Un an après le référendum sur le Traité constitutionnel européen, du nouveau

Un an après le référendum sur le Traité constitutionnel européen, du nouveau

La raison des nations de pierre manentUn an après la large victoire du non au référendum sur le Traité constitutionnel européen, l’Europe est en panne. Ce ne fut pas la tempête annoncée par les tenants du oui, ni le grand soir rêvé par beaucoup de tenants du non ; mais, ce qui est sûr, en tout cas, c’est que le fameux « plan B » se fait attendre !

Ce repos forcé du processus d’intégration européenne nous fournit une bonne occasion pour prendre le temps de réfléchir à ce que nous voulons vraiment pour l’Europe et pour notre pays. Question apparemment saugrenue, mais dont la campagne de l’an dernier a largement montré qu’elle était décisive. Nous avons, en effet, assisté à cette occasion à d’impayables dialogues de sourds : – L’Europe veut anéantir le modèle social français. – Oui, mais elle nous a apporté la paix ! Ou encore : – Regardez à quelle vitesse s’est modernisée l’agriculture française grâce à Bruxelles. – Certes, mais Javier Solana est un valet des États-Unis et Bruxelles le 51e état de l’Union… On n’en finirait pas de faire la liste d’arguments, dont certains étaient recevables, mais presque toujours utilisés à contre-emploi.

Revenons donc aux « fondamentaux » : voulons-nous un marché unique de mieux en mieux intégré – avec ce que cela suppose d’harmonisation fiscale, budgétaire, sociale, juridique… – ou voulons-nous créer un État fédéral ? Les deux se justifient, mais il est évident que les conséquences sur le « plan B » seront singulièrement différentes : dans le premier cas, il n’y a aucune difficulté à accueillir à terme la Turquie ; dans le second, c’est presque impossible. Dans le deuxième cas, il faudra songer à fermer les représentations diplomatiques nationales ; dans le premier, ce sont les représentations diplomatiques de la Commission qui sont superflues, voire nuisibles…

Bref, une fois de plus, il faut avoir le courage de faire un choix politique : le point de départ n’est pas technique (comment aboutir à telle situation économique, politique ou sociale ?), mais politique (quel est le modèle européen dont nous rêvons pour 2050 ?)

Or, précisément, l’un des grands risques de l’aventure européenne, c’est que son haut degré de technicité conduit peu à peu à une dépolitisation du débat.

Pour revenir aux débats cruciaux, rien ne vaut la lecture d’un remarquable petit ouvrage du philosophe Pierre Manent : « La raison des nations – Réflexions sur la démocratie en Europe ».

Pierre Manent est l’un des meilleurs connaisseurs de la pensée politique libérale, un disciple de Raymond Aron. Et surtout un remarquable philosophe, au sens où il ne se lasse jamais de questionner les plus élémentaires « évidences » du temps, à la façon de Socrate.

Dans ce petit ouvrage, c’est au tour de l’expérience politique européenne de se retrouver sur la sellette et cela semble singulièrement salubre pour une Europe encalminée depuis un an !

On lira, en particulier, avec grand intérêt les pages concernant l’évolution de la démocratie au cours des dernières décennies. Comment se fait-il, s’interroge l’auteur, que la démocratie ne supporte plus aujourd’hui la différence ? Car tout se passe comme si la démocratie était devenue un modèle de société uniforme, où les nations, les races, les langues…, sont des survivances archaïques qu’il faut s’attacher à extraire progressivement. Or, la démocratie s’est jadis fort bien accommodée de l’existence de la nation ou de la cité. Mieux même, elle n’envisageait pas la possibilité d’une sorte de démocratie universelle et ne croyait qu’à l’application limitée des règles du gouvernement démocratique sur un territoire donné et pour un ensemble d’actions humaines données (la démocratie dans l’entreprise, dans l’école ou dans l’armée n’avait alors pas plus de sens que la démocratie internationale).

On lira également avec intérêt les réflexions sur la religion, et tout particulièrement sur l’islam. Pierre Manent en profite pour « mettre les pieds dans le plat » en s’interrogeant sur le bien-fondé de l’entrée de la Turquie en Europe. Il rappelle à cette occasion que l’islam n’a pas encore trouvé de forme politique adaptée : il récuse la nation et rêve du califat, mais ce dernier n’est pas une forme politique, seulement (et encore !) une forme de rapports entre politique et religion. En prenant conscience de cette indétermination politique de l’islam, on mesure mieux le danger qu’il y aurait à accueillir la Turquie dans l’Union européenne qui, elle-même, peine à choisir son modèle politique, entre marché économique apolitique, union d’États souverains ou État fédéral…

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Comments (10)

  • sas Répondre

    A JC , il faut leur reconnaitre une chose…le machin truc signé et référendé par les bourricots français portait la question suivante:”….estes vous d’accord pour que la france présente un rérérendum sur la question d’intégration à l’europe(un truc comme ca)…et non etes vous d’accord avec la nouvelle Constitution européene et qu’elle supplante la nationale….. donc les manches à couilles initiés n’ont pas tord d’insister lourdement…giscard en tête. sas

    20 juin 2006 à 12 h 11 min
  • Jean-Claude Lahitte senior Répondre

    A propos du projet (non enterré) de “Constitution” européenne repoussée par le peuple Français (et pas seulement lui), que l’on me permette de rappeler que, l’an passé, sur différents “posts”, j’avais titré un “papier” : “TOUS COCUS LE 29 MAI”. J’y expliquais en substance que – si le “OUI” passait, nos gouvernements (UMP, UDF, P.S., PC et Verts) expliqueraient doctement aux demandeurs d’exceptions (nécessairement françaises !): nous, on veut bien, mais nous sommes liés par le traité consitutionnel. – si le “NON” l’emportait : à cause de votre vote négatif, nous ne sommes plus crédibles auprès des instances de “Bruxelles”, et nous ne pouvons rien pour vous ! Cordialement, Jean-Claude Lahitte

    19 juin 2006 à 17 h 52 min
  • sas Répondre

    Aux manches à couilles qui nous dirigent….le traité constitutionnel…NON c’est NON… sas

    19 juin 2006 à 12 h 58 min
  • Helios Répondre

    “…l’islam n’a pas encore trouvé de forme politique adaptée : il récuse la nation et rêve du califat, mais ce dernier n’est pas une forme politique, seulement (et encore !) une forme de rapports entre politique et religion. En prenant conscience de cette indétermination politique de l’islam, on mesure mieux le danger qu’il y aurait à accueillir la Turquie dans l’Union européenne…” Voilà des paroles sensées et qui devraient porter à réfléchir, cependant d’aucuns diront que la Turquie est un état démocratique et de surcroît laïc, le voile islamique y est interdit dans les écoles et les universités, l’islamisme y pousse mais probablement pas autant qu’en France en Angleterre ou en Suède. Dans les faits la crainte de l’adhésion de la Turquie tient davantage à son poids démographique, en Europe la balance bascule lentement mais sûrement en faveur des musulmans, l’inclusion de la Turquie ne fera qu’accélérer le phénomène! Mais alors puisque l’islamisation de l’Europe est perçue comme une menace pourquoi rester les bras croisés face à l’immigration musulmane tant légale que clandestine? Le califat en tant que forme de gouvernement n’existe plus depuis la première guerre mondiale et il est très peu probable de le voir resurgir autrement que dans les divagations des islamistes. L’état-nation est bien vivant en terre d’islam autrement on verrait dès demain toute l’Afrique du Nord s’unir sous une même bannière. Les saoudiens les plus fanatiques ne sont certainement pas disposés à partager la richesse pétrolière de leur pays avec les musulmans des autres pays fussent-ils aussi fanatiques qu’eux, témoin le gouvernement islamiste palestinien sevré des subsides de l’occident ne reçoit aucune aide des monarchies pétrolières qui cependant ne se privent pas de financer un peu partout et à coup de milliards le prosélytisme islamiste, les mosquées et les imams salafistes. Les États Unis d’Europe ne sont pas pour demain, l’Europe des technocrates et des économistes s’est laissée influencée non par des hommes politiques représentatifs de leurs électeurs mais par des acteurs sociaux soi-disant progressistes partageant avec les islamistes la haine de tout ce qui est différencié et authentique sur le plan culturel, pour eux l’identité nationale est l’ennemi à abattre. Il n’est pas étonnant que dans ce contexte les gens éprouvent de la difficulté à se reconnaître dans cette “vision” d’une Europe incolore inodore et sans saveur, où le christianisme est caché comme une maladie honteuse, où les mosquées poussent comme des champignons. Mais il y a plus, cette Europe se constitue en opposition aux États Unis d’Amérique comme si ces derniers avaient intérêt à ce que l’Europe ne voit pas le jour et comme si le sentiment anti-américain devait être le ciment de cette Union. On ne peut construire une entité politique sur la base d’un délire organisé, d’autant plus que pour sa propre sécurité l’Europe doit maintenir une alliance très étroite avec les États Unis. Cette absence de réalisme met en danger la construction de l’Europe, celle-ci doit absolument maintenir des liens très étroits avec le continent américain dans son ensemble et particulièrement avec les États Unis, c’est une question de masse critique dans un monde de plus en plus dominé par des géants économiques et démographiques tels que la Chine et l’Inde. Helios

    19 juin 2006 à 5 h 48 min
  • Ado Répondre

    “Revenons donc aux « fondamentaux » : voulons-nous un marché unique de mieux en mieux intégré – avec ce que cela suppose d’harmonisation fiscale, budgétaire, sociale, juridique…” Non, c’est complétement faux. Les USA n’ont ni les même systéme de droit, ni les même impôts, ni les même services sociaux selont les Etat, et pas même un taux de TVA unique. Et c’est pour cela que le systéme fonctionne.

    19 juin 2006 à 0 h 14 min
  • Jean-Claude Lahitte senior Répondre

    Ayant pris le temps de relire l’article de Guillaume (je ne sais pas pourquoi, ce prénom me fait penser, après cette relecture, que l’auteur pourrait sortir lui-même de la “rue Saint-Guillaume !), j’ai compris pourquoi je n’adhére pas à ses propos, même si ceux-ci sont brillants. Comme le sont généralement tous nos énarques, polytechniciens, etc. C’est parce que, insidieusement, apparaît l’idée que si certaines conditions purement “intellectuelles” sont remplies, l’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne pourrait se justifier … Personnellement, comme d’autres sortaient leur “pistolet” lorsqu’ils entendaient le mot “culture”, moi – moralement, certes – je sors mon pistolet lorsqu’est avancée l’idée de l’entrée de la Turquie dans une Union Européenne dont les racines, n’en déplaise à CHIRAC II, sont essentiellement christo-greco-romaines et surtout pas musulmanes. Mine de rien, il perce dans l’article dont il est question, que le brillant esprit qu’est assurément Pierre Manent n’est pas, quant à lui, farouchement opposé à cette entrée de la Turquie musulmane. Ce que refuse le manAnt que je suis asssurément resté… Bon dimanche et bien cordialement, Jean-Claude Lahitte senior P.S. Que les “ouistes” du 29 mai 2005 se rassurent : “nos” dirigeants (les “Français” comme les “Bruxellois”) concoctent dans l’ombre, non pas un “plan B”, mais, tout simplement une nouvelle “Constitution” qui serait un remake habillé différement, et que voteraient “en douce” le Parlement Français. Un Parlement qui, ayant voté la subordination des lois Françaises à celles prévues dans la Constitution qui devait être largement rejetée par les Français (et pas seulement par eux !), aurait dû, en toute logique, après le 29 mai 2005, se réunir à nouveau pour “désubordiniser” les Lois françaises… C’est la façon de procéder des politiciens de toutes nations qui n’ayant que le mot “démocratie” à la bouche, régentent (au sens éthymologique)leurs “peuples” (comme ils disent), en leur faisant croire qu’ils ont leur mot à dire. Tout comme, avec le mot “liberté”, selon le mot fameux de Madame Rolland, on a tué des gens, essentiellement du … peuple !

    17 juin 2006 à 16 h 23 min
  • Jean-Claude Lahitte senior Répondre

    Au risque de pararaître désagréable, je crains que cet article ne soit l’oeuvre d’un énarque tant il me semble procéder des raisonnements chers à l’énarchie, surtout quand elle s’appuie sur des “philosophes”. A quoi bon discuter de “démocratie” ou du “libéralisme”(comme d’autres, naguère, discutaient du sexe des anges) alors que le “France-Titanic” sombre. Et qu’il est plus que temps de changer l’équipage qui le mène au désastre, en même temps que les mentalités (pourries par l’Education – prétendue – nationale, et par une presse largement dévoyée) du “peuple”, au lieu de discuter à perte de vue pour savoir quel sens donner à la “démocratie” et au “libéralisme”. La meilleure doctrine du monde, mise entre les mains de gens incompétents et/ou malhonnêtes, et aplliquée à un peuple d’autruches ne fera que se dévoyer. Pierre Manent et son thuriféraire sont sans doute non seulement d’excellents “connaisseurs de la pensée politique libérale” et de ce que devrait être une véritable “démocratie”, en même temps que d’honnêtes hommes, aucune de leurs thérories n’y fera tant que le peuple ne disposera pas d’une véritable capacité de raisonnement, doublée d’un pouvoir de critique au sens positif du mot. Alors, malgré l’intérêt dont je ne doute pas, de la “Raison des Nations…”, je n’achèterai pas un livre dont je sais par avance qu’il ne servira en rien à régler les problèmes de la France, et encore moins à la guérir des maux dont elle souffre. C’est fou le nombre de gens qui réfléchissent tous azimuths aux maux dont souffrent la France, et qui n’ont pas le courage de dire “du balai” à tous les politiciens cause de tous nos maux. Il me font penser à ces médecins qui borrent leurs “patients” de médicaments de plus en plus sophistiqués, de plus en plus chers, sans exiger d’eux qu’il se remettent en question, qu’ils remettent en cause leur mode de vie… Et c’est comme cela que les malades finissent par périr de maladies nosocomiales… Cordialement, Jean-Claude Lahitte senior

    16 juin 2006 à 12 h 07 min
  • Scottkiller Répondre

    Effectivement, plus personne ne parle de l’UE, mais comme tu le dis bien Pierre :”C’est faux, Chirac, Jospin, Royale et Sarko-mitterrand… veulent faire enteriner une partie de la constitution europeenne par le parlement francais… faisant table rase du Non a la constitution europeenne de Mai 2005. C’est une insulte de plus pour la democratie et nos compatriotes” . Raison de plus pour foutre dehors cet illuminé de sarko, et cette poupée de gauche. Non à la turquie en europe, l’europe est chrétienne d’origine, au nom de rien du tout je voudrai l’islamiser. Il faudra voter du bon coté en 2007 pour virer toute cette classe politique corrompue et leur enlever leurs pribilèges (comme ça on ne leur paiera pas une rente à vie)

    16 juin 2006 à 9 h 48 min
  • Pierre Répondre

    ed a ecrit:’Comme vous le mentionnez,une année après la victoire du non au référendum sur le traité constitutionnel européen il ne s’est rien passé,ni dans un sens ni dans l’autre.D’ailleurs aucun des champions du non ou du oui ne revient sur cette affaire’ C’est faux, Chirac, Jospin, Royale et Sarko-mitterrand… veulent faire enteriner une partie de la constitution europeenne par le parlement francais… faisant table rase du Non a la constitution europeenne de Mai 2005. C’est une insulte de plus pour la democratie et nos compatriotes. Quant a la Turquie dans l’UE, cumulee a l’immigration invasion que nous connaissons deja, autant dire adieu a la civilisation europeenne et a la France… Cordialement

    15 juin 2006 à 21 h 09 min
  • ed Répondre

    Comme vous le mentionnez,une année après la victoire du non au référendum sur le traité constitutionnel européen il ne s’est rien passé,ni dans un sens ni dans l’autre.D’ailleurs aucun des champions du non ou du oui ne revient sur cette affaire.C’est du passé,il y a plus urgent maintenant;les présidentielles de 2007.Très important…pour les partis politiques.Après ce sera les législatives puis les municipales,ensuite il faut de nouveau trouver un sujet pour mobiliser la fibre politique du citoyen de base;Tiens ça fait longtemps qu’on n’a plus parlé de l’Europe on relancera une question qui interessera beaucoup de monde “La Turquie et l’Europe”.Cela permettra aux partis qui auront perdu les présidentielles de se refaire une santé.La politique,qu’elle soit nationale ou européenne,est une affaire d’opportunité pour détourner le citoyen des vrais problémes.Faut-il laisser la turquie entrer dans l’Europe? La question n’a plus aucun sens,les turcs sont déjà là,et beaucoup d’autres également et je ne suis pas certain que ce soit eux qui posentle plus de problèmes. Il serait interessant de connaître les origines des immigrés qui sont le plus assistés en Europe,avec tous les fonctionnaires qui se trouvent à Bruxelle cela devrait être possible.Le citoyen contribuable européen à bien droit à cette information. A ceux qui seraient tentés de trouver une connotation raciste à cette question je répondrais que c’est du réalisme et du pragmatisme,à l’heure de la mondialisation nous n’avons pas le choix.Il faut savoir ce que l’on veut, et surtout,ce que l’on ne veut pas.

    15 juin 2006 à 16 h 36 min

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