Le massacre de Kadhafi et la barbarie démocratique

Le massacre de Kadhafi et la barbarie démocratique

On est en démocratie. On va vous bichonner aux petits obus.

Le massacre de Kadhafi par des sicaires et des droits communs aura rempli de plaisir tous ceux qui comme moi savent à quoi s’attendre en matière de comportement et de propagande démocratique. Les bêtes humaines et pas immondes qui ont déchiqueté l’ancien leader agité avec qui l’occident avait fait la paix auront montré en tout cas à l’historien et à l’éthologue en quoi consiste un aggiornamento démocratique.

Depuis vingt ans, nous aurons eu droit à un occident en pleine forme avec ses millions de morts pour rien en Irak, ses bombardements en Serbie, ses jugements ineptes de chef d’Etat par des tribunaux privatisés, ses provocations incessantes contre la Russie et l’Europe de l’Est ; nous aurons aussi vu la mutation dégénérative de l’OTAN en organisation du traité de l’Afrique du Nord ou de l’Afghanistan Nord. Il faut en outre ne pas être un allié des Etats-Unis en Obamaland ; c’est le meilleur moyen de finir pendu par les pieds ou présenté comme Moubarak mourant à un tribunal digne de ceux du stalinisme ou du comité de salut public. L’an prochain nous aurons d’ailleurs un autre président black, républicain cette fois, un nommé Cain, un autre à la joue qui tombe, prêt pour l’atomisation de la Chine et de la Russie (qu’ils se le disent !) : le retour à la nature pure et primordiale de la démocratie surhumaine et sacrificielle sera alors total.

Il faudrait un Joseph de Maistre, auteur d’un somptueux traité sur les sacrifices, pour analyser le massacre filmé par les bourreaux, dignes de celui de Ceausescu, de Saddam Hussein et bien d’autres encore. Dans le cas de Kadhafi, pleuré par son infirmière ukrainienne et sa famille, éloquent défenseur (chez Guillaume Durand) de Jésus et par ailleurs bon père et grand-père, jadis reçu en grande pompe dans les jardins de l’Elysée, jadis si proche de Cecilia Sarkozy chargée de récupérer je ne sais quelles infirmières bulgares (jadis c’est en 2007, lors de l’élection d’un certain président je crois), dans le cas de Kadhafi dis-je, le cannibalisme barbaresque s’est ici marié à la barbarie démocratique pour nous proposer un spectacle de choix : le tyran subitement dénoncé par leurs médias s’est retrouvé dévoré vivant par les pitbulls de la rébellion démocratique armée par l’OTAN est conseillée par Juppé et par BHL. On espère qu’ils les recevront bien à l’Elysée à leur tour, et qu’ils nous bichonneront aux petits obus, comme disait Céline.

Je fais appel à Joseph de Maistre justement pour non pas dénoncer – c’est trop tard – mais rappeler les grands moments de la barbarie démocratique. Il faut sacrifier l’ennemi, c’est-à-dire l’hostie, c’est à-dire le manger vivant, explique sommairement notre grand penseur. Avec le christianisme – il le comprend avant René Girard qui lui a tout pris, et sans le dire – l’humanité avait accompli un immense progrès. Mais en 1789 nous sommes retombés dans l’état de grâce du paganisme. Le sacrifice humain est revenu à la mode : à ce jeu la démocratie est la championne du monde, et elle a sa conscience pour elle, comme tout salaud qui se respecte.

La barbarie démocratique, sans remonter à Thucydide que je lis en me couchant, c’est le roi Charles jugé et décapité par l’Angleterre démocratique mué en pétaudière puritaine. La barbarie démocratique ce sont les millions de morts de la révolution française, l’agonie de Louis XVI et de Marie-Antoinette. La barbarie démocratique, c’est le massacre de la famille du tzar et d’une partie de la population slave. La barbarie démocratique, c’est aussi la guerre de Sécession et la croisade de Gambetta après Sedan (un demi-million de morts dans chaque cas). La barbarie démocratique, ce n’est surtout jamais la victoire des idées : c’est le triomphe du plus fort, de la menace, du chantage, de l’extorsion, du carpetbagger et des bombardements. Où que ce soit. C’est le génocide programmé d’une population à Hambourg, Dresde ou Hiroshima, et le jugement ultérieur des peuples et de leurs dirigeants. On comprend qu’à ce train tout le monde devienne un zombie, c’est le seul moyen de survivre au charme discret de la bourgeoisie puritaine. Car dans le domaine des guerres comme dans celui de l’économie, on aura tout déréglementé, c’est le moins que l’on puisse dire…

J’espère que les tortionnaires équipés de Porsche Cayenne, de VTT et de godasses Reebok, qui claironnaient comme des bouffons depuis des mois, seront prochainement ministres, députés, juges, économistes et qu’ils aideront la Libye à entrer dans la zone horreur, pardon dans la zone euro. Et qu’ils joueront au golf avec Juppé, avec en guise de club un cimeterre adapté au nouvel âge d’or démocratique. Peut-être qu’ils auront droit à un hôtel particulier rue Jacob avec les avoirs dégelés de leur défunt pays ?

Je n’ai à offrir que du sang, de la sueur et des larmes, disait Churchill bien inspiré, qui fabriqua la famine de l’Assam en 1942 (treize millions de morts d’après Alain Daniélou) et avait participé aux génocides de la guerre de Boers (98% de femmes et d’enfants morts dans les camps de concentration de l’Afrique du Sud). Aujourd’hui on a des dettes et des serrements de vis en attendant mieux. Cette société démocratique est agonique, elle ne pourra pas s’arrêter. Le destin du spectacle n’est pas de finir en despotisme éclairé, disait Debord, et l’on n’a encore rien vu, me disait Jean Parvulesco avant sa mort. Même si on commence à entrevoir quelque chose grâce aux pitbulls et Obama. Bon appétit pour le XXIème siècle.

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Comments (4)

  • WatsonCorsica Répondre

    yes Nicolas, mais :

    les guerres que Louis XIV menait juste pour s’amuser et passer le temps ?

    En ce temps là, il n’y avait pas la télé – donc pas d’image, pas de réalité !

    Vive le roi !

    Certes, les sociétés avancées démocratiques possèdent d’autres moyens technologiques… Dommage pour Louis XIV qui en aurait bien profité – Et si Charlemagne avait eu des ogives nucléaires, la Chine existerait-elle ?

    Bonnal, relisez juste avant d’écrire de belles phrases vibrantes d’amour pour les anciens régimes,  l’histoire du premier empereur chinois Tsing Che Huang Ti qui vécu bien avant notre ère

    31 octobre 2011 à 11 h 26 min
  • Guillermo Répondre

    Je partage complètement l’avis de quinctius cincinnatus (soit dit en passant quel nom à coucher dehors pour qui n’a pas fait de latin ou lu Astérix !) concernant le très alcoolo-syphilitique British. Cette phrase du sang, des larmes et de la sueur perd toute sa profondeur, tirée de la bouche d’un porc tel que Churchill.

    30 octobre 2011 à 18 h 28 min
  • durandon Répondre

    Je voulais voter contre cet article

    29 octobre 2011 à 10 h 27 min
  • quinctius cincinnatus Répondre

    Pour Churchill vous oubliez les bombardements de Dresde et de Hambourg : des centaines de milliers de civils allemands périssant sous les bombes au phosphore … Jamais je n’ai eu la moindre estime pour pour cet alcoolo-syphylitique qui est,il faut le rappeler , "l’INVENTEUR"des "camps de concentration" dans lesquels périrent des centaines de femmes et d’enfants afrikaaners , pas plus que je n’ai d’admiration pour Louis dit Le Grand qui fit périr les miens dans les Cévennes !

    28 octobre 2011 à 21 h 43 min

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