Référendum constitutionnel et clivage droite-gauche

Référendum constitutionnel et clivage droite-gauche

Le projet de Constitution européenne divise aussi bien la gauche que la droite. Certains communistes voteront « oui », comme sans doute Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT; quelque 15 % des électeurs du Front national s’apprêteraient également à voter « oui »; tandis qu’au PS, alors que le « oui », avait remporté près de 60 % des suffrages lors d’un référendum interne, le « non » gagne chaque jour du terrain. Quant à l’UMP, quasiment unanime au niveau de ses principaux dirigeants, ses électeurs apparaissent très divisés.

Une fois encore, sur un sujet précis, les électeurs se répartissent en deux camps, qui ne recouvrent en rien le clivage droite-gauche. C’est frappant. Mais c’est aussi banal. Car c’est ainsi presque toujours sur toutes les questions politiques ou de société.

Cette observation ne signifie pas que le clivage politique droite-gauche n’a finalement aucun intérêt, bien au contraire ! Elle démontre seulement que ce n’est pas tant sur le terrain idéologique ou philosophique qu’il faut rechercher les critères de ce clivage, mais au contraire sur un terrain pratique.

On n’aura jamais fini de débattre sur le point de savoir si le libéralisme, le nationalisme, le patriotisme, le conservatisme… sont de droite ou de gauche. D’illustres représentants du libéralisme économique classique siégèrent parmi les élus de la gauche (Frédéric Bastiat, Yves Guyot…) ; le souverainisme de gauche existe, c’est indiscutable ; on a vu des communistes patriotes ; et on voit tous les jours des syndicalistes conservateurs. Il n’empêche qu’à l’occasion d’une élection générale législative ou présidentielle, le clivage droite-gauche se reconstitue, chaque camp se rassemblant et réunissant alors ceux qui s’étaient opposés même vigoureusement, sur l’Europe, sur l’école ou sur tout autre sujet…

Je soutiendrais même que le clivage droite-gauche, dont la meilleure définition est pour moi de type « nominaliste » – sont « de droite ceux qui se disent de droite » et « de gauche, ceux qui se disent de gauche » –, permettrait de relativiser les clivages occasionnels comme celui que nous vivons actuellement.

Pourtant, en France, ce clivage droite-gauche, si utile au bon fonctionnement démocratique des pays anglo-saxons, est non seulement nié par beaucoup d’observateurs, mais encore, depuis le début de la Ve République, il fait l’objet d’une attaque en règle. Charles De Gaulle en 1958 prétendait rassembler tous les Français. Jusqu’au bout, il chouchouta ses chers « gaullistes de gauche »… Valéry Giscard d’Estaing avait une prétention plus modeste : rassembler deux Français sur trois.

Avec Jacques Chirac, du point de vue du clivage droite-gauche, on est en complète confusion. Dans leur immense majorité, les électeurs de l’UMP – comme Nicolas Sarkozy d’ailleurs – se disent de droite, tout comme les électeurs du parti socialiste se disent de gauche, mais, au niveau des politiques mises en œuvre, comme l’écrivait d’ailleurs dans une chronique du « Figaro » du 30 mars 2005, Alexandre Adler, « il n’y a plus aucune opposition sérieuse entre les directions actuelles du PS et de l’UMP ».

Qui plus est, il n’est pas rare que le Président de la République déborde sur leur gauche les partis politiques de gauche. Par exemple, au plan diplomatique, ou bien en politique intérieure, sur le terrain social.

Les élus UMP réputés chiraquiens sont sur la même longueur d’onde. Il n’est pas rare, à Bruxelles ou à Strasbourg, de voir les députés européens UMP mêler leurs voix à celles des élus de la gauche, voire de l’extrême-gauche, en particulier quand celle-ci est emmenée par le très médiatique Daniel Cohn-Bendit. Les apparatchiks Toubon, Sudre, Saïfi et Roselyne Bachelot sont coutumiers de tels votes.

On a gardé en mémoire qu’après le 21 avril 2002 et l’élimination du candidat socialiste Lionel Jospin, un front commun anti-Le Pen se constitua qui permit à Jacques Chirac d’enregistrer plus de 80 % des suffrages au deuxième tour de l’élection présidentielle. On parle à propos du référendum du 29 mai d’un 21 avril « à l’envers », dans la mesure où la pression médiatique s’exerçant en faveur du « oui » aboutirait à l’inverse de l’effet recherché. Mais on pourrait aussi bien parler d’un nouveau 21 avril « tout court », dans la mesure où, d’ores et déjà, le score du « non » est, sans commune mesure, plus important que le poids et les représentations des formations politiques qui le prônent. n

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Comments (3)

  • sas Répondre

    a adolphos…pas certain le non sens VOLTAIRE était franc maçon…et c’est un subversif anti national tout comme Rousseau et les lumières…ils ont lancé et semé ce que l’on récolte aujourd hui…en pleine gueule…avec intérêts frais et accessoires. …ce sont l’application des protocoles de sion amicalement sas

    7 mai 2005 à 18 h 02 min
  • Adolphos Répondre

    “D’illustres représentants du libéralisme économique classique siégèrent parmi les élus de la gauche (Frédéric Bastiat, Yves Guyot…) ;” Vous substancialisez nos divisions Gauche-Droite. C’est comme de se demander si Voltaire était de droite ou de gauche, ca n’a tout simplement aucun sens. Notre division actuelle devrait être Socialo-Communiste contre défenseur de la liberté. Bon, hélas, la droite est contaminé par le Marxisme, cette polution, de ses ennemis. Peut-il y avoir une redéfinition du clivage droite-gauche dans les années à venir ? En tous cas, le PS ne pourra pas faire l’économie d’une explication interne, surtout si le Non l’emporte.

    7 mai 2005 à 2 h 19 min
  • ben Répondre

    cher monsieur, le clivage gauche droite en france n’existe plus depuis belle lurette. le spectre politique est simplement constitué que de socialistes “statolatre”. pourquoi? tout simplement parce que le marxisme reste l’alpha et l’oméga de tout reflexion politique française.le référendum en est la preuve, l’ennemi est tout trouvé, autant pour les partisants du oui que pour ceux du non, il se nomme : libéralisme. bien à vous.

    1 mai 2005 à 12 h 47 min

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