Le prétendu « problème corse »

Le prétendu « problème corse »

La République a ses traditions. Quel que soit le Président en place, on sait qu’il défilera le 14 juillet ; le Premier ministre fera, lui, une déclaration de politique générale ; les députés, chaque mardi, pousseront des cris de vierges effarouchées au cœur d’un hémicycle étonnamment plein, dans l’espoir que les caméras s’arrêtent sur eux…

Mais il est une autre tradition non écrite qui anime nos institutions : chaque ministre de l’Intérieur se doit de déclarer, sur un ton énergique, qu’il entend s’attaquer au « problème corse ».

Pour nous, vulgum pecus, non-initiés aux mystères de la langue des « sachants » parisiens, cela semble témoigner d’une volonté de mettre un terme aux maux qui gangrènent l’île : chômage, faillite du système éducatif, immigration incontrôlée, surendettement, drogue et alcool, crise de l’agriculture, vieillissement de la population… sans oublier le premier fléau de l’île, la violence.

Non, décidément non, il n’est pas question de cela, ici.

Le fameux « problème corse », c’est une hydre, un monstre, un mythe : c’est la question sans cesse posée de l’avenir de l’île, c’est l’enjeu de réformes institutionnelles jamais réglées.

Chaque ministre a donc son plan pour la Corse et Manuel Valls ne fait pas exception : à peine arrivé aux affaires, il s’est empressé de nommer une « commission Chaubon ». Après le « plan Poniatowski », le « statut Joxe », les « accords Matignon » et la tentative de « réorganisation Sarkozy », voici donc une énième solution miracle.

Une fois encore, on va donc tout changer pour que rien ne change. On va modifier l’appellation des élus locaux, leur mode d’élection… transférer de nouvelles compétences. Et prier, dévotement, pour que les choses n’empirent pas trop. Évidemment, nos gouvernants savent bien que cet exercice ne réglera rien. Mais, après tout, si les ministres d’aujourd’hui réglaient les problèmes de toujours, à quoi serviraient les ministres de demain ?

C’est là qu’il convient d’aborder une autre particularité de notre République : elle ne s’aime pas et a une propension naturelle aux comportements autodestructeurs. Les exemples ne manquent pas : la nation qui s’abandonne entre les griffes de l’Union européenne, allant jusqu’à lui demander de lui imposer règlements, normes et, le cas échéant, sanctions. On pourrait aussi citer la création quasi-frénétique de « hautes autorités indépendantes », entités créées par l’État afin d’être indépendantes de lui-même. Comme si l’État se méfiait de lui-même…

L’affaire n’est, hélas, pas différente en Corse. L’État délègue, de façon régulière et constante, compétences et pouvoirs aux élus locaux avec une sorte de joie morbide. Bien sûr, on ne vous dira pas : « La République se tire ! » Mais c’est pourtant ce qu’il faut comprendre.

Oui, il y a des problèmes en Corse, comme partout sur le territoire national, à des degrés divers. À côté des vraies difficultés, il est probable qu’il existe un « problème corse ».

Mais il est aussi probable que celui-ci ne soit pas là où on le croit : c’est sans doute le renoncement de l’État à être actif. C’est peut-être le refus des gouvernements successifs d’écouter la voix des Corses. C’est probablement cette succession ridicule de statuts venus renforcer une classe politique locale étrangère au bien public, à bout de souffle et malade de ses vices.

Ce ne sont pas les barons locaux, confiscateurs de la démocratie véritable, qui aideront l’île à sortir de cette spirale. Ce sont les Corses qui sauveront la Corse, et eux seuls.

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Comments (1)

  • quinctius cincinnatus Répondre

    ” ce sont les Corses et eux seuls etc … ”
    je mourrai certainement avant d’avoir vu ces jours heureux !

    ce dont les Corses ont besoin c’est d’un … Mussolini !

    27 mars 2013 à 19 h 50 min

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