Le crépuscule de la démocratie occidentale

Le crépuscule de la démocratie occidentale

Au dernier sommet de Davos, les pays émergents, que l’on nommait il y a dix ans les pays du tiers-monde, ont fait la morale aux démocraties américaines et européennes : vous ne pouvez, disaient-ils, rester avec de tels déficits et nourrir une telle entropie !

L’Amérique du nord, comme l’Europe, connaît des déficits abyssaux, ubuesques, scandaleux, de l’ordre de 8 à 10 % annuels ; le tout dans une indifférence à peu près générale. Car on a d’autres chats à fouetter quand on se préoccupe avant tout, comme nos contemporains, de la vie sexuelle de Jennifer Aniston ou de celle de lady Gaga, n’est-ce pas ? L’affaiblissement militaire occidental, incapable de régler la question afghane ou de lancer une intervention en Libye, est aussi parodique. Il est vrai qu’il n’y a plus de courage guerrier, mais des budgets militaires, et un état d’esprit plus très entreprenant…

Ce déclin économique et financier est survenu brutalement à l’orée des années 2000, le mauvais et provocant exemple américain, lancé par le désastreux et oublié Bush, ayant déteint sur l’Europe, elle-même ruinée par sa monnaie scandaleuse et par son aberrante « construction », dont la seule mission, depuis cinquante ans, semble être justement la destruction de la civilisation millénaire qui y avait fleuri. Les bureaucrates et les banquiers réussiraient là où les Tatars avaient échoué. L’irresponsabilité économique et financière de nos élites, c’est-à-dire de nos élus, est en tout cas fascinante. Jamais on n’aura détruit autant de valeur en aussi peu de temps. Cela se fait aussi bien à l’échelle des communes que des États, et dans une grande atmosphère de résignation. Les temps sont eschatologiques et comme on ne sait pas ce que nous réservera 2012, on se tait…

Toutefois, on constate que les gens ne sont pas contents, comme on dit. Il y a les sondages qui donnent raison aux candidats populistes, il y a ceux qui donnent tort aux dirigeants. On connaît l’impopularité des gouvernants français ; on sait celle de Zapatero en Espagne ; on découvre celle de Merkel en Allemagne, conspuée par son électorat alors qu’elle est encensée par les médias et les marchés financiers (cela va souvent ensemble). Mais l’électorat n’est pas si sot et sait maintenant qu’il ne s’en sortira pas à bon compte avec l’opposition : elle lui garantira son lot de déficits, de privations, de scandales et de frustrations. Il ne lui reste qu’à tourner en rond dans sa chambre en se rappelant comme un robot la phrase consacrée de Churchill sur la démocratie comme régime et exercice imposé à l’exclusion de tous les autres. L’électorat ne sait pas à quelle sauce il sera mangé, mais elle risque d’être forte dans les années ou la décennie qui vient. La dégénérescence de la classe politique euro-américaine, tant intellectuelle que morale ou même psychotechnique, dans le cas de l’Italie ou de la Hongrie, est elle aussi exemplaire.

C’est là que je vois un crépuscule de la démocratie, comme système devenu incapable de résoudre les crises. Emmanuel Todd en a fait le sujet de son dernier essai, passé inaperçu, lui qui pourtant ne s’était trompé ni sur la disparition de l’Union soviétique, ni sur le déclin américain, ni même sur la notion de fracture sociale qui met fin, après le reaganisme, à deux siècles de progrès socio-économiques et nous ramène au temps des oligarchies féodales. On en a des exemples précédents.

Le modèle grec est à cet égard exemplaire : aventurisme colonial athénien, pillage de la ligue de Délos, massacre des Méléiens, ruine du trésor, guerres interminables et inutiles, dégénérescence culturelle et tyrannie des Trente. Relisons Thucydide et Aristophane (sublimes Nuées, impressionnants Oiseaux, grandiose Lysistrata : c’est gratuit et c’est sur Wikisource !) et nous comprendrons que ce n’est pas la première fois que la démocratie met fin à l’histoire. Du reste, une fois que les Arabes auront renversé leurs tyrans, ils découvriront que la démocratie, c’est notre système, moins leur tyran. Et ce n’est pas Facebook qui remplira leur caddie.

Je vois donc à court terme, et sans jouer au voyant, une chute des démocraties. Elles peuvent dégénérer en tyrannie, comme le voyait Platon (livre VIII de la république) ou comme dans le cas de notre chère première République. Ou bien susciter une réelle et positive réaction populaire qui amènera de nouvelles élites au pouvoir. Le pire n’est jamais sûr…

Partager cette publication

Comments (3)

  • ozone Répondre

    Bon article

     

    D’autre part,ils nous critiquent ?

    Mais ils devraient nous lécher les pieds

    Nos déficits son le corollaire de leur développement

    Sans la cupidité de nos élites en tous genres est-ce qu’ils auraient pu méttre la main sur autant de technologies de pointe ?

    Le Brésil,pour prendre cet exemple,pays ou dans l’agriculture l’ésclavage exite toujours pourrait t’il se preparer a casser notre agriculture?

    Etc etc

    De quoi ils se plaignent,alors qu’ils devraient dire merci.

    12 avril 2011 à 22 h 04 min
  • shrapnel Répondre

    temps court du politique / complexité des questions Aujourd’hui quel homme politique voit plus loin que le printemps 2012 ? nécessité d’obtenir un maximum de voix / complexité des questions Qui prendra, par exemple, le risque de parler crûment aux Français de leurs retraites ou de leurs déficit ?

    12 avril 2011 à 9 h 51 min
  • sas Répondre

    DEMOCRATIE OCCIDENTALE DEMOCRATIE FRANCAISE…………..modèl bananier et maçonique par excellence…

    Dix personnes bientôt jugées

    R.L. France-Antilles Martinique 09.04.2011

    Un douanier et un commerçant foyalais ont été déférés hier au parquet de France-de-France. Placés sous contrôle judiciaire, ils seront jugés avec huit autres personnes dans le cadre d’un trafic de vêtements volés entre l’hexagone et la Martinique.

    TRAFIC DE VÊTEMENTS VOLÉS. Pour la justice, l’enquête du Service National de la Douane Judiciaire qui dure depuis un an, est assez aboutie. Hier, à l’issue de la garde à vue de deux douaniers, d’une employée d’une société de transit et d’un commerçant foyalais, une date a été arrêtée pour un procès. Le 25 mai prochain, dix personnes sont citées à la barre du tribunal correctionnel pour leur implication plus ou moins importante dans un trafic de vêtements volés entre l’hexagone et la Martinique.
    Hier, deux des quatre gardés à vue de cette semaine ont été déférés au parquet de Fort-de-France. Il s’agit d’un commerçant foyalais implanté à la rue Victor Hugo, suspecté d’être l’organisateur de ce trafic et d’un inspecteur régional des douanes, poursuivi pour avoir sorti les marchandises, en dehors du cadre légal des contrôles. D’après les investigations menées, les écoutes et les auditions des uns et des autres, le commerçant aurait commandité les vols de vêtements dans des boutiques de la région parisienne. Il faisait ensuite acheminer la marchandise dans l’île pour la revendre. Les enquêteurs ont retrouvé la trace de plusieurs mandats envoyés aux employés de ces sociétés, lesquels auraient réalisé eux-mêmes les vols. Tous sont cités fin mai devant le tribunal correctionnel de Fort-de-France. Une employée d’une société de transit à la Martinique a également été mise en cause et entendue cette semaine. Poursuivis diversement pour vols ou recels de vol habituel, ils encourent tous jusqu’à 10 ans d’emprisonnement.
    Complice présumé de ce trafic, un douanier a, pour sa part, été mis en examen hier pour « concussion » . C’est-à-dire que, dans le cadre de ses fonctions, il se serait abstenu de recueillir les taxes légales, en faisant sortir illégalement la marchandise. L’enquête n’a pas déterminé d’enrichissement personnel à son encontre. En garde à vue, il aurait expliqué avoir voulu rendre service. Il encourt 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. Dans le cadre du contrôle judiciaire prononcé hier, le parquet n’a pas demandé d’interdiction professionnelle d’exercer. L’autre douanier placé en garde à vue cette semaine aurait agi sous les ordres du premier.
    Dans un mois et demi, tous les participants à ce trafic devront s’expliquer sur ces faits

    11 avril 2011 à 13 h 20 min

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *