Fusion des groupes Suez et Gaz de France

Fusion des groupes Suez et Gaz de France

Le projet de fusion des groupes Suez et Gaz de France, annoncé samedi dernier par le Premier Ministre, doit être apprécié sur plusieurs plans.

Pour les actionnaires, sur la base d’une action pour une autre, l’intérêt est très limité. En cas d’OPA hostile, les actionnaires de Suez pouvaient espérer une prime d’au moins 30 % de la valeur de leurs actions…

Au plan industriel, l’opération va être très difficile à mettre en œuvre, malgré la complémentarité des productions, à cause de l’immense différence des cultures. Gaz de France, dont les services commerciaux demeurent communs avec ceux d’EDF, a gardé l’esprit d’une entreprise publique, largement cogérée avec la CGT. Par contre, Suez a une tradition financière et internationale plus que séculaire. La filiale de Suez, productrice d’électricité en Belgique, Tractebel est par ailleurs un concurrent direct d’EDF.

Au plan économique, on voit bien que le nouvel ensemble, fort d’une capitalisation boursière de plus de 70 milliards d’euros devient impossible à avaler par quelque concurrent européen que ce soit. Mais, en terme de création de valeur, on n’a jamais vu qu’une fusion ratée en génère beaucoup. Or, une culture commune n’est pas prêt de faire naître du rapprochement des deux groupes français.

L’affaire est clairement politique. Suez ne voulait pas se laisser racheter par l’Italien ENEL. Le groupe entrait dans le champ du patriotisme économique, récemment défini par le gouvernement. L’ensemble de la technostructure française, largement relayée par les médias, s’opposait à ce projet de raid, avant même qu’il n’ait commencé.

Certes, au plan international, l’effet de cette opération est immédiatement catastrophique. Les dirigeants italiens sont non seulement mortifiés mais sont aussi fondés à considérer que les règles les plus élémentaires du fonctionnement de la concurrence au sein de l’Union européenne sont invoquées par la France quand elles l’arrangent, puis bafouées quand elles la dérangent.
L’opinion publique applaudit à chaque fois qu’un groupe français plante son drapeau sur une terre étrangère. Nos dirigeants sont prêts à tout pour empêcher qu’un étranger, fusse-t-il un amical voisin, en fasse autant chez nous. Tant que cela sera ainsi, ne parlons plus d’Union européenne.

Plutôt que de jouer au Meccano industriel, Dominique de Villepin ferait mieux d’appliquer tout de suite le rapport Pébereau et de rembourser la dette publique.

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Comments (6)

  • sas Répondre

    FUSION ou pas ….le calcul des “frères “est simple…si ca coûte c’est les contribuables….si ca rapporte c’est privé et initié… ca c’est de l’économie simplifié….et c’est pour cela qu’on va se pêter la gueule avec l’ouverture européene et la mondialisation….car nos règles economiques et sociales “de francs maçons” et de monopole ou de délégation publico/privé…..sont des règles de cons dites” d’initiés”….on veut bien jouer ,mais en connaissants les résultats d’avance…est-ce bien compatible avec l’économie de marché concurentielle et libre??? sas qui dit non.

    7 mars 2006 à 17 h 37 min
  • Jaures Répondre

    Assez d’hypocrisie. La seule motivation de cette opération est de privatiser G.D.F sous couvert d’un patrotisme économique qui a bon dos. Une fois de plus les travailleurs en feront les frais.

    6 mars 2006 à 13 h 19 min
  • Jean-Caude Lahitte Répondre

    L’article de Jean ROUXEL développe parfaitement, en langage économique, le dessin publié dans “MINUTE” (01/03/06) et signé Aramis. Ce dessin, sous le titre “Dans le fond, le “patriotisme” économique, c’est simple” faisait dire à Villepin : “Je fais fusionner Suez avec Gaz de France qui fusionne avec la SNCF qui fusionne avec Renault qui fusionne avec Lagardère qui fusionne avec Bouygues qui fusionne avec Havas qui fusionne avec Total qui fusionne avec France-Télécom qui fusionne avec l’Oréal qui fusionne avec Pernod-Ricard qui fusionne avec Videndi qui fusuinne avec PPR qui fusionne avec Axa qui fusionne avec PSA … et après on revend le tout !” J’ajouterai un commentaire personnel : lors de la fusion Suez-GDF, on a évoqué (invoqué serait plus juste !) la différence de cultures thème soulevé notamment par les syndicats et les politiciens qui ont voulu ainsi se tailler à bon compte un costume de “patriote”. Argument repris et développé par l’article de Jean Rouxel. Précédemment, le président (luxembourgeois) d’Arcelor avait invoqué le même argument pour repousser l’OPA d’un industriel indien. Tout cela me paraît plaisant à entendre dans la bouche de politiciens ou de syndicalistes de tous bords qui se moquent passablement de l’avenir des cultures européennes face à leur submersion par une culture qui leur est non seulement étrangère, mais aussi qui se comporte de plus en plus comme un adversaire… Comme on l’a vu encore récemment lors d’un délilé dans les rues de Londres ! De même il paraît surprenant de voir nos politiciens de l’UMPS (UMP = PS = UMPS !)faire front contre une entreprise italienne qui joue loyalement le jeu institué par tous les partisans du libéralisme, que dis-je, de la “globalisation” à tout-vat, dont ces mêmes politiciens sont, avec les traités internationaux qu’ils ont dûment paraphés, les responsables. Ils ont ainsi ouvert la Boîte de Pandore… Et j’évoquerai les réactions américaines (pas seulement celles de l’opinion publique) à l’annonce du rachat de six grands ports américains (dont celui de New-York)* par une société de Dubaï. Ce qui tend à prouver que les “libéraux” ont le sens du fair-play britannique : celui qui consiste à ne garder son sang-froid et sa courtoisie que lorsque l’on gagne ! Oubliant que dans ce nouveau “Grand Jeu”, dont les règles ont été imposées par l’Occident pour développer leurs marchés, sous l’impulsion vigoureuse de l’impérialisme américain ! Et, pour en revenir à la fusion SUEZ-GDF, après voir noté que le président de ce nouvel ensemble sera Gérard Mestrallet -PDG de Suez) je pense que celui-ci saura impulser à ceux qui, au sein de GDF auraient pu conserver un esprit protectionniste, le sens de la compétivité, de la productivité,de l’innovation et de la remise en cause permanente, qui dans la jungle économique sont leur seule chance de survie. Après tout, les tenants de l’immigration à tous vents ne nous répètent-ils pas que le choc des cultures, le melting pot, le “métissage”, sont une chance pour la France ! Encore faudrait-il un “Gérard Mestrallet” pour conduire cet ensemble de plus en plus hérétogène (hétéroclite, aussi !)qu’est devenu notre pays. Cordialement, Jean-Claude Lahitte P.S. Bien entendu, je me réjouis de voir que SUEZ reste dans le patrimoine français. Même si on a dû utiliser pour cela de fausses-bonnes raisons, des arguties, etc. Ce qui ne m’empêche pas, avec un fair-play tout britannique, de saluer nos “amis” italiens ! * il faut reconnaître que George W. Bush, lui, a joué le jeu, en donnant son aval à ce projet de rachat.

    6 mars 2006 à 11 h 09 min
  • Observateur Répondre

    Pour moi cette information montre deux choses : – le sous-développement croissant de la France. Cette affaire est à rapprocher d’autres affaires comme le rachat de Pechiney, une des premières entreprises française en terme de chiffre d’affaire, par Alcan qui a eu pour conséquence de supprimer tous les centres de recherche en France, et de déplacer les centres de décisions vers le Canada. Ainsi, la France devient progressivement un pays du tiers-monde où la recherche et les centres de décisions s’éloignent. – une nationalisation déguisée par une quasi-entreprise publique incompétente (GDF) qui va entraîner la création d’un mastodonte en situation de monopole en France et dont les consommateurs seront les premières victimes. Mais franchement, JE NE VOIS PAS CE QUI EST CONDAMNABLE DE VOULOIR POUR UN POLITICIEN DEFENDRE LES INTERETS DE LA FRANCE ! Condamner toutes idées “nationalistes” en matière politique est aussi totalitaire que l’est le socialo-communiste. Ainsi, il y aurait des pays qui auraient le droit d’être “nationalistes”, comme la Chine, l’Inde, Les USA, le Brésil, le Canada, le Japon… tous très protectionnistes, et la France n’aurait pas le droit de l’être. (Par exemple, les USA imposent aux entreprises d’équipement qui veulent vendre aux USA de produire 40 % aux USA) La conséquence est prévisible : la fuite continuelle de technologie dans le reste du monde, à l’image de la vente de 100 airbus à la Chine devant s’accompagner de la cession à la Chine de technologies de pointe qui permettront à la Chine de produire elle-même des avions à coût moindre; la disparition en Europe et en France en particulier de pans entiers d’industries et de services stratégiques (informatique, électronique, recherche, biologie, banque, services…). Pour moi, il y a deux totalitarismes en France, tous les deux aussi destructeurs, un totalitarisme de gauche (socialiste, communiste, collectiviste, libertaire, altermondialiste, anti-chrétien, laïciste, « anti-raciste » et culpabilisateur,…) et un totalitarisme d’une certaine droite, volontiers alliée à la gauche (immigrationniste, anacho-capitaliste, anti-français et anti-national, multi-culturaliste, pro-islam, libero-mondialiste…). L’UMP-UDF a la particularité de défendre à la fois ces deux formes de totalitarismes (il faut le faire quand même !), … comme les trotskistes d’ailleurs. La totale ! Pas mal pour un parti dit de droite !

    5 mars 2006 à 17 h 15 min
  • Olivarus Répondre

    Actionnaire de Poweo, le petit concurrent alternatif de EDF et de GDF, j’attends que l’Etat fasse respecter la libre concurrence dans ce domaine. Il ne peut être juge et partie, donc son désengagement progressif de GDF sous la menace d’OPA est encore une secousse positive pour les dinosaures soviétiques. On ne sort pas de 58 ans de socialisme facilement, le premier juillet 2007,Poweo, mon entreprise alternative des dinosaures, pourra vendre de l’énergie aux particuliers, comme tout autre opérateur privé qui se lancera d’ailleurs. La libération est en marche, la France sera sans doute le dernier pays à sortir du communisme, mais tout arrive, ne désespérons pas. Liberté concrète contre liberté abstraite. Notre pays se gorge d’abstractions idéologiques vidées de leur côté pratique. On en sort, mais que c’est dur!

    5 mars 2006 à 14 h 29 min
  • gael perdriau Répondre

    pour votre information, les services commerciaux d’edf et gdf sont separes depuis 1999 et non plus communs. restent communs les services techniques de releves de compteurs, d’entretien des reseaux, et de facturation à la clientele domestique, service qui est en cours de demixage. il me semble que ce projet de fusion est une chance historique industrielle et economique pour les deux groupes avec des complementarités evidentes. liberal moi aussi je trouve votre jugement un peu à l’emporte piece cordialement

    5 mars 2006 à 11 h 07 min

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