La décomposition européenne

La décomposition européenne

J’ai toujours pensé que la construction européenne souffrait d’un défaut ma­jeur : être, précisément, une construction résultant de décisions prises d’en haut.

Ses acteurs ne semblent pas voir que ce que Friedrich Hayek appelle « constructivisme » débouche sur des fuites en avant qui s’achèvent par un effondrement. Les signes de l’effondrement sont là. Ils ne signifient pas que nous serons bientôt sous les décombres. Ils signifient que les mois à venir vont être plus mouvementés que certains ne l’imaginaient.

L’Europe économique, si elle avait été essentiellement une zone de libre-échange, aurait pu fonctionner. Il aurait fallu tôt ou tard se débarrasser des systèmes ruineux de subvention tels que la politique agricole commune, qui a conduit des milliers d’agriculteurs à vivre d’argent public et à se trouver ruinés dès que la manne a commencé à se tarir. Il aurait fallu aussi de la transparence dans les relations entre gouvernements. Mais cela aurait pu être gérable.

Ce qui promettait d’être ingérable était la création d’une bu­reaucratie technocratique supranationale fonctionnant indépendamment de la volonté des populations, et la réduction du pouvoir des gouvernements de chaque pays. Ce qui promettait d’être ingérable, surtout, était la volonté de passer à une Europe politique et de créer, à marche forcée, une monnaie unique.

L’Europe politique est un monstre hybride, avec d’un côté un Président de la commission, José Manuel Barroso, d’un autre, un Président de l’Union européenne, Herman van Rom­puy, en troisième lieu un conseil européen constitué des chefs d’État et chefs de gouvernement, un parlement à Stras­bourg composé de partis politiques qui n’ont qu’une correspondance très lointaine avec les partis existant dans chaque pays.
Le gouvernement économique de l’Europe est lui-même un monstre hybride, avec une Commission et des Conseils européens prenant certaines décisions au-dessus de la tête des populations, et des politiciens qui, dans chaque pays, doivent néanmoins rendre des comptes à leurs électeurs.

L’euro a été ajouté à l’ensemble, alors que nombre d’économistes expliquaient que sa mise en place dans ces conditions conduirait à des difficultés, voire une catastrophe. Nous sommes face aux difficultés. Nous ne sommes pas encore dans la catastrophe, mais celle-ci finira par venir. Imposer une monnaie à un ensemble de pays dans lesquels, même si 70 % des décisions sont prises au niveau supranational désormais, les politiques sociales, fiscales, budgétaires sont très différentes – sans parler du fonctionnement économique, des cultures et des mœurs – était créer une bombe à retardement destinée à exploser.

La Grèce était, sans doute, le maillon faible. Les gouvernements grecs successifs ne pouvaient pas contraindre les Grecs à vivre comme des Allemands sous peine d’être chassés du pouvoir avec pertes et fracas. Ils ne pouvaient pas restructurer l’économie grecque pour qu’elle ressemble à celle des pays d’Europe du Nord. Les Grecs n’ont pas vécu comme des Allemands ; l’économie grecque est restée ce qu’elle était : une économie liée largement au tourisme.

Si la Grèce avait gardé sa monnaie, les gouvernements grecs auraient pu recourir à des dévaluations, à des ajustements de taux d’intérêts. Ils n’ont pas pu. Ils ont emprunté, et emprunté encore. Les financiers internationaux ont vu que la banqueroute approchait et en ont tiré leurs conclusions. Les mesures adoptées présentement sont de simples rafistolages qui tiendront six mois, un an peut-être, avant qu’il ne faille déposer le bilan. La suite viendra. On ne peut donner de date. Mais il est certain qu’elle viendra.
Le Portugal et l’Espagne sont les prochains pays sur la liste. La France n’est pas très loin de rejoindre la liste. L’Allemagne ne voudra pas payer, et c’est logique.

De toute façon, tant d’autres problèmes pèsent sur les pays d’Europe : courbes démographiques, déficits publics, État-providence ruineux, prélèvements obligatoires, immigration non contrôlée, chômage et pauvreté qui montent… Si l’euro survit, ce sera en très mauvais état. Le constructivisme s’achève toujours tragiquement. Ce n’est que le début de la décomposition européenne. Juste le début. 

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Comments (11)

  • françois Répondre

      @ Franck

     Vous parlez des "pseudos nationalistes" collabos (selon vous). C’est curieux que vous passiez sous silence les turpitudes des communistes français. S’il y en a qui ont été collabo, ce sont bien eux, allant jusqu’à appeler à la désobéissance et à saboter les armes et les usines de la France alors en guerre contre l’Allemagne! Il faut dire que l’Allemagne était alliée à l’union soviétique et donc il s’est trouvé naturel que les communistes français trahissent leur pays au nom de l’idéologie marxiste. S’ils se sont ensuite retournés contre l’Allemagne,ce n’était ni par amour de leur patrie, ni par horreur du nazisme, ni par compassion des juifs, mais UNIQUEMENT parce que l’Allemagne attaqua l’URSS! Alors, si vous voulez donner des leçons de patriotisme et distribuer bons et mauvais points, ne citez pas les communistes français en exemple ! Il n’y a pas eu plus traître à leur pays qu’eux!!!

    12 mai 2010 à 17 h 39 min
  • grepon Répondre

    "Le problème est que les marchés financiers veulent faire payer aux peuples la facture de la crise (dont l’origine n’a rien à voir avec l’euro, convenez-en)."

    L’euro n’a rien affaire avec "L’Europe" qui est une tentative de sur-centralisation de tout et de n’importe quoi???

    QUOI?     Il n y a pas de BCE dans votre monde a vous?  

    Et ce BCE n’est pas un resultat de l’Europe politique, une bande d’etats providences?

    ET cette bande d’etats providences qui impose tout ce qui bouge, reglemente tout ce qui  bouge encore, et sousventionne tout ce qui est raide morte, n’est pas pas connecte en aucune facon a "L’Europe", le BCE, l’Euro?  

    Il y a pire que de voir sa monnaie implose, Jaures.   Genre, de se retrouver a nu devant un envahisseur qui a des centaines de passages sanglantes qui vous concerne directement.   Ouvrez vos yeux.

    9 mai 2010 à 23 h 27 min
  • Jaures Répondre

    Certes, l’Europe est une construction. Mais n’est-ce pas le cas de toutes les nations ?
    Les Etats-Unis, si chers à Guy Millière sont eux mêmes une construction qui s’est stabilisée dans les conflits et la douleur.

    Le numéro sur le "constructivisme" nous a déjà été servi: "l’ Europe constructiviste est déjà obsolète" écrivait Guy Millière le 6 mars 1999.
    De même l’imminence de la chute de l’euro : "L’Europe aurait une monnaie susceptible de rivaliser avec le dollar, les coûts de transaction entre les entreprises européennes se trouveraient supprimés et la prospérité longtemps promise allait enfin être au rendez vous… Moins de trois mois plus tard, l’euro poursuit sa dégringolade face à la monnaie américaine, un peu plus de huit pour cent de baisse à ce jour." (Les 4V le 20 mars 1999).

    Le problème actuel n’a rien à voir avec l’euro: l’Angleterre et l’Islande ne sont pas membres de la zone euro et sont dans un état économique encore moins enviable que celui de la France ou l’Allemagne.
    Le problème est que les marchés financiers veulent faire payer aux peuples la facture de la crise (dont l’origine n’a rien à voir avec l’euro, convenez-en).

    La situation de la Grêce vient à point pour exercer une pression sur les peuples alors que la Grêce ne représente même pas 2% du PIB européen.

    Déjà, les politiciens de droite menacent: il faut renouer avec l’austérité ou nous suivrons le sillage grec. Les états européens ne sont d’ailleurs pas si inquiets de l’état de la Grêce puisqu’ils l’ont mise en demeure d’honorer ses contrats militaires alors que l’on sait que l’importance de ce budget (avec la corruption et l’évasion fiscale) est une des principales causes de la crise actuelle.

    Qu’un état européen doive emprunter à des taux plus élevés que ses banques, là est le scandale.
    Plus que l’austérité pour un peuple qui est loin d’être dans l’opulence, c’est d’une réforme de ses institutions que la Grêce, dont les dirigeants ont trop souvent confié les clés du pouvoir à des affairistes sans scrupules, a besoin.

    9 mai 2010 à 16 h 31 min
  • Frank Répondre

    Serge, je doute que l’OPEP puisse faire un embargo pendant longtemps car ils ne vendent que du petrole et ils n’ont pas d’autres clients.

    9 mai 2010 à 14 h 37 min
  • Trumpeldor Répondre

    @Au courageux anonyme #1, Pas une seule fois Mr Milliere n’ecrit le mot “Israel” dans son article Pourquoi en rajoutez vous inutilement une couche ? Vous avez objectivement une fixation israelienne,cela est votre probleme et celui de beaucoup de concitoyens europeens mais cela ne sauvera pas le tres vieux continent…. Je ne vous salue pas,antisemitiquement votre,

    9 mai 2010 à 13 h 11 min
  • ozone Répondre

    Il a raison Milliére,curieusement il prend les arguments avancés par les souverainistes il y a bien longtemps.

    Il n’est jamais trop tard

    8 mai 2010 à 21 h 38 min
  • Anonyme Répondre

    Nous vivons en tous cas une époque formidable où se forment des tas d’évènements importants voire graves en un temps record (terrorisme nazislamique, crise des banques, crise économique européenne, tsunamis, volcanisme, etc.).  D’autres époques ont été plutôt monotones…  Aujourd’hui, on ne s’ennuie pas !

    Nous vivons bien l’Apocalypse, c’est à dire les "révélations" où l’on voit de nombreuses vérités, cachées tant bien que mal durant des siècles, faire surface. C’est l’heure des comptes. C’est le temps du solvea où rien ne persiste longtemps et tout se dissout inexorablement, et qui fera place ensuite au coagula, l’inverse après la tempête.  Ce sont des cycles (comme ceux du climat de la planète)et nous vivons en plein dans le changement.  Il y a déjà eu de telles époques agitées (mais les gens ayant la mémoire courte…) et il y en aura d’autres bien plus tard.

    Mais il y aura beaucoup de dégâts dans ce cycle là…  Ceux qui ont vécu entre 1930 et maintenant verront pire.

    8 mai 2010 à 14 h 36 min
  • Anonyme Répondre

    @Frank

    Bonjour cher compatriote!

    Je suis totalement d’accord  avec vous pour ce qui est des Pseudo-nationalistes français, ceux qui hier et aujourd’hui se cachent lâchement derrière une lucidité de pacotille face aux soit-disant complots "judéo-maçonniques” pour mieux vendre leurs pays à l’envahisseur nazis hier ou islamistes aujourd’hui.

    Il mérite plus que leur part d’opprobre!

    Cependant, je dois me faire l’avocat du diable en ce qui concerne la politique arabe de la France. Même si moins de Français étaient des pseudo-nationalistes comme vous les dénoncez, la France ne pourrait jamais être aussi pro-isralienne que le monde anglo-saxon car la France elle, est presqu’à 99% dépendante du pétrole importé. Un embargo général de l’OPEP et c’est la catastrophe.

    Si elle est pro-arabe contre Israël, elle est plutôt anit-arabe en Afrique comme lorsqu’elle soutient le Tchad contre la Libye ou le Soudan (par néo-colonialisme certainment, mais la crise du Darfour nous rappelle que l’impérialisme français est peut-être un moindre mal pour les Africains noirs que l’impérialisme arabe).

      

    Serge Boisvert

    7 mai 2010 à 20 h 03 min
  • Frank Répondre

    Au "courageux" anonyme —.80.24-93.rev.gaoland.net 

    Les nationalistes francais comme vous sont justement la cause des problèmes de l’Europe et de la France. L’UE a été construite sur le meme modèle que celui qui a permis de construire la France à partir de regions culturellement et politiquement diverses: la creation d’une administration centrale oppressive, autoritaire, centralisatrice, uniformisatrice, anti-démocratique et anti-économique. Ce n’est pas un hasard si les principaux artisans de la construction européenne étaient français.

    La France gaullienne que vous semblez réverer est un retour malheureusement réussi à ce modèle ancien et inefficace que la Révolution francaise avait amoindri ce qui avait permis a la France de sortir de son archaisme. Rappelons que ce sont les nationalistes et les communistes qui ont reconstruit ce système à partir de 45.

    Les pseudo-nationalistes francais méritent un mépris absolu, d’une part parce qu’ils ont constamment collaboré avec les ennemis de la France depuis les années 30 par lâcheté, par haine idéologique de la démocratie et aussi par cupidité. Rappelons que les communistes faisaient chanter les prétendus nationalistes grâce aux archives de la Gestapo française récupérées par l’Armée Rouge à Berlin et qui prouvaient qu’une grande partie de ces faux patriotes avaient collaboré avec les nazis. Rappelons aussi que le soutien de ces pseudo-nationalistes aux nazislamistes n’est pas simplement du a la proximité idéologique mais aussi aux dollars qu’ils reçoivent.

    L’idéologie autoritariste, anti-libérale et anti-capitaliste de ces nationalistes est l’explication première de l’échec politique, économique et social de la France. Si l’on prend le dossier de l’immigration par exemple, les nationalistes ont choisi d’echanger des immigrants partiellement hostiles et inadaptés aux besoins du marche du travail contre du pétrole plus cher que les cours du marché. De vrais liberaux capitalistes n’auraient jamais conclus ce genre de transactions anti-économiques et anti-sociales. Pas plus qu’ils n’auraient mené cette infâme politique arabe qui a permis a certains lobbies de s’enrichir au détriment du contribuable francais, qui a détruit la crédibilité internationale de la France et qui a conduit a sa ruine interieure.

    La démocratie libérale et capitaliste était dejà la seule option viable au XIXème siècle, elle l’est encore plus au XXIème siècle.

    7 mai 2010 à 0 h 28 min
  • grepon Répondre

    La France n’est pas loin derriere.   Je laisse parler les experts:

    http://www.zerohedge.com/article/hugh-hendry-greek-bailout-really-bailout-french-banks#comment-334792

    D’ailieurs, il est interessant de regarder les dettes que la France et L’Allemagne doivent emettrent cette annee pour continuer de fonctionner.   Certes, quand on fait un spreadsheet avec les ratios dettes/pnb la France n’est pas aussi mal qu’une liste d’autres pays, mais attention, la France a preter de l’argent a ses autres pays(voir l’article ci-dessus de l’excellent site web ZeroHedge).   Les banques de ce bas monde sont insolvable, et vos etats-providences mourrantes ne peuvent pas les sauver car ils ont besoin eux-memes d’etre sauve.   Je recommande fortement aussi le site de Reggie Middleton, son BoomBust Blog, pour voir un vingtaine d’articles tres chiffre du comment ca ne peut pas tenir.  

    Milliere sous-estime probablement le degre de "mouvemente" que les prochaines mois promettent, mais il fait bien de faire la remarque.   Sinon, dans trois ou quatre mois les Jaures viendraient crier que Milliere n’a rien prevu.

    6 mai 2010 à 19 h 11 min
  • Anonyme Répondre

    Enfin une bonne nouvelle ! *** La décomposition européenne *** Même Charlemagne avec ses trois fils ne put empêcher le partage de l’Europe. Le roi des belges est le garant timide de l’unité de la Belgique, s’il saute, la capitale européenne sera une enclave entre deux petits états rivaux, c’est assez jouissif. Au fond Bruxelles va peut-être finir comme la cité du Vatican, en plus onéreux, donc en plus fragile. Les nations existent encore honnies par (les cosmopolites? non, je me censure, ou) les mondialistes (utilisons le mot que la police de la pensée tolère encore), mais bien amochées. Etrange situation! Pour Guy Millière c’est vive Israël! Il ne faut pas le contrarier, Israël a toujours raison. C’est émouvant cet amour inconditionnel. Lisez le site drzz, vous verrez ses déclarations enflammées pour l’aile la plus radicale du pays qui excommunie l’aile plus modérée, ne mettez pas votre grain de sel dans la conversation, cela va saigner. Au fond, Guy Millière désespère de l’Europe mais espère en Israël. Pourquoi pas ? Cela fait un peu décalé par rapport à nos intérêts nationaux, mais c’est comme cela. Il y a toujours un patriotisme autorisé, notez le, mais pas trop dans l’hexagone… J’aimerai plutôt des déclarations d’amour de la France, c’est la solution normale, mais qui serait insupportable pour la nomenklatura en place. Alors soyons insupportables. Chacun a les affections qu’il peut. On peut espérer.

    6 mai 2010 à 16 h 58 min

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