Démocratie européenne : l’exemple britannique

Démocratie européenne : l’exemple britannique

Le Premier ministre britannique Tony Blair a déclenché une tempête en annonçant le mois dernier que le projet de Constitution européenne, qui sera sans doute adopté fin juin, serait soumis aux électeurs britanniques qui auront à se prononcer sur ce texte par référendum.
En Grande-Bretagne, les fins observateurs de la vie politique considèrent qu’il s’agit d’une simple manœuvre de politique intérieure. Le Premier ministre est dans la deuxième partie de son second mandat. Il provoquera sans doute, selon la pratique habituelle Outre-Manche, des élections anticipées au deuxième semestre 2005. Et on s’attend à ce qu’il brigue un troisième mandat de Premier ministre. Or son parti, le Labour, comporte une majorité d’eurosceptiques. En annonçant un référendum sur l’Europe, qui leur permet d’espérer une victoire du « non », il les oblige à mettre une sourdine à leurs critiques, au moins jusqu’aux élections. Il donne aussi satisfaction aux médias britanniques qui, majoritairement, sont très anti-européens.
En attendant, Tony Blair, par cette seule annonce, renforce son pouvoir de négociation dans la dernière ligne des ultimes marchandages avant l’adoption du projet de Constitution européenne élaboré par Valéry Giscard d’Estaing. C’est une façon pour lui de dire à ses partenaires : « Si vous ne prenez pas en compte les demandes britanniques, mes électeurs voteront contre l’adoption de votre Constitution »… Un chantage qui n’a pas échappé aux eurocrates de Bruxelles. Le Président de la Commission européenne, Romano Prodi, pourtant du même camp politique que Tony Blair, n’a pas hésité à menacer la Grande-Bretagne de « graves » conséquences si elle rejetait le projet de Constitution.
La décision d’un homme d’État est rarement exempte de sous-entendus. Mais, quand elle se traduit par un recours au peuple souverain, dans un domaine qui est sans conteste possible de la compétence de celui-ci, on ne peut qu’applaudir. Et souligner l’écart béant entre le cran et le courage de cet homme, par rapport au comportement du plus grand nombre de ses pairs.
Interrogé sur le même sujet, quelques jours après la décision de Tony Blair, Jacques Chirac s’est bien gardé de prendre la même position, préférant rappeler que la Constitution européenne pourrait aussi bien être adoptée par un vote des assemblées parlementaires réunies en Congrès. Sur l’Europe ou sur toute autre question, le peuple français ne sera consulté qu’à la condition d’être bien d’accord avec ceux qui le gouvernent.

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Comments (2)

  • SIRIUS Répondre

    Tony BLAIR est effectivement un homme d’Etat, et non un simple politicien, comme nous en avons tant ici. Mais qu’est ce qui différencie un homme d’Etat d’un politicien? C’est que l’homme d’Etat ne caresse pas tout le temps l’électorat dans le sens du poil pour être réélu. Il a une vision des problèmes et de leur solution, qui ne coincide pas nécessairement avec l’état de l’opinion à un instant “T”, opinion par essence volatile et conditionnée par les medias. Le politicien, lui, donne l’heure qu’on lui demande. Il est l’esclave des sondages et de l’audimat.

    12 mai 2004 à 22 h 01 min
  • Paul Répondre

    Dans une démocratie, le peuple est souverain. Il y a bien longtemps que ce n’est plus le cas en France par exemple. La culture du réferendum qui doit etre le fer de lance de toute démocratie a été abolie il y a bien longtemps. Ainsi une minorité a imposé l’abolition de la peine de mort contre l’avis d’une majorité. le peuple n’a pas été consulté car les gouvernants connaissaient la réponse. De même pour l’imigration qui préoccupe les français, surtout pas de référendum. Et brusquement le peuple gaulois découvre qu’il est multiethniques malgré lui avec presque une invitation à se convertir à l’islam ou dumoins à adopter ses coutumes. Et bien l’Europe prend le même chemin. Nos gouvernants préférent ignorer l’opinion des peuples de crainte d’être désavoués. L’imposture européenne ira grandissante jusqu’à peut être un rejet car on ne peut pas faire le bonheur des gens malgré eux. En fait de bonheur promis c’est plutot un appauvrissement général qui ne fait que commencer. Jacques Chirac sait bien pourquoi une consultation démocratique pourtant indispensable se revelerait un échec. Il fera tout pour l’eviter. Quel démocrate !!! Et quelle démocratie pour l’Europe si le peuple n’a jamais droit à la parole et s’il reste superbement ignoré quand il s’agit des décisions majeures !!

    12 mai 2004 à 19 h 23 min

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