Le Monde a enquêté sur les banlieues

Le Monde a enquêté sur les banlieues

I

“Dans les tours de Clichy-sous-Bois et de Montfermeil (Seine-Saint-Denis), les deux villes emblématiques de la crise des banlieues depuis les émeutes de l’automne 2005, la République, ce principe collectif censé organiser la vie sociale, est un concept lointain. Ce qui “fait société” ? L’islam d’abord.”

“les deux villes (60 000 habitants au total) comptent une dizaine de mosquées, aux profils extrêmement variés, pouvant accueillir jusqu’à 12 000 fidèles. Une pratique du ramadan presque systématique pour les hommes. Une conception extensible du halal, enfin, qui instaure une frontière morale entre ce qui est interdit et ce qui est autorisé, ligne de fracture valable pour les choix les plus intimes jusqu’à la vie sociale.”

Gilles Kepel, professeur à Sciences Po, ajoute, sur l’identité musulmane, qui se manifeste :

“par l’extraordinaire développement du halal. Il y a vingt-cinq ans, ça n’était pas un enjeu. Aujourd’hui, c’est un marqueur de l’identité extrêmement fort qui traduit la place de l’éthique religieuse dans les comportements. Pas seulement dans l’alimentaire : le halal marque les interdits dans la vie privée et sociale – du lit conjugal jusqu’au refus d’inscrire des enfants dans les cantines scolaires. […] Ensuite, la prégnance des mariages endogamiques : c’est un point qui m’a surpris dans la mesure où la France a toujours été considérée comme un pays où les mariages mixtes étaient particulièrement nombreux. Parmi les pratiquants, le mariage endogamique islamique est aujourd’hui quasiment la norme dans l’agglomération. C’est un effet particulièrement préoccupant de l’enclavement. Enfin, la participation politique : depuis les émeutes de 2005, après les inscriptions massives sur les listes électorales, il y a une volonté marquée des élites locales de la diversité de peser dans les débats politiques en assumant leur identité républicaine, démocrate et, le cas échéant, musulmane. A l’échelle des conseillers municipaux, le plafond de verre a sauté et on assiste à l’affermissement d’une jeune classe politique. La façon dont émerge l’élite de ces populations – cadres, entrepreneurs… – est au coeur de la transformation sociale du pays. Et il est inévitable et logique que, pour traduire la diversité de la société, les prochaines élections municipales et législatives voient des candidats d’origine africaine ou maghrébine s’imposer.”

(source lesalonbeige.com)

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