Les deux discours des Frères Musulmans avant les élections

Les deux discours des Frères Musulmans avant les élections

Les élections législatives égyptiennes se tiendront dans moins d’un mois, le 28 novembre. l’arrivée au pouvoir en Egypte des Frères musulmans constituerait nouvelle désillusion pour les thuriféraires des printemps arabe, après la victoire du parti islamique Ennahda lors des élections en Tunisie et les déclarations des responsables Libyens selon lesquels la charia sera la base du futur Etat libyen. L’automne serait alors bien pleinement islamiste. A la dictature personnelle succèderait sur la scène arabe la dictature religieuse.

Née à la fin des années 1920, l’organisation des Frères est la mieux structurée, la plus puissante dans le contexte  actuel.  Sa posture et sa force s’apparentent  à celles d’Ennhada, le premier parti tunisien. Les Frères ont créé  le parti de la Liberté et de la Justice (PLJ). Comme Ennahda avant le scrutin de Tunisie, le PLJ  adopte un profil médian,   tout en affirmant fidélité à l’islam.

2011 : la plate forme idéologique du Parti de la Liberté et de la Justice

C’est ce qu’exprime clairement la plate-forme électorale du P L J publiée sur  internet (Hurryh.com ) par les Frères Musulmans.

  • Le PFJ est  « un parti dont la source d’autorité est la charia islamique, première source également de toute législation ». Le parti entend  incarner « les principes de  la charia, ses normes morales, ses valeurs réglant le  mode de vie de  chaque individu et de l’ensemble de la société ».
  • L’emprise de la doctrine islamique est justifiée  à longueur de texte : « la charia est la source de l’autorité qui régule tous les aspects de l’existence pour les musulmans et les non musulmans vivant sur le territoire national ».

Dans le langage  de la plate-forme,  « l’unité nationale de la charia » est le cadre idéologique du P L J.

2007 : le projet de société islamique

Comparé au texte  de 2011,  le projet de société islamique publié en 2007 par les  mêmes Frères Musulmans comportait des formules fondamentalistes beaucoup  plus tranchées.

Trois  exemples :

  • La femme mariée (projet 2007) a le droit de travailler « à condition que cette autorisation ne viole pas le droit de la famille et les obligations dictées par la charia ». Est inenvisageable politiquement que « la charge  de la présidence nationale puisse peser sur les épaules d’une femme ».
  • Inadmissible aussi   (projet 2007) que les Coptes, les non musulmans en général occupent  des fonctions et des responsabilités dont « la finalité est la sauvegarde  de la religion, en particulier la mission de premier ministre et de Président ». Les Frères insistent : « nous croyons que le devoir d’un président ou d’un premier ministre est contraire aux convictions d’un non musulman ».
  • Les touristes (projet 2007) doivent « se familiariser avec les limites qu’impose la religion musulmane (…) Toutes les activités touristiques  sont nécessairement respectueuses des principes et valeurs de l’islam».

La tactique du double discours

Les commandements  intégristes  (2007) visant les femmes, les non musulmans,  les touristes ne figurent pas  dans la plate-forme électorale  (2011) du P L J.

Si les Frères jouent sur une version soft de l’islamisme,  disent les Egyptiens opposés à la théocratie politique, c’est par  opportunisme  tactique. En écartant le visage pur et dur  (2007) de l’ordre fondamentaliste, ils  se  donnent des allures de modernité et de compromis  afin d’élargir leur  base électorale.

Les dirigeants du PLJ sont des maîtres du double discours. Des experts en art de la dissimulation. Au Caire, les  défenseurs des droits  de l’homme qui ont combattu la tyrannie de Moubarak nous mettent en garde contre le totalitarisme  vert  dont est porteur le militantisme des Frères Musulmans : au  moins, les Occidentaux  n’auront pas l’excuse de l’ignorance.

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