Guy Debord et les conséquences de l’affaire DSK

Guy Debord et les conséquences de l’affaire DSK

La première conséquence de l’affaire DSK est que ce dernier pourrait être élu l’an prochain président de la république française, une fois rétabli dans tous ses droits et privilèges, et condamnés et damnés tous ceux qui l’avaient trop vite mal jugé (je m’étais mépris, puis bien repris, je le jure, Votre Honneur ! ).

45% de Français le trouvaient présidentiable même après sa brève chute, et 57% estimaient de toute manière qu’il avait été victime d’une conspiration. Considérant que Sarkozy n’est guère populaire, que DSK rassure les marchés et qu’il incarnera les valeurs bobos et socialos en même temps, on ne voit guère ce qui pourrait l’empêcher de se présenter et d’être élu et déjà réélu… Il n’y aura pas beaucoup de gens de droite qui se déplaceront pour offrir à l’actuel président un deuxième mandat, de cela il peut être sûr. DSK est resté de toute manière un de nos moins mauvais ministres des finances quand il était dans l’équipe Jospin. Son histoire actuelle le grandira de toute manière aux yeux d’une opinion amusée par les scandales, et qui en a vu d’autres : comme à la belle époque, l’opinion se passionne pour un scandale, puis s’en lasse.

La deuxième conséquence concerne l’inquiétude liée à la possibilité d’être arrêté pour n’importe quoi en Amérique ou ailleurs maintenant : il suffit que quelqu’un vous accuse de quelque chose et sans preuve – on a presque envie d’écrire : surtout sans preuve – pour se retrouver en prison. Ce n’est pas pour rien que l’on nous conseillait sous Clinton de ne pas monter dans le même ascenseur qu’une femme. On a cité l’affaire Lewinski, je trouve que l’affaire Kobe Bryant (un célèbre basketteur black aussi accusé de viol) encore plus édifiante : la réceptionniste blanche d’un hôtel de luxe avait couché avec lui puis l’avait accusé de viol, sur les conseils de ses collègues de travail. Apparemment ces filles s’en sortent bien, alors que leur comportement relève du scandale. Il dépasse le simple problème de la guerre des sexes, il relève de la forfaiture sociale. Il est vrai que la pauvre nigériane avait le droit moral pour elle, vengeant l’honneur de la nation africaine et de la gent ménagère ! On se rappellera alors l’affaire O.J. Simpson : un jury black avait acquitté l’ancien footballeur américain que tout accusait. Comme dit le prophète Amos, « vous avez changé le droit en poison, et en absinthe le fruit de la justice » (6, 12).

Il reste que cette histoire sent le coup monté, et que nous assistons depuis le début de ce désastreux siècle à une succession de coups plus ou moins bien montés, et dont d’ailleurs, il est temps de le dire, l’opinion se fout complètement. La surinformation et l’obésité médiatique nous auront rendus complètement indifférents à ce qui peut réellement s’être passé. L’élite nouvelle le sent partout, et multiplie ainsi les coups montés. Guy Debord le sentait venir il y a vingt ans, dans ses impeccables Commentaires, quand il parle d’une relève de la classe politique. 

« Cette relève, qui va décisivement parachever l’œuvre des temps spectaculaires, s’opère discrètement, et quoique concernant des gens déjà installés tous dans la sphère même du pouvoir, conspirativement. Elle sélectionnera ceux qui y prendront part sur cette exigence principale : qu’ils sachent clairement de quels obstacles ils sont délivrés, et de quoi ils sont capables. »

On commence à bien voir de quoi la nouvelle autorité politique est capable, un peu partout d’ailleurs, et surtout de quoi elle est débarrassée : d’une opinion publique inquiète et avertie. D’ailleurs, elle est aidée par le trouble de toutes les opérations actuelles (attaque de la Libye, émeutes bizarres, affaire Breivik, manipulation des cours de la bourse, et j’en passe) qui défraient la chronique et demeurent inexplicables.

Du coup, l’opinion apolitique et post-historique se moque de tout ou gobe tout. Guy Debord note encore que « l’imbécillité croit que tout est clair, quand la télévision a montré une belle image, et l’a commentée d’un hardi mensonge. La demi-élite se contente de savoir que presque tout est obscur, ambivalent, " monté " en fonction de codes inconnus. Une élite plus fermée voudrait savoir le vrai… et aimerait connaître la méthode de la vérité, quoique chez elle cet amour reste généralement malheureux."

On en finirait par voter pour DSK, même en étant de droite pas vrai ? Tant on nous ordonne de le faire… Je sens que je vais virer Debord, pardon de bord !

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Comments (2)

  • louis Répondre

    Pour être élu Président de la République, il faut tout de même n’être pas trop méprisé.

    27 août 2011 à 21 h 12 min
  • Jean Theis Répondre

    Je ne pense pas que les Français sont si contents de cette affaire et  leur opinion a évolué depuis la première image de DSK menotté.

    Certains socialistes même ne considèrent pas la chose comme excellente pour leur parti.

    Malgré tout, trop de fric et de copinage leur a été montré.  Certains journalistes évoluent depuis quelques jours, soit en leur âme et conscience, soit qu’ils sentent le vent tourner.

    26 août 2011 à 18 h 40 min

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