Le scandale du Rafale vu de droite

Le scandale du Rafale vu de droite

Une fois de plus le prestigieux avion Rafale a été refusé à l’exportation. C’est un peu comme le TGV, autre merveille de l’industrie nationale, dont, peu ou prou, personne n’a voulu, comme si les étrangers n’étaient pas capables de construire un train ou un avion de guerre.

Jusque là, rien que de très normal : nous sommes dans la perspective du coq hérétique et de l’exception française telle que je l’avais décrite il y a quinze ans dans un ouvrage promis à peu de succès. On ne change pas un modèle qui ne marche pas.

Mais l’affaire Rafale est plus intéressante. Et aussi plus scandaleuse. Car depuis quand l’Etat français doit-il faire la fortune de la famille Dassault ? Du temps de Marcel (Dassault) les Mirage s’exportaient dans le monde entier, profitant du génie de nos ingénieurs d’alors, profitant sans doute aussi de la métapolitique gaulliste qui donnait une image plus grandiose et plus libre de la France que l’hexagone actuel. Mais depuis vingt ans, le produit Dassault ne se vend plus nulle part, et c’est au contribuable français de payer et d’essuyer les pots cassés d’une entreprise privée.

Cela est d’autant plus curieux et scandaleux que la famille Dassault, comme tous les mendiants ingrats qu’évoquait le grand Léon Bloy, ne cesse de hurler contre l’interventionnisme de l’Etat, la politique sociale de l’Etat, l’humanitarisme de l’Etat. Et de tempêter dans sa presse, qu’elle a fort nombreuse (la nommera-t-on ? j’aurais peur de nuire à mes nombreux amis qui y travaillent !), contre le RMI, l’ISF, le SMIC et toutes les lois sociales qui garantissent aux pauvres leur trop d’argent !

« vous fournissez les armes, je fournis la guerre »

On se croirait en Amérique, pays dont les idiots nous croient si éloignés : les riches oligarques ont un Etat à leur botte, promeuvent des politiques antisociales (pourquoi pas d’ailleurs ? Trop de social tue le social, on le voit bien en Espagne ou ailleurs) et surtout des guerres pour leurs opérations militaires.

Bill Bonner l’économiste libertarien qui est aussi le possesseur de mon éditeur Les Belles lettres, trouve un peu chère l’addition de la lutte contre le terrorisme promue par la défunte administration Bush : 2 000 milliards de dollars ! Tout cet argent et tous ces morts pour faire de Bagdad la ville la moins sûre du monde (les plus agréables, soit dit entre parenthèses d’après les classements actuels, sont les villes germaniques : Vienne, Munich, Zurich…). Certes, mais que ne ferait-on pas pour enrichir Halliburton, les marchands d’armes et les mercenaires ! Ou pour assurer l’approvisionnement pétrolier aux Chinois qui ont raflé la mise (car il n’y a même plus de pragmatisme dans la diplomatie américaine) en Irak !

C’est là que je trouve un autre point de jonction avec la France de l’actuel président, toujours plus menaçante et va-t-en-guerre : car pourquoi avoir déclaré la guerre à la Libye ? Ce pays nous envahissaitil ? Posait-il des bombes sur notre sol ? Nous avait-il manifesté une quelconque hostilité ? Mais ce n’est pas tout : nous allons aussi déclarer la guerre à l’Iran (comme le voulait Kouchner, agent de change humanitaire de la maison Soros) et à la Syrie. En attendant la Russie ? Et tout cela pour satisfaire qui ?

On se souvient de la phrase de Hearst, prélude à l’impérialisme américain (vol de Cuba et des Philippines à l’Espagne en 1898, en se basant sur un faux attentat) : « vous fournissez les armes, je fournis la guerre » ; la guerre via la presse, s’entend. Aujourd’hui nous avons les mêmes prestataires de services puisque ce sont les marchands d’armes (Hachette et Dassault en France) qui tiennent les médias. Et nous avons besoin de guerres pour faire miroiter nos armures chevaleresques et nos avions invendus. Le calcul économique est bien sûr catastrophique : appauvrir tous les contribuables pour enrichir une poignée de marchands. Rien de nouveau sous le soleil, dira-t-on : et que ne fera-t-on pas pour assurer la victoire de la démocratie en Egypte ou ailleurs, régime qui assure la victoire des islamistes et des salafistes dans tout le pourtour méditerranéen ?

Dans son édition du 1er décembre Le Monde estime chaque Rafale à 140 millions d’euros, payés rubis sur l’ongle par le contribuable. Dans mon livre Mal à droite, soigneusement occulté par les médias, j’avais estimé le coût de l’opération à 70 milliards d’euros, dont le but n’avait été que de faire quelques heureux… qui nous demandent en revanche comme Goldman Taxes et les banques de payer les vêtements dont ils nous ont dépouillés. Cette société néolibérale ou néo quelque chose est un vrai compte de fées, pardon un compte de faits ! Et l’on comprend mieux les enjeux de la crétinisation par la technologie que j’ai déjà évoquée.

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Comments (9)

  • laurent simon Répondre

    François a (malheureusement ?) raison : vous semblez vous aventurer sur un terrain que vous ne connaissez pas. Et ses autres remarques sont également pertinentes.

    Vous pouvez lire mon article : "Pourquoi le Rafale peut l’emporter en Inde"
    http://europeagenda2010.free.fr/article.php3?id_article=221

    qui contient de nombreuses infos, notamment sur le coût du programme Rafale, par rapport au JSF F35 américain, ou par rapport à l’Eurofighter, qui ont tous les deux explosé, avec les délais…

    Cordialement,
    .

    13 décembre 2011 à 15 h 26 min
  • CENTLEM Répondre

    Je croi/s utile de dire que je ne suis pas connaisseur en matière d’aviation – pourquoi l’avion de DASSAULT ne trouve pas acheteur ? est-il possible d’avisager une autre voie que celle du coût ? si oui je propose la décision désastreuse du Général DE GAULLE quant à l’embargo sur certaines commandes à destination d’Israel – surtout lorsque celui ci est décrété à des moments scabreux pour un pays. Bien cordialement à tous.

     

     

     

     

    13 décembre 2011 à 13 h 25 min
  • quinctius cincinnatus Répondre

    Le conformisme à la pensée unique ,  bien pensante et politiquement correcte règne en maitre sur certains esprits …
    Ceci explique sans peine l’état auquel la Nation est rendue …

    13 décembre 2011 à 12 h 36 min
  • HansImSchnoggeLoch Répondre

    Petite anecdote:
    Le Gripen est fabriqué par le groupe suédois SAAB. Or le secteur automobile de cette société a été racheté dernièrement par la Chine pour 1.5 milliards de dollars. Dans le besoin le gouvernement suédois pourrait aussi vendre le secteur aéronautique au même pays, qui sait?
    Cela ferait alors du Gripen un appareil chinois.

    13 décembre 2011 à 10 h 06 min
  • Anonyme Répondre

     

    Comme François, je ne vois pas trop où serait le scandale. Si nos militaires sont assez mauvais juges de leurs besoins pour acheter un avion trop beau et trop cher pour eux, c’est en effet un surcoût inutile pour le contribuable.

    Ce qui est plus inquiétant est de constater que personne au monde ne juge le rafale avoir un rapport performances/prix suffisamment haut pour en commander quelques uns. Il y a beaucoup de pays qui pourraient se le payer et qui ne le font pas. Il est donc extrêmement probable que le rafale est aussi trop cher pour ce qu’il peut faire.

    Mais enfin, Dassault n’a jamais pu casser les prix pour descendre au niveau qui rendrait l’avion compétitif sur les marchés externes et ce malgré tout le "gras" qu’il aurait accumulé sur le dos du contribuable français. Ceci est donc en soi rassurant car cela veut dire qu’il n’est pas possible à cette entreprise privée de gagner de l’argent en cassant le prix. Donc l’armée de l’air française a payé le "vrai" prix et de plus dispose bien d’un outil exceptionnel.

    L’avion coûte donc très cher "par construction", et si "scandale" il y a, rien n’est évident de l’extérieur.

    12 décembre 2011 à 23 h 53 min
  • gilles Répondre

    Article bien lisible de M. Bonnal, pour une fois ne mélangeant pas le Marsupilami, Wilhem Furtwaengler et John Wayne pour la même cause.

    Même si François a raison de faire remarquer que l’Etat français est le premier acheteur de Dassault afin de faire régner les droits de l’homme en Lybie ou en Afghanistan, on a l’impression que les premiers bénéficiares des subsides de l’Etat sont les riches. Même si c’est pour la bonne cause, car ils ont des usines, des magasins, des banques, font travailler les Français, etc…, finalement eux restent riches et nous devenons (ou restons) pauvres. D’où sentiment de frustration et de dépossession (en fait on se fait posséder) préalable à toute révolte.

    12 décembre 2011 à 21 h 34 min
  • ozone Répondre

    Surtout que entre les années de conception de cet avion et maintenant la "guerre froide" a pris fin,les USA se sont trouvé dans la méme situation avec leurs sous marins d’attaque Seawolf prévus a quelques dizaines d’éxemplaires en sont rester a quatre tout simplement pour ne pas fermer leur dernier chantier de construction de ces machines,c’est la loi du genre,si vous fermez et qu’ensuite vous avez besoin de reconstruire c’est plutot hasardeux une fois ingénieurs et ouvriers partis a droite et a gauche.

    Ou alors on entre dans la coopération internationale pour obtenir un produit pour satisfaire des besoin contradictoires,cela revient aussi chér est l’on à a la sortie un canard plus ou moins correcte,en général plutot moins.

     

    12 décembre 2011 à 20 h 59 min
  • quinctius cincinnatus Répondre

    le Rafale aurait été un excellent produit d’exportation comme appareil embarqué ( aéronaval )  , malgré son moteur manquant singulièrement de puissance et  surtout sa faible autonomie "technique" ( les révisions doivent être plus fréquentes que chez ses concurrents) et son prix exorbitant , sans compter son électronique et son armement actuellement dépassé ( c’est le Charles De Gaulle du ciel ! )Il semblerait , aussi , que l’armée de l’air française ait voulu en avoir le monopole d’utilisation en sachant qu’elle désirait dans les années 90 mettre sous son joug l’aéronavale … cela n’enlève rien à la pertinence de l’article : c’est le contribuable qui enrichit l’immobilière Bloch – Dassault …enfin rappelons à @ François que le Général Coppel , le plus brillant de nos aviateurs , démissionna par ce qu’il était en désaccord avec le pouvoir militaro-politique

    12 décembre 2011 à 17 h 54 min
  • François Répondre

      Monsieur Bonnal, je crains que vous vous aventuriez sur un terrain que vous ne connaissez pas.

      Les avions de chasse, navires de guerre, chars, hélicoptères militaires, bref tous les grands programmes de défense sont des commandes de l’état français à ses industriels. A ce titre, l’état en paye le développement et achète la quantité de matériel qu’il a demandé à ses industriels de construire pour lui.

    Je ne vois là rien d’anormal ni de répréhensible. Si ensuite l’industriel arrive à vendre son produit à l’export, tant mieux et l’état arrive via les taxes diverses à récupérer une partie de sa mise. Mais au départ, construire de l’armement a pour finalité d’assurer notre défense, il ne faut pas l’oublier… Et cela se passe de la même façon dans tous les pays qui produisent de l’armement.

     Enfin, si c’est au contrat Suisse que vous faites allusion, le Rafale et le Grippen ( choisi par les Suisses) ne jouent pas dans la même cour, ni en terme de performance, ni par voie de conséquence en terme de prix. Un peu comme une entreprise voulant se rééquiper en véhicules choisirait la clio et pas la BMW…Ce sont toutes deux des voitures, mais ce n’est pas la même chose. Et le Grippen n’arrivera jamais à remplir les missions du Rafale avec son efficacité.  Mais cela peut peut être suffir aux Suisses, c’est leur choix.

    12 décembre 2011 à 14 h 56 min

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