Vente des sous-marins et irénisme français

Vente des sous-marins et irénisme français

Si les choses se sont passées comme on nous le dit il y a de quoi être en colère contre le trio anglo-saxon.

J’ai peine à croire que le président français n’ait pas été pré-alerté.

Mais la manière, en tout cas, reste indigne de pays avec lesquels nous sommes alliés depuis plus d’un siècle.

Et le Royaume-Uni et l’Australie n’ont pas hésité à faire cette annonce depuis la capitale du « grand frère » bénéficiaire, en outre, du « hold-up ».

Dur à supporter – et à excuser.

Nous avons le droit d’être vexés.

En fouillant un peu dans un coin de notre tête, souvenons-nous cependant que nous avons fait, nous aussi, sous M. Hollande, un coup tout aussi pendable aux Russes en refusant au dernier moment une vente de frégates pratiquement terminées et payées.

Les indignations sont changeantes.

Quant au fond, il faut essayer de garder la tête froide.

Quand l’Australie dit que ses besoins ont changé, on peut (presque) la croire.

Mais on peut regretter qu’elle ne s’en soit pas aperçue plus tôt.

Car ce n’est pas un scoop de découvrir maintenant que les performances des sous-marins à propulsion nucléaire sont supérieures à celles des sous-marins classiques : rayon d’action, y compris en plongée, quasi illimité, discrétion.

Or ce contrat avec la France est vieux de 5 ans.

Regardons une carte.

Depuis quelques années, la situation stratégique dans le Pacifique a évolué et a vu les tentations hégémoniques de la Chine s’accroître, sa puissance militaire grandir.

Elle inquiète tout le monde.

L’Australie, c’est un continent : 14 fois la France en superficie, mais seulement 25 millions d’habitants.

Elle retrouve le même sentiment de vulnérabilité que face au Japon au XXe siècle.

Elle cherche des alliés dont elle peut espérer un soutien politique et militaire crédible.

Qui peut lui garantir ça ?

La France ?

Le souci stratégique a noyé le respect d’un traité commercial.

Quand « Le Figaro » écrit que « c’est un sacré coup dur pour la stratégie indopacifique de la France et de l’UE qui, par ce contrat, pouvaient asseoir leur crédibilité dans la région », cela prouve qu’on continue à rêver, à ne pas voir les choses en face.

La crédibilité repose d’abord sur la capacité à agir, sur la force potentielle donc, et bien sûr la volonté politique qui va avec.

Or l’Europe n’existe pas politiquement ni militairement.

Pas de quoi rassurer un État situé aux antipodes.

Qui d’autre que les États-Unis peut être ce garant – même si ce choix n’est pas sans doutes ni arrière-pensées ?

Je serais d’ailleurs très surpris que le Japon, Taïwan et la Corée du Sud, d’autres peut-être, ne rejoignent pas rapidement cette « alliance de containment » contre la Chine qui est en train de se constituer.

Pour nous, quelle est la leçon ?

Les États n’ont pas d’amis, mais peuvent avoir des alliés par communauté d’intérêt.

Nous sommes désormais une puissance moyenne, mais qui peut compter dans le monde, si nous le voulons et consentons les efforts nécessaires.

Imaginer que notre diplomatie peut être efficace sans s’appuyer sur un outil militaire crédible n’est que du vent.

Les grands costaux sont toujours plus écoutés que les autres.

Hors l’Europe, tout le monde se réarme.

Tant que nous ne dépenserons pas au moins 3 % de notre PIB pour notre défense, nous ne serons pas crédibles dans les grandes affaires du monde, et nous continuerons à nous faire marcher sur les pieds.

Nous sommes étonnés que notre engagement indopacifique ne soit pas davantage pris au sérieux ?

Mais, pour n’évoquer que le domaine naval, combien de navires de combat pouvons-nous déployer là-bas, où, d’ailleurs, de nombreux territoires peuplés de Français attendent protection ?

Souverains d’un domaine maritime de 11 millions de km², le deuxième du monde, nous avons une petite marine éparpillée sur toute la planète.

De quelque côté que l’on se tourne, nous ne pourrons être crédibles, inspirer le respect et une certaine prudence à notre égard, influencer, dans notre intérêt égoïste, les affaires du monde, que si nous nous forgeons un outil militaire complet adapté à nos ambitions politiques. C’est loin d’être le cas aujourd’hui.

D’ailleurs, et pour rester dans le domaine de la défense proche, c’est une condition absolument nécessaire avant d’envisager de sortir de l’OTAN.

Et cela ne nous autorisera pas à nous priver d’alliés.

Partager cette publication

Comments (4)

  • quinctius cincinnatus Répondre

    la France se cherche un nouveau … Maître et Vladimir Poutine … semblerait faire l’ affaire pour certains !

    2 octobre 2021 à 18 h 53 min
  • hansimschnoggeloch Répondre

    Poutine serait sûrement acquéreur de ces sous-marins. Cela ferait un beau pied de nez à Bidon.
    Et cerise sur le gâteau, en ces temps de hausse, cela sécuriserait les livraisons de gaz russe à un prix préférentiel.
    Chiche?

    2 octobre 2021 à 11 h 39 min
  • quinctius cincinnatus Répondre

    ” irénisme français ” synonyme de ” soumission ”
    fuyons le ” modèle ” américain !
    celui de Trump comme celui de Biden !

    29 septembre 2021 à 10 h 47 min
  • quinctius cincinnatus Répondre

    en Europe peut être faudrait il AUSSI que l’ Allemagne augmente le budget alloué à la Bundeswehr
    l’ Armée française ( dans le cadre de l’ O.T.A.N. ) ne représente qu’ une force d’ appoint et … temporaire
    par contre elle possède une flotte ” atomique ” assez dissuasive qu’ il faut ENCORE RENFORCER pour protéger nos possessions … maritimes dans le Pacifique et dans l’ Océan Indien

    29 septembre 2021 à 9 h 51 min

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *