La logique du marché

La logique du marché

On médit souvent de la logique du marché en dénonçant la course effrénée au profit des entrepreneurs capitalistes.

Nul altruisme, nulle solidarité de la part des entrepreneurs, si ce n’est pour afficher des bons sentiments vendeurs leur permettant de rogner davantage encore de parts de marché.

L’égoïsme le plus abject, qui remplace le cœur par le tiroir-caisse, vous choque, soit ; mais on vous répondra : « il faut bien vivre », et qui sommes nous pour reprocher à d’autres des travers si humains ? Car ainsi va le monde, et le désintéressement pur n’existe pas sur cette terre.

D’ailleurs, est-il si épouvantablement dramatique que notre comportement soit mû principalement par le soin que nous portons à nos intérêts ? Souffrons nous de ce que Bill Gates soit devenu multi-milliardaire ? Nous plaignons-nous de ce que des inventeurs un peu toqués aient permis de nous fourguer téléphones, disques, téléviseurs, lave-linges et autre objet aussi inutiles, dont l’humanité s’est dispensée pendant des millénaires ?

La réponse est évidemment non ; la fortune des uns n’aurait pas été possible sans la satisfaction de nos besoins par la mise à disposition à titre plus ou moins onéreux de leurs produits manufacturés.

Eh oui, n’en déplaise aux altercomprenants, la logique du marché met le plus souvent en présence les deux parties que sont l’offreur et le demandeur, qui s’entendent sur une transaction aussi longtemps qu’elle leur permet de satisfaire leur intérêt. On se situe là dans ce que l’on appelle un jeu à somme positif c’est-à-dire un échange gagnant-gagnant. Cela est bien évident car qui accepterait de conclure librement une transaction qui ne répondrait pas à ses intérêts ?

La logique de l’État

L’affaire se complique quand, au nom des bons sentiments, de la justice sociale, des services publics ou autres prétextes plus ou moins foireux, l’État se mêle de faire notre bonheur, ou plus exactement le bonheur de certains. Les premiers bénéficiaires de l’intervention de l’État sont d’abord ceux qui le représentent : les politiques, puis ceux qui en vivent : les fonctionnaires. Les uns et les autres sont alors payés par la population pour rendre des services publics toujours plus nombreux dont l’incertain caractère indispensable ne saurait faire de doute pour l’opinion publique, ce qui est la condition sine qua non de perpétuation et de développement des services publics.

Cependant, nous ne nous situons plus là dans une logique de marché, aucune valeur supplémentaire n’est créée. Nous n’avons pas affaire à un jeu à somme positive, mais au mieux à une situation où ce que les uns gagnent, d’autres le perdent, autrement dit un jeu à somme nulle. La fiscalité est alors nécessaire afin que la population puisse être contrainte de régler des services dont elle se serait détournée sur un marché libre.

Tout le jeu de l’État et de sa classe de fonctionnaires consiste donc à légitimer les services publics. Pour cela, il convient d’en exagérer le gain perçu par la population et d’en minorer le coût dans l’opinion publique. Toute la superstructure étatique est mobilisée dans ce but : l’Éducation nationale, les média faussement indépendants, la magistrature, les partis politiques, les syndicats conditionnent assez grossièrement la population non seulement à l’acceptation des sévices publics imposés, mais surtout à leur développement par une mise en accusation de la logique alternative du marché.

Un service public emblématique : l’aide à l’enfance

Un exemple, presque caricatural de ce sévice public est celui de l’aide à l’enfance. On y retrouve les quatre parties que sont la population contribuable, qui forme peu ou prou l’opinion publique, les politiques, les travailleurs sociaux et les familles.

Qui gagne à ce jeu ? Les travailleurs sociaux assurément ; les familles, elles, pour de fausses maltraitances, sont brisées, aussi bien parents qu’enfants ; quant aux contribuables, ils offrent de plus en plus de moyens et de privilèges aux travailleurs sociaux dont les prérogatives s’étendent aux détriments des libertés individuelles et au mépris du principe de subsidiarité. Ce qui est perdu là ne se calcule pas seulement financièrement, mais en termes de libertés fondamentales ; ce qui se gagne n’est pas seulement un budget, mais des pouvoirs illégitimes octroyant des privilèges à une classe de fonctionnaires, soutien du régime de l’Etat-nounou.

Nous nous situons bien dans la logique publique d’un jeu à somme nulle : ce que les uns gagnent, les autres le perdent. Pour que ce jeu ne soit pas dénoncé par une des parties perdantes, il faut donner à chacun l’impression de profiter de ce sévice. Les réalités doivent être cachées et, en matière de propagande, les travailleurs sociaux jouent à fond l’image de la générosité, d’une part contre l’institution familiale présumée source de maltraitances, d’autre part pour les cas sociaux réellement maltraitants, mais victimes d’une société pas encore totalement étatisée.

Les politiques de gauche profitent du développement du secteur social à l’enfance, où ils trouvent leurs soutiens les plus acharnés.

Les politiques de droite jouent un jeu semblable pour le même motif d’extension des prérogatives publiques, avec tout de même une volonté de favoriser d’autres services qui leur sont moins hostiles, tels ceux liés au maintien de l’ordre. Dans le secteur social, ils n’ont pas les coudées franches face à des syndicats proches de l’extrême gauche qu’ils ne souhaitent pas se mettre trop à dos. Ils n’hésitent donc pas à les brosser dans le sens du poil et quelquefois, par une volonté de changement d’image, la droite favorise ce secteur en cherchant à capitaliser une image de sensibilité dans l’opinion.

Pour que le jeu s’arrête, il faut que l’opinion publique soit informée sur les bavures des services sociaux à l’enfance, mais prenne aussi conscience de leur coût véritable, en termes non seulement financier, mais aussi en termes de liberté.

Remettre à leur place ces services, c’est donc chiffrer leur coût véritable, les privilèges de leurs agents et également les pertes de prérogatives de l’institution familiale, ainsi que la mise sous sujétion de la population, résultant de l’extension du domaine public dans un secteur qui relève de l’intime.

Xavier Collet, sur une suggestion de Félicia

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Comments (3)

  • Bourbonnaise Répondre

    Bien vu. Et c’est un lent glissement qui progresse de façon sournoise.

    26 juin 2010 à 10 h 34 min
  • François Répondre

      REMARQUABLE.

    26 juin 2010 à 9 h 48 min
  • ozone Répondre

    NUL

    25 juin 2010 à 20 h 22 min

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