Limites économiques du principe de précaution

Limites économiques du principe de précaution

La vache folle revient en gambadant dans les prairies américaines. Immédiatement les médias s’emparent de l’information et la diffusent dans le monde entier. Les précautions sont prises. Des milliers de vaches sont détruites en Amérique. L’Europe décide de ne plus acheter de viande de bœuf provenant des USA… On rappelle au passage un commerçant qui se serait approvisionné clandestinement en viande provenant d’un pays dangereux, ce qui fait monter l’angoisse des consommateurs à un niveau encore plus élevé. Des millions de consommateurs, dans le monde, cessent de manger un beefsteak, même leur bon beefsteak provenant de bons charolais bien français. Ils se rabattent sur le poulet. Le cours du bœuf s’effondre et des dizaines de milliers d’agriculteurs ne peuvent plus vendre leurs bêtes. Il faut donc voter d’urgence une aide à tous ces producteurs qui passent brutalement d’une situation financière équilibrée au dépôt de bilan.

Puis, on ne parle plus de la vache folle, mais la peste aviaire apparaît en Asie. Les poulets provenant de ces lointaines contrées sont mortels. Des milliers de poulets sont abattus, on ferme les frontières. L’Europe décide de ne plus acheter de poulets venant d’Asie. On ne peut pas ouvrir un poste de radio ou de télévision sans entendre parler du retour de la peste aviaire…

Le peuple se rabat sur le saumon d’élevage pas trop coûteux. Catastrophe. On apprend alors que ce saumon contient des produits cancérigènes.

Il reste encore le saumon sauvage, d’excellente qualité, tant qu’un chercheur ne va pas découvrir qu’il est très toxique pour l’homme. Il faudra devenir végétarien…

Depuis que son éventuel passage à l’espèce humaine a été dépisté, il y a une dizaine d’années, la maladie de la vache folle aurait tué dans le monde quelques centaines d’individus, surtout en Angleterre. Le nombre des morts en France est loin d’atteindre la dizaine. Le coût des mesures prises en France pour s’opposer à sa diffusion s’élève très probablement à des milliards d’euros. Si depuis dix ans, on avait utilisé ces milliards d’euros à équiper nos routes de radars, on aurait sauvé des milliers de vies. Un mauvais choix de l’argent public semble avoir été fait. Il faut essayer de trouver une explication.

Un chercheur est en principe un monsieur très sérieux qui travaille en silence dans son laboratoire. Mais le chercheur est aussi un homme. Il aime bien être reconnu comme un chercheur qui trouve quelque chose. Quand sa recherche le mène à envisager que le prion passe de la vache folle à l’homme, les médias reprennent immédiatement son hypothèse. Il passe alors de l’ombre à la lumière. Il obtient en même temps des crédits pour son laboratoire. Il peut augmenter la taille de son équipe. Le trou d’ozone ou le prion de la vache folle sont, pour un chercheur, une voie royale vers la notoriété et les crédits.

Les médias sont à la recherche du scoop. Être le premier média à avoir informé le bon peuple de France du danger du beefsteak pomme frite est un scoop de première grandeur. Le média passe de l’ombre à la lumière. L’audimat grimpe immédiatement, chaque auditeur voulant tout savoir sur le prion. Plus l’angoisse des auditeurs monte, plus l’audimat monte. Le trou d’ozone ou le prion de la vache folle sont pour un homme de média une voie royale vers la notoriété et les crédits.

Les hommes politiques sont à la recherche des électeurs. Les chercheurs et les médias leur ont désigné le prion de la vache folle comme l’ennemi public numéro 1. Les hommes politiques vont donc défendre leurs électeurs contre une attaque du prion. Ils vont prendre des mesures les mettant à l’abri de ce nouveau danger. Les chercheurs et les médias approuvent immédiatement ces sages mesures, même si elles coûtent des milliards d’euros qui auraient été bien plus utiles ailleurs. L’électeur est bien entendu satisfait, et l’homme politique devient le père du peuple.

L’homme politique attribue alors au chercheur des crédits royaux. La boucle est bouclée. Le chercheur a les moyens d’entretenir l’angoisse du bon peuple.

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Comments (2)

  • PEGASE Répondre

    On ne peut qu’être d’accord avec l’objet de cet article, qui pointe du doigt le cercle pervers Recherche-Médias-Electoralisme. Une restriction cependant, s’agissant d’un point de détail : le coup de chapeau donné aux radars automatiques. Ayant suivi de près pendant des années, de l’intérieur,le mode de fonctionnement de notre bureaucratie et connaissant maintenant plutôt bien ses ressorts cachés, je puis vous assurer qu’il ne s’agit aucunement ici de “sécurité routière” (même si cela peut PAR AILLEURS conduire à un effet bénéfique en ce domaine) mais sutout d’accroissement des recettes fiscales, cette fois avec la bénédiction des contribuables eux-mêmes.

    5 février 2004 à 7 h 59 min
  • Hunden Répondre

    Le prétendu “principe de précaution” ne connaît aucune “limite, puisque c’est une dinguerie communiste, née de l’irresponsabilité institutionnelle et dans l’irresponsabilité institutionnelle, http://www.quebecoislibre.org/020831-14.htm et dont le seul effet —donc le seul but – et de servir de prétexte à des violations indéfinies du Droit par la caste exploiteuse.

    31 janvier 2004 à 20 h 22 min

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