Masques et mascarade

Masques et mascarade

Ils jonchent les trottoirs et cachent les visages de tout un chacun, flambant neufs ou réutilisés depuis un bout de temps au mépris de l’hygiène la plus élémentaire, faisant parfois office de mouchoir ou de crachoir, fourrés dans les poches à côté du paquet de cigarettes ou dans le sac à main de ces dames entre le portable et la tétine du petit dernier.
Certains les gardent pour manger dans la rue ou à la terrasse des cafés, autour du cou comme un bavoir et s’empressent de le remettre une fois l’intermède gustatif terminé – il faut bien circuler dans l’établissement pour aller payer ou aller aux toilettes, et il est interdit de le faire le visage découvert.
Les marques ont vite saisi l’opportunité, et on en voit fleurir sur les visages féminins décorés ou imprimés.
Qui sait où ils finiront en fin de journée ?
Nos ministres se contredisent et érigent chaque jour de nouvelles règles, M. Castex voudrait les rendre obligatoires même en extérieur partout et sur tout le territoire, alors que M. Véran vient de trouver la formule magique, « la règle de l’ABCD » (fragile ou Âgé, lieu Bondé, lieu Clos, Distance impossible à respecter) qu’il nous enjoint de respecter afin d’éviter la fameuse deuxième vague crainte comme le loup blanc.
La canicule elle-même n’empêche pas son port royal et vain, les fameux indicateurs ayant tendance à remonter en flèche ces dernières semaines.
La mascarade se poursuit, sortons couverts, il y va de notre vie et de celle du prochain !
Le Larousse donne trois définitions du mot « mascarade » qui ont de quoi nous faire réfléchir.
1) Réunion ou défilé de personnes déguisées et masquées.
2) Déguisement étrange, accoutrement ridicule.
3) Comédie hypocrite, mise en scène trompeuse.
Ces trois sens, très proches au demeurant, répondent en tout point à la conjoncture actuelle.
Les réunions sont déconseillées mais, avec le masque, tout est permis (lieu Bondé, lieu Clos), comme la promiscuité dans le métro ou le train, puisque c’est pour la bonne cause, relancer l’économie.
Le ridicule ne tue plus depuis bien longtemps, il est même admis et plébiscité depuis les Habits neufs de l’Empereur : qu’importe que je sois en réalité ridicule si tout le monde reconnaît et affirme que je suis bien conforme aux convenances actuelles.
Ainsi se déroule, en toute honnêteté intellectuelle – que dis-je, en tout bien-fondé moral –, la triste et menteuse comédie du masque dans laquelle nous jouons tous un rôle, de gré ou de force, par ordre gouvernemental.
Rappeler simplement un des sens étymologiques de la « personne » en grec ancien ne serait pas inutile : le masque de théâtre se dit persona.
Essayons donc d’être de bons acteurs, et non pas à notre détriment.
Ne nous assimilons pas trop à ce rôle, ne le prenons pas trop au sérieux, de peur de faire corps avec lui, comme l’acteur novice et naïf qui, en s’identifiant totalement à son rôle, à son masque, finit par s’y assimiler et y perdre son identité propre, sa véritable personne.

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