Lettre à un des six cent mille élus de la République

Lettre à un des six cent mille élus de la République

Cher élu,

Vous savez depuis maintes publications sur le sujet que la France détient le record du monde du nombre d’élus par habitant tout en supportant une des pressions fiscales les plus fortes.

Mais je sais, peut être comme vous, que ces chiffres sont trompeurs.(1) Il faudrait regarder ce que coûte et ce que fait chaque élu. Il faut aussi voir l’incidence des mandats multiples, que notre président a promis de diminuer. Si nous comparons à quelques autres pays, nous pouvons vérifier que nous avons beaucoup, beaucoup trop de sénateurs (4 fois plus qu’en Allemagne, et ils coûtent très chers), trop de parlementaires, et beaucoup, beaucoup trop de communes, ce qui explique que nous ayons dans les 36 000 Maires et… dans les 520 000 conseillers municipaux. Ces derniers, qui reçoivent le plus souvent une indemnité de 228 euros par mois, représentent 85% des élus français.

C’est évidemment de là que vient l’anomalie. Nous avons de loin le plus grand nombre de communes : 3 fois plus que l’Allemagne qui est plus peuplée, et 40% des communes de l’UE (27 pays, 500 millions d’habitants). Je cite Urba News : la population médiane d’une commune française est de 423 habitants contre 2 300 en Italie et 11 000 en Belgique. De nombreuses tentatives de diminution du nombre de communes ont été entreprises par le passé, notamment en 1959 : 350 communes fusionnèrent ; et depuis 1971, la Loi Marcellin permet aux communes fusionnant de recevoir une aide financière, mais seulement 1 300 communes s’y sont résolues, certaines d’entre elles ont le statut de commune associée. Depuis cette date, il y a 1 100 communes de moins en France. Lors de la dernière décennie, la tendance était plutôt à la défusion.

En Belgique, le nombre de communes est passé de 2 663 à 589 de 1961 à 1977, suite à la suppression de communes grâce à certaines dispositions de la Loi unique de 1961. Quand les Belges s’y mettent, cela se voit. Rappelons que ce pays remarquable a réussi à vivre normalement sans gouvernement pendant 600 jours environ. Normalement ! Les gosses allaient à l’école, les braqueurs de banques étaient poursuivis, il n’y a pas eu de coupure de courant, la pression fiscale (42%) n’a pas augmenté et les trains étaient (à peu près) à l’heure. Voilà des gens concrets !

A tous les élus, j’oserai dire ceci : dans une France en crise (chômage, dette, déficit, pression fiscale…), vous faites partie du problème et non pas de la solution, quelle que soit votre couleur politique. Opposer la droite et la gauche à ce sujet n’a plus aucun sens. Par contre, considérant ce que vous coûtez et l’importance des budgets que vous gérez, j’ose encore dire que, pour un jeune français ambitieux qui se lance dans la vie active, il est plus rentable, plus prestigieux, et beaucoup, beaucoup moins risqué de se faire élire que de créer son entreprise. Ayant été à mon compte depuis 1972 en France et aux Etats-Unis (26 ans) et ayant participé à de nombreuses créations d’entreprises en France et ailleurs, je sais ce dont je parle.

Et cela, c’est très grave. A chacun de vous, je demande de regarder dans son passé et de répondre lui-même a cette question : Qu’est-ce qui vous a, un jour, poussé à devenir un élu plutôt qu’un entrepreneur ? Vous vous rendrez service à vous-même.

Maintenant je m’adresse à la piétaille des élus, aux conseillers municipaux, et vous propose de donner le signal de la révolution, forts du fait que, au moins, vous ne coûtez pas cher. Mettez-vous dans le sens de l’histoire. Voyez la croissance des mouvements de tous bords politiques (Avaaz, iFRAP, Cri du Contribuable, ATTAC, etc., etc.) qui posent publiquement, de plus en plus fortement, en France et dans le monde, la question de rendre les politiques plus responsables des finances publiques, et de la Concertation Citoyenne. L’avenir est de leur côté. Servez-vous des lois et statuts existants, et changez de camp : poussez vous-même à la fusion des communes. Poussez votre maire à la consultation ouverte. Posez la question ouvertement : En France, supprime-t-on les départements, ou les régions ?

Entre la commune de base et Paris, nous avons un feuilleté de sept couches contre quatre en Allemagne ou en Angleterre. Soyez de ceux qui militent pour supprimer des couches du feuilleté. Reprenez les termes de la Loi Marcellin de 1971 qui fut un échec, voyez pourquoi, et si on pourrait reprendre la question en la combinant avec des moratoires sur la dette des collectivités sous condition de fusions. Du courage, que diable !

André Teissier du Cros

président du Comité Bastille (www.comitebastille.org)

 (1) 577 députés, 343 sénateurs, 2 040 conseillers régionaux (en comptant les 51 membres de l’assemblée territoriale corse, auxquels s’ajoutent les 131 représentants des assemblées de la Nouvelle-Calédonie, de Polynésie et de Wallis et Futuna), 4 042 conseillers généraux (+ conseillers de Paris), 36 635 maires, 519 417 conseillers municipaux, 78 députés européens, environ 38 000 élus intercommunaux.

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Comments (4)

  • Banro Répondre

    Et si l’on se compare aux USA c’est par 10 qu’il faudrait divisé le nombre de ministres, de sous-secrétaires d’état, de députés et de sénateurs (et j’en passe)
    Voila une excellente initiative pour réduire de déficit de la France, M Hollande !

    1 mars 2013 à 0 h 29 min
  • goufio Répondre

    Et de constater que 13 personnes ont lu votre billet. C’est lamentable. Mais soyez rassuré je dispense le même propos autour de moi. Mais les gens ne savent pas quoi faire. il n’y a pas de relais pour démettre tout ce beau monde. Je lisais deniérement que nos trois présidents VGE, JC et NS coûtaient à la République la bagatelle de 5 millions d’euros par an. Nous en aurons bientôt quatre!!!

    26 février 2013 à 21 h 03 min
  • HansImSchnoggeLoch Répondre

    L’auteur de l’article a oublié les syndicalistes qui sont des élus sans voix mais se nourissent quand même au ratelier des prébendes publiques.

    25 février 2013 à 20 h 26 min
    • quinctius cincinnatus Répondre

      des ” élus SANS voix ” mais qui se font entendre !

      26 février 2013 à 16 h 48 min

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