Le xxie siècle : une ère de pénurie

Le xxie siècle : une ère de pénurie

Le xxie siècle devait être religieux ou ne pas être : il ne sera certainement pas religieux sauf s’il se termine avant terme en catastrophe. Mais pour l’instant, il est surtout matérialiste : nous nous étions habitués à un monde où ne consommaient que les Blancs, accompagnés des Japonais : il faut maintenant se mettre à table avec les Asiatiques, les Latinos, les musulmans, bientôt les subsahariens, le tout au nez et à la barbe de Malthus qui prétendait chasser le pauvre du grand banquet de la nature…

Il y a dix ans, un sociologue israélien de grand renom, Zymunt Bauman, avait évoqué dans un livre le coût humain de la mondialisation. Mais la mondialisation n’a pas qu’un coût humain ; elle a aussi un coût culturel, un coût écologique, lequel, lié à une spéculation financière toujours plus rapide et gourmande, nous achemine vers un siècle de pénurie.
Il n’y a pas à accuser qui que ce soit : nous voulons tous vivre dans les meilleures conditions possibles, aucun Chinois ne veut vivre comme au temps de Mao, aucun hindou comme au temps de Gandhi. La consommation de tout est le but à la fois physique et métaphysique de l’humanité qui a abjuré la frugalité et les socialismes divers, d’une humanité qui en outre vieillit, ce qui ajoute à sa rapacité, et à son coût pour la planète terre, devenue trop petite pour nourrir nos mauvaises habitudes.

Je suis retourné en Amérique du sud où j’ai pu constater le doublement de tout en deux ans, de la nourriture, des matières premières, de l’immobilier et même de l’eau et de la terre. La terre a doublé au Brésil en un an, suite aux spéculations sur l’éthanol. Pour que nous continuions de voler et de rouler, les forêts argentines, brésilienne ou péruvienne vont achever de brûler, et les surfaces agricoles consacrées à l’alimentation vont être réduites : tout monte donc, du prix du sol à celui du pain, le tout dans un contexte presque comique où l’on ne cesse d’annoncer des chiffres humoristiques pour l’inflation (1 % en France, 5 % en Argentine…). Contexte comique qui autorise aussi à décréter que cette énergie bio est écolo (?!?) alors que le nucléaire, recommandé à grands cris par le grand savant Lovelock ne l’est pas…

Einstein parlait d’une quatrième guerre mondiale qui se déroulerait à coups de masse et de cailloux, il m’apparaît de plus en plus que c’est à coup de terre, de pétrole et d’eau ou de métaux que se construit l’économie régressive de la mondialisation. En huit ans, les cours du Dow Jones ont à peine monté, ceux du Nasdaq ont été divisés par deux, ceux du CAC ont baissé de 20 % (une belle performance pourtant peu soulignée).
Ce qui a monté, comme cela aurait monté au Moyen Âge, c’est l’or, l’énergie, toutes les matières premières. La destruction de l’agriculture européenne par Bruxelles a facilité ce début de pénurie continentale qui promet d’être planétaire. Le déclin du progrès technique finit aussi par avoir un coût important : nous consommons toujours plus d’essence et de pétrole, nous n’avons pas trouvé le moyen de conquérir l’espace, et les surfaces agricoles diminuent partout dans un contexte de désertification et d’augmentation toujours plus folle des populations (8 milliards et demi d’êtres humains en 2020 pour 17 millions de km2 de terres cultivables).

Les conséquences de nos inconséquences vont donc être la pénurie et la hausse des prix continuelles. Comme le chien Ran-Tan-Plan, le citoyen lambda « sent confusément quelque chose ». Grâce aux attentats de Ben Laden, l’immobilier a flambé un peu partout dans le monde, puisque les taux d’intérêt avaient pu artificiellement être baissés, sans un commentaire.
Mais intellectuellement, cette hausse des prix immobiliers était en quelque sorte un impôt de l’espace et du temps : nous vieillissons, nous avons peur pour nos précieuses retraites. Et nous sommes plus nombreux sur une terre de moins en moins habitable. Le mètre carré nous reviendra donc à six mois de travail au lieu de deux. Pour les matières premières et l’énergie, il en est de même. Nous sommes disposés à payer de plus en plus cher pour nos ressources naturelles.

Après tout, ce qui a fait perdre la guerre à Hitler, ce n’est pas son armement, c’est son absence de pétrole. Et ce qui détermine les gesticulations militaires des Américains en Asie centrale ou ailleurs, c’est la quête de l’énergie ou des matières premières. Les « ennemis de la démocratie », arabes, russes ou vénézuéliens, le savent bien qui en usent et abusent. Et l’on a vu que la plupart des grandes fortunes des années 2000 sont celles non pas liées à la technologie (la technologie, c’est dépassé) mais au vol des matières premières (en Russie ou au Brésil) ou à leur simple possession par une oligarchie féodale (Moyen-Orient, monde musulman en général).

Ce que je voulais faire remarquer c’est qu’en dépit de son arrogance intellectuelle, cette société nous ramène à des âges, c’est le cas de le dire, antédiluviens : nous attendons le déluge pour réagir, en attendant nous payons plus. Et nous organisons des processions écologistes, comme dans Manon des sources.

Dans le contexte global de la soumission volontaire, cette pénurie arrive aussi à point nommé pour contraindre les populations à plus de soumission. Si le xxie siècle doit finalement être religieux, c’est parce qu’il sera fondé sur la pénurie, la peur et l’inefficacité. L’Occident libre et inventif aura ainsi vécu, et entraînera la planète dans un siècle trouillard et féodal. Et surtout très cher…

Nicolas Bonnal
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Comments (7)

  • Jew Avec Moi Répondre

    Je connais des saoudiens adorateurs du Veau d’or Hallal qui devraient être virés comme des marchands de la mezquita, bien avant les marchands du temple !

     

    Le genre de mecs bien pieux qui adorent fréquenter les bordels de Marbella !

     

    Mais SAS appartient à la tribu des chameaux qui ne voient pas leurs bosses et c’est bien cela le problème …!

    25 septembre 2007 à 16 h 02 min
  • Anonyme Répondre

    DRUANT Philippe : " Le contrôle démographique et une dépopulation intelligemment menée sont la clé de la survie de l’espèce humaine."

    C’est comment une dépopulation intelligemment menée mais efficace tant qu’on y est ?  Les virus artificiels ?  Les nanos poisons ?  La bombe à neutrons ?  autres choses ?

    24 septembre 2007 à 17 h 53 min
  • konébien Répondre

    personnellement je pense que les faits sont en train de donner raison à Malthus,mais ,j’admets la possibilité de faire erreur.Nous raisonnons toujours le futur comme les conséquences de la persistance des conditions d’aujourd’hui sauf que l’avenir est imprévisible ;qui avait prévu réeellement la chute du communisme en 1989,même la CIA n’avait pas vu le coup venir .Certes de doctes assemblées parlaient de colosse au pied d’argile de là imaginer la chute du mur de Berlin qu’Honecker non plus n’a pas vu venir.. Au début des années80 le japon devait dominer le monde ..on a vu ce qu’il en a été;aujourd’hui c’est la Chine ;oubliant au passage leurs problèmes démographiques,politiques et la scission entre le pays nouveau côtier et le pays traditonnel intérieur…. bref l’avenir chacun le construit comme le reste d’ailleurs à travers ses lunettes de vision du monde.ce qui est sûr c’est que le progrés technologique s’accélère ;que le nombre de savants ,de chercheurs dans le monde augmentent;Un monde nouveau se construit sous nos yeux ,mais nous ne le voyonspas au début du 20eme siécle le tourisme aérien et de masse était inconcevable… cela fait tourner des millions d’emplois dans le monde;; Tous les jours des brevets sont déposés .Au niveau des nouvelles découvertes,une société américaine aurait mis au point par exemple une batterie permettant de rouler 800km avec une charge de seulement 5 minutes.une socité européenne a créé un proto permettant de créer de l’energie liquide ( hydrogéneà à partir de l’énergie solaire)les ouvrages spécialisés regorgent de trouvaillles en tout genre ;certaines aboutiront ,d’autres non et les nanotechnologies nous promettent monts et merveilles; je ne vous fait pas une nouvelle démonstration du positivisme scientifique ,car ce sont toujours les hommes qui utiliseront les nouveaux produits et le probléme est et restera toujours sa faillibilité et sa monstruosité,mais le monde de demain sera tellement différent du notre que nous ne pouvonsl’imaginer

    23 septembre 2007 à 19 h 44 min
  • sas Répondre

    Vous appelez cela la mondialisation ,avec son cortege d’inutilité,de gâchis et d’aberration…….mais en fait c’est tout simplement le CULTE DU VEAU D OR; chèr à certaines raclures et imposé à tous…..

    Mais l histoire a tendance à se répéter et bientot les marchands seront virés du temple…..

    sas

    20 septembre 2007 à 12 h 36 min
  • jim Répondre

    " … vous pourrez dormir en paix et jouir des bienfaits bien réels et plaisant du capitalisme mondial."

    Le "manque de compréhension de la situation"  est  partagé, car tous les paramètres de notre environnement naturel et social , qui sont encore plus réels que votre analyse financière, indiquent le contraire …

    Ce n’est pas la prise d’anti-dépresseurs qui risque d’arranger les choses !

    La "plaisanterie" risque d’être beaucoup plus courte que vous ne le pensez …

    19 septembre 2007 à 16 h 40 min
  • DRUANT Philippe Répondre

    Malthus ne désirait pas chasser le pauvre du banquet de la Nature mais plutôt mettre en adéquation le chiffre de population sur un territoire donné avec les capacités de ce territoire(capacité de charge d’un territoire),ce qui est du pur bon sens!

    Le problème démographique sera le problème majeur du 21 éme siècle et Malthus ainsi que Lovelock,Cousteau,Dumont ont vu juste.

    Le contrôle démographique et une dépopulation intelligemment menée sont la clé de la survie de l’espèce humaine.

    19 septembre 2007 à 11 h 51 min
  • jacques Répondre

    Amusant article…

    … représentant un manque de compréhension de la situation.

    En une phrase, voici ce qui se passe: on assiste à une période de surinvestissement dûe à une baisse artificielle du coût du crédit engendrée par une politique monétaire trop accomodatrice qui finira tôt ou tard à revenir à la normale, avec période obligée de transitions avec cris et grincements de temps pour ceux qui se seront endettés ou auront cru que les banques centrales et les nouvelles méthodes d’ingénierie financière quantitative des produits dérivés des gurus/grand-prêtres financiers/mathématiciens (et surtout leur imaginative méthode de les valorissées dans les états financiers) étaient en mesure de faire disparaître comme par magie le risque inhérent à toute activité humaine.

    Lorsque tout reviendra à la normale, tous les problèmes que vous mentionnez, surconsommation, utilisation accélérées des resources naturelles, sans oubliés les autres effets (moins évidents mais réels) sur la stabilité des familles s’amenuiront et vous pourrez dormir en paix et jouir des bienfaits bien réels et plaisant du capitalisme mondial.

    En attendant, je vous conseille de prendre des anti-dépresseurs car le ton de votre article semblerait en indiquer le besoin. Ou encore, il vous suffira d’être patient…. le réajustement est en train de se faire sous vos yeux et sera complété vraisemblablement d’ici deux ans, possiblement plus rapidement encore, lisez les journaux pour le savoir; c’est d’ailleurs un roman passionant à suivre.

    19 septembre 2007 à 8 h 55 min

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