À propos de la retraite des fonctionnaires

À propos de la retraite des fonctionnaires

Les propos que j’ai tenus dans l’entretien que les «4 Vérités» ont aimablement publié le 26 mars, ont provoqué un commentaire de l’un de vos lecteurs, M.Albert Bonnenfant, auquel je souhaite répondre à mon tour.

M. Bonnenfant me reproche de défendre les retraites du privé en attaquant le régime des fonctionnaires: «C’est sans doute la vieille habitude française de lorgner la gamelle du voisin qui est forcément meilleure que la sienne», écrit-il.

Il existe de multiples régimes de retraite, les uns meilleurs que les autres.

Mais la différence entre ceux du privé et ceux de la fonction publique est ailleurs: les premiers sont financés par leurs affiliés, tandis que les seconds le sont par l’ensemble des contribuables.

Je me sens le droit de «lorgner la gamelle du voisin», à partir du moment où c’est moi qui la paie, en plus de la mienne – qui est, en effet, moins bien remplie.

Il ne s’agit pas ici de jalousie, mais de simple justice.

M. Bonnenfant ajoute que l’on ne peut pas «mettre dans le même sac la retraite du fonctionnaire et celle des régimes spéciaux qui correspondent à des entreprises dont l’État est actionnaire ».
Je considère, au contraire, que les régimes spéciaux de la fonction publique et ceux des entreprises publiques sont de même nature : tous sont des régimes dits à «prestation définie», par opposition à ceux du privé, qui sont essentiellement à «cotisation définie».

La différence entre les uns et les autres est essentielle : dans les régimes à prestations définies, le montant des pensions est fixé et garanti par l’État (au minimum 75% du traitement des six derniers mois pour une carrière complète).

Il ne peut pas descendre en dessous de ce seuil.

Dans les régimes à cotisation définie (ceux du secteur privé), au contraire, c’est le niveau de la cotisation qui est fixé, mais pas le rendement du régime.

La baisse des taux de remplacement (montant de la pension par rapport au dernier salaire) y est quasiment générale d’une génération à l’autre, comme l’a montré une étude de l’actuaire Jean-Jacques Algarron, publiée par Sauvegarde Retraites en octobre2015.

« Les fonctionnaires cotisent eux aussi et non fictivement puisque, dans le calcul de leur salaire net, une cotisation pour pension (de 7,85 % avant la réforme de 2010) vient bien en déduction de la rémunération brute », écrit encore votre correspondant.

Or, il se trompe.

Comme l’avait observé en 2003 un haut fonctionnaire du ministère de l’Économie et des Finances, Pascal Gobry, dans son livre «La Grande duperie», le bulletin d’un fonctionnaire se construit «par le bas»: on part du net et l’on y ajoute de prétendues «cotisations» qui ne correspondent à aucun mouvement de fonds réel, pour arriver à un traitement brut fictif.

Ainsi, alors que la réforme des retraites de 2010 a prévu que la retenue sur traitement des fonctionnaires (les prétendues cotisations) augmenterait progressivement de 7,5% jusqu’à 11,20 % en 2020, le traitement net des fonctionnaires ne diminue pas d’un centime.

Au contraire, dans le privé, on établit les feuilles de paie en partant d’un montant brut, duquel on déduit les prélèvements pour arriver au net.
Dans ce cas, toute hausse de cotisation se traduit donc par une baisse du net.

Je relève, pour finir, cet aveu de M. Bonnenfant: «Les retraites des fonctionnaires ne sont donc pas payées par le seul contribuable, mais le fonctionnaire (qui est, lui aussi, un contribuable) y participe largement.»
Je n’en disconviens pas: tous les contribuables, qu’ils soient salariés du secteur privé ou fonctionnaires, paient les pensions de la fonction publique
.
Les salariés et retraités du privé sont ainsi conduits à financer des régimes spéciaux, qui servent à leurs affiliés des avantages dont eux-mêmes ne bénéficient pas.

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Comments (7)

  • quinctius cincinnatus Répondre

    le problème n’ est pas seulement le nombre cumulé et excessif de fonctionnaires mais leur efficacité , en somme le retour sur investissement

    le problème n’ est donc pas l’ impôt en soi – même mais là où il est utilisé et comment il est utilisé

    6 mai 2019 à 15 h 42 min
  • Bernard Mitjavile Répondre

    Le problème, c’est quand le nombre des fonctionnaires et des membres de leurs familles a atteint une masse critique, ce qui est le cas en France, qui fait que toute réforme de la fonction publique pour plus de justice vis à vis du privé et pour réduire les déficits publics sans augmenter la ponction fiscale, du type de celles qui ont été effectuées dans tous les grands pays industriels, devient difficile à réaliser sans avoir à faire face à des mouvements de type révolutionnaire. C’est pour cela qu’il est difficile de critiquer E. Macron de ne pas en faire assez dans ce domaine sans se mettre vraiment à sa place. J’ai entendu Marine Le Pen expliquer que tout cela, c’était la faute à l’Europe et qu’elle résoudrait facilement les questions de retraites et de déficits sans réforme douloureuse de la fonction publique, or ce n’est pas si simple. Bien sûr elle a raison de réagir face à l’immigration massive ou l’insécurité mais pour le reste….

    2 mai 2019 à 8 h 33 min
  • DIZY CLAUDINE Répondre

    Excellente mise au point !

    29 avril 2019 à 9 h 19 min
  • KAVULOMKAVULOS Répondre

    Mr Bonnenfant défend sa gamelle, c’est de bonne guerre. Nous espérons qu’il trouvera, lui, de bonne guerre que nous, du “privé”, voulions cesser de la lui abonder en l’invitant à cotiser effectivement et pas par un artifice qui revient à faire payer son loyer par son voisin. Et quand il écrit qu’il “paie des impots” il devrait dire que nous lui donnons l’argent pour qu’il paie des impots, nuance. Mais, là il n’y aura que la ruine générale qui pourra le mettre au pas. C’est un peu comme les vraies feignasses de la municipalité où je vais de temps à autre en province: je connais bien les zozos et s’il fallait les payer au temps réellement travaillé, ils feraient la manche ( arrêts à tous va, journées du maire, de sa femme, de sa maitresse, de son chien….un vrai festival). Et ça vous prend de haut en plus. Il y en a même une qui a réussit à se faire payer un voyage aux Antilles où vit une partie de sa famille ” pour visite familiale”. Enfin quand je dis se faire payer, disons plutot que les contribuables ont payé sa fantaisie. Demain je vais me trouver un arrière cousin en Australie où je rêve d’aller faire un tour…gratos.

    26 avril 2019 à 19 h 51 min
  • quinctius cincinnatus Répondre

    Mr Bonnenfant doit avoir une pléiade de fonctionnaires dans son entourage familial et peut être est il lui-même un ancien fonctionnaire ou bien alors ignore t il tout de ce qui est son sujet d’ écriture et ce ne serait pas alors la première fois

    25 avril 2019 à 17 h 55 min
  • Gérard Pierre Répondre

    Je viens de retrouver et de relire l’article du 26 mars dernier dont il est ici question. Je n’y ai point trouvé le commentaire de ce monsieur Albert Bonnenfant.

    En revanche, je suis heureux de voir que vous confirmez ici ce que j’ai écrit dans mon commentaire à l’époque, à savoir en substance que ce sont bien les salariés du privé qui subventionnent les retraites du secteur publique, …… sans pour autant bénéficier de leurs avantages !

    Par exemple, pour ma part, salarié retraité d’un groupe industriel privé, après 41 ans et 6 mois ininterrompus de services civils et militaires, ma retraite représente 63% du salaire brut moyen (toutes primes confondues) de mes vingt dernières années d’activité, et ce parce qu’un fond géré par mon groupe industriel apporte un complément aux sommes versées (CRAV + ARRCO + IREPS) pour parvenir à ces 63%.

    Merci de m’avoir conforté par votre mise au point fort bien documentée.

    25 avril 2019 à 11 h 05 min
    • quinctius cincinnatus Répondre

      si j’ ai bien ” situé ” Mr Bonnenfant , celui ci est dijonnais et un Dijonnais c’ est un ” parisien ” de Province pétant toujours plus haut que son cul et prenant les autres … provinciaux, tout comme les bordelais, pour des moins que rien … le problème c’ est qu’ ils ne sont intellectuellement pas grand chose

      27 avril 2019 à 20 h 28 min

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