L’avenir des révolutions arabes

L’avenir des révolutions arabes

Depuis deux ans, nous avons assisté à une éclosion des « printemps arabes » – à savoir de puissantes poussées sociales et sociétales, des ébranlements et des bouleversements qui marquent sans aucun doute un moment-clé, sinon un tournant, dans l’histoire du monde arabe.

Quel est, pour l’essentiel, le contenu de ces révolutions (même si ce terme de « révolution » doit, ici comme ailleurs, être pris avec beaucoup de précaution) ?

1) Tout d’abord, nous avons assisté à une mise en cause des fondements des régimes politiques de certains États. Ce qui a entraîné, pour d’autres États, l’obligation de mettre en place des réformes substantielles dans la perspective d’une certaine « démocratisation » marquée par une libéralisation de l’expression et de la parole (journaux, radios, réseaux sociaux,) et par un pluralisme de partis politiques.

Bien sûr, cet accouchement douloureux de la démocratie s’est fait avec des scénarios différents selon la diversité des États du monde arabe. En Tunisie ou en Égypte, on a eu une véritable « libération » démocratique, no­tamment dans l’expression des opinions. Au Maroc, en Algérie, ou en Jordanie, on a assisté à des processus de réforme démocratique contrôlés et limités. La Syrie s’est enfoncée toujours plus dans la guerre civile. Enfin, dans les pays du Golfe, l’ordre existant a paru se maintenir sans aucune modification.

Au total, on peut donc dire qu’on a eu un échiquier démocratique « ébauché », avec jusqu’ici progression des partis islamiques modérés.

2) Cette « poussée » démocratique est allée de pair avec une déstructuration accrue. En effet, on avait, jusqu’aux « révolutions arabes », un certain nombre de régimes despotiques (Libye, Égypte, Tunisie…) qui apportaient de la stabilité et de la prévisibilité. Avec les « révolutions arabes » et la disparition de ces régimes, on a sans aucun doute aggravé l’instabilité de l’espace euro-méditerranéen. On a bien eu une déstabilisation à l’intérieur des pays arabes eux-mêmes ; une déstabilisation du monde arabe dans son ensemble ; une déstabilisation à la proximité de ce monde arabe, avec la nouvelle zone d’instabilité au Sahara induite par la chute de Khadafi, et par là des risques accrus de terrorisme qui menace désormais l’Europe.

Où vont aller demain ces « révolutions arabes » ? Il est très difficile d’anticiper. Sans aucun doute, le monde arabe va connaître demain une période de transition difficile et dangereuse. Au plan international, nous constatons une formidable déstabilisation à l’échelle planétaire, avec l’affaiblissement de l’ordre international occidental. L’instabilité arabe est, au vrai – cela a été le cas hier, cela sera encore le cas demain –, une composante de ce désordre et de cette « désoccidentalisation » du système international qui constitue un événement géopolitique considérable.

Il est clair que les turbulences, ne sont pas terminées, loin s’en faut.

La marche vers la démocratie sera sans aucun doute longue et incertaine, avec des apaisements, des rechutes, voire de vrais échecs… avant que le monde arabe ne trouve éventuellement – comme le monde dans son ensemble – un nouvel équilibre vers 2030, avec une mondialisation chinoise.

Ce nouvel équilibre pour les pays arabes, ce sera un compromis historique, une synthèse entre le « religieux » et la « raison » dans l’organisation de la société arabe, entre les forces qui se réfèrent au « religieux » et les forces « laïques », les forces « conservatrices » et les forces de la « modernité ».

La France et l’Europe peuvent-elles, doivent-elles, mener des actions pour aider le monde arabe à trouver cet équilibre demain ?

1) Elles peuvent, d’une part, lancer une initiative pour la mise en place d’un grand ensemble euro-méditerranéen, en repartant de l’esprit du projet avorté « d’Union pour la Méditerra­née ».

2) Elles peuvent, d’autre part, lancer une sorte de grand plan Marshall pour le développement rural du Sahel. Ce serait, sans aucun doute, la meilleure réponse à la menace djihadiste sur ces régions.

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Comments (11)

  • Janko54 Répondre

    Derrière Assad, il y a le Hezbollah et l’Iran. Et derrière les “rebelles”, il y a Al-Qaidas, les salafistes et les takfiris. Deux forces hostiles à l’Occident.

    Et donc, quand un conflit oppose 2 entités qui nous sont hostiles, la meilleure solution est de ne soutenir personne.

    24 mai 2013 à 17 h 20 min
    • quinctius cincinnatus Répondre

      En réalpolitique, il faut aussi faire des choix stratégiques et ne pas rester ” neutre “ou indécis
      Dans un premier temps on évalue l’hostilité que les adversaires peuvent avoir envers vous
      Ensuite on soutient celui ( ou ceux ) qui nous est ( sont) le(s) moins hostile(s) voire le(s) plus favorable(s) … ici Assad et l’Iran, qui pour mémoire, sont des nations chez lesquelles la culture française fut ( et reste ) un … modèle
      Renverser les alliances pour complaire servilement à certains, n’est pas l’attitude la mieux avisée, surtout lorsque ces pays accumulent les ” conneries ” !

      25 mai 2013 à 13 h 04 min
    • HansImSchnoggeLoch Répondre

      Janko54: Soutenir à bonne dose les deux jusqu’à annihilation mutuelle est aussi une bonne solution.

      26 mai 2013 à 11 h 58 min
      • quinctius cincinnatus Répondre

        je pense que vous vous trompez; les U.S.A. viennent récemment d’admettre ( enfin Obama, pas ces idiots de la C.I.A. ou du lobby ) que l’Iran est paradoxalement un facteur … d’équilibre au Moyen-Orient; il n’ont pas du tout envie, mais alors pas du tout, d’avoir un nouvel Afghanistan et un nouvel Irak à gérer, la guerre perpétuelle contre le terrorisme islamique il laisse ça à un benêt comme Hollande ou à un moindre degré Cameron … d’autant qu’il est vraisemblable qu’un deale a été passé avec … Moscou, qui craint la contagion islamique ( via l’Afghanistan ) pour “ses” républiques musulmanes d’Asie centrale ( où vit une forte minorité de Slaves ) … l’Orient est bien compliqué, laissez cela aux ” cerveaux ” … orientaux; l’expérience historique les a formés à ça

        26 mai 2013 à 21 h 27 min
        • quinctius cincinnatus Répondre

          quant à Israël, il s’accomoderait plutôt d’une Syrie peut être affaiblie mais pas trop … celle d’Assad !

          27 mai 2013 à 22 h 57 min
      • Janko54 Répondre

        Sauf que si on soutient les deux, il n’y aura pas d’annihilation mutuelle, mais plutôt un bon stock d’armes qui se retrouvera entre les mains des islamistes, et qu’ils réutiliseront contre nous si une 3ème guerre mondiale devait éclater. Vous êtes conscient de cela ?

        29 mai 2013 à 22 h 51 min
      • Janko54 Répondre

        Non. Ce que j’essaye de vous faire comprendre c’est que, nous ne devons pas armes les arabes.
        Parce que de toute façon, si nous vendons des armes aux pays musulmans (que ce soit à des dictateurs ou à des “rebelles”, d’ailleurs), le jour où une 3ème guerre mondiale éclatera tous ces pays musulmans se serviront de ces armes contre nous.
        Bref, nous devons apprendre à redevenir EGOÏSTES. Nous avons besoin d’une armée pour nous défendre, et non pas pour équiper des pays non-occidentaux qui, par définition, nous seront hostiles (parce qu’ils n’appartiennent pas à notre culture).
        Donc d’après moi on devrait se contenter d’une coopération très étroite entre pays Occidentaux, mais par contre, arrêter de vendre des armes aux pays arabes. Comme ça ils seront affaiblis et ils n’auront pas la possibilité de nous attaquer.
        Ras le bol du maso-altruisme.

        4 juin 2013 à 2 h 12 min
  • Claude Roland Répondre

    Quinctius a dit : “reste le cas explosif d’Israël, qui rappelons le pour certains, a été une épine plantée par Joseph Staline dans la zone d’influence ( à l’époque ) britannique”.

    Il a oublié Hitler car celui-ci avait déjà établi des accord pour virer les juifs d’Europe par la terreur (idem Staline) afin qu’ils peuplent un Israël déjà prévu à l’époque. Lisez Makow. Et ce n’est pas le seul auteur qui présentent les preuves.

    24 mai 2013 à 9 h 25 min
    • quinctius cincinnatus Répondre

      Hitler c’était …Madagascar !

      24 mai 2013 à 13 h 46 min
  • quinctius cincinnatus Répondre

    l’auteur a une vision ( ? ? ? ) américaine des choses !

    ce qui fera basculer, dans un sens ou dans l’autre , démocratie ( sic ) ou théocratie, le Monde arabe, c’est l’avenir qui sera celui de la Syrie, de l’Iran ( qui n’est pas majoritairement “arabe ” ), du Hezbollah et … la persistance ou même le renforcement de la présence militaire ( navale ) en Méditerranée du rêve séculaire ” tsariste ” !

    un seul point d’accord, l’Occident n’a plus aucune influences au Moyen- Orient et les U.S.A. ( avec leur gaz de schistes et leurs échecs répétitifs en Irak ) reprennent le chemin de l’ isolationnisme ( ce qui qui nous évitera bien des bêtises dont ils sont coutumiers ! )

    reste le cas explosif d’Israël, qui rappelons le pour certains, a été une épine plantée par Joseph Staline dans la zone d’influence ( à l’époque ) britannique

    22 mai 2013 à 13 h 03 min
    • quinctius cincinnatus Répondre

      à propos de l’exploitation des gaz dits de schiste … les brasseurs américains lancent un cris d’alarme … les eaux pures nécessaires à l’élaboration de leurs ( exécrables ) bières commencent à leur manquer !

      et un ricain sans sa gorgée de bière glacée ( on balance le reste de la canette ) c’est un orphelin intellectuel !

      24 mai 2013 à 13 h 50 min

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