La leçon de géopolitique de Vladimir Poutine

La leçon de géopolitique de Vladimir Poutine

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Depuis 2004, le Club international de discussion de Valdaï réunit une fois par an des experts et des politiques de différents pays pour débattre de la politique internationale. Cette année, la rencontre a eu lieu les 22, 23 et 24 octobre, à Sotchi. 108 experts, historiens et analystes politiques, originaires de 25 pays, dont 62 étrangers à la Russie ont ainsi analysé durant trois jours le thème de cette édition 2014 : L’ordre mondial : de nouvelles règles ou un jeu sans règles ?

Vendredi 24 octobre, Vladimir Poutine est intervenu. Extraits :

« […] La Guerre Froide a pris fin, mais elle n’a pas pris fin avec la signature d’un traité de paix comprenant des accords clairs et transparents sur le respect des règles existantes ou la création d’un nouvel ensemble de règles et de normes. Cela a créé l’impression que les soi-disant « vainqueurs » de la Guerre Froide avaient décidé de forcer les événements et de remodeler le monde afin de satisfaire leurs propres besoins et intérêts. Lorsque le système actuel des relations internationales, le droit international et les freins et contrepoids en place faisaient obstacle à ces objectifs, ce système était déclaré sans valeur, obsolète et nécessitant une démolition immédiate.

Pardonnez l’analogie, mais c’est la façon dont les nouveaux riches se comportent quand ils se retrouvent tout à coup avec une grande fortune, dans ce cas sous la forme d’un leadership et d’une domination mondiale, au lieu de gérer leur patrimoine intelligemment, pour leur propre bénéfice. Aussi bien sûr, je pense qu’ils ont commis beaucoup de folies.

Nous sommes entrés dans une période de différentes interprétations et de silences délibérés dans la politique mondiale. Le droit international a maintes fois été forcé de battre en retraite, encore et encore, par l’assaut impitoyable du nihilisme légal. L’objectivité et la justice ont été sacrifiées sur l’autel de l’opportunisme politique. Des interprétations arbitraires et des évaluations biaisées ont remplacé les normes juridiques. Dans le même temps, l’emprise complète sur les médias de masse mondiaux a rendu possible, quand on le désirait, de présenter le blanc comme noir et le noir comme blanc.

Dans une situation où vous aviez la domination d’un pays et de ses alliés, ou plutôt de ses satellites, la recherche de solutions globales s’est souvent transformée en une tentative d’imposer ses propres recettes universelles. Les ambitions de ce groupe sont devenues si grandes qu’ils ont commencé à présenter les politiques qu’ils concoctaient dans leurs corridors du pouvoir comme le point de vue de l’ensemble de la communauté internationale. Mais ce n’est pas le cas.

[…] Ils ont jadis parrainé des mouvements islamistes extrémistes pour combattre l’Union soviétique. Ces groupes se sont formés au combat et aguerris en Afghanistan, et ont plus tard donné naissance aux Talibans et à Al-Qaïda. L’Occident les a sinon soutenus, du moins a fermé les yeux sur cela, et, je dirais, a fourni des informations et un soutien politique et financier à l’invasion de la Russie et des pays de la région d’Asie centrale par les terroristes internationaux (nous ne l’avons pas oublié). C’est seulement après que des attaques terroristes horribles aient été commises sur le sol américain lui-même que les États-Unis ont pris conscience de la menace collective du terrorisme. Permettez-moi de vous rappeler que nous avons été le premier pays à soutenir le peuple américain à l’époque, le premier à réagir comme des amis et partenaires après la terrible tragédie du 11 Septembre.

Au cours de mes conversations avec les dirigeants américains et européens, je parlais toujours de la nécessité de lutter ensemble contre le terrorisme, de le considérer comme un défi à l’échelle mondiale. Nous ne pouvons pas nous résigner et accepter cette menace, nous ne pouvons pas la couper en morceaux séparés à l’aide du deux poids deux mesures. Nos partenaires ont exprimé leur accord, mais après quelques temps, nous nous sommes retrouvés au point de départ. Ce fut d’abord l’opération militaire en Irak, puis en Libye, qui a été poussée au bord du gouffre. Pourquoi la Libye a-t-elle été réduite à cette situation ? Aujourd’hui, c’est un pays en danger de démantèlement et qui est devenu un terrain d’entraînement pour les terroristes.

Seule la détermination et la sagesse de la direction égyptienne actuelle a sauvé ce pays arabe clé du chaos et de l’emprise des terroristes. En Syrie, comme par le passé, les États-Unis et leurs alliés ont commencé à financer et armer directement les rebelles et leur ont permis de remplir leurs rangs de mercenaires provenant de divers pays. Permettez-moi de vous demander où ces rebelles obtiennent leur argent, leurs armes et leurs spécialistes militaires ? D’où tout cela vient-il ? Comment l’État Islamique notoire a-t-il réussi à devenir un groupe aussi puissant, de fait une véritable force armée ?

Quant aux sources de financement, aujourd’hui, l’argent ne vient plus seulement de la drogue, dont la production a augmenté non pas de quelques points de pourcentage mais dans des proportions considérables depuis que les forces de la coalition internationale sont intervenues en Afghanistan. Vous êtes au courant de cela. Les terroristes obtiennent également de l’argent en vendant du pétrole. Le pétrole est produit dans le territoire contrôlé par les terroristes, qui le vendent à des prix de dumping, le produisent et le transportent. Mais d’autres achètent ce pétrole, le revendent, et font du profit, sans penser au fait qu’ils financent ainsi les terroristes qui pourraient venir tôt ou tard sur leur propre sol et semer la destruction dans leur propre pays.

[…] La Russie a mis en garde à plusieurs reprises sur les dangers des actions militaires unilatérales, des interventions dans les affaires des États souverains, et des flirts avec les extrémistes et les radicaux. Nous avons insisté pour que les groupes luttant contre le gouvernement syrien central, surtout l’État islamique, soient inscrits sur les listes des organisations terroristes. Mais avons-nous vu le moindre résultat ? Nous avons lancé des appels en vain. […] »

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Comments (11)

  • obachiwa Répondre

    Pour moi, la question n’est pas de savoir si on aime ou pas M. Poutine, en d’autres termes si on aime l’homme ou pas. La politique n’est pas affaire de sentiments mais de bien commun. Ainsi je trouve son discours plein de bon sens et de verite.

    Et je prefererais un M. Poutine a la tete du pays plutot que la couille molle – enfin si je puis dire compte tenu des aventures connues de la couille molle en question –

    La Russie grandit, les naissances sont maintenant plus importantes que les morts, la famille traditionnelle est valorisee, la propagande homo est interdite devant les mineurs, bref ……le bon sens a cote de chez nous comme dit l’autre.

    Ses propos sont effectivement une lecon de geopolitique pour les occidentaux qui ne se rendent plus compte qu’ils sont devenus cretins, avec une baisse de QI effrayante, qui sont mus par une ideologie crasse, par un suivisme americain decadent et miserable. L’UE ne vaut pas mieux car l’intelligence a deserte tous les “couloirs”. Plus personne ne sait s’exprimer correctement, reflechir, voir plus loin que le portefeuille et les avantages personnels.

    Partout, on ne pense plus que sexe, cul, encore et toujours le cul, pour tout le monde des la naissance. C’est l’avenir reve pour le monde entier. Idiocracy dans toute sa splendeur.

    Alors oui, j’aime le discours de M. Poutine que je trouve absolument genial dans sa pertinence.

    2 novembre 2014 à 1 h 14 min
  • Hervé Boismery Répondre

    Poutine s’affirme comme l’un des dirigeants les plus perspicaces et les plus pertinents de sa génération.
    En Ukraine, comme au Proche Orient, l’Occident se trouvera inéluctablement en situation d’échec et mat.
    La Crimée a été “annexée”, en réalité libérée, comme du reste les régions orientales de l’Ukraine. L’Europe, après la faillite de sa dérisoire politique de “sanctions”, ne peut qu’accepter le fait accompli. Dans quelques années, l’Ukraine réintégrera sagement le giron de la Russie.
    L’Europe occidentale n’est plus qu’une zone de stagnation économique et de rupture sociale. Sincèrement, qui peut encore croire en l’Union Européenne ?

    1 novembre 2014 à 18 h 36 min
  • DA85 Répondre

    Extraordinaire Poutine ! en face il n’y a que des nains.
    Il est le seul a avoir tout compris. La Russie est en bonne mains, les russes lui font confiance. Ils ont raison

    1 novembre 2014 à 16 h 29 min
  • brandenburg Répondre

    Sans entrer dans des querelles et des pressions inévitables,il faut prendre Poutine au mot et rétablir le traditionnel jus gentium-droit des gens et des peuples-qui est le fruit d’un accord entre pays souverains et leurs chefs et dont la première loi est la non-ingérence dans les affaires des autres pays sauf s’ils menacent l’indépendance nationale de tel ou tel pays et donc la diplomatie traditionnelle elle aussi dont les ouvriers sont les ambassadeurs et les maitres les chefs d’Etat qui ne doivent jamais essayer de régler directement les affaires par téléphone ou à l’onu,ce “machin” disait de Gaulle, par exemple avant que le travail des diplomates n’aient déblayé le terrain.Sinon,on tombe dans l’affrontement direct d’egos qui est toujours insoluble et conduit à la violence sans freins.Dans ce domaine comme dans tous les autres, il faut mettre fin aux idéologies révolutionnaristes qui promettent des lendemains qui chantent et l’avenir radieux et se terminent en fleuves de sang comme au siècle dernier!

    1 novembre 2014 à 8 h 35 min
  • Marquais Répondre

    C’est un Poutine qu’il nous faudrait….je le dis depuis des années !
    Un Président qui a l’air, ben….. d’un Président !

    1 novembre 2014 à 7 h 59 min
  • quinctius cincinnatus Répondre

    Mon idole [ politique ], enfin si je puis dire, c’ est Benyamin Netanyahu !

    31 octobre 2014 à 16 h 05 min
  • Jacky Social Répondre

    Extraordinaire double langage. Oublions vite le communisme, l’Afghanistan, le KGB, le Goulag, les guerres unilatérales en Tchétchénie, la Géorgie, l’Ukraine, la Transdniestrie, le Koursk, la collaboration avec l’Iran, etc. Vladimir Poutine et son pays ne sont un exemple en rien. Quel manipulateur ! Enfin, que vient faire cet article ici ? Il est certain que beaucoup d’Occidentaux sont déçus de leurs “leaders”. C’est vrai, je partage cette déception, voire cet écoeurement. Mais si c’est pour prendre Vladimir Poutine comme exemple de leader, alors je ne comprends plus. De même que si c’est pour prendre Marine Le Pen et son programme PS hard avec le nationalisme en plus, je ne comprends plus. Il faut un vrai parti de droite en France, libéral sur l’économie et conservateurs sur les valeurs. Vladimir Poutine n’est rien de tout cela.

    31 octobre 2014 à 15 h 54 min
    • Trannod Répondre

      Poutine ne dit pas que des conneries….Qui a formé ben Laden…et ses comparses…la CIA…qui a foutu la merde en Ukraine…l’Ue et les USA…il me semble que le président avait été élu démocratiquement avec la bénédiction de l’UE …jusqu’au jour ou les USA ont dit.”” NIET”

      1 novembre 2014 à 7 h 48 min
      • Combo Répondre

        Enfin quelqu’un de lucide ! Je me sens moins seul ! Il y a tellement d’aveugles conditionnés par les médias et qui ne vont pas la recherche d’autres sources d’informations que notre gavage totalitaire !

        1 novembre 2014 à 8 h 11 min
      • Jacky Social Répondre

        Je ne vois pas en quoi l’UE et les USA ont “foutu la merde en Ukraine”. Il s’agissait de la signature d’un accord. Ce conflit entre la Russie et l’Ukraine indépendante ne date pas d’il y a un an mais remonte à il y a 23 ans ET trouve ses racines profondes dans l’Histoire des deux pays. Cet Accord d’Association est vecteur de modernisation du pays alors que la Russie n’est vecteur que de stagnation et d’arrogance. Les Ukrainiens n’ont pas choisi l’Europe pour cet Accord, la plupart ne sachant pas ce qu’il contient, car il y aura beaucoup de choses à modifier dans la gouvernance du pays et cela ne se fera pas sans mal. Des pays comme la Pologne ou la Slovaquie y sont arrivé. Pourquoi pas l’Ukraine. L’Europe est encore un symbole de liberté et d’espoir. Ce n’est pas tant l’Europe de Bruxelles, mas plutôt l’Occident et la civilisation occidentale. L’Ukraine dans son ensemble a choisi la liberté plutôt que l’asservissement et la domination russes. Ils ont raison et ont fait preuve de lucidité. Par ailleurs, les Ukrainiens auraient pu attendre la fin du règne de Yanukovitch et les choses se seraient mieux passée. Ils ont un premier ministre intelligent. Cela ne suffit pas car ils ont du chemin à faire. Les Ukrainiens n’ont fait que la moitié ce chemin. Ils doivent se prendre en charge en étant plus conscient de leur nation càd. “nation-aware”. Mais quel potentiel ils ont !

        1 novembre 2014 à 9 h 58 min
    • DeSoyer Répondre

      Venez à l’association libérale sociale!

      3 novembre 2014 à 21 h 13 min

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