Parité fixe et monnaie commune

Parité fixe et monnaie commune

Plusieurs de mes lecteurs, en particulier mon ami Jean-Pierre Chevalier, professeur d’économie, ne sont pas d’accord avec moi sur une possible dévaluation du franc en restant dans l’euro… On ne peut pas dévaluer une monnaie qui n’existe plus depuis 10 ans, di­sent-ils. Ce qui semble logique.

– Avant 1999, le mark et le franc étaient liés par une parité fixe. Comme les salaires et les prix augmentaient plus rapidement en France qu’en Allema­gne, les consommateurs français achetaient les produits allemands devenant moins coûteux et les financiers investissaient de préférence en Allemagne. Si les gouvernements tardaient trop à dévaluer, les spéculateurs intervenaient à leur tour et contraignaient les gouvernements à dévaluer. Pratiquement une dévaluation tous les 3 ans avait donc lieu. Les 2 gouvernements fixaient alors la parité nouvelle liant les 2 monnaies.

– Le 31 décembre 1998, à douze heures trente, la France et l’Allemagne choisissent une monnaie unique, l’euro, et fixent donc la parité liant de façon « irrévocable » mark et franc à l’euro : 1,95583 pour le mark et 6,55957 pour le franc. La parité alors choisie entre le franc et le mark était donc d’environ 1 mark pour 3 francs.

Cette parité lie toujours les 2 monnaies alors que les Français n’ont pas modifié leurs vieilles habitudes. Les prix français augmentent chaque année plus rapidement que les prix allemands. Mais les gouvernements ne peuvent pas dévaluer. Les spéculateurs interviennent donc.

Une dévaluation devient nécessaire. Schématiquement, on peut la faire de deux façons :
– Soit le franc sort de l’euro. Le gouvernement français décide de revenir au franc et l’on remet en circulation des francs. On laisse le marché déterminer librement la valeur relative du franc et de l’euro. Au bout de 6 mois (ou d’un an, peu importe), le marché indique la nouvelle parité liant le franc à l’euro. Un euro vaut 8 francs.

Le gouvernement français décide alors de revenir dans l’euro. La parité liant le mark à l’euro sera toujours de 2 marks pour un euro, mais la parité liant le franc à l’euro sera de 8 francs pour un euro. Une nouvelle parité fixe au sein de l’euro liera le franc et le mark : il faudra 4 francs pour un mark. Le Français ne payera pas plus cher un produit fabriqué en France. Par contre, il paiera plus cher un produit fabriqué en Allemagne. La France aura réalisé une dévaluation compétitive de plus.

– Soit le franc ne sort pas de l’euro. Les gouvernements européens et français négocient pendant un laborieux week-end la parité liant le franc à l’euro. La parité du mark ne change pas. Mais il faudra 8 francs pour obtenir un euro. Rien n’empêche d’ailleurs les gouvernements de rajouter 5 ou 6 décimales pour faire plus sérieux vis-à-vis des opinions publiques…

On peut obtenir en 2 jours exactement le même résultat que l’on avait obtenu en 6 mois ou un an : modifier les parités liant le mark et le franc entre eux à travers l’euro. On le fait sans avoir besoin remettre en marche la fabrication de pièces et de billets. Et surtout, sans être obligé de contraindre tous les habitants à changer de monnaie deux fois de suite en moins d’un an, ce qui est humainement et politiquement insupportable.
Dans les deux cas, le seul but recherché est de modifier la parité liant le franc et le mark. Et finalement, on aboutit exactement au même résultat. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi le changement de parité effectué en six mois ou un an serait techniquement possible, alors que le changement effectué en 2 jours ne le serait pas.

Il est bien évident que tous les pays de la zone euro doivent aussi négocier une nouvelle parité. Enfin, tous les ans, on pourra modifier les parités liant toutes les monnaies à l’euro, en fonction des indicateurs économiques précis mis en place. Il n’y aura alors plus de spéculation possible. 

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Comments (4)

  • Florin Répondre

    Ridicule tout ça. Trémeau lance une pierre dans la Seine, et les autres essaient de la retrouver et de la remonter à la surface. Il propose de sortir et de re-rentrer dans l’euro comme on sortirait son canasson de l’étable où il serait entré par mégarde.

    Idéologiquement, Trémeau propose de faire porter le fardeau de la crise (par le biais de l’inflation galopante)  à ceux qui ne peuvent pas y échapper : à savoir, ceux qui vivent de leurs seuls salaires.

    Non seulement, ce fatras de manoeuvres ridicules mettraient à terre l’économie, mais en plus on aurait des émeutes quotidiennes (la Grèce puissance dix, ou cent).

    On a beau être farouchement de droite, quand on lit ce genre de prétendue analyse, on hésite longuement entre Trémeau et le facteur de Neuilly – c’est dire …

    7 juin 2010 à 1 h 54 min
  • François Répondre

      Monsieur Trémeau, je n’ai pas vos compétences économiques, mais une question me " tarrabuste". Dans les 2 solutions que vous citez, on dévalue le " Franc" d’environ 30%. Ors, la France a contracté des emprunts importants en Euros. Est ce à dire qu’il nous faudra rembourser 30% de plus après cette manoeuvre? Si c’est le cas, le remède serait pire que le mal. Si ce n’est pas le cas, je serais heureux que l’on éclaire ma lanterne…

    4 juin 2010 à 18 h 08 min
  • Anonyme Répondre

    La première solution est une usine à gaz. Quant à la deuxième, je ne la comprends pas. Je suis d’accord avec Jean-Pierre Chevallier.

    4 juin 2010 à 17 h 36 min
  • Jacques Répondre

    Je vais vous expliquer pourquoi ça ne peut pas marcher, M. Trémeau:

    Je gagne 10 € par heure, avec votre système, il faudrait que je n’en gagne plus que 7 ou 8.

    Je ne suis pas d’accord, et je ne vois pas comment mon patron pourrait baisser mon salaire, de plus.

    2 juin 2010 à 11 h 49 min

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