universalime redistributeur (voire carrément marxiste dans certains cas) de certains autres opposants aux Etats-unis ? Je ne savais d’ailleurs pas que le patriotisme de la “droite nationale” se réclamait de l’universalisme, mais on peut être influencé par des préjugés. Dans le but du “redressement national” n’imposerez-vous pas aux Français trop d'”efforts” alors qu’ils en veulent justement aux USA de leurs imposer des “efforts” dans le cadre de la mondialisation ? En clair : le Front National souhaite-t-il infléchir sa doctrine vers davantage de social pour se concilier ceux qui redoutent les effets de la mondialisation sur leurs “acquis sociaux” ? Quant aux Français qui marient leur patriotisme avec leurs convictions universalistes, ils exhortent souvent la France à la “générosité” envers le Tiers-Monde (et les immigrés), afin de ne pas compromettre le “rayonnement” de la France dans les pays d’Afrique francophone. Dans quelle mesure le patriotisme d’inspiration universaliste, même (néo ou post)colonial, n’entre-t-il pas en conflit avec un nationalisme moins ambitieux mais plus “charnel” et “enraciné” ? Le Front National n’entretient-il pas une certaine ambiguité quant à ces deux formes de patriotisme et ne laisse-t-il pas croire aux Français qu’ils peuvent obtenir le beurre et l’argent du beurre ? Exemple : si le FN était amené à “faire le ménage” dans les banlieues (au risque de provoquer de sérieux troubles au moins à court terme), ne faudrait-il pas nous résigner à moins “rayonner” à l’étranger (notamment dans le tiers-monde) ? Je ne veux pas surestimer les réactions que provoqueraient une éventuelle “reprise en main” de la situation en France (les autres pays ont d’autres chats à fouetter). Mais de là à considerer que “l’empreinte de la France” que “le monde n’a pas oubliée” nous garantit automatiquement la bonne volonté du reste de la planète, il y a un pas que je n’ose franchir. Je crois simplement que nous bénéficions du fait que nous ne sommes pas les Etats-Unis, aubaine qu’il s’agit d’exploiter sans états d’âme ni romantisme. Le nationalisme du “germen” que vous évoquez me fait plutôt penser au nationalisme du “germain” Je l’évoque parce qu’il existe. Il se peut même que certains électeurs comptent sur le FN pour le favoriser (et peut-être s’agit-il d’un malentendu). Je le mentionnais comme “cas limite” opposé au “patriotisme” universaliste voire messianique qui présente selon moi des inconvénients lorsqu’il n’est pas accompagné de roublardise machiavélique et tempéré par quelque humilité. “La seule solidarité européenne qui ait jamais existé est celle de la chrétienté jadis” Jadis, oui, mais aujourd’hui la France est moins chrétienne que les USA, donc le christianisme nous pousserait logiquement à l'”atlantisme” ; il n’est ainsi plus guère un critère pertinent pour justifier l’union des peuples d’Europe. “Il faut vraiment être nazillon pour penser qu’une solidarité européenne de peuples blancs puisse exister” Oui mais si vous y réfléchissez, ce critère racial pèche d’une certaine manière par “universalisme”. La “race” traverse les nations (pour certains anthropologues de 1914, la Ière Guerre Mondiale était une guerre civile fratricide pour la “race nordique”, représentée en Allemagne mais aussi en France dans une moindre mesure). Finalement la parenté raciale n’aura pas empêché las nations européennes de s’entredéchirer au XXème siècle. Hitler n’espérait-il pas que le Royaume Uni conserverait envers lui au moins une certaine neutralité ? L’ethnie (type antropomorphique associé à une certaine langue) n’aura-t-elle pas compromis le “racisme”, finalement ? Donc la réalité serait peut-être encore moins universaliste que ce qu’imaginaient les anthropologues des XIXème et XXème siècles, égarés par un esprit de système “scientiste” et généralisant. Comme vous le dites : pas de “solidarité” blanche. “A ce moment là, pourquoi se limiter à l’Europe ?” Certains “identitaires” ne se limitent effectivement pas à l’Europe (je pense à Guillaume Faye et à son “Septentrion”) Mais quelle serait l’utilité de cette solidarité ? Est-ce que je sais ? Si, toutefois, on la restreint à l’Europe, l’utilité d’une telle solidarité me paraît davantage fondée, en théorie (contrepoids aux Etats-Unis, par exemple ?) Le moment approche, nénmoins, où les Français seront tentés de faire un bilan sans complaisance de “l’expérience européenne”. “J’avoue pour ma part être bien plus à mon aise avec une tonkinoise francophone qu’avec un danois anglophone.” Je ne vous dis pas le contraire. Je me demande simplement s’il faut “tout miser” sur votre “tonkinoise francophone”, car il ne s’agit pas seulement de ce que nous ressentons à son égard mais aussi et surtout de ce qu’elle ressent pour la France. “Quand à l’union européenne actuelle, ce sida qui anéantit les cellules protectrices nationales pour mieux nous livrer en pâture au mondialisme, je préfère ne pas en parler.” “Sida”, c’est un peu dur (On peut peut-être garder un tel registre métaphorique pour évoquer d’autres phénomènes : droit-de-l’hommisme, etc.). Au pire, j’emploierais le terme de “piège à cons” comme le propose Eric Zemour (pourtant sévère avec l’Europe, lui aussi). “La politique que prone le Front National est de donner une dimension politique à la francophonie et d’aider les pays d’ou viennent l’immigration à se développer (cf programme)” Aurons-nous assez d’argent pour ça ? Ceci dit, je ne veux pas dissuader le Front National de s’intéresser au Tiers-Monde… “Si nous abdiquons, si nous abandonnons notre civilisation, notre façon de voir le monde…” Je suis plus pessimiste que ça. S’il ne s’agissait que d’abandonner “notre façon de voir le monde”, nombreux sont ceux qui pourraient s’y résigner (et qui en avaient déjà fait le choix, en réalité). Je pense que, dans de nombreux cas, la simple survie des Français est en cause, à terme. C’est pourquoi ces derniers ressentent la nécessité que la France tape du poing sur la table. Comme l’a envisagé Emmanuel Todd (qui n’est peut-être pas la tasse de thé de votre mouvance) de nombreux représentants des élites, autrefois raisonnablement atlantistes, sont en train de virer leur cutie. Il en est ainsi parce que ces gens perçoivent ce que Todd appelle une “fièvre inégalitaire” et un déficit d'”universalisme” de la part des USA (pour Todd l'”universalisme” ne semble pas aller sans un certain dégré d’égalitarisme économique, position que conteste la philosophie libérale. Quoi qu’il en soit, une telle divergence sur la notion d’universalisme a sans nul doute contribué au sentiment d’éloignement croissant des élites européennes vis à vis de leurs homologues américaines). Mais je reviens à mon idée de déterminisme anti-américain : c’est autant notre intérêt vital que la défense d’une idée qui nous incite à rechercher des alternatives à l’Amérique (et, comme vous, j’ai tendance à penser que l’Islam n’est pas le paramètre le plus important de l’équation, même s’il est vraiment imprévisible). Pourquoi me faut-il proposer une telle idée de déterminisme ? Peut-être parce que je crains que la solidarité “francophone” qui vous tient à coeur ne soit fragile (même si je souhaite qu’une telle carte puisse rester à notre disposition), du fait des évolutions politiques de ces pays qui les éloignent parfois de nous, alors que des pays européens de langues différentes se trouvent dans une situation qui ressemble objectivement à la nôtre. Donc, je ne suis pas certains que le critère linguistique soit préférable à la proximité socio-politique, s’agissant de notre recherche d’alliés. Ainsi Emmanuel Todd envisage-t-il, par exemple, plutôt une fronde des “puissances moyennes” contre les USA qu’une “révolte du Tiers-Monde”… Ce ne sont là que quelques pistes de réflexion mais je n’ai hélas pas de grand “système” à proposer. Ce serait en principe la tâche de “nos intellectuels”, mais malgré quelques ouvrages sous formes d’essais, parfois stimulants, la volonté d’entreprendre une reflexion poussée et structurée semble faire défaut. Bien à vous.

    16 juillet 2004 à 5 h 05 min
  • Adolphos Répondre

    “il me semble que l’hypothèse de la France comme contre-puissance à l’hégémonie américaine se vérifie de plus en plus. ” Il ne faut pas se lancer dans des combats que nous ne pouvons que perdre. La priorité des priorité c’est l’économie, sinon nous allons être définivement distancé par les USA.

    16 juillet 2004 à 0 h 47 min
  • thierry Répondre

    Il serait bon de relire la RICHESSE DES NATIONS d’adam SMITH. Ce bouquin n’a pas vieilli.

    15 juillet 2004 à 22 h 56 min
  • Florent Morlan Répondre

    Pour vous répondre Rameau, il me semble que l’hypothèse de la France comme contre-puissance à l’hégémonie américaine se vérifie de plus en plus. Je ne sais si on peut parler d’une troisième voie entre l’amérique et l’islam. L’hégémonie américaine est bien réelle, l’islamisme s’apparente plus à un épouvantail grimaçant dont les états-unis se servent pour effrayer le monde et le rallier à sa cause. Je trouve que vous avez une idée très limitée du rôle de la France dans le monde. Lors de l’invasion américaine de l’Irak, la France est le pays dont l’opposition à la politique américaine a été la plus remarquée, le pays à qui les états-unis ont promis qu’il ne lui pardonnerait pas, sans doute par prescience de la vocation de la France. Cette vocation est bien sur universelle. Le monde n’a pas oublié l’empreinte que la France a posé sur lui. Notre universalisme doit évidemment reposer sur le rayonnement de notre langue, ainsi qu’il est né. La langue est l’élément le plus essentiel d’une culture, elle est l’âme d’un peuple, la perdre c’est se perdre. Ainsi je ne vois pas pourquoi l’on se perdrait comme vous dites à défendre un pré carré francophone. Les rois nègres dont nous serions d’après vous les jouets ne sont que des marionnettes dans les mains des réseaux maçonniques jacobins. Le nationalisme du “germen” que vous évoquez me fait plutôt penser au nationalisme du “germain”. La seule solidarité européenne qui ait jamais existé est celle de la chrétienté jadis. Il faut vraiment être nazillon pour penser qu’une solidarité européenne de peuples blancs puisse exister. A ce moment là, pourquoi se limiter à l’Europe ? Mais quelle serait l’utilité de cette solidarité ? J’avoue pour ma part être bien plus à mon aise avec une tonkinoise francophone qu’avec un danois anglophone. Quand à l’union européenne actuelle, ce sida qui anéantit les cellules protectrices nationales pour mieux nous livrer en pâture au mondialisme, je préfère ne pas en parler. La politique que prone le Front National est de donner une dimension politique à la francophonie et d’aider les pays d’ou viennent l’immigration à se développer (cf programme) Voila la voie de la grandeur. Voila la voie la France. Si nous abdiquons, si nous abandonnons notre civilisation, notre façon de voir le monde, pour adopter la civilisation américaine, alors à quoi sert-il d’essayer de conserver des instances politiques ou économiques indépendantes (qu’elles soient nationales ou européennes)? A l’instar d’un Guy Millière, crions “Vive l’Amérique” et courons sus aux vilains barbus ou tout autre moulin à vent que l’oncle Sam nous désignera.

    15 juillet 2004 à 22 h 29 min
  • Christophoros. Répondre

    Encore un mot à l’attention de Maryse et Isabelle. A tout prendre, quand je vois à la télé les exagérations des télé-évangélistes américains, je me dis qu’il faut vraiment être de “mauvaise foi” ( c’est le cas de le dire ) pour soutenir que le protestantisme a une “vision beaucoup plus équilibrée” que le Catholicisme ( au moins celui d’avant Vatican II ) et l’Orthodoxie… Quant à l’expansion de l’orthodoxie sur les “terres” de l’Eglise catholique romaine, au vu des scandales notamment d’ordre sexuel qui frappent l’église catholique en Europe ( en dernier lieu en Autriche ), je me dis que cela n’est pas impossible.Cordialement.

    15 juillet 2004 à 21 h 22 min
  • olivier Répondre

    dites-moi, au siècle dernier, sur quel continent sont nés le Franquisme, le communisme, le fascisme, le nazisme, le vichysme? Sur quel continent, au siècle dernier, se sont déroulées les guerres les plus meurtrères que l’humanité ait connue? Quel pays anglo-saxons est à l’origine de ces fléaux? Quel régime politique ont connus les USA depuis leur déclaration d’indépendance? Combien en avons nous connus en France depuis cette même date? ont-ils été tous démocratiques? Malgré notre longue Histoire de France, depuis quand les femmes votent-elles dans le pays des droits de l’homme? La qualité qui fait cruellement défaut dans ce beau pays si exemplaire, c’est l’humilité.

    15 juillet 2004 à 13 h 44 min
  • Rameau Répondre

    “Rameau,demandez a ceux qui decouvrent, qui construisent, qui vont dans l’espace, si ils font du “bougisme”…n’importe quoi…progresser, ce serait aller n’importe ou n’importe comment….on comprend clairement votre preference ou va votre coeur; a l’islam!” Je répondais à Agamemnon qui parlait d'”un monde qui cherche, qui trouve, qui court peut-être à sa perte, mais qui bouge et progresse”. Je trouvais que laisser entendre que le monde [libre] courait peut-être “à sa perte” était assez vachard, sans peut-être le vouloir, donc ça regarde Agamemnon. S’agissant du “bougisme”, c’est l’expression de Pierre-André Taguieff, intellectuel qui n’appartient à aucune mouvance “anti-atlantiste”. J’ai cru comprendre que les réflexions d’un Alain Finkielkraut (lui aussi peu suspect d’anti-atlantisme) notamment sur le phénomène Internet, mais sur un plan plus général, allaient également dans ce sens. Ce souci finkielkrautien de l’enracinement de l’Homme dans une identité concrète – afin qu’il ne perde pas toute humanité en devenant une entité abstraite et désincarnée – est inspiré par l’anti-totalitarisme d’Anna Harendt. Pour Finkielkraut, “l’idéologie française” (contrairement à la notion de BHL) est cet universalisme potentiellement totalitaire qui a donné le jacobinisme mais qui encourage aujourd’hui à sacrifier l’identité française (au profit, par exemple, de l’Europe mais aussi de la langue anglaise “universelle”, ainsi que du “metissage” – le conflit entre les “propalestiniens” et les “atlantistes” illustre probablement un schisme à l’intérieur de cette idéologie française universaliste). Donc tout ça est peut-être “néo-réac”, comme on dit mais s’il s’agit d’y déceler quelque penchant islamiste, j’estime que vous démarrez au quart de tour. Quant à dire que mon coeur va à l’Islam parce que j’ai osé me demander si l’on était obligé de se situer sur un axe Amérique-Islam, je trouve également que ce n’est pas piqué des hannetons. J’ai d’ailleurs fait remarquer que les néo-conservateurs (et que dire des théo-conservateurs comme George W Bush lui-même ?) étaient animés par un souci affirmé de favoriser un principe de transcendance dans les sociétés occidentales (en clair : il vaut mieux croire en Dieu). Est-ce que ce souci ne s’applique qu’à l’enseignement “exotérique” (destinée au bon peuple) et pas à la doctrine “ésotérique” des néo-conservateurs eux-même (destinée aux élites) ? Je ne suis pas spécialiste de leurs idées, mais je ne suis pas moi-même partisan de faire une place à “la transcendance” dans la vie politique. Si on voulait être polémique, on pourrait en réalité renvoyer néo-conservatisme et islamisme dos à dos sur ce point (L’atlantiste Alexandre Del Valle reproche aux Américains d’avoir trop longtemps maintenu une certaine alliance avec “l’islamisme”. Si l’on est encore plus méfiant, on peut craindre que sous prétexte d’anti-islamisme on ne nous fourgue doucement un dogme vaguement théocratique “en contrebande”). Donc mon coeur ne va ni à l’Islam, ni à la morale américaine basée sur une solide foi chrétienne. Appelez cela “troisième voie” ou “esthétisme” si vous voulez. Enfin vous me pardonnerez de ne pas admirer les Américains simplement parcequ'”ils vont dans l’espace”. Grand bien leur fasse, mais j’ai des préoccupations plus terre-à-terre. “Ainsi Rameau qui critique la seule alternative amérique ou islam proposée par certain, mais ne mentionne même pas la France comme troisième voie, lui préférant l’Inde ou la Chine. Quelle tristesse.” Lorsqu’on exhorte la France à ne pas “rester repliée sur elle-même” et plutôt à “tenir compte de ce qui se passe dans le monde”, on ne nous donne plus en exemple le Japon ou l’Allemagne, comme autrefois, mais toujours l’Amérique bien-sûr, et, c’est nouveau, la Chine et l’Inde. Or j’ai trouvé amusant que Guy Millière prenne bien soin d’expliquer que les succès chinois et indiens étaient tout-à-fait provisoires, contrairement au succès américain (je ne sais pas s’il a raison mais je ne suis pas étonné de sa position). Sur le fond, je ne sais pas trop ce que vous entendez, Florent Morlan, par “la France comme troisième voie” entre l’Amérique et l’Islam. N’est-ce pas confier à la France une mission d’une difficulté démesurée ? N’est-ce pas, finalement, cruel envers la France que l’exhorter à remplir quelque mission dans l’intérêt du genre humain plutôt que de l’encourager à promouvoir ses intérêts propres ? Je suis tout-à-fait favorable à ce que la France se fasse, à l’occasion, le porte-voix du “Tiers-Monde”, à condition d’être conscients que nous nous servons de lui et qu’il se sert de nous. Donc pas d’angélisme. Entre le “nationalisme blanc” des “identitaires” (qui se félicitent de la victoire de la Grece sur la France à l’Euro au motif que l’équipe de la seconde étaient trop “noire”) et le messianisme de “la France des Droits de l’Homme” (victime de son universalisme), je pense qu’il existe pour le coup une “troisième voie”. Il pourrait, sinon, y avoir conflit entre un nationalisme du “germen” (nous poussant à la solidarité avec nos “frères européens” voire “occidentaux”) et un nationalisme liguistique (nous poussant à nous perdre dans la défense d’un “pré-carré francophone”, quitte à céder toujours plus à des “rois nègres” se jouant de notre désir de contrer “l’influence anglo-saxonne” ; or le jeu en vaut-il la chandelle ? Les “Anglo-Saxons” gagnent-ils grand-chose à nous combattre sur “l’échiquier africain” ?). Jacques Attali (parfois bien inspiré mais pas toujours) considérais à une époque qu’il fallait “penser la solitude de la France”, désormais cité-Etat au milieu des empires. Je crois qu’il serait souhaitable d’envisager un tel chemin pour la France (avec peut-être un peu moins de pessimisme tragique). L’Europe peut constituer un interface, ou un levier, entre la France et l’universel ; mais vis-à-vis de l’Europe aussi, il s’agit pour les Français d’être “laïques” et donc de se garder de tout dogmatisme “eurobéat”. Il me semble plutôt utile d’imposer à l’Europe des obligations de résultat lorsque nécessaire. Cependant, je partage votre étonnement à propos du fait qu’une mouvance “conservatrice” (certes “libérale”) prenne à ce point parti contre son propre pays (Mais quand le libéralisme finit-il par trahir le conservatisme ?). La francophobie d’un Guy Millière n’est pas dissimulée (comment ose-t-il affirmer que “la France n’a jamais vraiment pris conscience des crimes de Vichy” ? Sur quel planète vivait-il dans les années 90, alors que les Français étaient quotidiennement sollicités par les médias pour se repentir des “heures les plus sombres de notre histoire” jusqu’à ce que le Président Chirac reconnaisse “les crimes de la France”, comme s’il cédait à quelque chantage moral à peine implicite ? Mais pour Monsieur Millière, ce n’est pas assez, ce ne sera JAMAIS assez…). Ce qui est amusant, c’est que certain tenants de cette mouvance stigmatisent (parfois) la “francophobie” (plus souvent le “racisme anti-blanc”, il est vrai) des “jeunes” issus de l’immigration. C’est impeccable mais leur dénonciation prendrait d’autant plus de poids s’ils n’étaient pas eux-même francophobes (et s’ils ne dénonçaient pas “l’arrogance” de la France en même temps que sa “lâcheté” et sa “haine de soi”). Il faut mentionner l’existence d’une personnalité interessante : celle de Romain Goupil. Ce personnage réalise l’exploit de concilier les deux francophobies : la tiers-mondiste soixante-huitarde et pro-immigration (mais pas “pro-palestinienne” heureusement !)et l’atlantiste libérale (libertaire, dirait-il) et pro-israëlienne (Israel est certes la seule démocratie du proche-Orient). Finalement Monsieur Goupil fait office de borne-témoin de l’idéologie “victimaire”, qui semble pourtant s’être scindée en deux branches peu conciliables : la tiers-mondiste pro-metissage et l’atlantiste pro-israëlienne. Certains atlantistes soucieux de “réalisme”, afin de justifier leur parti-pris pro-Américain, nous expliquent que la France a trahi (par quelque masochisme tiers-mondiste) sa vocation “occidentale” (et sa naturelle amitié avec les Etats-Unis). L’Occident auquel se réfère la mouvance atlantiste apparaît complêtement chimérique : les Américains ne s’en réclament que lorsqu’ils sont surpris par la dissidence européenne. Le reste du temps, ils se conçoivent comme “une cité sur la colline” libérée des compromissions et du cynisme européens. Il en va ainsi depuis leur naissance. Seuls les (anciens ?)atlantistes “modérés” et “sophistiqués” tels que Plenel et Colombani sont assez naïfs pour ne le comprendre qu’aujourd’hui. D’autres prétendent encore nous expliquer l’intérêt pour la France à rechercher les faveurs américaines alors que les USA considèrent depuis longtemps la France comme une adversaire sinon une ennemie (l’Irak n’a été que la goutte d’eau ; une simple abstention au conseil de sécurité aurait été présenté comme une “lâcheté” française et aurait conforté les USA dans leur opinion sur notre “faiblesse”).

    15 juillet 2004 à 2 h 42 min
  • Thierry Répondre

    L’article de Guy est intéressant a plus d’un titre. Le « capitalisme Culturel » explique les distinctions et degrés du capitalisme en occident. Ceci permet de comprendre pourquoi les pays a prédominance protestante et juive sont avantagés par rapport aux pays a prédominance catholique : La raison en est que l’individualisme méthodologique est beaucoup plus présent chez ces premiers que chez ces derniers. L’autre aspect est que le capitalisme culturel est nécessaire au développement politique, économique et culturel des nations : les tentatives sud-américaines de démocratisation ont souvent échoué a cause de ce manque. L’état de droit, la démocratie et le capitalisme ne sont que des mots tant qu’une culture capitaliste est absente pour consolider la présence de ces institutions. Heureusement que des articles comme ceux-la existent pour nous rappeler que les idéaux qui forment notre société sont fragiles et que nous devrions chérir le capitalisme plutôt que le blâmer.

    14 juillet 2004 à 21 h 09 min
  • CATON Répondre

    “Dans ce site édifié à la gloire des états-unis, seule la détestation ou le mépris de notre nation est de mise.” Attention! C’est au contraire précisément parce que tous (ou presque) ici nous aimons lea France que nous réfléchissons ensemble aux moyens de la relever. Et ce n’est pas la faute de l’Amérique si elle constitue, globalement, un exemple à suivre pour notre pauvre pays en péril de mort. Dans le même ordre d’idée, je ne sais qui la semaine dernière a cru bon d’écrire “Love it or leave it” (slogan des partisans de Nixon en 1971). Désolé, mais ce n’est pas parce que nous ne sommes pas d’accord avec la politique détestable de ce régime que nous devrions partir. Ce serait un comble! La France n’appartient pas à ses fossoyeurs et ce n’est parce que nous critiquons la politique de ces derniers que nous devons nous considérer comme au ban de la Nation. Je le dis hautement : ceux qui écrivent dans ce journal portent le frêle (et à peu près seul espoir) du pays.

    14 juillet 2004 à 20 h 50 min
  • Thierry Répondre

    Il faut rendre justice a Guy : le plus grand auteur libéral Francais récent date du 19eme siecle: il s’agit de Frédéric Bastiat (lu et respecté en Amérique, il est inconnu des étudiants de science-po) Il faut dire qu’être un auteur libéral en France, c’est être un pariat : Dangereux pour la droite et detesté par la gauche. Il faut être tres courageux: Aimez Guy Milliere, le jour ou il sera en Amérique il ne vous restera plus “qu’envoyé spécial”….

    14 juillet 2004 à 20 h 25 min
  • Florent Morlan Répondre

    Un nom français cité par Guy Millière ? Vous rêvez. Dans ce site édifié à la gloire des états-unis, seule la détestation ou le mépris de notre nation est de mise. Ainsi Rameau qui critique la seule alternative amérique ou islam proposée par certain, mais ne mentionne même pas la France comme troisième voie, lui préférant l’Inde ou la Chine. Quelle tristesse.

    14 juillet 2004 à 19 h 06 min
  • Christophoros. Répondre

    Chère Isabelle. Vous avez raison sur un point, le catholicisme c’est renié lui-même en se rapprochant du protestantisme, ce n’est plus aujourd’hui la religion dans laquelle j’ai été baptisé ( indices divers abandon de la pratique de la communion sous les deux espèces, diaconat permanent, le fait de considérer l’Islam comme une religion, etc… ). Moi, “je quitte le navire”.Lorsque mon emploi du temps me le permettra, si Dieu me prête vie,j’irai trouver un pope orthodoxe et je demanderai à rejoindre la Communion Orthodoxe et je pense que je me ferai confirmer solennellement devant mes enfants…Cordialement.

    14 juillet 2004 à 18 h 39 min
  • LAFAYETTE Répondre

    BUSH ou la nuit.

    14 juillet 2004 à 17 h 46 min
  • lagorre Répondre

    Permettez-moi de m’indigner: vous omettez Alain Peyrefitte, La Société de confiance. Cela nous aurait tout de même fait chaud au coeur de voir un nom francais dans la liste d’auteurs que vous citez, M.Millière.

    14 juillet 2004 à 9 h 22 min
  • Isabelle Répondre

    Tres bon article de Guy Milliere et tres bonnes interventions d’Agamemnon et de Maryse. En effet, le development economique est intimemment lie a la culture et comme, Agamemnon, je pense qu’un melange de culture anglo-saxonne/protestantisme bases sur un veritable judeo-christianisme ont le plus contribue a un dynamisme economique dans les societes ou ils ont domine. Maryse, je suis tout a fait d’accord que les cultures de tradition catholique et ses cousines de tradition orthodoxe ont diabolise l’argent et la reussite materielle sur cette terre. N’en deplaise a Christophoros mais Luther, malgre ses fautes personnelles(qui est parfait?) et aussi Calvin, Zwingly et autres reformateurs ont remi les pendules a l’heure en rejetant la notion Catholique d’un univers divise en 2 spheres, la nature et la grace. Dans la tradition Catholique, la nature (a comprendre, la terre, le materiel) en-soi est mauvaise et seule la grace(la vie spirituelle, le paradis) est bonne et compte pour quelque chose. Le protestantisme a permi de realiser que la creation en soi n’est pas mauvaise y compris l’entreprise, la production de richesses, le succes, etc. Et je pense que c’est en cherchant a immiter les modeles culturels anglo-saxon/protestants que les cultures Catholiques ont elles aussi reussi a evoluer. Mr. Milliere parle de possibilite dans les cultures Catholiques. Je suis d’accord mais dans le sens ou c’est justement parce que ces cultures sont moins Catholiques et peut-etre, sans le vouloir, on adopte des valeurs plus judeo-protestantes. Je simplifie bien-sur et m’inquiete d’ailleurs que la montee de l’anti-americanisme/anti-Israel au profit d’une attirance vers l’Islamo-fascisme ne peut que contribuer a un declin economique de certains pays europeens. Ils auraient pu rester sur une bonne voie mais semblent accepter de se faire completement derailler par des valeurs islamo-tiermondistes. Il est interessant que la gauche, qui etait supposee s’opposer a la religion opium du peuple, se sent plus proche ideologiquement des obscurantismes fondamenlistes et totalitaires que d’un vent d’emancipation et de democratisation tel que le courant protestant a pu souffler sur l’occident.

    14 juillet 2004 à 5 h 11 min
  • dolf Répondre

    Rameau,demandez a ceux qui decouvrent, qui construisent, qui vont dans l’espace, si ils font du “bougisme”…n’importe quoi…progresser, ce serait aller n’importe ou n’importe comment….on comprend clairement votre preference ou va votre coeur; a l’islam! “Desabuses” ceux qui changent et faconnent le monde? Pensent ils que leur intelligence, leur savoir, qui les rend uniques et hors du commun et fondamentaux pour l’humanité, qu’ils vont “nulle part”? n’importe quoi, cesssez la branlette intelectuelle.

    14 juillet 2004 à 1 h 06 min
  • Rameau Répondre

    “La Silicon Valley et l’Islam. Il ne saurait exister deux conceptions plus antagonistes de la société et du devenir de l’Homme. De quel côté vous situez-vous ? Certes, encore une fois le premier, prométhéen, court peut-être à sa perte, mais, ce qui est sûr, c’est qu’avec l’autre vous n’irez jamais nulle part.” Si on n’a le choix qu’entre courir “peut-être à [notre] perte” et “ne jamais aller nulle part”, ce n’est pas folichon comme perspective (mais est-il obligatoire de se situer sur un axe Amérique-Islam ? Et la Chine ? Et l’Inde ? Pour parler des pays que l’on nous dit “d’avenir”… Il reste à confirmer que ces pays auront du mal à lutter contre le capitalisme américain de dernière génération, comme le pense Guy Millière). Votre apologie du “bougisme” (pour parler comme Pierre-André Taguieff) ne semble en fait pas très enthousiaste et même plutôt désabusée. Par ailleurs, je ne sais pas si le “protestantisme anglosaxon” se conçoit à ce point comme “prométhéen”. Parce qu’il célèbre la techno-science ? En fait il est soucieux qu’elle soit encadrée par la morale et soumise à la transcendance (exemple : les néo-conservateurs sont très anti-clonage, par exemple, sans doute par anti-eugénisme implicitement anti-nazi)

    12 juillet 2004 à 23 h 13 min
  • Micha Répondre

    “Heureusement, il existe une troisième voie dans le christianisme,l’Orthodoxie…” je ne vois pas de raison pour que l’eglise orientale “revienne sur nos écrans” européens dans l’avenir prévisible. Par contre, il y a une autre réligion, le champion du monde en termes de recrutement depuis des années qui est déjà “sur nos écrans”. Micha

    12 juillet 2004 à 18 h 31 min
  • Maryse Répondre

    En matière d’amalgame et d’inculture, Florent Morlan n’est pas mal ! Je lui conseille simplement de bien vouloir relire l’Exode : judaisme et protestantisme, religions du veau d’or ? Cet épisode (Ex 32) apparait comme un péché du peuple, qui se repentira et reviendra vers “L’Eternel”. Par ailleurs je rappelle également que le judaisme et les religions chrétiennes qui en dérivent directement partagent le même héritage biblique, contrairement à l’islam – qui a réécrit la Bible ! Enfin il est exact que les sociétés traditionnellement catholiques, ayant diabolisé l’argent, ont eu un retard de développement par rapport au monde protestant qui a toujours eu une vision beaucoup plus équilibrée : ce n’est pas l’argent en soi qui est sale, mais certaines manières de le gagner ou le dépenser. Pourquoi devrait-on avoir honte d’un argent gagné honnêtement ?

    12 juillet 2004 à 18 h 11 min
  • Florent Morlan Répondre

    Bel amalgame que celui d’Agamachin qui assimile tout d’abord les état-unis à l’angleterre, puis l’angleterre au protestantisme et pour finir tout cela à la chrétienté bysantine. Quel rapport entre Bysance et l’inculture de masse caca-cola et mac-merdald qui empoisonne le monde ? Je propose à cet amateur de raccourcis et de pensée binaire la vision du monde suivante : D’un côté les religions de l’argent, du veau d’or, à savoir le judaisme et le protestantisme, de l’autre les religions de l’homme, le catholiscisme et l’islam. Et Ben Laden en ange de la mort qui vient frapper Sodome et Gommorhe et pulvériser les tours de Babel moderne. C’est-t’y pas beau ça ?

    11 juillet 2004 à 21 h 37 min
  • Christophoros. Répondre

    Agammemnon est certainement un de ces protestants qui pensent que tout commence à la Réforme et que, finalement, Dieu accorde aux justes dotés d’un QI suffisant l’aisance matérielle et le paradis en prime. Peut être voudra-t-il considérer que le christianisme a d’autres visages et qu’il commence en l’an O et non avec le gros Luther moine défroqué qui ayant justement dénoncé les travers de l’Eglise Catholique s’empressa de créer sa propre boutique ( sans parler du triste christianisme de Calvin et de ses sbires ) Heureusement, il existe une troisième voie dans le christianisme,l’Orthodoxie, bientôt de retour sur vos écrans… ( Merci à Alexis II, Monseigneur Christodoulos, au clergé serbe et aux autres… )

    11 juillet 2004 à 10 h 39 min
  • AGAMEMNON Répondre

    N’en déplaise aux hystériques anti-US, l’essentiel du progrès mondial depuis au moins une centaine d’années provient, peu ou prou, de la sphère anglo-saxonne. Et, si l’on remonte un peu plus loin dans le temps, force est de constater que tout ou presque dans la progession de l’humanité provient du “libre-examen”, lui-même issu de la Réforme, du protestantisme et, spatialement parlant, de l’Angleterre. Si vous allez à Istambul, vous constaterez que deux mosquées se font face : Sainte-Sophie (au demeurant construite par les chrétiens au Vème siècle) et la mosquée bleue, édifiée mille ans plus tard, strictement sur le modèle de la première. D’un côté, un monde qui cherche, qui trouve, qui court peut-être à sa perte, mais qui bouge et progresse et tire en remorque le monde entier derrière lui. De l’autre, une société statique. La Silicon Valley et l’Islam. Il ne saurait exister deux conceptions plus antagonistes de la société et du devenir de l’Homme. De quel côté vous situez-vous ? Certes, encore une fois le premier, prométhéen, court peut-être à sa perte, mais, ce qui est sûr, c’est qu’avec l’autre vous n’irez jamais nulle part.

    10 juillet 2004 à 21 h 06 min

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