Sortie de crise ?

Sortie de crise ?

Qui peut croire que, après deux années de tâtonnement, la fameuse troïka n’ait encore trouvé aucune solution ? Il suffit pourtant de lire les suggestions d’économistes sérieux pour se faire une opinion.

Le problème est clair, mais sa solution exige un grand courage : produit rare. Nous faisons face à un déclin régulier de compétitivité de la plupart des pays membres de la zone euro. Tout le monde est d’accord là-dessus, même depuis peu notre gouvernement.

Dans la plupart des pays, les prix augmentent continuellement plus vite que ceux des plus performants, de sorte qu’ils perdent des marchés. Leur production baisse, leur chômage augmente, les profits des entreprises se dégradent, les recettes fiscales diminuent, les déficits publics augmentent, et par suite la dette.

Mais pourquoi ce malheureux enchaînement ?

À cela, deux séries de causes : la gestion publique, et l’effet “zone monétaire”.

La gestion publique diffère d’un pays à l’autre, en fonction des choix de la population. La plupart ont mis en place « l’Etat-Providence », car les citoyens font davantage confiance à l’Etat qu’à eux-mêmes. Outre l’exercice des responsabilités régaliennes, ils lui confient donc de multiples tâches qu’ils pourraient assumer eux-mêmes (couverture sociale, retraite, indemnisation du chômage, gestion des sans-emploi, etc.). Comme ces demandes augmentent sans cesse, l’Administration devient pléthorique, et ses budgets énormes. En France, par exemple, le Budget de la Sécurité Sociale (456 Mds) est depuis de longues années devenu supérieur au budget de l’Etat (366 Mds). De leur côté, les Communautés Locales laissent exploser leurs budgets, par intérêt des élus et par démagogie.

Personne n’est très motivé à réformer le système. Par hypothèse, il a la préférence des citoyens, qui n’ont aucune idée de son surcoût. Par intérêt, il a aussi la préférence de la classe politico-administrative et des Syndicats, ravis de voir leur influence, leur avantage et leur pouvoir, couvrir peu à peu tous les aspects de la vie quotidienne.

Comme c’est bien connu, l’Etat, à l’abri de la concurrence, est très peu efficace. A service égal, ses prestations sont beaucoup plus chères que celles du secteur marchand. Ce surcoût est donc d’autant plus lourd que la sphère des services publics est plus importante (en France, 56% du PIB).

Comme les entreprises finissent par les supporter directement ou indirectement, leurs coûts de revient en sont d’autant plus affectés que l’effet « Providence » est développé.

Ces comportements sont culturels et génèrent une structure adaptée. On appelle leurs effets inflationnistes « taux d’inflation structurel ». Plus celui-ci est élevé, plus la compétitivité du pays se dégrade rapidement. Pour compenser ces hausses de coût à l’export, on dévalue de temps à autre. C’est là qu’intervient la monnaie unique, qui, par construction, empêche les dévaluations. Dans ce système, le pays qui entre dans la zone avec le taux le plus faible, en tire un avantage de compétitivité sur les autres. Vendant plus facilement, il conforte sa position relative et affaiblit celle des autres. C’est ainsi que les performances des divers pays membres, qui auparavant s’équilibraient par réajustement monétaire, tendent mécaniquement à diverger, et non à converger.

À cet effet défavorable s’en ajoute un second. Une monnaie unique ne pouvant gérer qu’un seul taux d’intérêt pour l’ensemble des membres, ce taux est une moyenne adaptée au taux moyen d’inflation de la zone. Il advient inévitablement qu’il soit inférieur au taux d’inflation des pays les plus inflationnistes, d’autant qu’ils divergent. Ces pays, qui connaissent, par leur défaut de compétitivité, des difficultés plus grandes que les autres, notamment de désindustrialisation et de chômage, se voient ainsi offrir des financements quasiment gratuits : difficile de résister à ce « piège à dette » pour équilibrer leurs budgets, en particulier sociaux.

C’est ainsi qu’au bout de quelques années, les pays quelque peu désavantagés au départ sont désindustrialisés et couverts de dettes, mais le mieux placé se retrouve avec une industrie renforcée, un excédent régulier du commerce extérieur, d’importantes réserves de change, et un faible endettement. Où l’on voit que le conseil quotidien de nos élites « faisons comme l’Allemagne » est ridicule. Dans aucun jeu il ne peut y avoir plusieurs champions…

Sans monnaie unique, seule la qualité de la gestion publique influence la compétitivité, et les écarts peuvent se compenser par dévaluation. Tous nos pays ont vécu ainsi pendant des générations, et les dévaluations fréquentes n’ont pas empêché le pouvoir d’achat des Français d’être multiplié par plus de 5 depuis la guerre.

La sortie de crise tient donc à deux décisions courageuses : suspendre le fonctionnement de l’euro pour arrêter l’effet d’étranglement, et redresser fermement, mais progressivement, les budgets publics, au fur et à mesure que la croissance le permettra sans risques sociaux. Car à quoi servirait un redressement financier si les populations sont dans la misère ?

L’ennui, c’est que les “dirigeants” ne veulent ni l’une, ni l’autre.

Monsieur Hollande ne veut pas revenir sur l’idéologie de l’Etat-Providence, qui est consubstantielle à son parti et lui fournit le gros de ses troupes, et Madame Merkel ne veut pas voir disparaître l’euro, car elle perdra immédiatement son avantage de compétitivité, donc ses meilleurs clients export. Pour le moment… Car elle sait mieux que personne que ses clients ne pourront bientôt plus lui acheter, et que l’Allemagne devra combler les déficits de tous les autres, ce qu’elle ne pourra évidemment pas faire. Ainsi, pour notre malheur à tous, l’échec sera complet et, comme d’habitude, payé par les contribuables, qui n’y sont pour rien.

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Comments (5)

  • BORGAL Répondre

    “….. et Madame Merkel ne veut pas voir disparaître l’euro, car elle p e r d r a immédiatement son avantage de compétitivité, etc….”

    Elle “PERDRAIT” peut-être, non ? ? ?
    (ça veut dire : si jamais cela ARRIVAIT un jour, ce qui n’a rien de certain) ….

    Un véritable fléau dont jamais personne ne parle : la disparition pure et simple ( en français) du SUBJONCTIF et du CONDITIONNEL : ça aussi , c’est la décadence du sens et de tout le reste – et apparemment voulue par tous !!!

    22 janvier 2013 à 14 h 52 min
  • Anartien Répondre

    Sortir de l’ Euro ? mais c’est aller vers plus de socialisme dispendieux encore ! Car sans le garde-fou (socialisme oh combien fou, en effet !) de l’Euro et d’une Commission européenne des plus strictes au plan budgétaire (ce qu’elle n’est pas suffisamment encore), se renforcerait cette culture mortifère et liberticide de l’ Etat Providence, à la fois paternaliste et “nounou”, culture mise en place au CNR en 1944 par l’alliance des gaullistes (un général à la De Gaulle se voit comme le père, évidemment raisonnable, de ses enfants soldats, au comportement naturel évidemment erratique) et des communistes.

    Nous devons donc conserver l’ Euro en montrant combien la culture socialo-communiste de l’envie, de la dépense à crédit et de la paresse doit être vigoureusement combattue puis dépassée pour encourager/obliger les efforts de chacun.

    Mais bien sûr cela contrarierait aussi les puissants que sont le MEDEF (ex Comité des Forges) et la FNSEA (et son appendice le RPR puis l’ UMP)…: la concurrence fait peur car elle remet en cause les situations acquises et leurs rentes confortables.

    18 janvier 2013 à 9 h 43 min
    • quinctius cincinnatus Répondre

      l’économie est semblable à la la mort , elle vit à crédit !

      il ne fallait pas entrer dans l’euro ou bien alors il fallait gérer les budgets de la nation et de l’assurance maladie ” en bon père de famille ” ce qui ne fut le soucis de personne pour des raisons électoralistes

      tant qu’on vous prête à des taux raisonnables la dette s’accroit certes mais la consommation qui se maintient et qui est l’unique moteur de la croissance en France donne encore l’illusion euphorique que l’économie est toujours en bonne santé

      si dans ce contexte on veut apurer les comptes , on constate alors que trop d’austérité désamorce la pompe … à Phynance et la … croissance

      et c’est bien là la raison pour laquelle il faut réorienter l’emprunt vers les secteurs productifs ( industriels sans doute mais aussi les services de haute technologie ) dans tous les cas uniquement vers ceux qui ont un avenir … pas Florange !

      allez donc faire entendre ça à un syndicat C.G.T. qui demande la sortie de l’euro pour continuer la glissade !

      il est tout à fait possible de sortir de l’euro , mais seulement à la condition que le gouvernement gère les budgets avec rigueur mais également avec souplesse

      on attend les propositions sur notre …droite

      18 janvier 2013 à 19 h 05 min
  • QUINCTIUS CINCINNATUS Répondre

    combien parmi les lecteurs râleurs des ” 4 V² ” :

    – ont voté en faveur de l’euro ?
    – se sont souciés de la dette régalienne dès que celle ci est devenue ” comptablement visible ” ( dans les années 75 )
    – se sont inquiétés du déficit de la balance du commerce extérieur ? ( par exemple en achetant systématiquement chez une marque automobile étrangère )
    – ont maintenu leur consommation médicale , leur consommation pharmaceutique et les examens de laboratoire à ce qui était nécessaire ?
    – se sont plaints que les ” aides ” et autres subventions n’étaient pas à la hauteur de leurs besoins ” légitimes ” ( loisirs , clubs , associations etc … )
    – se sont endettés au delà de ce qui était indispensable nécessaire et surtout raisonnable ?
    etc … etc …

    et maintenant tous de se lamenter !

    mais il y a aussi :

    ceux qui pensent qu’il suffit de produire à perte ( et produire même si on ne vend pas pour avoir un emplois ) je veux parler des ” syndicalistes français “

    17 janvier 2013 à 21 h 09 min
  • dubos Répondre

    Mais que si , les cvontribuables sont responsables de la situation actuelle
    C’est eux qui ont élu les politicards qui faisaient les plus belles promesses : demain non seulement on rasera gratis , mais en plus on vous achetera vos poils et autres toison
    La promesse a été tenue ,on nous tond a ras la peau,et on prend en charge la moitiée sinon plus de la population , méme celle non originaire de notre pays
    Il va falloir attendre que nous soyons affamés pour que la révolte qui se murmure encore , explose avec les dégats que l’on doit IMAGINER

    17 janvier 2013 à 16 h 31 min

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