Dix westerns pour l’été

Dix westerns pour l’été

Je propose dix westerns pour l’été, comme au bon vieux temps de la dernière séance. On les aura vus, mais pourquoi ne pas les revoir ? Je suis plus réac en cinéphilie qu’en politique, ils dateront donc tous de l’âge d’or hollywoodien…

La piste des géants

Le film qui n’a pas consacré Wayne comme star. A vingt-trois ans, il est tout bonnement mûr et parfait dans ce joyau du premier cinéma parlant qui respire encore l’espace et la narration du muet. Il escorte une caravane-monde de prêcheurs, de pionniers et de tueurs fatals à travers l’ouest et les grandes neiges. Walsh maîtrise toute cette logistique avec la facilité des conquérants de l’empire des steaks…

La lance brisée

J’ai redécouvert ce film récemment. Ukrainien né au Canada, Dmytryk est vraiment capable du meilleur. Ainsi ce film d’inspiration très biblique qui montre la naissance de l’argent sous la forme du bétail, l’intrusion du conflit entre père et enfant (extraordinaire Widmark), les aléas du métissage aussi : le dernier-né, le préféré, est celui qui va le plus souffrir de cette préférence paternelle. Spencer Tracy, époustouflant de violence paternelle, fait peur même dans la scène où il apparaît mort à cheval…

Winchester 73

Il est de bon ton de mettre, depuis Godard, Anthony Mann au-dessus de Walsh ou de Ford. Or Mann n’est ni Homère, ni Virgile ! Mais ce film connaît une première demi-heure sans égale : l’arme qui rend fou, comme l’anneau du pouvoir chez Tolkien, change de main, chaque fois dans le sang et la violence. Métaphore de la machine, de l’argent, du pouvoir, la Winchester 73 ne cesse d’éblouir.

Colorado territory

Remake de High sierra, avec Bogart, mais cinquante ans plus tôt. C’est le sommet du monde, l’Everest du cinéma. Une incroyable histoire d’amour, tragédie grecque, avec Joël McRea et Virginia Mayo, couple rebelle et maudit, qui ne trouvera la paix que dans le combat à mort avec les forces de l’ordre, transformées pour un instant en forces du chaos. Les décors naturels sont de vrais personnages, et Walsh est l’homme qu’il faut prier trois par jour.

Fort Apache

Encore Fort Apache ? Oui, encore. On peut le voir une fois par semaine. La scène du bal est fondatrice. Wayne est excellent et discret, et il laisse la vedette à l’antihéros torturé Fonda, beau comme un cardinal de Richelieu, et séduisant malgré tout avec ses longues jambes qui dansent si bien. Lui aussi mène comme Custer ses troupes au massacre, mais avec gravité. Les seconds rôles McLaglen et Ward Bond sont sublimes.

La charge fantastique

Ce film épique célèbre intelligemment un Custer romantique et épris de justice. L’incorrigible Flynn est plus suicidaire que jamais, et il mène ses troupes à l’abattoir, comme à l’accoutumée. Flamboyant de virtuosité, Walsh décrit en quelques plans la naissance de l’hymne du septième de cavalerie ; on passe du piano au chant, des tambours aux fifres et aux trompettes, et l’on célèbre l’air légendaire de Garry Owen. C’est du Beethoven.

Route de Santa Fe

Génie à tout faire du cinéma, Michael Curtis arrive à encadrer la fougue suicidaire d’Errol Flynn, cet acteur politique qui argumente toujours pour se faire tuer. Le sujet est ici délicat et même politiquement incorrect puisqu’il s’agit de détruire une bande d’excités antiracistes qui rêvent d’abolir l’esclavage avant Lincoln. Les scènes de violence sont insurpassables et Van Heflin pire que Judas. Ronald Reagan, qui joue Custer, est toujours aussi sympathique.

L’homme de l’ouest

Wyler aurait pu être français, puisqu’il est né à Mulhouse pendant l’occupation prussienne. Emigré en Amérique, il devient le directeur le plus régulièrement nominé aux oscars, excellant dans tous les genres. Ici, il filme le juge Roy Bean, qui va aussi inspirer Huston et Goscinny. Le juge parle de son grand amour à Gary Cooper. Ce dernier, qui risque d’être pendu pour un vol qu’il n’a pas commis, entre dans le jeu ; et il écoute Walter Brennan évoquer l’éternel féminin. C’est magique, et c’est en plus photographié par Gregg Toland.

Le jardin du diable

Un des grands Hathaway, un des grands Cooper vieillissants. Une superbe image, et un décor qui tient le premier rôle, en rendant fous les personnages : le monastère espagnol abandonné dans un réduit méso-américain. On y va pour de l’or et des dollars, pour une femme, et on y va surtout pour mourir. La route pour y parvenir est effrayante, elle me donne encore des cauchemars. Western déjà postmoderne (au sens malin du terme), puisque le héros semble avoir lu le script.

L’homme qui tua Liberty Valance

C’est le dernier western classique, donc le dernier western (ni Ford, ni Walsh ne feront mieux après). C’est aussi peut-être le dernier vrai classique du cinéma, donc le dernier film du cinéma. Ford en a eu conscience puisqu’il nous explique que tout repose sur des malentendus et des manipulations médiatiques. « Nous préférons la légende à la réalité… » A part cela, les acteurs sont tous grandioses, car ils vont tirer leur révérence, et la scène où l’on risque une tuerie pour un steak reste d’anthologie, d’autant qu’elle se termine pacifiquement.

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Comments (3)

  • Anonyme Répondre

    "La route de Santa Fé" = "Santa Fe Trail".

    http://www.imdb.com/title/tt0033021/

    The best is  "3:10 to Yuma"

    http://www.imdb.com/title/tt0050086/

    6 août 2011 à 15 h 48 min
  • Westerner Répondre

    Bonjour M. Bonnal, Il est bien agréable de trouver sur le Net un amateur de Western de qualité, voire de Western tout court, car ce fabuleux genre est en voie d’oubli -si ce n’est de mépris, par les moins de 50 ans !!! Votre liste entre tout à fait dans mes vues sur le sujet et j’ai beaucoup aimé vos commentaires. Un titre manque cependant à ma culture: “La route de Santa Fé”, que j’ai cherché en vain sur Amazon. Pourriez vous donner le titre de ce film en anglais? je vous en remercie vivement par avance et vous souhaite un bon été de chevauchées cinématographiques.

    6 août 2011 à 12 h 05 min
  • WatsonCorsica Répondre

    Samedi dernier, avec ma femme, on a revu un vieux film américain " Rivière de Non-Retour " avec Marilyn Monroe. Moment rare.

    Un tel film ne pourrait plus sortir aujourd’hui !

    Non, ce n’est pas le sexe ni la violence, ni l’atteinte à la vie privée de personnalités connues qui le ferait interdire.

    Rien de tout cela…

    Je vous le dis moi. Ce sont les associations de défense de ci et de çà qui l’interdiraient !

    Vous voulez des exemples,

    je vais vous en donner…

    L’association de défense des enfants contre la violence

    L’association de défense des Natifs américains

    L’association de défense des Sioux

    La société de protection des animaux du Nord Dakota

    L’association contre le dressage des animaux de compagnie

    Le mouvement de défense de l’image de la femme

    Le mouvement de libération des femmes de Californie

    L’association de protection de la nature du Nord Dakota

    L’association des secouristes du Nord Dakota

    L’association pour la défense du port d’arme

    Le comité pour la non violence au cinéma

    L’association fédérale de protection des sites fluviaux

    … Etc… Etc… Etc

    En fait, il y aurait plus de deux cent cinquante associations qui se porteraient partie civile.

    Chacune profitant de l’occasion pour faire parler d’elle…

    Vive la liberté, vive la démocratie !

    N’a-t-on pas dit que les associations étaient la meilleure représentation de la démocratie ?

    AFPSF se porterait également partie civile. CNVC se porterait partie civile. ADPA demanderait l’interdiction du film. ASND porterait plainte pour incitation à comportement dangereux sur rivière en crue. APNND porterait plainte pour incitation à la destruction de la nature. MLFC, porterait plainte pour rôle dégradant attribuée à l’actrice principale. MDIF, demanderait l’interdiction du film pour discrimination sexiste. ACDAC, se porterait partie civile. SPAND, porterait plainte pour mauvais traitement infligé à un cheval. ADS, l’association de défense de l’image des Natifs américains au cinéma ADINA, l’association Ni Sauvages Ni Violents NSNV, l’association international Native Culture INC et l’association de défense des Commanches ADC se porteraient toutes partie civile pour que certaines scènes soient supprimées. ADNA demanderait l’interdiction du film pour discrimination raciale. Les Natifs américains ( Indiens ) présents dans le film sont cantonnés à des rôles pouvant porter préjudice à la nation indienne.ADECV demanderait l’interdiction du film car un enfant mineur assiste à une scène de violence entre adultes.

    6 août 2011 à 11 h 45 min

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