Contre-offensive idéologique de la droite européenne

Contre-offensive idéologique de la droite européenne

Nous avons souvent eu l’occasion de le dire dans ces colonnes: le combat politique n’est pas exclusivement – ni même d’abord – un combat électoral; il est essentiellement un combat pour la conquête des esprits.
La gauche, notamment marxiste, l’a fort bien compris, qui a longtemps accepté les seconds rôles sur le plan politique pour se ménager le temps d’obtenir un quasi monopole sur les réseaux de diffusion culturels (des journaux à l’Éducation nationale, en passant par le cinéma…).
Lorsque les esprits sont mûrs, tout naturellement les suffrages viennent sanctionner la victoire sur le plan politique.
Il importe donc pour la droite de ne pas faire les choses à l’envers comme elle le fait depuis trente ans: il n’y aura pas de victoire électorale durable – c’est-à-dire hors de cette insupportable “alternance” – sans reconquête idéologique.
Il suffit de regarder ce qui s’est fait aux États-Unis pour comprendre de quoi il s’agit. Dès 1968, la droite américaine voyant l’étendue de l’offensive intellectuelle de la gauche a fait le choix de se doter de fondations et d’associations militantes, qui produisent et diffusent une doctrine de droite adaptée à l’époque. Notons que la droite n’avait pas encore perdu le pouvoir, mais elle a fait le pari que, sans domination intellectuelle, sa domination politique était éphémère.
La droite française, au contraire, manque cruellement de vision à long terme, et tout aussi cruellement de consistance idéologique: il n’existe pas de fondation ayant un minimum de renom – on ne peut évidemment placer dans cette catégorie les fondations issues de partis politiques – et quasiment pas d’associations de diffusion.

Manipulation du langage


Pendant ce temps, nous laissons donc à la gauche le monopole de l’action idéologique et sémantique. C’est ainsi que le vocabulaire que nous employons est presque toujours celui de l’adversaire. Pire encore, nous employons le vocabulaire de l’adversaire sans même nous rendre compte qu’il est piégé!
Il faut donc se réjouir d’une toute récente initiative de la droite catholique européenne en faveur de la clarification sémantique.
En effet, sous la houlette du Conseil pontifical pour la famille, plus de 70 intellectuels européens ont démonté le vocabulaire usuel en matière morale.
Il n’est pas besoin d’être grand clerc, si l’on ose dire, pour comprendre que c’est, en particulier, sur les questions morales et familiales que la gauche a accentué son effort depuis deux ou trois décennies. C’est donc là aussi que le travail est le plus abondant pour nous.
On trouve ainsi des analyses très fines de certains concepts plus qu’ambigus comme la “santé reproductive”, la “sexualité sans risque” ou carrément mensongers comme “l’interruption involontaire de grossesse” (comme si une grossesse interrompue pouvait être reprise!).
En tout une petite centaine d’entrées sur des thèmes d’une actualité brûlante.
Signalons, en particulier, un admirable article d’Ignacio Barreiro, professeur uruguayen de sciences politiques sur “l’ingénierie verbale”, qui expose très simplement et très brièvement (huit pages seulement) comment le langage est manipulé et comment cette manipulation du langage engendre la plus totalitaire des dominations, selon ce qu’avait génialement pressenti Orwell.
Naturellement, ce lexique appelle deux types de travaux: d’autres lexiques du même type pour d’autres domaines de la vie humaine; des travaux de vulgarisation pour mettre à la portée de tous les intuitions, souvent profondes, présentes dans cet ouvrage.
N’oublions jamais que, lorsque nous n’avons plus le mot adéquat pour dire ce que nous pensons, nous n’avons tout simplement plus les moyens de le penser!
Pour maintenir cette indispensable liberté de penser, souhaitons que ces autres lexiques et ces travaux de vulgarisation soient nombreux et qu’ils viennent vite…

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Comments (3)

  • florent Répondre

    Brillant exposé qui résumme assez clairement la situation de notre pauvre pays. On peut alors songer à l’une des rares fautes du général de Gaulle qui avait dit en son temps”laissons la culture à la gauche, ça lui fera un os à ronger”, depuis, nous avons eu mai 68, les mouvements associatifs divers et variés des années 1980-90 et les films de Costa-Gavras ( je résumme là bien sûr ). il est grand temps que la droite, la vraie, reconquiert enfin ce champs d’expression que sont la culture et les médias. Pour cela, j’ai peur qu’il ne faille un peu faire table rase, la fausse droite actuelle ( Union des mal pourvus ) s’étant depuis longtemps laissé aller à la gauchisation ambiante; mais avant de créer un nouveau parti politique, constituons-nous d’abord des réseaux d’influence. Pas de charrue avant les boeufs.

    7 juillet 2005 à 17 h 49 min
  • erik dugas Répondre

    bof !! on peut toujours dire que la droite se fait manipuler et n’a pas les reseaux de la gauche… Ce que je constate c’est que en france, droite et gauche c’est pareil ! Chirac est de droite parce que mitterand etait deja au PS. Difficile de se frayer un chemin alors, il vallait mieux creer un nouveau parti soit disant a droite. D’ou le RPR. Faut pas chercher plus loin …

    4 juillet 2005 à 21 h 30 min
  • qdfgqfdsg Répondre

    Merci de préciser les références de ce livre !!!!!!!!

    4 juillet 2005 à 12 h 06 min

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