Contre la censure légale…et contre la censure médiatique

Contre la censure légale…et contre la censure médiatique

Notre ami Jean Robin vient de signer un passionnant ouvrage intitulé « Petit dictionnaire des débats interdits (mais légaux) ». La précision entre parenthèses n’est pas inutile… ne serait-ce que pour éviter la correctionnelle !

Il y aurait beaucoup à dire sur les lois liberticides françaises. Nous avons fréquemment, dans ces colonnes, dénoncé ces lois qui prétendent conférer au Parlement le pouvoir extravagant de dire, non pas seulement ce qui est conforme au droit, mais ce qui est conforme à la vérité. Je profite de l’occasion pour redire tout le mal que je pense de cette dérive totalitaire : non le Parlement n’est pas compétent pour dire le vrai et le faux ! Et il y a tout lieu de penser qu’un Parlement pourvu de cette ahurissante prétention, d’une part délaisse ses véritables prérogatives (où voit-on le Parlement français contrôler sérieusement l’exécutif ?…) et d’autre part, prend le risque d’apparaître illégitime dans l’opinion publique…
Mais, encore une fois, ce n’est pas de cela qu’il est question. Il s’agit, dans le livre de Jean Robin, d’une liste des dossiers pour lesquels la censure médiatique prend le relais de la censure judiciaire.

Plutôt qu’un dictionnaire, il s’agit donc d’un recueil – hélas ! non exhaustif – des dossiers qu’il vaut mieux ne pas traiter si vous voulez « percer » dans les médias.

Tous ces débats sont présentés, grosso modo, de la même façon : une définition, une évaluation du « niveau d’interdiction », un historique, un mot sur le point de Godwin (du nom de cette célèbre loi sociologique, selon laquelle plus une discussion dure longtemps, plus la probabilité d’y voir mêler les noms d’Hitler et l’accusation de nazisme est forte…), les invectives employées contre les « contrevenants » qui décideraient de passer outre l’interdiction du débat, les modalités et les causes de l’interdiction, une courte revue des arguments interdits et des incompréhensions sur le sujet.

Quant aux sujets, ils sont des plus variés et l’auteur assume volontiers la part d’arbitraire dans les choix réalisés : on va du réchauffement climatique ou de l’islam à la peine de mort et à la pédophilie, en passant par la possibilité que l’équipe de France de « balle au pied » ait été dopée lors de sa victoire pour la coupe du monde de 1998 ou encore l’éventualité que Corneille ait écrit tout ou partie des pièces de Molière…

On le voit, les sujets ne sont pas vraiment tous sur le même plan : des thèmes légers côtoient les débats les plus graves, des thèmes politiques voisinent avec des interdits culturels…

La place me manque pour évoquer ici tous les sujets.

On pourra être choqué de la présence de tel ou tel thème ; on pourra juger contre-productif d’évoquer côte à côte des sujets sans le moindre rapport entre eux. Certes. Mais ce qui compte, c’est tout de même que la France crève d’une forme de censure (ou d’autocensure) qui empêche tout débat sur un nombre croissant de sujets. Or, faute de débat, aucune solution ne peut être trouvée à certains problèmes graves dont souffre notre pays. Pire, aucune solution ne peut être proposée pour des problèmes dont l’existence même est occultée.

Pour ne parler que des sujets politiques, que je connais mieux que les autres, comment débattre de la crise dont souffre actuellement notre institution judiciaire si nous nous interdisons a priori toute réflexion sur la peine de mort ?

Ou encore comment peut-on réfléchir à l’intégration de populations de culture musulmane si nous nous interdisons a priori toute critique de l’islam ? Mais, ici, on voit à quel point les censures légales et les censures extra-légales se rejoignent : la critique de l’islam est, de façon générale, admise ; mais, dans la pratique, elle n’est praticable qu’aux risques et périls des auteurs car il est extrêmement facile d’assimiler une critique de l’islam à une « incitation à la haine raciale », selon la jurisprudence constante de la funeste loi Pleven de 1972 (la loi fondatrice de l’« antiracisme »).

C’est pourquoi il importe, non seulement d’ouvrir le plus de tribunes possibles pour débattre de ces sujets « interdits », mais encore de soutenir autant que nous le pouvons ceux qui sont condamnés au titre des lois liberticides – seraient-ils d’un « camp » fort éloigné du nôtre !

Jean Robin
Petit dictionnaire des
débats interdits
(mais légaux)
Tatamis

406 pages – 20 euros
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4 Vérités-DIP 18 à 24, quai de la Marne 75164 Paris Cedex 19 OU
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Comments (6)

  • Ben Répondre

    Incroyable qu’il faille défendre une evidence comme la liberté d’expression. Où sommes-nous?

    14 février 2010 à 23 h 21 min
  • Anonyme Répondre

    Ou est passé Pierre Lance, au passage?

    14 février 2010 à 19 h 32 min
  • Daniel Répondre

    Mnémosine :

    "Trop, c’est trop. Et c’est pourquoi la seconde partie de mon message a échoué dans le panier virtuel où échouent d’ordinaire les propos jugés diffamatoires ou injurieux. Du coup, la première partie devenait sans objet… "

    L’ensemble de votre intervention est remarquable de sens.
     Il est regrettable (dit à la mode bourgeoise)  que la dernière partie ait été censurée…    nous sommes arrivés à ce point étrange où   après avoir démontré qu’un acte est criminel, il est interdit d’appeler "criminel"  l’auteur de cet acte. C’est ainsi que les 4V suivent cette terrible mode qui permet aux joresses d’afficher et promouvoir des principes discriminants comme principes souhaités de civilisation,  mais impose de considérer que les crimes qui en découlent, matérialisés par des victimes en chair et en os,   ne sont plus des crimes:  cela doit être perçu comme  un processus naturel qu’il ne convient pas de changer puisqu’il ne faut pas injurier les criminels en les traitant de criminels;  ça les rend trop malheureux et ils peuvent donc demander des dommages et intérêts à des juges très influencés par l’appartenance à une caste semblable à la leur.
    Il faut souligner au passage que pour tout raciste,  la souffrance d’un individu n’est crédible que si cet individu est assimilable et comparable à lui même.   (Les réactions à "Polanski niveau social" avant "Polanski citoyen" a fait tomber les masques et départagé les racistes de fait) .
     
    C’est ainsi que la France met à la rue sans vergogne  des millions de Français travaillant et cotisant , (mais méprisés socialement déjà par la religion Education Nationale et son échelle de valeurs),   et qu’elle fait rentrer,  pour preuve de son grand coeur,   le même nombre d’étrangers pauvres auxquels elle laisse croire que tout est gratuit, comme l’ont établi les 68-tares ayant vêcu de la manne de l’argent public,  anonyme donc sans odeur. 

    Guillaume de T :  bien que la discussion soit courte, puis-je prononcer le mot "racisme"  ou  "nazisme" pour nommer cette déficience intellectuelle de l’élite,  puisque,  pour tout esprit normalement humain  s’indignant donc de toute inhumanité,  ces quelques lignes contiennent déjà la démonstration d’un racisme à l’échelle du pays?   
     Hors, je suis fréquemment  censuré par les 4V  quand le mot tabou  "nazisme" apparait dans une intervention! Le risque de la loi, je suppose. Cette loi qui prétend sanctionner le racisme verbal est une loi qui permet de couvrir un autre racisme de fait que paient très cher des millions de Français.  

    Si ce débat,   qui permettrait de comprendre quelles sont les conditions indispensables pour que le racisme soit efficace et réel,  est interdit,  de quoi vous indignez-vous au juste puisque ce sujet tabou génère l’essentiel des dérives actuelles?

    14 février 2010 à 17 h 14 min
  • Mnémosine Répondre
    Bonsoir,
    La censure, dites-vous… Elle est partout. Fléau de notre temps qui n’est pas sans rappeler la mise à l’index des ouvrages dont le contenu était jugé non-conforme à la doctrine de l’Église ou à la morale chrétienne. Je suis tenté de dire : heureux temps que celui-là où l’Église se bornait simplement à déconseiller un livre à ses fidèles. Aujourd’hui, c’est une tout autre inquisition qui se manifeste et qui vise à supprimer purement et simplement le droit de s’exprimer. Sous de nobles motifs, cela sans dire.
    Intéressante émission théma sur Arte ce mardi 9 février sur le thème voisin de la désinformation, les ragots d’Internet, la théorie du complot, la complaisance médiatique, les connivences, présentée avec un film titré « Les effroyables imposteurs » (Allusion à T. Meyssan). Bref, la chaîne culturelle « s’inquiète d’un journalisme qui va mal et met en danger la démocratie ». On allait le dire.
     « Huit journalistes en colère » expriment alors un avis sur ce qu’il faut bien appeler un naufrage déontologique de la profession d’informer. Parmi lesquels A. Chabot, Davis Pujadas, Edwy Plénel, Philippe Val… Le plus inattendu dans l’autocratique fut David Pujadas. En substance : la presse ne fait plus son métier. Les médias se copient servilement, pratiquent l’autocensure et le copinage rédactionnel.  Écœurés, les gens font chercher dans les réseaux sociaux informels et les poubellesd du web ce qu’ils ne trouvent plus dans la presse classique. Rien à redire. Une émission bien faite.
    Malheureusement le débat qui suivit n’a pas été à la hauteur des intentions. Animée par le bavard Daniel Leconte, la discussion resta académique et l’on se garda bien d’évoquer les sujets « sensibles » au profit d’un « traitement » de la réalité sociale désormais coulé dans le bronze de la pensée correcte et sur le respect de laquelle la meute journalistique s’entend comme larrons en foire. Vous l’évoquez dans votre article. Je n’y reviens pas.
    Il n’y a pas que les journalistes contraints de se couler dans le moule de la « diversité ». Le modeste péquin reste soumis à l’inquisition des prudes chaisières chargées de « modérer » les messages selon la consigne reçue ou l’humeur du moment. Cela existe aussi dans Les 4 Vérités. Car si la presse a ses têtes de Turc (Le FN, l’Église, le Pape, Sarko…) elle a aussi ses vaches sacrées. Comme un certain Roman Polanski et Bernard Henri Lévy qu’il ne fait pas bon critiquer. Voici un exemple de cette censure insidieuse dont le motif reste aussi opaque que l’identité des censeurs.
     
    Le 15 octobre 2009, dans Le Point, BHL déclare, sentencieux : « Abuser d’une fille de 13 ans est, évidemment, un crime grave. Et être un artiste de génie n’a jamais constitué, pour quelque crime que ce soit, une circonstance atténuante ».  On aurait pu en rester là, l’essentiel étant dit. Mais Roman a des excuses, car : « Il est honteux, enfin, écrit-il, que l’on ne puisse, quand on parle de cette vie, évoquer l’enfance au ghetto, la mort de la mère à Auschwitz (…) ». Émotion. Vous avez raison : Godwin for ever.
    Le 12 février 2010, il y revient pour affirmer qu’il est scandaleux que son ami reste assigné à résider à…
    Tenu à patienter en sa luxueuse résidence de Gstaad, charmante cité suisse où l’on rencontre plus de nababs que de SDF. BHL dénonce le « lynchage médiatique » et « l’acharnement du procureur ». Par la magie de la casuistique le violeur passe du statut d’accusé à celui de victime. Et de conclure benoîtement : « Il faut, comme sa victime, prier pour qu’on le laisse, enfin, en paix. ». Amen. On retrouve bien là les ingrédients classiques d’une sollicitude victimaire pratiquée désormais à grande échelle.
    Agacé par ces jérémiades, je rappelle que « l’artiste de génie » n’a point – comme Battisti (autre « victime » emblématique du philosophe) braqué des banques au profit d’une noble cause prolétarienne (petit rappel du passé mao de BHL). Il s’est seulement contenté de forcer une fillette préalablement droguée ; que le deal avec les parents de la gamine vaut au civil mais n’efface pas le crime au pénal ; que le gros paquet de dollars versé (montant gardé secret) comme prix du viol de Samantha Geimer vaut celui de Michael Jackson pour le jeune Jordan Chandler. Des faits largement commentés dans la presse et donc peu passibles d’une « modération ».
    Mais j’ai l’imprudence fatale d’oser percevoir dans ce laxisme d’intellectuel nourri de relativisme soixante-huitard une constante du comportement caractéristique de l’intelligentsia de gauche ; qu’il s’agit autant du conformisme moutonnier d’une certaine élite que d’une volonté consciente de destruction des valeurs chrétiennes – qualifiées de « bourgeoises », typique de la contre-culture. A tout le moins de rendre caduque ce qui fait le fondement moral de la civilisation. Et je cite à l’appui de mon propos les pétitions pédophiles des années 70 dans Le Monde et Libération qui avaient mobilisé le gratin soixante-huitard afin d’y dénoncer la « morale d’État » et la pénalisation des relations sexuelles avec les enfants. J’ajoute que nombre de ces esprits « progressistes » ont quitté ce monde et que les rescapés ne se portent guère mieux ; qu’aucun de ceux-là ne prendrait aujourd’hui le risque de braver la morale commune de cette « France moisie » que Philippe Sollers méprisait tant.
    Trop, c’est trop. Et c’est pourquoi la seconde partie de mon message a échoué dans le panier virtuel où échouent d’ordinaire les propos jugés diffamatoires ou injurieux. Du coup, la première partie devenait sans objet. Mes salutations.
    13 février 2010 à 20 h 55 min
  • JP Pagès-Schweitzer Répondre

    Jean Robin n’est pas mon ami  !

    Voir à ce sujet, sur "cafephilodedroite", mon article  :
    "La face cachée de jean Robin", en date du 20 septembre 2009.

    JPPS

    12 février 2010 à 19 h 31 min
  • Christophe Répondre

    Votre article,monsieur de Thieulloy est passionnant!

    Le temps passe est semble faire son oeuvre.Vous semblez vous apercevoir que la censure c’est gênant et que cela empêche tout débat.

    Je vous rappelle,même si cela vous agace,que vous avez dû prendre une mesure radicale afin d’empêcher monsieur Lance de continuer à s’exprimer sur ce site.

    Cordiale salutation

    12 février 2010 à 14 h 55 min

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