Nicolas Bonnal répond sur Ridley Scott et le rétrofuturisme

Nicolas Bonnal répond sur Ridley Scott et le rétrofuturisme

Nicolas Bonnal répond sur Ridley Scott et le rétrofuturisme (*)

 

Couv Riddley Scott

 Pourquoi ce livre sur un cinéaste si commercial?

Je passais l’hiver à Almeria. Il s’est trouvé que Ridley Scott est venu y tourner son film sur l’Exode ! Pour le reste Ridley Scott est un créateur visuel et c’est un réalisateur qui a beaucoup filmé et sur lequel il y a beaucoup à dire. Notre inconscient collectif depuis quarante ans a été façonné par lui. Pensez à Alien (quelle parabole sur nos sociétés…), Blade runner, Gladiateur ou Prométhée. Je pense en outre que le cinéma d’auteur n’a jamais eu grand-chose à dire, alors que les œuvres grand public ont deux ou trois niveaux de lecture. Blade runner aura obsédé ma génération par son aura visuelle, sa rêverie nietzschéenne, sa dystopie cruelle et ses conflits métaphoriques.

 

Justement : qu’est-ce que le rétrofuturisme ?

 Je l’ai évoqué dans mon libre publié en 2000 sur Internet, nouvelle voie initiatique. C’est l’idée qu’à l’ère des jeux vidéo, des réseaux, des labyrinthes, des codes secrets, la Bible, la Genèse, la mythologie, la culture archaïque ont plus à nous apprendre que notre culture littéraire bourgeoise. Cela rejoint la remarque de Kubrick que la littérature de fantaisie nous parle plus que le romanesque. Alien évoque ainsi le minotaure, Blade runner les anges rebelles, Prométhée les géants du ciel et tous les thèmes Illuminati. J’aime aussi la fascination de Ridley Scott pour l’histoire – pensez aux duellistes napoléoniens – et pour le passé mythique. Si son Gladiateur est un grand film musical, ses opus sur le moyen âge relèvent par contre de ce que j’ai nommé les épopées désabusées, des pensums.

 

Y a-t-il un grand Ridley Scott ?

En tant que grand moghol de la pub, il a une dimension luciférienne. Il éblouit et il fait vendre. Il a créé le look Lady Gaga dans le très Illuminati Légende, il a enluminé Apple. C’est aussi un cinéaste « impérial », tant britannique qu’américain – mais moins que d’autres ou que son frère. D’un autre côté, c’est un conservateur initiatique à l’anglaise comme je les aime ; un homme de culture un rien sceptique, mais épris d’aventures, de chevauchées et de navigation. Son film d’apprentissage Lame de fond est un modèle de cinéma politiquement incorrect. Scott défend l’héroïsme et l’imaginaire dans la grande tradition européenne. En même temps, dans tous ses films de science-fiction, il nous a prévenus : nous sommes dévorés tout crus par les grandes corporations. C’est fait. Et quel artiste visuel !

 

Votre approche ?

 Au fil de l’eau, pour le plaisir. J’ai commencé par une étude de son profil, de ses idées, de son esthétique. Ensuite les thèmes entremêlés de son cinéma touffu : la mythologie, l’androïde, l’ascension de la femme, l’épopée ratée. Enfin la conclusion : la référence au cinéma noir, c’est-à-dire l’idée que la civilisation moderne est un piège.

 

Votre film préféré ?

 Le premier, Boy and Bicycle. Le cinéaste révèle tout sur lui. C’est une matrice, une vraie mine. A voir et écouter !

 

(*) Editions Dualpha

 

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Comments (2)

  • Scoubidou Répondre

    “Gladiateur, un grand film musical”…???
    Même si la musique est prépondérante, on a pas dû avoir la même lecture du film M.Bonnal !

    15 mars 2014 à 12 h 26 min
  • Agathe Répondre

    Mythologies et religions nous dépeignent le merveilleux sans leque nous ne pourrions vivre. Et même survivre. Aristote puis les psy nous disent qu’on ne peut rester équilibré sans accorder sa part au rêve.
    Mais en tant qu’être humain adulte, je me dois aussi de rester conscient. Or, qu’adviendra-t-il à des jeunes laissés volontairement sans instruction ? La confusion.

    14 mars 2014 à 22 h 40 min

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