Quelques précisions sur la situation américaine

Quelques précisions sur la situation américaine

 Les média français entretiennent une confusion totale: eux-mêmes ne comprennent rien à ce qui se passe puisqu’ils se contentent de reproduire les commentaires partisans de leurs confrères américains. L’essentiel étant bien sûr non d’informer mais de discréditer les républicains ).

 Une “fermeture du gouvernement”? Qu’est-ce que c’est? Pourquoi faire?

Il y en a eu plusieurs ces 30 dernières années. C’est assez banal sauf si ça dure longtemps; le peuple peut se lasser.

  Il y eut fermeture (très partielle, plus une mini-diète en fait) le 1er octobre ( début de l’enregistrement à Obamacare) parce que le 25 septembre précédent, à 15h, le gouvernement s’était de nouveau trouvé à cours de fonds (malgré le “séquestre” déclenché en janvier par Obama quelques coupes automatiques et la hausse des impôts sur les 2% d’ Américains les plus riches). Cela signifiait qu’à partir de cette date, le gouvernement devait emprunter chaque dollar nécessaire pour le remboursement des intérêts de sa dette souveraine. Ce même 25 septembre, le sénateur Tea Party Ted Cruz monopolisa le micro du Sénat (c’est son droit) pendant 21 heures pour alerter le pays sur le désastre fiscal qu’entraînerait le plan de santé tant vanté d’Obama, puis demanda à la majorité républicaine de la Chambre de ne pas financer ce 4e mammouth qui empêcherait à jamais d’élaborer un budget équilibré.

Pour la première fois, Boehner, le président de la chambre, décide alors de suivre le désir populaire et de tenir tête à Obama. Du jamais vu! Les représentants républicains votent le financement de TOUS les postes SAUF Obamacare. Ils savent très bien qu’ils ne peuvent réussir mais veulent forcer Obama à revoir ce plan qui révulse une large majorité selon tous les sondages. Mais Obama ne veut même pas négocier et c’est lui qui, délibérément, fait “fermer le gouvernement” et veille à ce que cela soit le plus pénible possible pour la population afin de faire porter le blame sur ses “adversaires”: fermeture de parcs nationaux, des cimetières de Normandie, et même de lieux qui sont en fait toujours ouverts!

 Les républicains lui demandent alors de reculer d’un an son plan impopulaire ou qu’il accorde au moins aux individus d’être exemptés de l’obligation d’acheter l’assurance santé fédérale comme il en a exempté unilatéralement et illégalement car au mépris de sa propre loi lui-même et ses collaborateurs,les élus du Congrès et leur personnel, les syndicats, les entreprises. Quatre fois en 10 jours, les républicains (qui ont voté tout le reste, même les services dits “non-essentiels”) essaient d’obtenir une négociation. Refus cinglant de la part d’un président qui s’assoit volontiers avec Putine et Rouhani mais ne négocie pas avec ses compatriotes et volée de termes outranciers pour désigner ceux qui osent le défier: incendiaires, preneurs d’otages et même jihadistes…

 Quand même, de quel droit les républicains utilisent-ils la Chambre pour s’opposer au “budget d’Obama”?

C’est au Congrès et surtout à la Chambre de légiférer en matière de budget. Sous Obama, aucun budget n’a pu être voté, même en 2009 alors qu’il avait une majorité dans les deux chambres. C’est donc la 5e année que le congrès est en dysfonctionnement, dans l’incapacité de remplir la première de ses obligations qui est d’établir un budget équilibré chaque année en septembre pour l’année suivante. En l’absence de budget, les législateurs doivent voter toutes les six semaines une Continued Resolution, procédé qui “continue à autoriser”les dépenses sur le dernier budget voté; or, ce dernier budget, voté par l’Administration Bush en 2008 était exceptionnellement élevé puisqu’il finançait le TARP (Plan de relance Bernanke-Paulson pour cause de crise) et avait été alourdi par la plan de relance d’Obama en février 2009 .

 Donc, les démocrates menés par Reid, trouvent commodes ces “continuations” qui leur permettent de dépenser et de “redistribuer” à tours de bras les deniers publics. Mais les gens du Tea Party voient le budget fédéral en pères de famille, comme si c’était leur budget personnel. Leurs élus ne font donc que les représenter lorsqu’ils demandent un peu de retenue. Ils sont à juste titre angoissés par la folie dépensière d’Obama et la liste sans fin des gaspillages et fraudes qui creusent les déficits, déficits qui alourdissent une dette publique passée de 9 trillions de $ au départ de Bush à 17 trillions après cinq années d’Obama. La position des démocrates est indéfendable. A lui seul, Obama est presque parvenu à doubler la dette de tous ses prédécesseurs!

 Alors, les médias et l’opinion devraient s’inquiéter qu’il faille emprunter encore et toujours plus pour seulement payer les intérêts de cette dette et de voir ce président qui n’a de nouveau plus un dollar en poche réclamer rien moins qu’ une “continuation” de plus, sans discussion, ainsi qu’ un trillion de dollars de plus de hausse du plafond de la dette, cela aussi sans discussion, sans quoi l’Amérique, menace-t-il, ne pourra pas honorer son échéance.

 La Chambre est complètement dans son rôle dans son opposition à un exécutif autoritaire et intransigeant. C’est le fameux équilibre des pouvoirs. Notons aussi que si Obama a un mandat électoral, les représentants à la Chambre en ont un tout aussi valide et même plus légitime car plus proche du peuple: ils se représentent devant leurs électeurs tous les deux ans et doivent les affronter lors de chaque congé. Ils sont l’expression directe du peuple. C’est çà la démocratie constitutionnelle. 

Mais les républicains ne perdent-ils pas tout crédit à se laisser mener par ces extrémistes que sont les groupes Tea Party ?

C’est là le mensonge officiel: que le GOP serait noyauté par un groupe de “dangereux extrémistes”. La réalité est que les élus Tea Party ne sont qu’une minorité à la Chambre mais ont une influence certaine; ils ont été élus justement pour rappeler aux mous et aux complaisants qu’ils n’ont pas à se laisser intimider par des démocrates agressifs ni se laisser corrompre par les lobbies et n’ont de comptes à rendre qu’à leurs électeurs.Ils font fausse route en cédant à la panique au moindre sondage défavorable et c’est à force de compromis douteux passés avec les démocrates ( et toujours sans rien en échange) que le pays en est là.

  Mais élus conservateurs et Tea Party rassemblés n’ont pas encore réussi à sauver le parti républicain de lui-même ni de sa destruction assurée si rien ne vient entraver Obama. Clairement, Obama veut écraser toute dissidence et pour cela doit détruire le GOP. En fait, c’est le parti démocrate qui, lui, est effectivement noyauté par des radicaux de gauche, les soixante-huitards américains, depuis une quinzaine d’ années. Ces gens là, tout comme Obama, “organisateur de communauté” de son état, connaissent à fond les Règles pour radicaux de Saul Alinsky. Le refus absolu de négocier, c’est une de ces règles d’or que l’on voit Obama mettre en pratique actuellement car “négocier donne une dignité humaine à l’ennemi (pour Obama tout républicain est un ennemi) et il faut en revanche ridiculiser sa demande”…

 Pourquoi néanmoins prendre le plan de Sécu d’Obama en otage? Quel rapport avec les dépenses? 

D’abord, rien ni personne n’est pris en otage! 

  La Chambre non seulement à le droit de financer ou non ce plan mais ce cadeau empoisonné lui a été confié  expressément par décision de la Cour Suprême en juin 2012. Le Juge John Roberts a décidé qu’Obamacare était “constitutionnel”. En fait, il ne l’est pas puisque nul ne peut forcer les citoyens à acheter un produit. Roberts n’aurait pas voulu être le premier juge suprême à s’opposer au premier président noir…Il a utilisé un faux fuyant en considérant que la question était fiscale et relevait donc de l’autorité du congrès.

 Les conservateurs ont toutes les raisons de vouloir empêcher la mise en vigueur de ce projet. Il couvre un sixième de l’économie, ne résout aucun des problèmes liés à l’assurance et à la santé aux Etats-Unis. Il est d’une complexité extrême, profondément inégalitaire puisqu ‘il favorise certains groupes aux détriments d’autres, qu’il ne tient aucune des promesses solennelles d’ Obama et qu’il représente la hausse d’impôt la plus importante de l’histoire du pays. Il faut bien comprendre que toutes les lois d’Obama ont le même but: redistribuer. C’est par la médecine socialisée qu’un gouvernement tient ses citoyens et le risque majeur, c’est qu’une fois ce plan institutionnalisé, il sera impossible de le révoquer. C’est bien ce que veulent les démocrates: habituer les masses, et les électeurs à venir, aux subsides, cela va de pair avec le projet de naturalisation massive des millions d’immigrés illégaux.

Les républicains ne veulent pas attendre que le plan de santé craque de lui-même sous son propre poids. Et notons bien ceci: le plus inacceptable pour eux, c’est qu’en plus c’est le Services des Impôts qui doit décider de l’égibilité à la gratuité d’Obamacare pour les uns, des amendes à payer pour ceux qui ,n’ayant droit ni aux crédits d’impôts ni aux subsides, refuseraient de participer, des informations personnelles à stocker sur fichiers, etc. Or, l’ IRS est actuellement soumis à diverses enquêtes pour son harcèlement méthodique, depuis 2009 , contre les groupes opposés à la politique d’Obama et notamment les Tea Party. Là encore, il est contraire à toutes les normes qu’ un service public puisse avoir un tel pouvoir sur les citoyens à plus forte raison un service discrédité.

 Est-ce une raison suffisante pour faire défaut comme le risque se profile pour le 17 octobre?

Cela n’a rien à voir. Si l’Amérique faisait défaut, ce serait uniquement parce que le président l’aurait décidé. Le gouvernement reçoit 250 milliards de $ chaque mois des divers impôts et taxes et le service de la dette, c’est 25 milliards, soit le 10e de la somme due. Aucun président, jamais, n’a fait défaut en 237 ans de république.

De plus, c’est la 8e fois en cinq ans que ce président réclame une hausse de la dette! Il a ainsi alourdi la dette de 43 000 $ pour chaque ménage qui paie des impôts. Depuis la dernière rallonge, le 18 mai 2013, il a dépensé 300 milliards de $ ! C’est le rythme pour trouver l’argent des allocations aux”pauvres” qu’il a doublés, aux handicapés eux aussi doublés, et les fonds pour toutes sortes de programmes dits sociaux comme la distribution de téléphones portables pour plus de 2,5 milliards. La fraude seule occupe des milliers de fonctionnaires . C’est le règne absolu de la folie.

 Les républicains, qui ont eu affaire l’été dernier à leurs électeurs en colère, essaient seulement de ne pas recharger la carte de crédit nationale sans cette fois-ci obtenir au minimum une réduction des dépenses discrétionnaires (celles dont le congrès peut décider) et aussi un début de réforme structurelle pour couper de façon significative dans les dépenses automatiques dues aux programmes sociaux à bout de souffle de l’état-providence_sans quoi c’est tout le système qui s’effondrera. Où sont les extrémistes? Les républicains qui veulent faire entendre raison à l’autre camp ou ce président dangereux qui n’hésite pas à provoquer un début de panique financière par ses déclarations infondées? 

 L’agence Moody et le WSJ ont eu beau rappeler que le président bluffe car il doit se conformer à la loi votée par les deux chambres en mai 2013. Cette loi, qu’il a refusé de signer l’oblige à donner la préséance aux créditeurs. Toutes les autres dépenses, y compris les retraites, passent en second et peuvent être ré-échelonnées. Il y va du crédit du pays. Faire défaut serait un acte se sabotage délibéré et pourrait provoquer une crise combinant 1929 et 2008 en une seule. Imaginons que tous les créditeurs n’ayant plus confiance veulent être remboursés ( et ne se contentent plus des intérêts ), çà, ce serait le véritable précipice fiscal et non plus un spectre lointain. Nous sommes tous concernés par cette  faillite possible de l’Amérique parce que nous serions vite touchés et qu’il n’y a aucune entité capable de faire pour la première économie du monde ce que l’on n’arrive même pas à faire pour la Grèce.

 Obama osera-t-il aller jusqu’au bout de son poker menteur, certain qu’il pourrait encore être soutenu par les média complices? 

Même si la situation se détend vraisemblablement parce que les républicains l’en croient capable et auront encore cédé, il reste trois longues années à tenir et la question tôt ou tard va resurgir. 

 Alors, si les républicains obligent une fois de plus Obama, à quoi tout cela aura-t-il servi?

Et bien, pas à rien! Les républicains ont démontré plusieurs points: déjà, une partie du public endormi a pris conscience de la nocivité d’Obamacare à présent que le plan commence à les frapper et beaucoup ont découvert le vrai visage du président pour la première fois. Ils ont un peu souffert de la fermeture de certains services mais ont aussi compris que la majorité de ces services ne sont pas indispensables du tout. Obama a pu se faire élire et même réélire ( et le public saura un jour comment) mais hors du périphérique de Washington, il existe le pays profond qui a élu 30 gouverneurs conservateurs. Grâce à eux, les parcs nationaux n’ont pas attendu l’argent fédéral et ont ré-ouvert les sites arbitrairement fermés, prouvant les bienfaits que seraient des privatisations massives. Bref, la société civile a compris grâce à une situation concrète qu’il lui faut reprendre son destin en main et que l’Etat est la plupart du temps le problème et rarement la solution. Enfin, on a vu ce que le GOP pouvait faire contre des circonstances adverses pour peu que ses diverses composantes s’entendent, même si l’expérience aura été de courte durée. 

Évelyne Joslain
Derniers ouvrages parus :
« Obama: de la déconstruction
de la démocratie » (Muller)
« Tea Party » (Picollec)

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Comments (5)

  • arthur Répondre

    Excellent article qui remet les choses en place. Lire a ce propos tout ce qui concerne le Shadow Party Democrat et ses liens avec George Soros dont le but est de detruire l’Amerique par le biais de la societe ouverte…

    Il faut savoir aussi que la reelection de BHO a ete le resultat de multiples fraudes en particulier dans l’Ohio et le Michigan …

    En ce qui concerne l’Obama Care il est clair que les difficultes actuelles rencontees par les futurs assures pour souccrire aun plan d’assurance montre que ce projet est totalement inapplicable. Voir la mise en cause de Sebelius.

    21 octobre 2013 à 2 h 16 min
    • quinctius cincinnatus Répondre

      il est clair que l’Obamacare est une forme ” sanitaire ” des sub-primes … avec les conséquences prévisibles que l’on sait .. Si les Américains veulent être en bonne santé, cela ne tient qu’à eux : changer de mode de vie et de paradigmes économiques … mais cela se ferait aux détriments des puissances ” financières ” ; tout le problème est donc là !
      Ezra Pound avait bien levé le lièvre dès 1946

      21 octobre 2013 à 9 h 52 min
  • BRENUS Répondre

    Quinctius. Comprenez mr. zoroatre qui ne parvient pas a s’extraire de la pensée unique française. Genre :voius avez perdu les élection et il ne vous reste qu’a fermer votre g..le et passer à la caisse. Mais si, d’aventure, vous deviez revenir au pouvoir, nous considèrerions comme notre devoir de nous opposer à tout et pratiquer la désobéissance civile. Seul l’effondrement généralisé amènera, peut-être, ces cerveaux formatés a admettre autre chose que leur doxa gaucho-faschiste.

    19 octobre 2013 à 15 h 49 min
  • quinctius cincinnatus Répondre

    Tout à fait étonnant que ce bon article que j’ai largement transmis ne fasse l’objet d’aucun commentaire sauf celui de Zoroastre
    En réponse à @ Zoroastre : … c’est TOUT SIMPLEMENT l’expression démocratique d’une partie du peuple américain … blanc , celui du Tea Party qui veut que les U.S.A. redeviennent un pays d’hommes libres et non soumis aux … banquiers de New-York !

    19 octobre 2013 à 9 h 41 min
  • Zoroastre Répondre

    Depuis quand un parti qui a perdu une élection et n’a pas su obtenir l’aval de l’électorat – en l’occurrence le parti républicain -est-il habilité à faire du chantage tout à fait contraire à la constitution, à menacer la stabilité monétaire et économique du pays et du monde entier, pour avoir gain de cause ? Le plan de santé dit “Obamacare” a été entériné dans la plus complète légitimité, y compris par la cour suprême des E.-U. Le Tea Party représente une minorité extrêmement vociférante et peu soucieuse des réalités. Ce n’est pas un modèle à suivre dans une démocratie.

    17 octobre 2013 à 20 h 48 min

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