Jacques Chirac fait payer à la France sa détestation du Front National !

Jacques Chirac fait payer à la France sa détestation du Front National !

Les commentateurs politiques affectionnent les comparaisons cataclysmiques. Ils parlent de déferlante, de raz-de-marée, de séisme et de tremblement de terre. Pourtant, même quand les changements qui résultent du sort des urnes sont considérables, il ne faut jamais oublier que, individuellement, les électeurs changent rarement d’opinion. On est de gauche ou on est de droite et on sait, le plus souvent, se définir comme tel. Les études socio-politiques les plus sérieuses montrent que le rapport droite-gauche est relativement stable avec 55 à 60 % pour la première et seulement 40 à 45 % pour la seconde. Ce qui fait la différence d’un scrutin à l’autre, c’est la mobilisation de chaque camp.

Il suffit d’ailleurs d’avoir pu examiner attentivement des listes électorales paraphées par les électeurs ayant voté pour constater, d’un tour sur l’autre, mais plus encore d’un scrutin à l’autre, que ce ne sont pas toujours les mêmes électeurs qui votent.

On parle des abstentionnistes comme s’ils constituaient une famille politique, mais à l’exception d’une petite minorité, c’est faux. Quand les électeurs de gauche sont déçus par un gouvernement de gauche, ils s’abstiennent en grand nombre. Et quand les électeurs de droite sont déçus par un gouvernement de droite, c’est à leur tour de s’abstenir. Et, quand ils sont plus que déçus, certains vont même jusqu’à voter contre leur camp…

Voilà très exactement ce qui s’est passé dimanche dernier, au deuxième tour des élections régionales. La gauche a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés et, dans la foulée, a réussi un incroyable petit chelem. Pour autant, elle n’est certainement pas majoritaire dans l’opinion. Elle a simplement, mécaniquement, profité de la raclée infligée à la fausse droite par ses propres électeurs, ceux-là même qui auraient dû lui assurer une large victoire.

Il y a un peu plus de vingt ans (mars 1983, élections municipales à Paris), Jacques Chirac a fait le choix d’ostraciser le Front National et son chef charismatique, Jean-Marie Le Pen. On s’interroge encore sur les motivations réelles et profondes de ce parti-pris. Mais c’est ainsi. Et cela constitue un élément fondamental de l’histoire politique contemporaine.

Malgré ce, le Front National a su se développer et s’enraciner dans le paysage politique, au point de représenter aujourd’hui entre 15 et 20 % des suffrages exprimés. La droite est fracturée. Et il est donc devenu très difficile de l’emporter pour une droite parlementaire qui prétend, en toutes circonstances, se priver du moindre concours de la droite nationale qualifiée d’extrême. Elle préfère perdre et faire passer son adversaire de gauche plutôt que son concurrent de droite.

Une telle stratégie est proprement incompréhensible. Car qui peut nier que les valeurs aujourd’hui incarnées par le Front National – « identité de la patrie », « protection nationale », « réduction du fiscalisme »… – qu’on les partage ou non, appartiennent intrinsèquement au patrimoine de la droite ?

La logique voudrait que l’on mène, au moins, une politique susceptible de réduire le fonds de commerce électoral de celui qui est en vérité tenu pour le principal adversaire. Mais, sans doute égaré par une passion aveuglante, Jacques Chirac ne fait à peu près rien pour retirer du grain à moudre à son rival détesté.

Il faudrait pour cela – il eût fallu – par exemple, réduire fortement la dépense publique, commander à l’Administration plutôt que lui obéir, ramener le pouvoir syndical à sa juste mesure, contrôler l’immigration, et rétablir l’état de droit. Même en accordant un bon point à l’hyper-actif Nicolas Sarkosy, on est très loin du compte.

Le 21 avril 2002, en vérité, Jacques Chirac avait réalisé un score médiocre. Pour la première fois depuis quarante ans, le candidat arrivé en tête du premier tour de l’élection présidentielle recueillait moins de 20 % des suffrages exprimés. Il était talonné par son concurrent détesté. N’importe quel candidat unique de la gauche l’aurait aisément emporté. C’est d’ailleurs cette observation que Lionel Jospin ne cesse, sans doute, de ressasser : sans Robert, sans Jean-Pierre, sans Noël et Christiane (sans oublier Arlette, Olivier et Daniel), non seulement il arrivait largement en tête, mais il était certainement élu, et Chirac définitivement éliminé…

Aussi longtemps que la droite demeurera ainsi fracturée, la gauche, pourtant largement minoritaire dans l’opinion, aura de fortes chances de l’emporter dans les urnes. À la seule condition d’organiser, un brin, sa diversité, et de savoir instaurer des règles aboutissant, plus ou moins démocratiquement, à la sélection d’un candidat à l’élection présidentielle. Depuis le 28 mars, François Hollande me paraît être le mieux placé. C’est le plus petit commun multiple…

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Comments (9)

  • Adolphos Répondre

    Hum.. Ca fait un peu “Protocole des sages de sSion” votre histoire. A force de voir des complot partout, on finis gauchiste vous savez…

    10 avril 2004 à 11 h 09 min
  • GUSTAWSON Répondre

    Vous écrivez : ” …En mars 83 J. Chirac a fait le choix d’ostraciser le F.N., on se demande encore pourquoi ….” Lors de la réunion d’une organisation juive mondiale (franc-maçonne) à laquelle les principaux représentants du monde politique français participaient, ceux-ci DURENT prêter serment de ne jamais faire alliance avec le F. N. (trop français, patriote, nationaliste) sous peine de perdre tout avenir politique personnel …. De même que la politique des USA obéit à certains intérêts étrangers (voir IRAK), la politique française n’est plus guidée par l’intérêt national mais par des groupes de pression étrangers organisés en “mafias” puissantes. En ce qui concerne les derniéres élections régionales, contrairement à ce que distillent les hommes politiques des partis “aux ordres” ainsi que les médias obéissants, le FRONT NATIONAL a obtenu 240000 voix de plus que lors des derniéres régionales, il a donc fortement progressé malgré l’ostracisme général qu’il subit. La droite française, qui a pratiquement toujours été majoritaire, ne peut plus se permettre “d’ignorer” ce parti qui est devenu INCONTOURNABLE. En conséquence, TOUS les politiciens de “la vieille droite ramollie” DOIVENT s’éclipser, la queue entre les jambes !

    7 avril 2004 à 16 h 45 min
  • Lassalle Répondre

    Bonjour, D’accord avec le contenu de votre article…enfin presque : Donner un bon point à super-sarko pour sa campagne contre la sécurité c’est un peu exagéré. Placer des machines sur le bord des autoroutes pour piéger les conducteurs, c’est facile et démagogique, car la plupart des accidents ont lieu sur le reste du réseau routier. Quant aux aggressions contre les individus, l’accès pour nos policiers, aux zones de non-droit de nos banlieues, etc., rien n’a été fait, il s’est même fait virer de l’une d’elles. M. Sarkozy est un “bateleur”, un bonimenteur, il fait du vent.

    6 avril 2004 à 11 h 58 min
  • Pierre Répondre

    Bravo pur votre article, Alain. Les electeurs du FN ont le droit d’etre entendus, respectes et representes. Amities

    4 avril 2004 à 11 h 55 min
  • ALLEZ ALLAIS Répondre

    Ce n’est pas une alternance droite gauche que nous voyons, c’est du zapping pour chercher un autre gouvernement, sans pouvoir en touver un de bon, signe de pourriseemnt avancé. ” Quand les peuples cessent d’estimer, ils cessent d’obéir “, connu ! Ceci dit, en diabolisant l’ED quand le PS angélise l’EG, Chirac ne prend pas le risque de se tirer une balle dans le pied. Puisque les grands mères de gauche des petits chaperons rouges diront, devant le danger du loup, la bête du Gevaudan, de voter pour Chirac plutôt que de s’abstenir. Ce qui ne fût pas facile pour JOSPIN qui n’a pas donné cette consigne, lui. Lui comme ARLETTE. Alliance secréte de LO avec le PT ?

    4 avril 2004 à 11 h 17 min
  • chc4 Répondre

    Croire que la France est un pays de droite, c’est une lourde erreur. La France est un pays de gauche, c’est écrit noir sur blanc dans la Constitution. Déjà dans celle de la IVe République, puis dans celle de la Ve? On y lit que l’Etat doit “garantir un emploi à chacun”,”assurer à l’individu les conditions nécessaires à son développement”, “garantir la protection de la santé, de la sécurité matérielle, le repos et les losirs”, et aussi que “tout bien qui a les caractères d’un service public national doit devenir la propriété de la collectivité”. Ce ne sont pas là les caractéristiques d’un pays de liberté.Ce sont celles d’un Etat collectiviiste qui ne dit pas son nom, mais annonce la couleur : rouge vif. La droite, quand elle est au pouvoir, fait encore plus que la gauche. Par exemple, qu’a fait Juppé en 1995 ? Il a augmenté les impôts de 130 milliards, sans compter le reste de sa politique qui a été dans le sens de la gauche. Donc, si vous voulez vivre dans un pays de droite et de liberté, où l’Etat ne se mèlera pas d’organiser votre vie privée, et ce jusqu’à l’éducation de vos enfants, CHANGEZ DE PAYS !

    4 avril 2004 à 9 h 27 min
  • Adolphos Répondre

    Une Droite en France ? Allons donc !

    4 avril 2004 à 1 h 00 min
  • Nicolas Répondre

    La France doit probablement être le seul pays où la “droite” préfère avoir un triomphe national de gauche plutôt que de s’allier aux patriotes qui défendent seuls notre pays. Dans n’importe quel pays qui se respecte, la droite serait elle-même patriote. On en est loin. La “droite” française, plutôt que de défendre la France (ce qui passerait assurément pour du fascisme), préfère nommer avec complaisance un “préfet” arabe et ouvrir grand nos frontières aux vagues déferlantes du Tiers Monde. C’est édifiant!

    3 avril 2004 à 19 h 25 min
  • ALDEBARAN Répondre

    Je ne suis pas du tout sûr personnellement que le rapport gauche/droite soit toujours en France de 40/60 ou même de 45/55 en faveur de la droite. Avec les millions d’assistés, fonctionnaires, enseignants, RMIstes, immigrés, chômeurs, salariés des grands monopoles assurant le “service” (!) public (EDF-GDF, SNCF, RATP, CNRS, Poste, etc), il y a aujourd’hui en france davantage de gens qui ne produisent pas que de gens qui produisent, et ces assistés de tous poils votent naturellement plutôt à gauche, de peur de voir leurs subsides réduits.

    3 avril 2004 à 19 h 13 min

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