La sortie de crise n’est pas pour demain

La sortie de crise n’est pas pour demain

Des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour annoncer une sortie de crise prochaine. Les décisions du G20 (et notamment les 1000 milliards de dollars supplémentaires accordés au FMI pour aider les États en difficulté) ont, semble-t-il, convaincu politiques et journalistes que le creux de la vague était derrière nous. La chose me paraît possible, mais peu probable.

Possible, car ce qui compte en effet pour sortir de la crise, c’est de restaurer la confiance des investisseurs. Si ceux-ci sont désormais majoritairement persuadés que la crise touche à sa fin, ils réinvestiront et, de fait, conduiront à la fin de la crise.

Cependant, ce scénario me semble peu probable. D’abord, parce qu’il est fréquent, lorsqu’une bulle spéculative éclate, d’observer une première chute, une timide remontée, puis une nouvelle chute. Cela s’explique aisément : beaucoup d’entre nous estiment (à mon avis, à juste titre) que la crise actuelle a sanctionné injustement des valeurs industrielles de grande qualité et que la crise nous offre l’occasion de les acquérir moins cher que leur valeur réelle. Ne donnons qu’un exemple : les actions L’Oréal se vendent actuellement autour de 51 euros, alors qu’elles frisaient les 80 euros voici un an ; pourtant, la société a annoncé une croissance en 2008. Il est donc logique d’estimer que l’on peut acheter ces valeurs « en solde ».

Ce comportement devrait entraîner mathématiquement une remontée de la bourse, donc de la confiance des investisseurs, qui elle-même accentuera la remontée de la bourse… Mais, je doute que l’ensemble des actifs « pourris » aient été éliminés du marché mondial et cette euphorie risque donc d’être cassée par l’annonce d’une ou plusieurs mauvaises nouvelles. La chute serait alors probablement plus forte encore que celle que nous venons de connaître.

Naturellement, ce ne sont que des scénarios possibles, nullement des certitudes. J’ajoute que j’aimerais me tromper.

Cependant, une chose est certaine. Nous sortons, collectivement, extrêmement affaiblis de cette première année de crise. Nous sommes tous d’accord pour dire que la bulle spéculative a principalement été une bulle de l’endettement. Or, loin de réduire notre endettement, nous l’avons colossalement aggravé. C’est pour cela que bon nombre de lecteurs et chroniqueurs des « 4 Vérités » ont émis des doutes sur les divers plans de relance et sur les décisions du G20. Si ces plans et ces décisions suffisent à restaurer la confiance, nous applaudirons volontiers.

S’ils ne suffisent pas, nous serons dans une situation pire qu’avant. La dette publique française s’est ainsi aggravée pour atteindre 1 285 milliards d’euros (hors provision pour les retraites de fonctionnaires).

Et cela devrait s’aggraver, puisque le déficit public prévu pour 2009 est de 80 milliards d’euros (sans compter l’amortissement des dettes de l’État qui fait tout de même passer les besoins de financement à 192 milliards – chiffre officiel !). Tout cela sans parler des engagements de l’État, qui cautionne désormais les banques et plusieurs grandes sociétés pour une valeur de l’ordre du budget annuel de l’État. Bref, en un an, l’État français, pourtant déjà prodigue, a largement accentué sa fragilité.

Dans le même temps, les ménages français ont connu une régression de leur patrimoine
. L’épargne privée ne couvrira donc pas – loin s’en faut – l’endettement public. Dans ce contexte extraordinairement tendu, la moindre mauvaise nouvelle pourrait avoir des conséquences encore plus graves que l’annonce de la crise des subprimes.

Un autre élément doit être pris en compte. La reprise repose largement sur un coût du crédit très bas. Cela pousse, non à l’épargne et à l’assainissement des finances publiques et privées, mais à l’endettement. Nous allons donc vraisemblablement nous rendre de plus en plus vulnérables à la moindre mauvaise nouvelle.

Ajoutons à cela qu’il existe un oligopole mondial des agences de notation. Il est par conséquent assez vraisemblable que la dégradation ou l’amélioration de la « note » d’une dette (de particulier, d’entreprise ou d’État) soit au moins autant un choix politique qu’un résultat économique.

De là à imaginer que les États trop lents à s’aligner sur la « gouvernance économique mondiale » dont rêvent les « élites » pourraient se voir sanctionner brutalement par une détérioration de leur note, donc une hausse du coût de leur crédit, et bientôt une faillite, il n’y a qu’un pas !

Nous n’en sommes pas là, mais ce dernier scénario ne me semble pas plus invraisemblable qu’une sortie de crise au cours de l’année 2009…

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Comments (3)

  • IOSA Répondre

    Ce qui est certain…C’est qu’après la pluie vient le beau temps et la multiplication des prédictions selon la loi de probabilité fera le reste.

     

    28 avril 2009 à 1 h 43 min
  • Daniel Répondre

    Une leçon qui n’est pas comprise a besoin d’être répétée. 

    La question est:  qu’apporte la bourse à la personne humaine? Qu’apporte-t-elle à la communauté? et combien de personnes a détruit, détruira  la bourse, pourquoi et comment?

    25 avril 2009 à 11 h 18 min
  • HansImSchnoggeLoch Répondre

    En dépit  des discours officiels embaumants qui dissimulent mal la panique qui s’est emparée des dirigeants, cette crise va durer. Comme on dit en language commercial de Wall Street "it will get worse before getting better".
    Les dettes colossales qui se se sont accumulées, il faudra bien les rembourser. Par qui? Pardi, par les seuls qui sont occupés dans des emplois marchands. La "fonctionaille", elle qui ne fait que consommer les fonds publics n’aura pas à s’en soucier.
    Les impôts atteindront bientôt des sommets astronomiques à tel point que cela va dégouter les derniers travailleurs de ce pays. Faites cracher les bobos et les fanatiques de Libé en premier, eux qui trouvent chic de payer des taxes.

    23 avril 2009 à 13 h 40 min

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