Quelques remarques sur les bonus des traders

Quelques remarques sur les bonus des traders

La sympathique colère exprimée par l’un des lecteurs des 4 Vérités dans le n° 707 contre les attaques que subissent les traders participe du sain libéralisme revendiqué par cette courageuse revue. Ce que je ne puis qu’approuver, y compris les comparaisons avec les salaires exorbitants de stars de la télé (ou du foot). Simple question : ce lecteur est-il lui-même trader ? Car il ne faut pas défendre ce qui n’est pas défendable et être clair sur le sujet. Réglons un point : j’ai moi-même bénéficié par le passé de bonus lorsque j’ai occupé successivement des postes de direction dans deux sociétés de bourse. Certes, les contrats (en l’occurrence d’embauche) doivent être respectés et il est juste que ceux qui font gagner de l’argent, beaucoup d’argent, soient bien rémunérés.

Mais il faut être précis. Les traders ont gagné de l’argent parce qu’ils en ont fait gagner à leurs entreprises (encore que !). Mais il est faux de dire qu’ils en ont fait « gagner » aux clients. Comment peut-on prétendre que les traders ont obtenu des bonus (même réduits à la demande de Sarkozy) à partir des gains 2008 de leurs clients qui seraient « cinquante fois plus gros » ? Crise boursière de 2008 (et l’embellie actuelle n’est pas près de rattraper les niveaux, pas plus que ceux perdus en mars 2003), hedge funds (produits dérivés) et produits structurés (prétendus garantis) ont ruiné des centaines de milliers de petits épargnants à qui on assurait « qu’il allait faire plus beau demain » (gérants de 2007 à 2008), que leur produit « sécurisait le reste de leur portefeuille (hedge) » ou « qu’il ne pouvait pas baisser (structurés) ».

Les portefeuilles ont perdu 40 à 50 %. Une majorité de hedge ont disparu. Les gammes de structurés des deux plus gros établissements concernés ont perdu 90 % et 80 %, alors que l’on avait garanti aux clients la sécurité. Les traders n’ont pas globalement fait gagner d’argent aux clients, pas du moins si l’on ne se limite pas à quelques semaines, mais si on observe plusieurs années. Et c’est normal puisqu’ils sont là pour faire gagner de l’argent à leurs entreprises, travaillant surtout pour les clients sur les mouvements d’achats et de ventes (courtages) et pas sur les résultats.

C’est d’ailleurs ce qui explique, pour une bonne partie, la hausse récente des bourses où quasiment seuls les spéculateurs et gérants en mal de chiffre d’affaires agissent faisant d’abord tourner les portefeuilles pour eux. Et seuls les gérants sont donc parfois payés sur les résultats par le client, pas les traders.

Quant à l’autre travail fourni par ces derniers pour leurs entreprises (activité pour compte propre), il est aussi pour partie responsable (mais c’est la faute de leurs directions) de la ruine de certaines banques, de celle de leurs actionnaires et prêteurs obligataires, des risques subis par leurs clients et des impôts que l’on nous prélève ou prélèvera sur nos enfants pour sauver leurs établissements de la faillite, même si les aides gratuites aux banques sont bien moins importantes qu’on ne le dit.

Enfin, quand une entreprise, à plus forte raison une PME, perd de l’argent, elle diminue les revenus de ses cadres dirigeants ou supérieurs, voire de ses salariés. Il n’y a donc rien d’extraordinaire à mettre un coup de canif dans les contrats (Reagan avait donné l’exemple avec les « volants » des compagnies aériennes). De même, il est aberrant de ne tenir compte que des profits rapportés et pas des pertes. Mais cela est en cours de correction…

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Comments (2)

  • le troll Répondre

    Madoff n’a épongé que des mecs blindés, pas de soucis pour eux , à l’heure qu’il est, ils se sont déja refaits une santé sur le dos des gogos.

    1 octobre 2009 à 17 h 41 min
  • Anonyme Répondre

    Les bonus sont de retour, au propre comme au figuré.
    Au fond, que quelqu’un gagne cent, mille, ou dix mille fois plus que moi, ne me gêne pas outre mesure. Maintenant, qu’il me pique ne serait-ce qu’un centime de ce que j’ai durement gagné, voilà qui me gêne vraiment, et j’appelle ça du vol. Si je place en bourse et que je gagne ou que je perde, j’assume, j’ai risqué, personne ne m’a fait de tort. Enfin, dans le cas d’une bourse "normale", ce qui n’est plus le cas. En effet, suite à des largesses inimaginables, les financiers ont été autorisés à se construire des outils absolument démoniaques et propres à ruiner tout le monde – épargnants et entrepreneurs, sauf eux… Au déclenchement programmé de la crise, beaucoup de gens ayant des positions douteuses et devenues intenables, ont été obligés de vendre des positions honnêtes, disons des entreprises qui fonctionnaient normalement avec des gestions correctes. Cette avalanche de vente a donc minoré ces valeurs réelles, pour compenser des marchandages sur des valeurs fictives. Il s’agit donc bien ici de vol, dans la mesure où des épargnants / investisseurs avaient misé des sommes sur des choses réelles et concrètes, se détournant à juste titre des valeurs surfaites et à risques, comme les produits dérivés. Comme on le voit, la sagesse et l’honnêteté ont été pénalisées au lieu d’être récompensées. Mais comme cela ne suffisait pas, il a fallu que les états s’en mêlent. Non contents d’avoir encouragé le vice par des politiques totalement irréalistes voire inconscientes, ils en rajoutent plusieurs couches, en décidant de renflouer les (grosses) entreprises en (très grosses) difficultés, lesquelles, après avoir bien vécu, demandent à l’état de les aider à sortir de leur bourbier, bourbier où elles se sont mises volontairement, en pleine conscience, sachant bien qu’au final, l’état les sauverait. Naturellement, les états étant pour la grande majorité des états gouvernés par des immâtures qui dépensent aujourd’hui l’argent qu’ils seraient susceptibles de récolter dans cent ans, il faut recourir à l’emprunt pour boucher le trou, ce qui se traduit par un nouveau trou que les états entendent boucher avec le concours des contribuables : et c’est là le second acte de vol. En fait, l’individu lambda, c’est-à-dire moi, est volé deux fois et comme dans tout acte de vol, il y a un voleur et un volé, c’est toujours le voleur qui ramasse la mise… Et ça me déplaît franchement…
    Mardoff n’a rien inventé, mais peu m’importe ses victimes, après tout, plein de gens courraient après lui pour lui donner leur argent, et quand on joue, on gagne ou on perd. Kerviel n’a rien inventé non plus, et il est clair que ses magouilles, il avait l’aval de sa hiérarchie, sinon il n’aurait rien pu faire tout seul, pas à ce niveau. Pour la forme, on lui fait porter le chapeau, je reste persuadé qu’il a été (ou sera) récompensé à son juste talent. Par contre, tous ceux qui ont mis en place ces systèmes de fraudes légales pour ruiner le peuple, je demande haut et fort qu’ils soient fusillés en eurovision, en direct et en couleur…

    30 septembre 2009 à 13 h 55 min

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