La réforme Obama du système de santé : un enjeu majeur

La réforme Obama du système de santé : un enjeu majeur

Pour sa réforme de l’assurance maladie, le président Barack Obama est au milieu du gué. Ou plutôt dans la phase parlementaire, c’est-à-dire politicienne.

Sa promesse de procurer une couverture santé aux 47 millions d’Américains qui en sont dépourvus a sans doute été un des éléments de sa popularité et de son élection en novembre dernier. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres !… Les choses sérieuses ont donc commencé, il y a trois mois.

Il a d’abord fallu admettre que 25 % environ de cette population de 47 millions de personnes n’avaient pas de couverture d’assurance maladie parce qu’elles n’en voulaient pas, et à aucun prix ! D’autres, parce que cette couverture leur paraissait trop chère. D’autres, parce qu’elles attendaient d’entrer comme ayant-droit dans un système public, « medicaid » pour les pauvres, ou « medicare » pour les vieux. D’autres encore, parce qu’elles se font soigner gratuitement par toutes sortes d’associations, souvent émanant des universités. Bref, le caractère non universel de la sécu américaine n’était donc pas si scandaleux que ça…

Il est vrai que pour 60 % des Américains, la couverture santé est largement, voire totalement, prise en charge par les entreprises. C’est un avantage social important. Mais, avec la crise économique, et le renchérissement constant des soins, il devient un fardeau insupportable. Associé aux fonds de retraites d’entreprises, c’est lui qui a failli mettre KO l’industrie automobile tout entière.

Obama avait une deuxième raison pour vendre son projet de réforme de l’assurance santé : globalement les États-Unis consacrent 17 % de leur PIB aux dépenses de santé, alors qu’elles ne sont « que » de 11 % en France. Pour des résultats très voisins. Tout ça, selon Obama, parce que les compagnies d’assurances, les laboratoires pharmaceutiques et même les professionnels de santé s’en mettent plein les poches !
Le président veut donc créer une concurrence publique à l’offre privée et évidemment cette dernière a des raisons de craindre que les prix subventionnés de la première fassent venir à elle tous les clients. Labos et assureurs sont donc vent debout !…

Mais tout ça ne serait rien pour le président si les experts des commissions compétentes du Congrès n’avaient pas fait tourner leurs calculettes et prévenu l’opinion que la réforme allait coûter très cher aux contribuables, quelque 1 000 milliards de dollars en quelques années, alors que le Trésor public américain n’a jamais été aussi endetté !

Du coup, les représentants démocrates modérés des États du sud conservateur, dont le mandat vient à renouvellement en novembre 2010, comme tous les deux ans, ne veulent plus voter sans état d’âme la belle promesse du nouveau président. En gros, on en est là…
Que va-t-il se passer ?

À court terme, le bras de fer est engagé et tout dépendra d’une poignée de parlementaires, et plus particulièrement de quelques sénateurs, dont le mandat n’est renouvelé que tous les six ans, et qui sont souvent plus coriaces que les représentants…
Et, à long terme, à supposer que la réforme, même amendée, soit votée, quelles en seront les conséquences ?

La réforme d’Obama doit être replacée dans la longue histoire mondiale de la sécurité sociale et de sa branche maladie. Elle commence en Europe avec les sociétés mutuelles dès le début du XIXe siècle, se poursuit avec Bismarck en 1871, Beveridge en Grande-Bretagne et Pierre Laroque en France en 1945, et n’apparaît, modestement, aux États-Unis qu’en 1965.

Qu’importent d’ailleurs les modalités et les variantes : il s’agit toujours de transférer de la personne à la collectivité une part essentielle de sa responsabilité naturelle. Et, comme le déjeuner n’est jamais gratuit, il y a, à la clé, toujours plus de redistribution, c’est-à-dire toujours moins de revenus libres pour les individus.

L’assurance maladie, la sécurité sociale en général, sont des institutions qui appartiennent à la même famille que l’éducation nationale gratuite et obligatoire, l’emploi garanti à vie, le logement « social », le contrôle général des prix, le monopole des banques centrales et leur monnaie de papier, ou la retraite par répartition… : tout le monde sait parfaitement qu’elles ne peuvent pas fonctionner durablement. À court terme, elles peuvent générer des illusions. Puis il faut gérer la pénurie, et parallèlement éviter ou mater les révoltes… Toutes ces institutions, mortifères, ne peuvent donc se maintenir, temporairement, qu’en s’appuyant sur la violence d’État.

Pour Obama, l’enjeu de sa réforme est sa réélection en 2013. Pour l’Amérique, l’enjeu est ni plus ni moins que sa démocratie.

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Comments (8)

  • Anonyme Répondre

    Il ne faut pas oublier une chose : la différence majeure entre la France et les USA est qu’en France, la couverture santé est obligatoire (Sécu ou mutuelle ou assurance), alors qu’aux USA, elle ne l’est pas.  Donc libres sont les gens d’en avoir une ou de faire l’impasse pour diverses raisons.

    Le problème est qu’en France, on compare ce qui n’est pas comparable.  Voici un article sur le web que m’a envoyé une de mes soeurs et qui met les pendules à l’heure.

    http://www.chirosystem.com/FPDF/secu1.pdf

    Instructif je dois dire.

     

    30 août 2009 à 19 h 58 min
  • HansImSchnoggeLoch Répondre

    Ozone <<Mais quand ferez vous amende honorable,saviez vous que les sociéres animales qui prosperent sont les grégaires,les individualistes sont au bord de l’éxtiction.>>
    Si vous voulez vivre dans une fourmilière, une termitière ou une ruche, libre à vous. Mais prenez garde de ne pas tomber dans la caste des ouvrières sans cela vous n’auriez rien à rigoler.
    Affirmer que les individualistes sont au bord de l’extinction est péremptoire, beaucoup d’animaux ne sont grégaires que passagèrement et s’en passent sans trop de problèmes le reste du temps. Il en est de même pour les humains. Vous ne voudriez tout de même pas que votre voisin vienne de temps en temps vous emprunter votre femme quand la sienne est indisposée ou vous ponctionne votre porte-monnaie *) quand ses finances sont à sec?
    Posez donc la question aux ex-Soviétiques qui devaient partager beaucoup de lieux communs dans leur appartement vétuste au paradis du prolétariat?

    *) le fisc s’en occupe déjà suffisemment.

    28 août 2009 à 16 h 35 min
  • grepon Répondre

    "Sa promesse de procurer une couverture santé aux 47 millions d’Américains qui en sont dépourvus a sans doute été un des éléments de sa popularité et de son élection en novembre dernier."

    Ca je doute tres fortement.

    Element de plus que Barack et les medias evitent comme la peste de faire mention:   Les couts enormes imposes sur les medicins, hopitaux, boites pharma, et al, PAR LES LAWYERS QUI PULLULENT ET LES JUGEMENTS CIVILS DEMESURES.  Voila que l’assurance des medecins, techniciens annexes, et hopitaux contre jugements civil est tres couteux, et encore pire, tres invasive, car ils changent leur pratiques pour eviter ce genre de catastrophes dans.  Ils commandent tests et scans, et font des therapies et interventions non pas parceque statistiquement c’est meillieur pour le client, mais pour se couvir les fesses si jamais un lawsuit aurait lieu, avec jugemetn propre a detrurie leur vie et peser lourde contre leur hopitale*le cas ou).  

    Et pourquoi Barack(un avoctat) et les democrats au Congress(tres majoritairement avocats) ne disent pas un mot dessus?   Les "Trial Lawyers" lobby aux Etats Unis sont parmi les plus puissant lobbies sinon les plus puissant, etant donne que les legislateurs sont des avocats eux-meme, mais surtout parceque ils donnent, et donnent, et donnet aux politiciens, et surtout aux Democrats.

    Pour voir comment une limitation des jugements (on dit "torts" en anglais) dans des cas medicales, il n y a que a aller au Texas, ou l’etat a choisi de limiter les jugements, et d’offrir des protections dans le loi aux hopitaux et medicins et techniciens annexes contre l’abus des lawyers.   Resultat?   Comme pour le reste de businesses et professions, le secteur sante va mieux qu’aillieurs aux Etats-Unis.    L’influx d’investissment, de medecins, de chercheurs, de boites annexes divers est impressionnant.    Et voyez, ce n’est pas suite a des avantages fiscale ou autre cadeaux de genre.   Ce n’est QUE des protections contre des lawsuits et jugements abusive.    Ca couple aussi le cout des soins au clients aussi.  

    En bref, le reste de l’iceberg dans cette histoire de secteur sante aux etats-unis, c’est largement l’activite des lawyers.    Pour le reste, il y a des "mandats" dans chaque etat reglementant ce que les boites d’assurances doivent et ne peuvent pas faire qui sont de nature demagogigue et illogique, qui rend l’assurance trop couteux.      Pour info, l’assurance est sense etre la pour eviter d’etre lamine par des depenses depassant l’ordinaire, et strictement pas pour couvrir des soins ordinaires, peu grave, ou peu couteux.   Ces soins sont guarantit a arrive a presque chacun necessitant ordinairement peu de depenses, mais neamoins les etats demandent que les boites d’assurances les couvrent.    C’est stupide, car le cout et le temps(qui coute!) consacre a la paperassie pour l’intervention depasse tres largement le cout de l’intervention pour tant de petits soins.  Ainsi les medicins et leur divers aides sont inonde de ce paperassie insense, au lieu de passer leur temps presque entierement a soigner.   Sachez aussi que tout cette documentation sert aussi a se proteger en cas de…proces civil.   

    28 août 2009 à 15 h 07 min
  • HansImSchnoggeLoch Répondre

    <<Toutes ces institutions, mortifères, ne peuvent donc se maintenir, temporairement, qu’en s’appuyant sur la violence d’État.>>
    Un crime de sang est en définitif moins réprimé qu’un délit contre ces institutions. Voyez les pénalités imposées à des entreprises ou particliers pour le moindre petit oubli ou omission. Oublis ou omissions qui la plupart du temps sont à imputer à des incohérences ou contradictions de la législation.
    L’état a bien compris qu’une ligue de citoyennes et citoyens contre ses pratiques signifierait sa fin. De là la violence exercée contre ces derniers.

    28 août 2009 à 13 h 39 min
  • Anonyme Répondre
    27 août 2009 à 10 h 35 min
  • HansImSchnoggeLoch Répondre

    SAS <<il peut être exprimé par cette formule : la générosité obligée.>>
    La première générosité est celle qui consiste à tout faire pour éviter de ponctionner celle de ses voisins. Cela implique la responsibilité, qualité rare en ces temps cyniques.

    26 août 2009 à 18 h 05 min
  • ozone Répondre

    "tout le monde sait parfaitement qu’elles ne peuvent pas fonctionner durablement."

    Mais quand ferez vous amende honorable,saviez vous que les sociéres animales qui prosperent sont les grégaires,les individualistes sont au bord de l’éxtiction.

    Jetez un oeuil a l’article présenté par SAS sur le fil sortie de la crise

    26 août 2009 à 13 h 51 min
  • sas Répondre

    tres bon article mr dumait…ceci etant le sort de la france m interesse un peu plus et si  on s inspirait de ce type….

    Sloterdijk joue les pourfendeurs de l’Etat fiscal, la presse adore…
    Régis Soubrouillard – Marianne | Lundi 10 Août 2009 à 07:01 | Lu 2751 fois
     
    Farouche défenseur des systèmes de redistribution et connu pour sa virulence à l’encontre des dérives du système néolibéral, le philosophe allemand Peter Sloterdijk signe un texte déroutant dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung où il dénonce l’Etat fiscal. Repris par Courrier International, certains passages laissent pourtant suggérer que l’exercice relève presque de la farce. Les deux journaux seraient-ils tombés dans le panneau ?
     
    Le philosophe Peter Sloterdijk
    C’est une véritable provocation à laquelle s’est livré le philosophe allemand Peter Sloterdijk. Dans un texte paru dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung, le philosophe livre une lourde charge contre l’état fiscal. D’ailleurs l’article a eu un certain retentissement, abondamment cité dans la blogosphère allemande, on y fait référence sur les sites libéraux français et l’hebdomadaire Courrier International y consacre ses pages Débat sous le titre « Oui, le pauvre exploite le riche ».

    C’est que Sloterdijk tape fort : « des Etats fiscaux organisés réclament chaque année la moitié des bénéfices économiques de leurs classes productives pour les remettre au fisc, sans que les personnes concernées tentent de trouver leur salut dans la réaction la plus plausible qui soit, la guerre civile antifiscale. Une fois ces considérations faites, on comprend aisément pourquoi la question le capitalisme a-t-il encore un avenir ? est mal posée. A l’évidence, nous ne vivons pas le moins du monde dans un système capitaliste – comme le suggère de nouveau, depuis peu, des discours aussi irréfléchis qu’hystériques. Nous vivons dans un ordre des choses qu’il faut définir, avec prudence, comme une forme de semi-socialisme animé par les médias de masse, qui se développe grâce à l’Etat fiscal… ».

    Ou encore : « Les observateurs libéraux de ce monstre kleptocrate, pilier de l’Etat providence actuel, ont le mérite d’avoir attiré l’attention sur les dangers inhérents à ce système : la surréglementation, qui réfrène à l’excès l’élan entrepreunarial; la surimposition qui pénalise la réussite ; et le surendettement, où la rigueur budgétaire – dans le secteur public comme privé – se trouve contrecarrée par une frivolité spéculative ».

     
    Sloterdijk: Sans impôts, les nations auraient disparu
    Peter Sloterdijk n’est pas spécialement connu pour ses affinités avec les penseurs libéraux. En 2005, dans la revue Mouvements, questionné sur « le partage du confort » et la complexité des méthodes de redistribution, il répond : « les forces de redistribution à l’œuvre ont toujours été liées à l’Etat, qui dispose du privilège d’imposer les impôts ; c’est la réalité majeure de l’âge contemporain. On ne peut pas se fier à la générosité des individus si on ne l’ordonne pas. Ce fondement moral des collectivités modernes est tout à fait paradoxal ; il peut être exprimé par cette formule : la générosité obligée.
    Les impôts permettent de céder à une totalité anonyme une partie des revenus – et des parties croissantes si vous êtes de ceux qui gagnent davantage. Sans ce viol généreux, pas de trésor public suffisamment rempli. Il s’agit du noyau dur de la solidarité nationale qui, très souvent, aimerait bien se faire passer pour une solidarité sans frontières. On a parfois trop tendance à l’oublier : les nations auraient disparu depuis longtemps s’il n’y avait pas eu la redistribution fiscale. La plupart du temps, la population a des vues absolument erronées sur ce qui se passe réellement au niveau de la fiscalité et de la gestion de la richesse moderne. A partir du moment où nous prendrons réellement conscience de la richesse qui est la nôtre, un nouvel impératif de générosité deviendra inévitable ».
     
    Sloterdijk, l’insaisissable
    L’impôt : une générosité- dont Sloterdijk se désole qu’elle soit « obligée »– mais aussi le noyau dur de la solidarité nationale sans lequel les nations auraient disparu depuis longtemps. Difficile d’être plus clair. Encore récemment en 2009, dans un de ses derniers ouvrages « jours de colère, l’esprit du capitalisme », Peter Sloterdijk abordait le mécanisme de la pyramide de Ponzi, méthode de spéculation à l’origine de la généralisation de l’hyperlibéralisme dans les anciens pays de l’Est par le système des « banques pyramidales » ou encore plus près de nous les milliards récoltés par le désormais célèbre Bernard Madoff.

    Aussi, le texte du Frankfurter Allgemeine Zeitung repris par Courrier International prend parfois des allures surréalistes. Evoquant la « kleptocratie étatique », Sloterdijk souligne qu’en ce système « la corruption reste un facteur limité », prenant pour exemple « la situation dans la Russie post-communiste, où un homme parti de rien comme Vladimir Poutine a pu amasser, en quelques années passées à la tête de l’Etat, une fortune personnelle de plus de 20 milliards de dollars ». On ne peut s’empêcher de pouffer et se demander comment interpréter  ce texte largement critiqué par des universitaires allemands, navrés de cette critique de l’Etat fiscal surtout de la part d’un recteur d’université rémunéré par l’Etat.

    Farce ? Provocation ? Retournement brutal de veste ? L’exercice relève plutôt de la figure de style et rappelle le déconcertant écrivain russe, Alexandre Zinoviev, l’un des plus talentueux pourfendeurs de l’Union Soviétique qui préférait délaisser les extrêmes pour la norme, décrivant le communisme au quotidien : « Quelqu’un de beaucoup plus dangereux qu’un dissident ou un opposant, parce qu’à lui seul, il dynamite tout un système en le décrivant » disait de lui Le Figaro, à sa mort en 2006. Toujours soucieux de prendre ses contemporains à rebrousse-poil, Sloterdijk démontre là qu’il maîtrise l’art de la déroute.

    26 août 2009 à 13 h 38 min

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