La crise financière : seuls comptent les résultats

La crise financière : seuls comptent les résultats

N’étant pas financier, je me garderai d’analyser la crise actuelle qui secoue le monde. Je laisserai cela aux spécialistes qui inondent les médias de leurs commentaires et prévisions. Je me risquerai seulement à dire que cette crise très grave s’explique parce que nulle part, États, banques, particuliers, n’ont respecté cette règle fondamentale : il ne faut pas dépenser plus que ce que l’on a dans son porte-monnaie.

C’est l’abus du crédit qui a conduit à la banqueroute dont on est loin de connaître toutes les conséquences. Car voici ce qui se passe. Nous vivons depuis un demi-siècle sous la dictature insidieuse et multiforme de la société de consommation. La publicité, qui est son bras armé, nous assène à chaque heure de la journée qu’il serait bon d’acheter des maisons, des appartements, des voitures, des bateaux, de partir en croisière et, si possible, de ne rien faire. L’intoxication comme la drogue produit alors ses effets. Pourquoi n’aurais-je pas une maison à moi ? Pourquoi n’aurais-je pas une deuxième résidence ? Pourquoi n’aurais-je pas une puissante voiture haute sur pattes, qui coûte très cher, consomme beaucoup d’essence et pollue beaucoup ? Pourquoi n’aurais-je pas une télévision à grand écran plat ?

À ce propos, je dois avouer, mais sans honte, que je n’ai pas de télévision à grand écran plat. Mais ce que j’ai me suffit amplement pour voir et entendre qu’en France, les fondamentaux sont sains, la croissance est et sera là, la crise financière n’affectera que les États-Unis… Cette croissance que le président de la république et du pouvoir d’achat a été cherché avec les dents. Comment peut-on à ce point se moquer du monde ou se tromper ? Ceci dit, l’objectivité commande d’écrire que Nicolas Sarkozy en sa qualité de président de l’Union européenne vient de faire preuve en cette affaire de dynamisme et d’initiatives probablement efficaces, mais il aurait mieux valu prévenir que guérir.

Toujours est-il que le système est tel que les particuliers s’endettent parce qu’on les pousse avec vigueur à s’endetter. Ainsi a-t-on en France une majorité d’endettés, plus de 50 % des ménages avec 186 000 surendettés dont les dettes seront finalement payées par ceux, économes et sensés, qui, eux, ne sont pas endettés. Les fourmis doivent nourrir les cigales.

Les États agissent depuis 50 ans de la même manière, mais pour des motifs différents que l’on peut résumer d’un mot : la démagogie. « Voyez tout ce que je vous donne, chers concitoyens, mais votez pour moi qui suis si bon avec l’argent des autres. » Ainsi un tiers de la richesse totale produite chaque année en France par tous ceux qui travaillent, agriculteurs, ingénieurs, ouvriers, commerçants est redistribué par l’État à ceux qui ne produisent rien, ce qui est un encouragement formidable à tendre la main. Les Français ne suffisant pas, on a appelé toute la misère du monde, les plus pauvres et les plus incompétents, en prenant soin d’oublier qu’une telle redistribution entrave la compétitivité économique et réduit la croissance. Alors, ne nous étonnons pas que nous soyons au bord de la ruine. Si la France, celle des travailleurs, des épargnants après toute une vie de travail, des honnêtes gens pouvait parler, on l’entendrait dire : « L’État-Providence m’a tuer ! ».

L’État est donc en faillite depuis longtemps. La crise financière actuelle, en d’autres termes, le retour douloureux à la réalité, met fin au rêve. De nombreuses entreprises accablées d’impôts, de paperasseries sans fin, privées de crédit, vont fermer. Le chômage va augmenter et donc les finances publiques encore se dégrader. Des troubles sociaux peuvent survenir, aggravés par des facteurs ethniques dans les quartiers « sensibles » et les zones qui pratiquement ne sont plus la France, mais le tiers-monde.

Il reste à savoir aussi, la France officielle empruntant à longueur de mois des milliards d’euros pour fonctionner, si elle trouvera toujours des prêteurs. Je précise, à ce sujet, que l’agence France-Trésor, qui gère la dette de l’État, devra emprunter sur les marchés financiers à travers le monde plus de 140 milliards d’euros pour couvrir le nouveau déficit public annuel de 52 milliards d’euros et rembourser la part de la dette qui viendra à échéance en 2009.

Alors, on me dit : « N’exagérons pas. Nombreux sont les États qui comme la France ne sont pas administrés sérieusement et se trouvent dans une situation analogue. » C’est vrai pour quelques-uns et non des moindres : la dette publique américaine atteint 10 000 milliards de dollars. Mais il en est tout de même qui sont bien dirigés. C’est le cas de l’Allemagne, aux finances saines malgré le poids très lourd de la réunification, du Danemark, de l’Irlande, de la Chine…

On me dit aussi : « Vous êtes pessimiste. Vous ne connaissez rien à la science financière. Avec des logiciels miraculeux, des formules mathématiques aussi secrètes qu’éblouissantes, des ordinateurs surpuissants au service de l’ingénierie financière, la magie moderne, on produit des richesses phénoménales. » Ainsi la masse d’argent (virtuel) créée par des produits dérivés représente quelque 350 000 milliards d’euros, alors que la richesse concrète correspondante est évaluée à 45 000 milliards ! On voit aujourd’hui ce qu’ont produit en réalité ces extraordinaires usines à gaz plaquées or : pour beaucoup une cruelle désillusion, sinon la ruine, et pour tous l’angoisse du lendemain. La règle simple et sûre a été oubliée : ne pas dépenser au-delà de ses avoirs.

Et, bien sûr, cette crise va accélérer la paupérisation de la France qui, depuis des décennies, vit bien au-dessus de ses moyens, un appauvrissement déjà bien engagé en raison d’une fiscalité écrasante qui va encore s’alourdir. « Il faut bien prendre l’argent là où il y en a encore ». Contribuables, prenez garde et préparez-vous pour 2009 !

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Comments (4)

  • UN chouka Répondre

    Monsieur Lambèrt ,ecrit bien mieux que moi, ce qui est a l’évidence une sagesse basique ,vérifiable par ceux qui mènent leurs affaires concrètes ?

    Devons nous oublier que "nos industries" productrices  se sont enfuies depuis ,si je ne me trompe pas,dans les années 70/80 ,sans que tous ceux qui s’en rendaient compte ,ne réagissent fèrmement  ?

    Cèrte peut avant  la deuxième guerre mondiale, ce fut ,il me semble le meme schémat ?

    Il y en a eu d’autres bien sûr ?

    Aprés ce massacre, comment s’étoner que les travailleurs d’alors  (cotisants),soient devenus des gens démunis (ayants droit ) a la "charge de l’état ",pour une bonne part  ?

    Deviendront ‘ils des "compatriotes contrains" ,pour des intérets qui les avaient oubliés jusque là ?

    Cet état qui se désengageant , se met a la "dette mondiale " pour calmer les opposants crédules (travailleurs ) qui deviènent inutiles et impuissants ?

    L’Argentine peut etre un bon exemple ?

    Cèrte, sans cette manipulation grossière,le choc aurait eu lieu bien plus tot peut etre ?

    Qu’est ce "gouvèrnement " qui fait passer en priorité les invèstisseurs boursicoteurs avant de se demander comment il financera l’ordre public  ( la structure sociale du tous ensemble )? 

    Le bon "chacun pour soit " aurait ‘il dû  prévaloir  sur le" tousensemble " verreux ?……………………………………………………………..ETC………………………………………………ETC.

    21 octobre 2008 à 8 h 33 min
  • HansImSchnoggeLoch Répondre

    <<Economie, science exacte? Prix Nobel d’économie? pourquoi pas un Nobel de Poker? Les chances de gagner doivent être sensiblement les mêmes….>>

    L’économie n’a jamais prétendu être une science exacte *). C’est bien le comité d’attribution des prix Nobel qui a décidé d’inclure cette discipline dans sa liste. Il aurait mieux fait d’y inclure un prix pour les entrepreneurs méritants, ceux qui se battent tous les jours pour que l’humanité ait quelque chose à a se mettre sous les dents.

    Pourquoi ne pas créer un anti-Nobel pour les gouvernements cafouilleurs? La France serai sûre de remporter le prix tous les ans!

     

    *) c’est plutôt les tripes des gugus boursicotiers qui déterminent les hauts et les bas de l’économie. Un prix de biologie serait certainement plus adéquat.

    20 octobre 2008 à 21 h 56 min
  • grutjack Répondre

    Cette semaine, tous les collaborateurs des 4V abordent le même sujet : la crise financière. Il est caractéristique de constater que le meilleur article, celui de Christian Lambert, à la fois modeste ("je ne suis pas financier") et clairvoyant, n’ait inspiré jusqu’ici aucun commentaire. Visiblement, beaucoup de gens aux 4V pratiquent la politique de l’autruche: enferrés dans leurs théories, ils refusent d’admettre l’évidence. Lorsqu’on est confronté à un désastre, il est tentant de trouver des boucs émissaires. A d’autres époques, on aurait accusé les juifs ; aujourd’hui, on préfère s’en prendre à Jimmy Carter, aux démocrates, à la Fed… Bien sûr, ces messieurs ont commis des erreurs, mais ils sont loin d’être les seuls. Quand on voit George Bush, l’idole des libéraux, procéder à une nationalisation partielle des banques américaines, quand on entend Sarkozy, l’ami des milliardaires, et McCain, l’héritier de Bush, dénoncer la rapacité des banquiers, ne doit-on pas reconnaître que quelque chose ne tournait vraiment pas rond ? Sans entrer dans la querelle de la déréglementation, je crois, avec M. Lambert, que les milieux financiers auraient dû observer une règle d’or, qui est simplement une règle de bon sens : on ne prête qu’à ceux qui ont une chance raisonnable de rembourser. J’ajouterai aussi qu’on ne doit pas essayer de prêter de l’argent à ceux qui n’ont ni l’envie ni le besoin d’emprunter. Or, nous vivons dans un monde où la carte de crédit est devenue pratiquement obligatoire et où il est de bon ton d’en posséder quatre ou cinq. Le slogan "buy now , pay later" , lancé après la deuxiéme guerre mondiale, est devenu obsessionnel. Pour comprendre la gravité de la crise, pensons à ce qui est arrivé à l’Islande. Là bas, non seulement les trois banques du petit pays ont dû être nationalisées en catastrophe, mais l’Etat lui-même est sur le point de déposer son bilan. Pourtant, s’étonnait Le Monde il y a quelques jours, l’Islande était un des pays les plus prospères du monde. Comment un pays "prospère" peut-il sombrer dans la faillite ? Il n’y a qu’une seule explication : il s’agissait d’une fausse prospérité ; tous les Islandais vivaient au-dessus de leurs moyens. L’Islande était un microcosme de ce qui se passait partout ailleurs, à commencer par les Etats-Unis. Ce qui est artificiel finit toujours par s’effondrer.

    17 octobre 2008 à 20 h 15 min
  • VITRUVE Répondre

    AVE

    cher Monsieur Lambert

    vous pouvez rester serein et garder la tête haute: même les financiers et les économistes les plus férus et médaillés ont été incapables de prévoir et pire, aujourd’hui, de prescrire le traitement à cette forte crise.

    Economie, science exacte? Prix Nobel d’économie? pourquoi pas un Nobel de Poker? Les chances de gagner doivent être sensiblement les mêmes….

    VALETE

    17 octobre 2008 à 16 h 32 min

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