Le Tea party et la renaissance de l’Amérique

Le Tea party et la renaissance de l’Amérique

Entretien avec
Évelyne Joslain

D’où vient le mouvement des Tea Parties?

Le mouvement n’est ni mort ni endormi_ pas plus d’ailleurs que sa sinistre contrepartie, le mouvement des Sqatteurs de Wall Street. Le Tea Party a démontré son éclatante santé lors du dernier CPAC (le congrès annuel conservateur) ainsi que l’étendue et la solidité de son implantation. Surgi le 19 février 2009 d’un rejet viscéral du peuple contre le socialisme agressif d’Obama, jugé non- américain, il fut suivi dès le 15 avril suivant (Taxday, jour ultime pour remettre sa déclaration de revenus) d’une révolte des contribuables, indignés de voir le pays courir vers la ruine, leur argent durement gagné étant dilapidé en gaspillages éhontés et “redistribué” vers le bas (vrais pauvres mais aussi myriades de profiteurs du système) et vers le haut (gros intérêts financiers, syndicats du public, énergies “vertes”…) au détriment des classes moyennes entrepreneuriales qui sont les véritables forces vives de toute démocratie.

Puis, il y eut les chahutages, dans leurs circonscriptions, de tous les élus républicains coupables d’avoir oublié leurs principes et cédé à la gauche sur des sujets-clés non négociables, et bien sûr toutes les manifestations spectaculaires, dans la meilleure veine populiste, à chacun des projets de loi de la gauche arrogante au pouvoir perçus comme autant d’outrages à la Constitution, tout cela amenant les victoires électorales de 2010 qui ont changé le débat national, limité le pouvoir de nuisance d’Obama et redonné vie au parti républicain.

Ce mouvement est-il durable?

Le mouvement a déjà prouvé sa durabilité et son endurance. Ses élus au Congrès fédéral ( les seuls dont on connaît les noms en Europe) présentent une résistance héroïque au pouvoir autoritaire de la Maison Blanche et fouettent la détermination toujours branlante des chefs des deux chambres. Mais c’est dans les états, dans les législatures locales et surtout aux postes de gouverneurs, que le Tea Party offre le mieux l’image de l’alternance libérale réussie.

 Les différents groupes Tea Party, qui sont tous connectés par leurs milliers de sites, ont installé dès le début les bases d’une infrastructure conservatrice qui leur est propre et qu’ils continuent de construire, comté par comté, à tous les échelons, dans les 50 états. Et c’est là où les gens du mouvement forcent l’admiration: face aux “élites” qui les ont trahis, ils savent ne pouvoir compter que sur eux-mêmes. Nombreux sont les prétendants pour les postes en vue mais c’est une autre chose que de trouver des candidats pour les postes électoraux mineurs. Il est remarquable que le pays profond réussisse à lever des armées de bénévoles pour assumer les emplois obscurs, ingrats mais indispensables au fonctionnement de cette infrastructure. Le Tea Party est une émanation de la société civile, une aspiration du peuple à reprendre aux élites faillies le contrôle de son destin. Il veut obtenir la refonte totale d’ l’Etat providence désormais obsolète, incontrôlable et insoutenable autant moralement que financièrement. Il exige la restauration d’un gouvernement limité, respectueux de la Constitution.

 Pour cela, il doit impérativement prendre le contrôle du parti républicain, “moisi et vermoulu” (selon le Sénateur Rand Paul), plutôt que d’aller vers le parti libertarien.

 N’est-il pas une épine dans le pied du parti républicain?

 Alors, oui, ces conservateurs Tea Party, impatients et irrévérencieux, sont une épine dans le pied des caciques du parti républicain qui s’accrochent à leurs postes et au honneurs, intimidés par la gauche au point de lui avoir cédé sur tout depuis des décennies, figés dans des attitudes courtoises et un esprit bipartisan qui ont eu leur vertu mais s’avèrent complètement dépassés alors qu’ils sont confrontés à une gauche qui a tous les culots et que la dette colossale ( près de 17 trillions de dollars) condamne le pays à la faillite. Les principes Tea Party et cette conscience aigüe de la menace imminente sont à la vérité la planche de salut du parti républicain, s’il peut la saisir avant 2014, et de l’Amérique.

 Pensez-vous qu’un mouvement analogue pourrait voir le jour en France et à quelles conditions?

On ne voit pas comment un mouvement analogue pourrait voir le jour en France ni dans aucun autre pays européen. On peut en espérer des variantes au mieux. D’abord, il y a l’immensité du pays et le désir de restaurer aussi le fédéralisme constitutionnel pour se libérer des empiétements de l’Etat fédéral. Nous, nous subissons le double fléau d’une bureaucratie européenne et nos potentats locaux. Notre société civile fait ce qu’elle peut mais elle n’a pas toutes les ressources de la société civile américaine, avec sa culture de la philanthropie et de la vie associative. On voit mal dès lors comment on pourrait mettre sur pied , en quelques mois, des réseaux, des associations militantes, des radios. le Tea Party a même une chaine de télévision depuis 2010 (RightNetwork), des centaines de blogs et de sites professionnels. Il n’est pas exagéré de dire qu’il s’en crée tous les jours. Et puis, se multiplient aussi ces PACs, ces fameux comités d’action politique dont le but est de collecter de l’argent électoral pour les candidats inconnus dépourvus de soutien. Car, contrairement à nous, les Américains votent souvent et pour tout. Tous les deux ans, on élit des représentants et sénateurs mais aussi des juges, des shérifs, des adjoints de toutes sorte.

 Mais il n’y a pas que le système. Les Américains, en tout cas encore une moitié, ont aussi une vénération pour ce joyau philosophique qu’est leur Constitution et un amour de leur patrie qui transcende les divisions. C’est pour défendre ça, bec et ongles, qu’ils sont descendus dans la rue. En se dressant contre l’Etat fédéral, dévoreur de leurs libertés et du fruit de leur travail, le mouvement ne défend pas des intérêts personnels, encore moins catégoriels, mais les idéaux de liberté.

Les Français ont-ils seulement conscience qu’eux aussi vivent une guerre culturelle et qu’ils sont en train de la perdre? Comprennent-ils, en masse et pas seulement dans quelques enclaves éclairées, que l’économique et le culturel ne font qu’un? L’idéologie égalitaire dominante les intimide, ils restent majoritairement passifs devant la confiscation de leurs libertés.

 Et puis, où sont nos Rand Paul, Ted Cruz, Sarah Palin, Scott Walker et autres étoiles montantes qui peuvent assurer la relève? Décidément, il est difficile de nos jours d’être Français et optimiste en même temps.

Évelyne Joslain
Tea Party :
L’Amérique
à la reconquête
de ses libertés
Jean Picollec

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Comments (8)

  • BRENUS Répondre

    Je ne comprends rien à la politique interne des USA pas plus qu’a l’utilité ou non du Tea Party. Mais, lorsque je lis ou entend les commentaires haineux de la gauchitude française à son égard, je ne peux que me dire que ce thé là serait à mon goùt.

    27 avril 2013 à 8 h 25 min
  • quinctius cincinnatus Répondre

    espérons que les ” tea party ” à la française seront ce que sont les ” rockeurs ” français aux rockeurs américains … une pâle, mais toujours assez grotesque imitation

    26 avril 2013 à 18 h 25 min
  • Grepon Répondre

    Barack Obama n’est pas une reaction aux mouvances “tea party”, q.c. Ils sont une reaction tres naturell a l’irresponsibilite destructrice d’un President qui permet a Congress de tourner sans meme un budget, et qui signe lois passé par Congress reformant des pans d ‘industrie aux effets directes et deletere sur la vie de chaque citoyen sans que les membres des deux chambre ou la publique a eu un instant meme pour les lire. La tyrannie aux Etats Unis, et sa faillite, le reste du monde relativement libre ne peut pas survivre, q.c.

    25 avril 2013 à 16 h 17 min
  • jacquesE Répondre

    Une vue optimiste de l’Amérique qui possède les ressorts pour s’évader de la prison de l’Etat-Providence qui conduit la France à l’enfer, pas seulement fiscal. Saurons-nous, à leur modèle, après les avoir aidé dans leur indépendance, les imiter pour régénérer la confiance dans les activités individuelles. Saurons-nous, toujours à leur modèle, utiliser vraiment la subsidiarité pour remplacer l’Etat et les collectivités publiques par des associations voulues explicitement par les individus concernés. C’est l’objectif que j’aimerai que les Français se donnent.

    25 avril 2013 à 9 h 33 min
  • anne charlotte Lundi Répondre

    On ne peut comprendre la politique américaine d’aujourd’hui si l’on ne connaît pas les protagonistes : d’un côté un parti démocrate à la dérive miné par une idéologie utopique et sectaire qui défend l’Etat Providence, et de l’autre l’Amérique Tea Party qui a mis en lumière les enjeux essentiels.
    C’est à la découverte de ce mouvement qui ébranle les Etats-Unis que nous entraîne ce livre.

    Et c’est sur Livres en Famille : http://www.livresenfamille.fr/p8164-evelyne_joslain_tea_party.html

    25 avril 2013 à 8 h 17 min
  • quinctius cincinnatus Répondre

    le ” Tea Party ” a permis la Renaissance de Barack Obama … point- barre !

    24 avril 2013 à 17 h 26 min
  • Gérard Manvusa Répondre

    Très agréable résumé et témoignage de ce mouvement qui souhaitons-le libère au moins l’Amérique

    24 avril 2013 à 14 h 19 min
    • quinctius cincinnatus Répondre

      vous devriez consacrer quelques minutes à la méditation, ou au moins à la réflexion, cela vous éviterait des désillusions futures !

      25 avril 2013 à 7 h 43 min

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