La fin du protocole et le débraillé général

La fin du protocole et le débraillé général

Le comportement des présidents français notamment à l’égard du Pape est tout à fait étonnant. Sarkozy, reçu par le Saint-Père, l’avait pris par l’épaule, comme on le fait avec un vieux copain et, dernièrement, Macron, reçu au Vatican, a tapoté la joue du Pape François. À ce train-là, le prochain président français reçu au Saint-Siège dira au Pape : « Et si on allait vider une chopine de rouge ensemble ? »

Cette familiarité est déplacée. Investi des plus hautes fonctions, on doit respecter les usages. C’était là une preuve d’affection, disent certains. Je répondrai à cela qu’un chef d’État n’a pas à faire preuve d’affection pour un autre chef d’État. Il doit faire preuve de considération. Lorsque le général de Gaulle a été, lui aussi, reçu au Vatican, il a respecté la tradition. Il a fléchi le genou devant le Pape.

Ce laisser-aller s’inscrit dans l’évolution générale qui veut que l’on fasse simple et « peuple », c’est-à-dire pratiquement, le plus souvent, que l’on soit vulgaire et ignorant des conventions.

La tenue vestimentaire doit être en harmonie avec tout le reste. Il faut donc s’afficher en débraillé, surtout pas de cravate, le col largement ouvert et, élégance suprême, ne pas être rasé. À ce propos, je dois avouer que je n’ai toujours pas compris pourquoi il est recommandé de ne pas se raser, alors qu’une barbe vieillit le barbu de 20 ans. Quand il a 40 ans, il en paraît 60 ! Et pourtant, ce négligé qui pose quelques questions sur la propreté du client, plaît sans doute aux dames qui, elles, à la belle saison, se baladent en shorts, de plus en plus short – ce qui leur permet de porter plainte pour harcèlement sexuel que, pratiquement, avec une telle tenue, elles paraissent rechercher.

Tout cela fait désordre. Rues, avenues et boulevards des grandes villes, ce n’est pas la plage.

Toujours à propos de notre président, qu’il soit permis aussi de s’étonner qu’à l’occasion de la fête de la musique, il ait reçu à l’Élysée de curieux musiciens se présentant comme « noirs et pédés », insultant la France, transformant le palais présidentiel en boîte de nuit douteuse, comme l’a fort bien souligné Jean Rouxel dans les « 4 Vérités » du 29 juin (n° 1150).

Et, à Lagos, ancienne capitale du Nigéria, où il était en visite officielle, le président, conformément à son goût pour la musique tam-tam, s’est rendu avec sa suite dans un bouge où, personnellement, je n’aurais jamais osé mettre les pieds lorsque j’y étais en poste – d’abord par décence et aussi de crainte de recevoir un mauvais coup.

On observe aussi que Macron se prête volontiers à ce qu’on appelle les « selfies ». Ainsi une demoiselle pourra se montrer très proche du président et dire, photo à l’appui : « Vous voyez, c’est mon copain ! »

Macron ne parvient pas à comprendre que l’autorité implique la distance.

De façon générale, en diplomatie notamment, il faut maintenant savoir s’embrasser. Angela Merkel remarque ainsi : « Les Présidents français n’arrêtent pas de me biser. » Comprendre : « de me faire la bise ». Il va falloir à l’ENA créer des cours de bise, ouvrant la voie à une coopération multiforme.

Je note aussi, ce qui est tout à fait curieux, que tout le monde ou presque, désormais, tripote d’étranges petites boîtes que l’on appelle « smartphones ». Dans les transports en commun, 80 % des usagers « tripotent », les yeux rivés sur le petit écran et l’on entend le dialogue : « Ça va ? – Bon, ben, si ça va, ça va. – On se rappelle. » On conviendra qu’avec un pareil dialogue, on a très peu de chances d’être élu à l’Académie française ! Bien sûr, ces portables permettent de surveiller les enfants, d’appeler le médecin ou le plombier, mais on en fait un usage abusif. Si bien que les petits enfants, eux aussi, se mettent à tripoter des appareils qui permettent d’accéder à des images de toute nature, ce qui est malsain. Dans la rue, on tripote aussi et, souvent, le tripoteur ne regarde pas devant lui, risquant de heurter le brave piéton qui doit faire attention à ne pas être renversé par le tripoteur, les trottinettes, les patins à roulettes, les planches à roulettes, les motos, les vélos à toute allure sur les trottoirs, et les chiens ! Il a de la chance de s’en tirer vivant.

Bref, je résume. Pour être à la page, il faut être débraillé, surtout pas de cravate, être mal rasé, voter centre-gauche et le faire savoir, et habiter dans des quartiers près du peuple, surtout pas à Paris le 16e et le 7e, où, paraît-il, se cachent des riches. Je recommande le 10e arrondissement avec agressions, détritus, squats et salles de shoot. Ainsi, bien considéré, on peut être élu, ce qui, généralement, permet d’accéder à un train de vie appréciable.

Mais ce n’est pas tout. Attention à un point important : en matière d’immigration, il fait être très prudent. Se déclarer fermement contre et, comme notre président, « en même temps », fermement pour. Ainsi ne risque-t-on pas grand-chose. Le dieu qui nous protège tous, ce n’est pas Jupiter, mais Janus, avec ses deux visages opposés, l’un regardant devant lui, l’autre derrière. Il faudrait lui élever un temple.

Je ferai preuve tout de même d’une grande compréhension. J’admets volontiers que, par 35 degrés à l’ombre, on ne porte pas de col dur avec nœud papillon, comme j’en portais à Sciences Po, il y a longtemps. Pour autant, évitons de visiter Notre-Dame de Paris en maillot de bain.

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Comments (6)

  • A. F. Répondre

    A la décharge de Macron, il faut souligner que la devise de Bergoglio est “hagan lio !” => foutons le bordel !
    donc il récolte ce qu’il sème.

    30 juillet 2018 à 10 h 04 min
  • IOSA Répondre

    La posture devant les caméras est significative, une main sur l’épaule n’est pas un signe d’amitié, mais c’est le signe de celui qui protège le plus faible (normalement), sauf que là elle signifie que ” je suis plus fort que toi”, une insulte en somme.
    Tout comme prendre la joue du pape, que même moi je n’oserai pas faire à mon grand père de peur qu’il comprenne qu’il est devenu un vieux gâteux.

    28 juillet 2018 à 10 h 36 min
  • quinctius cincinnatus Répondre

    j’ ai septante huit ans ( 78 ) et ma barbe ne me fait pas paraître nonante huit ( 98 )

    27 juillet 2018 à 14 h 30 min
    • HansImSchnoggeLoch Répondre

      Coupez la et vous paraitrez 68 ou moins.

      PS: septante, octante, nonante seriez-vous suisse romand, ou wallon ou québecois?
      En tout cas ce comptage me parait plus logique que soixante dix huit ou quatre vingt dix huit.
      Pourquoi pas vingt dix huit (38) ou deux vingt dix huit (58)?

      27 juillet 2018 à 16 h 55 min
  • Rosme Répondre

    Tres bon article, merci de remettre les pendules à l’heure. Au moins c’est dit !

    26 juillet 2018 à 20 h 43 min
  • HansImSchnoggeLoch Répondre

    // je n’aurais jamais osé mettre les pieds lorsque j’y étais en poste – d’abord par décence et aussi de crainte de recevoir un mauvais coup //

    C’est bien dommage que ce mauvais coup ne soit pas venu quand Macron a mis les pieds dans ce bouge.
    Mais peut-être était-il accompagné d’Alex et de quelques uns de ses potes.
    Cela aurait suffit à calmer la pègre locale.

    26 juillet 2018 à 19 h 12 min

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