Serge de Beketch : un gentilhomme est mort !

Serge de Beketch : un gentilhomme est mort !

Je m’étais juré de ne pas le pleurer. Et, je n’ai pu me retenir. Il était le meilleur homme du monde, mon secours et ma consolation. Du fond du Chaco ou des yungas de la Bolivie, je l’appelais ou je lui écrivais des textes. Sans lui, je n’aurai sans doute jamais pu écrire.

Il était le contraire de ce qu’il semblait : non la férocité de la droite éternelle, mais la générosité, le courage et l’intelligence. On le croyait fanatique, bigot, et intolérant, alors qu’il était tout le contraire. Il avait ce fond libertaire et ouvert, qui est la marque des immenses écrivains. En marge de ses colères, en marge de la France détruite et anéantie par des décennies d’obscurantisme et de couardise politique, il m’avait fait découvrir et partager : la droite, bien sûr, mais aussi le monde. L’ésotérisme, mais aussi le libéralisme, le libertarisme, la science-fiction de Kipling ou de Nabokov, la droite intérieure, le catholicisme magique, la tolérance. Une fois que l’on avait découvert la frontière absolue, on s’en allait avec lui sur ces chemins incroyables, dans son journal ou dans son émission admirables, car Serge était un émissionnaire.

Grâce à lui, j’ai pu rencontrer des politiques, des clowns, des ufologues, des guérisseurs, l’émouvante Simone Gallinard, Isabelle reine de France, des cinéastes, Brach, Annaud, des écrivains, des auteurs, des aventuriers de l’idée, bref tout ce qui fait que nous ne sommes pas des animaux. Pourtant, il aimait mes animaux et Horbiger, mon double de voyages en Patagonie ou en Amazonie, dans les sierras ou les glaciers. Grâce à lui au Libre Journal, j’ai pu écrire les synopsis de tous mes livres dont le dernier que je dois aussi à Jean Raspail (“Écrivez, Bonnal, mais arrêtez de déjanter…”).

 Je lui dois tout mon carnet d’adresses, je lui dois Claude Reichman et Alain Dumait, des journalistes de gauche et des marginaux de la droite éternelle. Je me souviens des déjeuners et des dîners avec des aventuriers de l’idée. Il était un rassembleur : un roi mérovingien, avec son corps maudit et fainéant, son esprit prodigieux (un QI de 160) et son âme tranquille.

Serge avait été condamné quarante fois. C’est dire qu’il était un combattant, et que le politiquement correct est devenu totalement fou depuis trente ans, depuis que la société et l’Occident ont été idéologiquement, et même démographiquement remplacés. Il était un homme de bon sens, mais depuis que le bon sens n’est plus de ce monde, il s’était mis en marge. Ses deux grands maîtres avaient été des juifs. Le grand Bergier, l’homme du Matin des Magiciens, et Goscinny qui avait décrit la bêtise humaine dans Lucky Luke et la transformation de la Gaule en avatar de l’empire romain (avatar renouvelé avec le passage à l’euro). Je me souviens aussi de cet article de Jérôme Lindon, dans « Libération », qui le décrivait comme un électron libre, scénariste de BD, un fou de la plume et du sens. Il était respecté dans le camp adverse. Il aimait les juifs de droite, en disant qu’ils ne devaient pas être de gauche, puisqu’ils étaient le sel de la terre. J’ai revu, avant de partir, mes copains d’enfance, juifs tunisiens, et ils ne sont pas de gauche. Donc il a gagné.

Il avait connu tout le monde, Brigitte Bardot, Alain Delon, Chirac, Jean-Claude Bourret, Bouygues, Isabelle de France, et tant d’autres qui ne me reviennent pas à l’esprit. Mais, il aimait aussi les humbles, les originaux, les ferrovipathes même. Et je pouvais l’appeler des Indes ou d’Ushuaia, sans qu’il s’en formalisât.

Il serait bon de se rendre compte à quel point la liberté de la presse est importante : la presse est ce qui oppresse, justement, le journal est ce qui libère. Il serait bon que le Libre Journal continue, comme « Les 4 Vérités », comme un espace de sincérité, avant que la société de consommation et les débilités des blogs achèvent de démolir l’esprit des hommes et notamment des Français.

Demain, je visiterai seul au nord de l’Argentine le grand parc du Chaco, avec ses capivaras et ses jacaratis. J’écrirai le texte sans me préoccuper du reste : comme me l’a dit sa femme Danielle, il est omniprésent. Il n’est donc pas mort, puisqu’il est là.

Et comme il me l’avait dit au téléphone, de sa terrible voix malade, cette voix d’outre-tombe, qui me poursuit depuis Mar del Plata, cité où Borges écrivit la Bibliothèque de Babel, “Découvre la Création. Il faut adorer la Création.”

Eh bien, faute de merle chanteur, je me consacrerai à l’ornithologie, tout en continuant de célébrer la mémoire de ce grand oligarque de l’esprit humain.

Voir aussi :
La page Serges De Beketch sur le blog des amis de Radio Courtoisie

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Comments (9)

  • nathalie veyron Répondre

    cet homme etait charmant. comme l’article d’ailleurs.La France est morte, et alors ?Nous mourons tous: eh bien, continuons de rêver: Merci à Serge.

    19 octobre 2007 à 23 h 15 min
  • Guyot-Jeannin Répondre

    Article juste et fulgurant ! Le voyageur éveillé exprime les 4 vérités de Serge de Beketch. Nous sommes quelques-uns à pleurer ce dernier que ressucite le premier. Mais, je suis certain que leur dialogue dans l’invisible se poursuit. Leur fraternité spirituelle est trop irriguée par une complicité sensible dès plus indéfectible. Cher Nicolas, je te reverrais avec un grand plaisir à Buenos-Aires ou à Paris en communion de pensée avec Serge.

    19 octobre 2007 à 19 h 20 min
  • Machoman Répondre

    Merci pour cet émouvant hommage, cela nous change des diatribes indignes de certains forums consacrés à la destruction de Radio Courtoisie et où Serge de Beketch avait eu le courage de venir débattre contre une nuée de coupe-jarret anonymes…

    19 octobre 2007 à 11 h 36 min
  • plantey Répondre

    un article génial pour un génie

    19 octobre 2007 à 8 h 25 min
  • gaius Répondre

    IL faisait  à mon sens la meilleure émission de Radio Courtoisie , c’est trés triste … ce qui est tristre aussi comme l’a fait remarquer JC Thialet  c’est l’attitude de nos politiques dites nationalistes face à l’urgence de la situation , nous n’avons plus rien à attendre d’eux.   

    18 octobre 2007 à 18 h 07 min
  • Frédéric Valandré Répondre

    Chapeau bas à Nicolas Bonnal pour cet hommage à une des plumes les plus talentueuses de la droite nationale.

    Cordialement,

    FV.

    18 octobre 2007 à 11 h 40 min
  • Jean-Claude Thialet Répondre

    17/10/07    – "Les 4-Vérités" –

    Comme promis dans mon précédent "post" (pas encore publié au moment où j’écris ces lignes), j’ai lu   – et même relu – le texte  – sublime autant que lumineux – de Nicolas BONNAL.  J’ai bien fait de différer cette lecture : tout y est, et même mieux que tout car l’auteur de cet article a su montrer (ce que je n’ai retrouvé dans aucun autre article écrit à la mémoire de Serge de BEKETCH) l’universalité de Serge BEKETCH, universalité que ce véritable touche-à-tout aura eu en commun avec la langue française, celle signalée en son temps par Antoine de RIVAROL. Une langue que notre ami maniait superbement, avec ironie, humour, pertinence et … impertinence.

    Mais j’arrête-là, laissant à d’autres le soin de poursuivre ces dithyrambes à l’égard d’un homme qui les méritait assurément et  dont on ne finira pas de regretter la disparition à l’heure où le "FRANCE TITANIC" est en train de sombrer corps et âmes. Un homme qui avait le courage de ne pas ménager ses attaques à tout ce que compte le "politically correct" de la corruption dans tous les sens que le mot comporte, mais aussi – ce qui est certes plus difficile – ses critiques aux dirigeants de la grande famille nationale. Une famille qui marche de plus en plus désunie au combat, et qui paraît désormais marcher à … reculons. N’en déplaise à Jean-Marie et à Marine, et à quelques autres qui, magré une sévère défaite attendue (et prévue par quelques-uns, dont Serge de BEKETCH lui-même) continuent leurs rodomondates, tout en étant obligés de compter et leurs troupes (celles DE leur Etat-major après celles de leurs électreurs/électrices !) et leurs sous, ceux qui n’ont pas remplis les caisses après des élections râtées ! Ce qui ne m’empêche pas de garder l’espérance, celle, notamment que l’Esprit Saint  éclairera les-un(e)s et les autres, et nous épargnera un "combat des chefs", une "guerre de succession" ! Un Esprit Saint qui descendra sur les esprits au prochain Congrès  Bordeaux(1), ou ailleurs, mais AVANT QU’il SOIT TROP TARD !

    Que l’on me permette simplement, pour terminer, de citer cette phrase de Suzanna TAMAGO : "LES MORTS PESENT MOINS PAR LEUR DISPARITION QUE PAR CE QUI, ENTRE EUX ET NOUS, N’A PAS ETE DIT." Eh oui ! Serge de BEKETCH avait encore tant de choses à dire, à NOUS DIRE ! A nous dire et à nous inspirer …

                  Cordialement, Jean-Claude THIALET

    (1) le meileur signe avant-coureur étant que Bruno MEGRET et quelques-uns de ses proches soient invités à BORDEAUX et que la "Marine" et quelques autres ne leur fassent pas la gueule … Une "Marine" qui, malgré son charme, ses dons et ses talents finit par en enm… plus d’un !

    17 octobre 2007 à 16 h 06 min
  • Jean-Claude THIALET Répondre

    117/10/07    – "Les 4-Vérités" –

    Remarque : par crainte de me laisser influencer, j’écris ce "post" sans commencer par lire l"article de Nicolas BONNAL. Mais  je remercie par avance d’avoir consacré une page à Serge de BEKETCH. Il le méritait aussurément.  Et, bien entendu, ce sera le premier article que je lirai dans le rpésent numéro des "4-Vérités".

    Pour ne l’avoir rencontré que trois ou quatre fois dans des circonstances différentes, pour n’avoir échangé que de trois ou quatre courriels avec lui, je ne pouvais prétendre avoir fait partie des amis de Serge de BEKETCH, pas même de le connaître.

    Mais, pour avoir suivi de loin en loin ses émission sur "RADIO COURTOISIE", pour avoir été abonné au "LIBRE JOURNAL", je le considérais non pas comme un AMI, mais mieux qu’un AMI, celui que l’on place d’instinct au dessus de tous les autres…

    Il avait un talent impertinent, et même irrévérancieux,  de polémiste que l’on ne trouve plus aujourd’hui, talent servi par une vaste culture (la meilleure qui soit, celle de l’autodidacte !), une verve et un courage inégalés. Un courage et des talents qui, en d’autres temps, lui auraient valu je sais combien de duels, et qui, à une époque où les lobbies, les Assoces et autres adeptes du "politically correct", font de l’argent devant les tribunaux pour défendre des idées de pacotille dont elles ont fait leur "fonds de comemrce", lui ont attiré maintes procès.

    Sa disparition est une grande perte. Certes pour son épouse et leurs deux enfants, pour ses proches, particulièrement ses collaborateurs qui, eux aussi, doivent se sentir orphelins, mais aussi pour toute la grande famille nationale parmi lesquels certains devraient se reprocher de n’avoir pu lui donner, avant son envol vers le Ciel, la joie d’une véritable réconciliation. Je me souviens que, sans suivre Bruno MEGRET, il avait pris du champ à l’égard de Jean-Marie LE PEN. Et, surtout, de ceux (particulièrement d’ailleurs celles !) qui n’avaient cessé d’agonir d’injures le "félon’" et toutes celles et tous ceux qui, parmi les électeurs du FRONT NATIONAL avaient suivi Bruno MEGRET dans son "exil". Ce sont celles-là et ceux-là, qui, ne comprenant rien à rien, ont créé des haines recuites entre les électeurs restés fidèles à Jean-Marie LE PEN et au FRONT NATIONAL et ceux qui avaient rallié le MOUVEMENT NATIONAL REPUBLICAIN. Un fossé que les propos et l’attitude d’une Marine LE PEN et d’un Louis ALIOT à l’égard de Bruno MEGRET, pendant la dernière présidentielle et la législative? n’ont fait qu’élargir(1).

    J’ai assisté aux obsèques de notre ami en l’Eglise SAINTE-ODILE, anonyme parmi des centaines d’anonymes. Et, tout en me laissant submerger par l’émotion d’une messe traditionnelle, de magnifiques chants liturgiques (ceux de ma jeunesse) et aussi, de chants scouts (ceux, aussi, de ma jeunesse) j’ai regretté qu’une bonne partie de l’assistance (pourtant composée en majorité de personnes d’un certain âge) se soit montrée incapable de réciter des prières en latin (notamment le NOTRE PERE) ou même de reprendre nos chants scouts, notamment le "DEVANT VOUS LE M’ENGAGE" (la Promesse scoute), ou le "SEIGNEUR JESUS, APPRENEZ-NOUS A ËTRE GENEREUX …" (la prière de saint IGNACE). Non par manque de communion avec l’âme du disparu, mais, manifestement, parce que les hommes et les femmes qui constituaient cette assistance les avaient oubliés. Voilà ce que la FRANCE laïcarde, mais aussi les évèques et les prêtres conciliaires ont fait de Français qui prétendent défendre nos traditions, défendre les valeurs et l’âme de la FRANCE, et ses racines chrétiennes. Il était temps, sans doute pour Serge de BEKETCH de retrouver la MAISON DU PERE. Puisse-t-il ne pas voir, du haut des "balcons du Ciel", le naufrage du "FRANCE TITANIC" contre lequel il se sera battu de toutes ces forces, jusqu’à son dernier souffle. Et si, au Père Lachaise, il est enterré dans le "Quartier des GénérAux", je pense que, dans sa grande Bonté", notre Père à tous, croyants ou mécréants, l’aura accueilli dans le "Quartier des GénérEux" ! Adieu généreux ami, à Dieu …Tu étais de la lignée de tous ceux qui (saints ou non) se sont sacrifiés pour faire la FRANCE !

    (1) Je ne dis pas que cela a hâté sa mort, mais je pense qu’une véritable réconciliation (et non le simulacre auquel nous avions assisté sur certain perron de saint-Cloud) aurait illuminé sa dure agonie. Il le méritait assurément pour avoir sacrifié sa vie et sa santé à son idéa0 et à ses durs combatsl. J’en connais quelques-uns qui   – pour peu qu’il réfléchissent à cela –   devraient avoir mauvaise conscience.(2)  Hélas, la politique, dès lors qu’elle est pratiquée par des femmes et des hommes qui laissent leurs ambitions et leur petites rancoeurs personnelles prendre le dessus, devient quelque chose d’excécrable, et même de nauséabons, même lorsqu’elle prétend servir les intérêts du pays !

    (2) je ne les ai pas vus parmi l’assistance. Il est vrai que qu’il y avait tellement de monde ! Ce qui ne m’a pas empêché d’y apercevoir un Jean-Marie Le PEN et un Bruno MEGRET, sortis d’ailleurs chacun de son côté. Tout un symbole …A qui ou à quoi pensaient-ils pendant la cérémonie. A l’ami perdu ? aux occasions manquées ? ou tout simplement à … eux ?

    17 octobre 2007 à 12 h 23 min
  • EIFF Répondre

    Paix à son âme, Serge de Beketch était un homme libre, droit, courageux, il était la voix de la France française, un insoumis, un révolté, un patriote authentique et véritable qui a défié toute sa vie durant l’Establishment et la pourriture républicaine qui flique et asservit le peuple français.

    17 octobre 2007 à 10 h 34 min

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