Les élites et la mondialisation heureuse

Les élites et la mondialisation heureuse

Dans le n° 1093, Cyril Brun notait à juste raison une divergence entre les objectifs des élites et les aspirations du peuple. C’est l’essence de la démocratie qui est alors en cause.

Dans « Fractures françaises », ouvrage remarqué, le géographe Christophe Guilluy avait justement noté, en 2010, la fracture entre les élites qui profitent de la mondialisation (auxquelles on peut ajouter ceux, retraités, fonctionnaires, etc., qui n’en sont ni bénéficiaires ni victimes), et la masse de ceux qui en supportent les conséquences négatives : chômeurs, travailleurs précarisés, agriculteurs, familles tombant chaque année en dessous du seuil de pauvreté, etc.

Fort de son excellente connaissance du sujet, il a manifesté son inquiétude sur M. Macron, candidat des élites européistes et mondialistes qui le tiennent en laisse.

Le nouveau Président n’aura d’ailleurs pas plus le choix de leur désobéir que ses prédécesseurs, puisque chaque pays-membre de l’UE est contraint, sous peine de fortes pénalités, à suivre les GOPE (Grandes Orientations de Politique Économique), publiées chaque année par Bruxelles – le 17 mai dernier pour l’année 2017-2018.

Cette contrainte semble largement méconnue (seul François Asselineau l’a mentionnée pendant la campagne), de sorte que le débat sur les programmes était sans objet – ce qui n’a visiblement dérangé ni les candidats ni les électeurs.
Le fait qu’une forte proportion des Français ne comprend pas que ceux qu’ils élisent sont sans pouvoir réel sur les sujets essentiels, ne laisse pas d’étonner, d’autant qu’en son temps, Jacques Delors avait confirmé, pour s’en réjouir, que 80 % de nos lois seraient faites à Bruxelles.

Peu voient le rapport avec le fait que, quelle que soit la couleur du gouvernement, les choses restent en l’état et la situation continue de dériver.

Sur le plan économique, l’euro est revenu sur la sellette, et ceux qui s’en sont emparé ont généralement étalé leur ignorance de ce sujet complexe.

Ce que Charles Gave appelle « une monnaie qui n’aurait jamais dû exister », est devenu l’élément principal de la crise financière actuelle, alors même que Maurice Allais et beaucoup d’autres économistes sérieux avaient relevé cette inconséquence dès 1992 et annoncé son échec.

Comme il est raisonnablement difficile d’imaginer que ces décideurs étaient tous des ignorants, on doit s’interroger sur leurs motivations.

Que la finance internationale continue de soutenir cette innovation calamiteuse est troublant, car la pertinence d’une décision se juge à ses résultats. S’ils sont mauvais, on doit corriger la décision initiale.
Faut-il alors penser que les conséquences de l’euro sont en ligne avec les objectifs initiaux ? Alors, il s’agit une forfaiture.

Sans entrer dans ce débat, comme l’euro, la mondialisation malheureuse, et beaucoup d’autres évolutions préoccupantes, dépendent des traités européens, le plus simple ne paraît-il pas, à l’exemple des Anglais, d’en finir avec cette organisation ?

C’était apparemment dans les intentions de Mme Le Pen, mê­me si ses déclarations étaient, sur ce point, instables.

Mais, si la majorité des Français, à commencer par les moins favorisés, y voyait à juste raison son intérêt, pourquoi ses élus à la future Assemblée ne contraindraient-ils pas le gouvernement à cette issue ?

Alors il faut faire un sort aux prédictions apocalyptiques : plusieurs spécialistes, notamment Jacques Sapir, ont exposé en peu de pages que le retour à une monnaie nationale ne coûterait pas plus que son abandon, et mettrait fin ipso facto à l’hémorragie annuelle de dizaines de milliards dont l’euro est responsable, qui a déjà ruiné la Grèce et mis le système bancaire italien au bord de la faillite.

À moins que, à force d’inertie, on ne préfère attendre l’écroulement total ?

Pour ma part, je préfère m’inspirer de Rivarol, disant que « c’est un terrible avantage de n’avoir rien fait, mais il ne faut pas en abuser ».

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Comments (1)

  • quinctius cincinnatus Répondre

    très bon article et au ton mesuré ; on y sent comme une pincée de Dupont-Aignant

    9 juin 2017 à 8 h 27 min

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