La France à la découpe ? (version intégrale)

La France à la découpe ? (version intégrale)

Les graves événements qui se déroulent en Guadeloupe et en Martinique depuis plus d’une semaine ont amené M. Lecornu, ministre des Outre-mer, à s’y rendre. Ce que la presse nous dit des problèmes sur place explique en partie certaines colères qui explosent en émeutes pendant lesquelles on tire sur les policiers sans qu’ils ripostent.

L’écart important de niveau de vie avec les départements de métropole n’est pas justifiable. Que des Français n’aient pas un accès normal à l’eau potable est incompréhensible. Il y a de gros efforts à faire là-bas ; prendre en compte des spécificités locales parait raisonnable. Moins d’argent aux immigrés pourrait aller à ces gens, Français depuis plus longtemps que les Savoyards. En échange sans doute aussi d’un peu plus de courage et d’ardeur au travail de la part de la population jeune.

Avant son déplacement M. Lecornu a trouvé judicieux de déclarer qu’il pouvait être discuté d’un statut d’autonomie pour la Guadeloupe. Il donne ainsi l’impression de céder par avance aux émeutiers, avant même le rétablissement de l’ordre.

Cela peut passer pour un début d’application bienveillante du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. C’est en réalité le faux nez de la faiblesse que l’état manifeste dans tous les domaines, là comme ailleurs. La portée de cette déclaration, certainement autorisée par le président, peut être incalculable. On est en train d’ouvrir une boite de Pandore. Evidemment les trois départements des Antilles prêtent une oreille intéressée. Et pourquoi cela s’arrêterait t-il là ? Pourquoi nos autres territoires ultra marins ne réclameraient-ils pas la même chose ? Et ceux qui ont déjà un statut particulier (Nouvelle-Calédonie, Polynésie, même la Corse) peuvent avoir l’idée de franchir une étape supplémentaire ; vers l’indépendance. A terme l’entrainement peut être irrésistible.

Quelle importance diront certains ? Toutes ces possessions, des iles à l’exception de la Guyane, coutent cher. Oui, mais toutes sont peuplées de Français et le plus élémentaire des devoirs d’une nation est d’assurer protection aux siens ; pas de les lâcher aux premiers vents mauvais.

Beaucoup rêvent encore du temps où la France comptait parmi les grands de ce monde. Ce n’est plus le cas ; ou plutôt si ; cela reste vrai sur le plan géographique justement. Grâce à ses territoires ultra marins éparpillés sur tous les océans, la France a le deuxième domaine maritime du monde derrière les Etats-Unis. Leur intérêt économique est grand, pas dans le domaine halieutique qui est secondaire ; mais les ressources sous-marines, même celles que la technologie actuelle ne permet pas encore d’exploiter, y sont considérables (nodules polymétalliques en particulier).

Stratégiquement ces territoires sont d’une importance majeure, surtout maintenant que les jeux de puissance se développent, dans le Pacifique en particulier, avec la montée inquiétante de la Chine.

N’en déplaise aux nostalgiques du grand siècle, la seule dimension mondiale qui nous reste est celle-là. A condition que nous soyions capables d’affirmer notre autorité et notre détermination à les défendre. Pour cela il faut une marine puissante que nous n’avons pas. On ne peut pas se contenter de montrer occasionnellement le pavillon ici ou là, ou dépêcher une frégate pour donner un coup de menton quand l’actualité attire l’attention sur tel endroit où ça chauffe un peu. Si nous donnons l’impression d’être prêts à lâcher, d’autres encourageront et prendront la place ; des adversaires potentiels comme la Chine, voire des alliés, comme par exemple les Etats-Unis ou l’Australie qui ne prendront pas le risque de voir leurs approches tomber dans des mains hostiles.

La Nouvelle-Calédonie mérite un regard particulier car son sort préfigure ce qui peut arriver ailleurs.

Le 12 décembre les électeurs de cette île seront appelés à voter pour décider s’ils veulent être indépendants. On ne demande pas à l’ensemble des Français s’ils veulent s’amputer. Certains y voient la France dans son rôle humanitaire honorable. Ce n’est pas mon avis. Remarquons d’abord que c’est le troisième scrutin sur le même sujet, les deux premiers ayant rejeté l’indépendance à une courte majorité. Pourquoi trois référendums ? Chercherait-on à tout prix que les électeurs votent comme on le souhaite ? En outre la république a trouvé judicieux d’éliminer du corps électoral plus de 35.000 électeurs inscrits sur les listes électorales générales. Basé sur la durée de séjour sur le territoire, cet oukase favorise les natifs très anciens de l’île, majoritairement Kanaks, et élimine presque 20% des électeurs venant d’ailleurs (pas seulement métropolitains), qui a priori sont très majoritairement contre l’indépendance. Quand on ajoute à cela que M. Lecornu a rappelé, sans s’offusquer, que l’ONU considère la Nouvelle Calédonie « comme une terre à décoloniser », on ne peut pas douter que nos dirigeants successifs, sans reculer devant des méthodes antidémocratiques, sont décidés à brader ce qui reste de l’Empire ; et à abandonner nos compatriotes.

Notons enfin que cette île a un intérêt économique majeur par la présence sur son sol de nickel qui la place au 4ème rang mondial pour la production de ce métal. Au moment où on a la prétention stupide de faire rouler tout le monde en véhicule électrique, rappelons que dans chaque batterie de 200 à 300 kg, il y a de 10 à 15 kg de nickel. C’est la seule matière première essentielle à cette fabrication que nous possédons. Raison de plus pour penser que, si nous partons, la place ne sera pas inoccupée longtemps.

La constitution dit bien que « la république est une et indivisible ». Oui, mais il y a le précédent des départements français d’Algérie ; et, déjà, la présence tolérée d’enclaves étrangères sur le sol métropolitain. Pas de quoi être rassuré pour l’avenir.

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