Proche-Orient : une double opportunité

Proche-Orient : une double opportunité

La semaine dernière, deux événements sans lien entre eux ont changé la donne politique au Proche-Orient. D’une part, Ariel Sharon a fait adopter son plan de retrait de la bande de Gaza par la Knesset ; d’autre part, la succession de Yasser Arafat a été ouverte par son hospitalisation.
On notera au passage que Paris, fidèle à sa tradition d’accueil de divers dictateurs ou terroristes, s’est empressé d’ouvrir les bras au leader de l’OLP.
Ces deux événements laissent penser que la logique politique peut reprendre le dessus dans cette zone du monde particulièrement sensible.
Pendant trop longtemps, Ariel Sharon avait donné l’impression, aux observateurs étrangers, de se comporter en chef militaire. Cela n’a naturellement rien de déshonorant, mais le Premier ministre d’un pays n’est pas seulement en charge de la sécurité nationale. On attend également de lui une vision politique. Or, manifestement, Sharon a pris ici une décision d’homme d’État. Décision courageuse et décision de compromis, tout à la fois : bref, décision politique.
Par ailleurs, l’éviction d’Arafat de la scène palestinienne est celle d’un homme dont la légitimité résidait tout entière dans son action terroriste de naguère. Pour la première fois depuis 1948, le prochain leader palestinien ne sera pas nécessairement un ancien ou actuel chef de bande terroriste. Là aussi, la logique politique pourrait reprendre le dessus.
On peut se réjouir de ce succès momentané de la logique politique, par-dessus les logiques théocratiques ou terroristes.
Mais bien des nuages pèsent sur ce fragile espoir. En Palestine, tout d’abord, où l’on peine à trouver un successeur au vieux raïs : la demi-douzaine de prétendants officiels ne paraît bénéficier ni d’un solide soutien de la rue, ni d’une solide reconnaissance internationale. Il y a donc fort à craindre que ce déclin temporaire de l’Autorité palestinienne ne permette à d’autres organisations de s’implanter plus fermement encore. Je pense, en particulier, aux divers organismes islamistes qui ne se contentent pas d’agir politiquement, mais ont également, outre une action terroriste importante, une action sociale et caritative.
En Israël ensuite, car on ne peut s’empêcher de penser que la constitution de ce pays, très proche de notre ive république, n’est guère faite pour soutenir les décisions courageuses. La majorité d’Ariel Sharon sur ce dossier paraît bien volatile.
Mais, précisément, cette fragilité et cette nécessité du compromis sont constitutives de la politique !

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Comments (6)

  • Enrhumé Répondre

    L’opportunité est unique. Elle ne se renouvellera pas avant très longtemps. C’est maintenant que les isréaliens et les palestiniens doivent se mettre d’accord. Je souhaite qu’ils le fassent au plus tôt et qu’ils acceptent les uns et les autres un compromis même imparfait qui leur permettra à tous de vivre en paix. Je suis convaincu que les palestiniens ont énormément à gagner dans la “fréquentation” des israéliens; j’espère pour eux qu’ils saisiront cette occasion, et en profiteront pour peu que les pays arabes d’une part et les pays européens d’autre part ne s’en mêlent pas.

    12 novembre 2004 à 21 h 43 min
  • Stéphane Répondre

    A Laurent. Non Roosevelt a été surévalué parce qu’il aurait relancé l’économie américaine après la crise de 1929, grâce à son “new deal” (interventionisme étatique qui se traduisait par sa politique de grands travaux notamment) et aussi parce qu’il a fait intervenir les Etats-Unis dans la seconde guerre mondiale aux côtés des alliés. Or aujourd’hui la réussite économique de Roosevelt est de plus en plus contestée. S’il a réussi c’est grâce à la guerre : dès 1940 les chantiers navals, l’aéronautique sont mobilisés au profit de la Grande-Bretagne (lois “Prêts-bails”). Lors de Pearl Harbour les Américains produisent plus de bateaux que les Allemands ne produisent de sous-marins… Sans attribuer la responsabilité de Pearl Harbour à Roosevelt (qui, cherchant un cassus belli, les Américains étant alors dans leur grande majorité isolationistes, sachant l’attaque imminente, pour certains historiens, n’aurait pas protégé la base militaire), on peut lui faire d’autres griefs pendant cette guerre. Vis-à-vis de la France, son obstination à vouloir écarter De Gaule à tout prix, pourtant défendu par Churchill, au bénéfice de Vichy était plus que suspect : après la seconde guerre mondiale il souhaitait établir un protectorat américain en France, dans lequel aurait été maintenu le régime de Vichy (Cf. R. T. Thomas, “Britain and Vichy”). On peut reconnaitre une grande responsabilité à Roosevelt : l’origine de la guerre froide. Par naïveté, il a laissé Staline avancer ses pions en Europe de l’Est car il croyait qu’il y aurait instauré des démocraties (voir la “déclaration sur l’Europe libérée” de la conférence de Yalta). Son manque de fermeté à l’égard de ce dictateur, habitué aux rapports de forces, a été à l’origine des débordements de l’URSS par la suite. Il a fallu toute la tenacité et la lucidité de Truman, sans doute le 3e plus grand président américain du XXe siècle, pour endiguer l’URSS. En fait, Roosevelt a plus de points communs avec Carter qu’avec Reagan !

    11 novembre 2004 à 1 h 27 min
  • Laurent Répondre

    A Stéphane: J’aurai bien mis ROOSEVELT dans les premières places….. Pas vous?????

    9 novembre 2004 à 20 h 30 min
  • Didier Répondre

    Et… N’oubliez pas de remettre Saint Arafat dans son frigo et de fermer la lumière avant de sortir !

    8 novembre 2004 à 10 h 05 min
  • Stéphane Répondre

    En fait, il y a une triple opportunité. La 1ere, quand Sharon s’est séparé de son aile la plus extrêmiste, en faisant adopter par la Knesset un plan de retrait de Gaza, comme le rappelle Jean Rouxel. La 2e par l’écartement naturel d’Arafat. Il était un verrou, un obstacle majeur à la paix au Proche-Orient. Il faut toujours rappeler, beaucoup sont amnésiques ou passent sous silence, qu’en juillet 2000, à Camp David, il a fait échouer les négociations dans lesquelles était abordées des questions de fonds comme la création d’un Etat palestinien. Il ne voulait pas apparaitre comme celui qui aurait “bradé” la Palestine. Il est probable qu’Arafat, n’aurait jamais voulu d’un Etat palestinien de son vivant. La mort d’Arafat serait donc un cadeau du ciel, y compris pour son peuple qu’il entretient dans la haine et le sous-développement. La 3e opportunité est bien sûr la réélection de George Bush. Le fait qu’il soit confortablement réélu, et avec lui le Congrès républicain, malgré ce que disent les jaloux, lui donne une légitimité sur la scène internationale, et notamment européenne, pour forcer une négociation israélo-palestinienne. Le fait également que ce soit le dernier mandat possible de Bush, lui donne les coudées plus franches. Maintenant, avec autant d’atouts, Bush n’a pas le droit d’échouer. S’il réussit il sera le 2e plus grand président américain du siècle, après Reagan.

    7 novembre 2004 à 21 h 16 min
  • F&H Répondre

    Bonjour, Mr Sharon a compris une chose évidente : les palestiennes faisant deux à trois fois plus d’enfants que les israëliennes, Israël est voué à la disparition. Il a compris aussi que le seul moyen pour Israël de vivre, c’est : 1 – Créer un état palestinien. 2 – Faire émigrer dans cet état tous les arabes vivants en Israël. 3 – Imposer l’apartheid en Israël. F&H

    7 novembre 2004 à 8 h 43 min

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