Vive la cohabitation !

Vive la cohabitation !

En cette rentrée parlementaire, alors que les articles de notre constitution relatifs aux pouvoirs du président de la République sont analysés et commentés, ce titre ne manquera pas de choquer une partie de nos lecteurs. Mais n’est-ce pas là un moyen provisoire d’échapper au système monarchique exécrable dans lequel nous vivons, l’installation d’une cohabitation ayant pour effet le respect absolu de notre constitution ?

Une nation qui se prétend démocratique ne peut pas accorder autant de pouvoirs à un seul homme. Il ne s’agit pas seulement des pouvoirs officialisés par notre constitution, mais aussi de ceux qu’il s’accorde au nom d’une interprétation douteuse de cette dernière (par exemple, le « domaine réservé » de la politique étrangère), de la pression qu’il exerce, à tout moment et en tout lieu, sur la classe politique et par voie de conséquence sur nos institutions. Les élus de sa majorité et ses ministres ? Des courtisans, parfois fiers de l’être (« Si tu m’utilises j’ai besoin de toi comme guide ») (1). Les conseillers ? Des personnalités probablement compétentes, mais « qui doivent tout au Prince » (2). Un règne dans lequel « la vertu n’y est point nécessaire et l’honneur y serait dangereux ».

Des monarques fascinés par un pouvoir, pourtant éphémère, conçu comme celui « de contraindre » (3). Comme M. Mitterrand, pourtant pourfendeur de « l’exercice solitaire du pouvoir » avant de s’en délecter,  nous en ferions – peut-être – de même à leur place, ce qui prouve la perversité de notre système politique : « le pouvoir absolu corrompt absolument ».

Qu’arrive-t-il alors ? Le président est chaque jour plus détesté par une partie d’un électorat déçu, et il est battu par celui qui n’a de cesse de clamer le subjectivisme et les foucades de celui qu’il affronte. Monsieur Hollande ne sera probablement pas « renouvelé », pas plus que ne l’ont été M. Giscard d’Estaing, M. Sarkozy, ou M. Chirac, si ce dernier avait eu l’imprudence d’être candidat en 2007. Le peuple n’en peut plus d’essayer, il veut rompre le joug des présidences monarchiques.

Ainsi la stabilité politique, souhaitée autrefois par les auteurs de la constitution, est-elle mise en défaut. Les réformes économiques fondamentales n’aboutissent pas parce qu’elles n’ont pas le temps d’être expérimentées, jugées dans la durée et parce que, risquant de compromettre les carrières de ceux qui les font, voire de ceux qui les proposent, elles sont vite abandonnées. Les réformettes antérieures sont « détricotées ». Les lois sont faites et défaites au gré du Prince, alors que la stabilité politique et la sécurité fiscale sont consubstantielles de la volonté d’entreprendre.

On a accusé la cohabitation d’aboutir à la paralysie des institutions. Or, le renouvellement du « guide suprême », devenu la règle tous les 5 ans au terme d’une campagne électorale permanente, a pour conséquence la stérilisation intellectuelle d’une classe politique hantée par la compétition. Dans le cas d’une cohabitation, comme celle fréquente aux Etats-Unis, le président et les assemblées – ces dernières votant les crédits – sont en pratique obligés de composer (l’intervention en Syrie), et le pays est à l’abri des caprices ou des lubies (l’intervention française en Lybie), étant acquis qu’une décision abandonnée par une assemblée d’élus responsables vaut mieux que la décision déraisonnable d’un seul.

En définitive, il devient indispensable soit de « défaire » notre constitution, soit de procéder à son application rigoureuse selon l’article 20 qui stipule : « le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation. Il dispose de l’administration et de la force armée. Il est responsable devant le Parlement ».

La cohabitation n’étant qu’une rare affaire de circonstance, mieux vaut brider définitivement la présidence en la contraignant au respect scrupuleux de cet article 20, même si l’on devait assister un jour à l’installation d’une cohabitation… dans la majorité.

(1)   Le Monde du 17 juin 2013 : « La lettre d’allégeance de Christine Lagarde à Nicolas Sarkozy » : « Utilise-moi pendant le temps qui te convient et convient à ton action et à ton casting… Si tu m’utilises, j’ai besoin de toi comme guide et comme soutien : sans guide, je risque d’être inefficace, sans soutien je risque d’être peu crédible »

(2)   « Le fait que l’on doit tout au Prince, fait que l’on ne doit rien à sa patrie ». Montesquieu : L’Esprit des Lois.

(3)   André Malraux. La condition humaine.

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Comments (3)

  • quinctius cincinnatus Répondre

    la ” cohabitation ” avec un ” colocataire ” qui vous méprise et vous haie et cependant par qui vous pensez vous faire aimer en singeant et ses idées ( délétères ) et ses ( mauvaises ) manières … très peu pour moi et pour beaucoup d’autres

    7 septembre 2013 à 9 h 25 min
  • Christiane Répondre

    La Monarchie, en France, n’a rien à voir avec la république. Nos rois ont toujours eu comme but : la
    grandeur de la France, sa gloire et sa place dans le
    monde. On ne peut pas en dire autant de la république, surtout depuis la troisième, à part quelques caractères
    d’exception.

    6 septembre 2013 à 18 h 05 min
  • verdad Répondre

    Malraux pilleur de tombes dans cet extrême orient qu’il
    aimait tant..
    Un grand Résistant à la Maurice ou à la Geroges deux
    d’exrême gauche, un qui imitant Lenine transita à travers
    l’Allemagne Nazie pour passer la Guerre en résident
    à Moscou et revint gracié par de Gaulle qui s’y connaissait
    en matière de désertion.
    Quant à l’autre Georges, celui qui succéda à Maurice alias Fils du Peuple, Travailleur Volontaire en Allemagne,
    il fut démasqué par des Communistes Résistants, le
    Georges fabriquait chez Messerchmidt, les avions
    qui nous matraquaient du temps où les Allemands avaient
    la maîtrise de l’Air en Afrique.

    Si j’en désole certains, je le regrette mais lorsque on
    se fait un devoir de renseigner la jeunesse sur l’Histoire
    de France en grande partie escamotée dans les livres
    d’Histoire nullement besoin d’en supprimer ni, d’en rajouter.
    Pour votre information, le Messerchmidt 109 , si j’ai bonne
    mémoire, premier Avion à Réaction, sorti durant la 2ème
    guerre Mondiale,,descendit en flammes un millier de Forteresses volantes dont quelques milliers d’aviateurs
    Américains, grillés ou explosés vifs en plein ciel ou en
    atteignant le sol

    6 septembre 2013 à 17 h 05 min

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