Les valeurs d’une civilisation

Les valeurs d’une civilisation

Je ne vais plus guère au cinéma pour voir des films français. J’ai dépassé depuis plusieurs décennies désormais le stade anal et les plaisanteries scatologiques des « nouveaux comiques » made in France ne me font pas rire. Je n’ai pas non plus atteint le degré de cynisme ou d’effondrement intérieur qui me permettrait d’apprécier un scénario où un voleur trouverait le vrai sens de sa vie après avoir découvert que le vol était le ressort secret et essentiel de l’Occident, ou un autre scénario où un pédéraste découvrirait l’esthétique qui en fera un génie grâce à des sodomisations multiples scandées par des arias de Bach.
Je garde une dilection particulière pour la production de quelques cinéastes appartenant à une espèce en voie de disparition. Éric Rohmer est souvent de ceux-là. Pierre Schoendoerfer aussi.
Le premier nous a offert voici quelque temps « L’anglaise et le duc » qui, dans un contexte de louanges unanimes vis-à-vis de la Révolution Française, a permis à ceux qui voient en celle-ci l’un des épisodes les plus sombres et les plus honteux de l’histoire de ce pays de comprendre qu’ils n’étaient pas seuls : pour la première fois depuis longtemps, il a été dit en France que la Terreur fût injuste et bestiale, que des innocents y ont eu la tête tranchée et plantée au bout d’une pique, et que la France fût très loin d’être alors le pays le plus respectable d’Europe.
Le second nous offre « Là-haut » qui est sur les écrans depuis quelques semaines, et qu’il importe de ne pas manquer. C’est l’adaptation d’un roman écrit par Schoendoerfer lui-même. C’est aussi un film somme qui rassemble les éléments essentiels de toute une vie.
Il s’agit d’un cinéaste (schoendoerffer), qui n’a jamais transigé, qui a connu les règles de l’honneur au temps de l’Indochine et de l’Algérie française et qui a ensuite tenté de vivre à la hauteur de ces règles, au risque d’en mourir.

Barbarie communiste

Il s’agit de la découverte de ce cinéaste par une jeune femme trop jeune pour avoir connu l’époque où des hommes en France vivaient et mouraient par ces règles, mais qui, en dessinant les contours du cinéaste, les redécouvre peu à peu.
Il s’agit d’honneur, oui, de fidélité, de souffrance, d’abnégation, de parole donnée qu’il faut ensuite respecter, de transcendance face à la douleur, de vie plus loin que la vie, et surtout de la raison pour laquelle nous sommes sur terre : non pas pour vivre une existence animale, mais pour transcender l’animalité, et faire des choix moraux.
L’Indochine, dit Schoendoerfer, fut, voici cinquante ans, bien plus qu’une région géographique : un lieu où la France déjà moribonde tenta d’incarner encore un idéal, une éthique, une dignité. Un lieu où la France agonisante tenta d’être encore une civilisation. Ce fut l’échec absolu dont découla peu de temps après l’échec algérien. Mais des hommes s’y sont montrés héroïques et y ont tissé entre eux des liens indicibles et indissolubles. Ils ont, qui plus est, été confrontés à ce qui sépare la civilisation de la barbarie qui, à l’époque, avait le visage du communisme. Nombre d’entre eux sont morts alors dans la boue de Dien Bien Phu ou un peu plus tard, dans les camps de concentration de Ho Chi Minh. Quelques-uns ont survécu. Ils pratiquent la fraternité des survivants, ils ne se trompent pas de combats, ils sont prêts à mourir les uns pour les autres, ils savent le sens de la parole donnée, ils savent surtout que quand les règles de la civilisation ne sont plus défendues, il ne reste rien. Ils savent par-dessus tout que la barbarie ne meurt jamais et peut toujours renaître si nous ne sommes pas assez vigilants et déterminés. Ils appartiennent à une espèce en voie de disparition, et le film de Schoendoerfer a une dimension funèbre.
Je partage le pessimisme de Schoendoerfer. Je pense que pour la France, il est déjà trop tard et qu’il n’y existe plus guère de sentinelles à même de défendre ce qui doit l’être. Je pense que pour l’Occident tout entier la situation est inquiétante.
Je pense aussi néanmoins qu’il est important que des écrivains, des penseurs, des cinéastes affirment encore les valeurs essentielles d’une civilisation qui fût grande précisément parce qu’elle incarna ces valeurs. Pierre schoendoerffer est de ceux-là.

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Comments (15)

  • Dr. Freud Répondre

    “Ne voyez vous donc pas encore que la France est en crise sur tous les plans: économique, culturel, politique et je dirais même religieux.” Si nous étions aussi cartésiens et intelligents que nous prétendons l’être, les “crises” que vous citez seraient réglées depuis longtemps : – “économique” -> libéralisation de l’économie et fin des privilèges -> crise terminée – “culturelle” -> fin de la culture étatiste et suppression des subventions -> crise terminée – “politique” -> limogeage de tous les énarques démagogiques au pouvoir depuis plus de 30 ans -> crise terminée – “religieuse” -> les énarques démagogiques limogés et l’ordre rétabli -> crise terminée Pendant que la France est en “crise”, les autres pays avancent et s’enrichissent. Nous avons déjà perdu 30 ans.

    2 juin 2004 à 22 h 03 min
  • Observateur Répondre

    “Et cette crise est loin d’être une crise de croissance. A tous les niveaux, il y a un abandon et une chute des valeurs qui fait que malheureusement tout le monde se laisse aller. Et ça descend, de plus en plus vite.” Justement, quel parti a été élu en 2002 pour réformer la France? Quel parti au pouvoir n’a fait aucune réforme depuis 2002 (la pseudo-réforme des retraites n’étant évidemment tout sauf une réforme digne de nom) ? Quel parti ne cesse de dire dans tous les médias aux ordres qu’il ne fait que des réformes, continuant à abuser les électeurs qui lui restent ? Quel parti élu depuis 2002 n’a respecté aucune des promesses électorales de baisse d’impôt ? Quel parti ne cesse de voter de nouvelles lois socialistes, la dernière en date étant “la Charte de l’environnement” ? Et on pourrait continuer encore longtemps la liste … La distinction entre les 2 partis du système (PS et UMP/UDF), entre la gauche institutionnelle et la “droite” au pouvoir n’a pas lieu d’être, car en réalité il n’y a aucune différence entre elles. La France est sans doute le seul pays au monde à avoir réussi à mettre en place une dictature socialiste dirigée alternativement par une fausse droite et une vraie gauche. Et déjà notre cher gouvernement Chiraquien prépare l’alternance pour le PS. C’est comme ça depuis 30 ans ! !

    1 juin 2004 à 21 h 54 min
  • 317ème section Répondre

    “Je me console en me disant qu’on ne connait des films du passé que les chefs d’oeuvres, toutes les oeuvres insignifiantes ayant disparu, et que pour moi, le cinéma, oeuvre de fiction ne peut rester qu’une distraction ” —————————————————— Je partage votre point de vue, et ce d’autant qu’il est corroboré parles faits . Encore que …, la manipulation des TV/Radios et autres abrutiscopes nous ressassent des nullités culturelles , des émissions quotidiennes ou hebdomadaires dont l’unique objet est de nous laver la cervelle .Etant “inlavable” en ce domaine (!)…. Enfin, il est scandaleux d’avoir un Ministère de la Culture .L’imprègnation marxiste totalitaire s’en exhale comme de la Propaganda Staffel .

    1 juin 2004 à 16 h 35 min
  • TATANGAS Répondre

    Cessez donc de vous focaliser les uns et les autres sur les prétendus “socialo-communistes”. Le plus beau est celui qui prétend que l’UMP est un parti de gauche et Jacques Chirac un communiste. N’est-ce pas un peu fort ? Ne voyez vous donc pas encore que la France est en crise sur tous les plans: économique, culturel, politique et je dirais même religieux. Et cette crise est loin d’être une crise de croissance. A tous les niveaux, il y a un abandon et une chute des valeurs qui fait que malheureusement tout le monde se laisse aller. Et ça descend, de plus en plus vite. Ah où sont les heureux temps où la gauche pouvait servir de bouc émissaire ? Et où grâce à elle le chômage diminuait et le budget de la sécurité sociale s’équilibrait ?

    1 juin 2004 à 11 h 09 min
  • TL Répondre

    A propos de cinéma français, avez vous remarqué que des films style “tontons flingueurs”, “le père noël est une ordure” salués comme des sommet de la ringardise beauf franchouillarde sont unanimement reconnus aujourd’hui, y compris par les bouffeurs de caviar, qui ne juraient que par la nouvelle vague et autres films tordus et emmerdants. Pour mes gouts personnels, j’avoue que j’ai énormément de mal avec les films modernes américains souvent cons et pleurnichards, et avec les films modernes français, souvent orduriers et tordus (la pose intellectuelle façon mai 68 n’étant plus à la mode). Je me console en me disant qu’on ne connait des films du passé que les chefs d’oeuvres, toutes les oeuvres insignifiantes ayant disparu, et que pour moi, le cinéma, oeuvre de fiction ne peut rester qu’une distraction

    30 mai 2004 à 20 h 50 min
  • R. Ed. Répondre

    Pour le chevalier de la liberté :survivre oui, prospérer serait peut-être encore mieux, pourquoi pas ? :-)

    30 mai 2004 à 20 h 27 min
  • chevalier de la Liberté Répondre

    L’Occident ne pourra survivre qu’en détruisant les restes de tribalisme, de bolchevisme, de ressentiment, de pessimisme et de dégénérescence qui font du monde actuel un dépotoir.

    30 mai 2004 à 16 h 56 min
  • christophoros. Répondre

    Dans le genre “scato” lisez Rabelais. A moins que vous ne considériez que celui-ci ne fait pas partie de la “civilisation” dont vous vous revendiquez. Cordialement.

    30 mai 2004 à 10 h 57 min
  • Jean-François Devloo Répondre

    Chaque être humain peut quotidiennement défendre les valeurs d’une civilisation. Par ses pensées, ses paroles, ses comportements, il peut défendre concrètement des valeurs comme l’honnêteté, le respect des autres dans leurs différences, la dignité dans l’adversité, l’amour de la vie. Ces valeurs de vie, pour être maintenues et pour se développer, doivent être véhiculées et défendues par chaque être humain. Cela n’est pas facile et ne va pas de soi. Il existe aussi des valeurs de mort, véhiculées et défendues également par des êtres humains. Cela a toujours été. Actuellement, nous vivons une période où un groupe d’êtres humains, les adeptes de l’Islam radical, sont particulièrement actifs dans la propagation des valeurs de mort. Il me paraît essentiel que, partout dans le monde, chaque être humain, à sa manière et avec les moyens dont il dispose, combatte l’Islam radical, que chaque être humain se tienne debout face à cette idéologie totalitaire, qu’il la regarde bien en face et lui dise : “non”. Si chaque être humain prend la décision de dire non à l’Islam radical et de ne pas relativiser, minimiser, voire ignorer cette menace, les valeurs de vie pourront continuer à se développer et les valeurs de mort reculeront.

    29 mai 2004 à 22 h 03 min
  • MELIES Répondre

    Le cinéma français est en effet dans l’ensemble nombriliste, malsain et grossier. Il ne survit commercialement (culturellement, il est mort)que grâce aux subventions et à l’avance sur recettes. Il parait qu’il est nécessaire de lui venir en aide au nom de “l’exception culturelle”. Les auteurs français de films sadico-pornos à prétention intellectuelle (devant lesquels s’ébaubissent les bobos et les gogos) subventionnés par les contribuables, doivent bien rire.

    29 mai 2004 à 21 h 54 min
  • vladimir Répondre

    Jacques(puisque maintenant on utilise que les prénoms),Guy parle d’un film et pas d’un pseudo documentaire,produit par le meme producteur que Quentin ,accessoirement president du jury du festival de Cannes.

    29 mai 2004 à 21 h 48 min
  • Christophoros. Répondre

    Je sais bien que votre dicton favori est “oldies but goodies” mais enfin il a parfois quelques exceptions type “les Choristes”. J’y suis allé à reculons mais cela se regarde. Cordialement.

    29 mai 2004 à 21 h 17 min
  • Renouveau Répondre

    Je pense qu’il y a encore un espoir, et que la situation peut changer très rapidement et si ce n’était pas le cas, je ne serais plus en France. Il y a déjà des signes avant-coureurs : déjà Internet a permis de briser un peu la pensée unique socialo-communiste, mais ce n’est qu’un début. De plus, l’UMP et l’UDF ont connu une défaite historique aux élections régionales de 2004. Il n’y a pas de fatalité. Les causes de la situation actuelle peuvent être parfaitement analysées, ce que je vais tenter de faire : La situation actuelle s’explique par la prise de pouvoir des anciens partis de droite à savoir l’UMP/UDF par des socialo-communistes, et par le premier d’entre eux, Chirac, dont les indices sont si nombreux qu’on peut raisonnablement penser qu’il est communiste. Mais le système est encore plus diabolique, car les Chiraquiens font croire aux Français que l’UMP est un parti de droite, d’une part en tenant un faux discours de droite qui n’est jamais appliqué, d’autre part en faisant sans arrêt de nouvelles lois socialo-communistes, qu’ils font passer à la hussarde, comme la dernière, la charte de l’environnement. Pour que le système fonctionne, l’UMP s’appuie sur des hommes politiques sincèrement de droite (libéraux, “les réformateurs”, “droite libre”), qu’on pourrait qualifier d'”idiots utiles” (pardon pour ce qualificatif) qui croient naïvement qu’ils peuvent influer sur les décisions du parti, alors que les décisions sont prises, en haut lieu, par Chirac et ses proches. Leur rôle est très utiles pour les Chiraquiens : ils sont chargés de donner l’apparence d’une démocratie dans l’UMP, et d’attirer les électeurs de droite, mais leurs opinions ne sont jamais appliquées. De plus, la fausse droite a réussi jusqu’à présent à marginaliser les courants à droite, en utilisant le totalitarisme intellectuel socialiste des médias, des syndicats, de l’éducation nationale… que le PS avait mis en place. Et cette tactique a fonctionné jusqu’à présent puisqu’elle a pu décrédibiliser tous les partis de droite qui pouvaient être un danger pour l’UMP (Libéraux, souverainistes, FN, conservateurs…). Enfin en diabolisant, toujours avec l’aide des médias, certains partis plus que d’autres, UMP a réussi à mettre, dans la tête des Français et des hommes politiques, l’idée que certains partis de droite sont totalitaires, fascistes, libéraux sauvages … ce qui a provoqué un éclatement de la droite en multiples courants concurrents. Ayant compris la tactique de l’UMP mise en place par Chirac, il ne reste plus aux hommes politiques de droite de s’unir enfin, ce qui mettra fin à l’imposture de l’UMP et permettra à la droite d’arriver au pouvoir pour en finir avec le socialo-communisme.

    29 mai 2004 à 20 h 53 min
  • R. Ed. Répondre

    Et revoila M. Agauchetoute . Bien le bonjour, Monsieur le visionaire extra-lucide.

    29 mai 2004 à 20 h 27 min
  • jacques furlainac Répondre

    “Je ne vais plus guère au cinéma pour voir des films français.” Mais mon cher Guy, alors il faut aller voir un bon film américain pour vous distraire. Voyons voir…. Qu’est-ce qu’il y a à l’affiche par les temps qui courrent… voyons, voyons… Oui, là, voilà, … oh! même primé à Cannes…. bon, je vous donne le titre: Fahrenheit quelquechose… un dénomé Michel More.

    29 mai 2004 à 19 h 27 min

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