Un projet européen dévoyé

Un projet européen dévoyé

L’Union européenne fait face à une dégradation permanente de sa situation économique et financière.

Maurice Allais a montré dès 1993 (Combats pour l’Europe), que la décision d’instaurer le libre-échange mondial (1975) a provoqué un renversement brutal des équilibres économiques. De plus en plus d’entreprises industrielles ont été, face aux pays à bas salaires, contraintes de fermer, ou d’y délocaliser leur production.

Certes, les mutations industrielles ont toujours existé. Ce qui est nouveau, c’est le remplacement de productions locales par des importations identiques, avec pertes d’emplois – et par décision politique.

Selon nos élites, nos pays (traditionnellement à la pointe de l’innovation) étaient devenus non-compétitifs. Il fallait abandonner nos activités traditionnelles sans avenir à des pays « plus performants », nous orienter vers des activités mieux valorisées, et y investir notre énergie et nos capitaux.

Mais les prétendus rustres sont aussi intelligents que nous : leur niveau de formation s’est régulièrement élevé et ils ont assimilé nos savoir-faire. Après les industries à forte charge salariale, les autres ont suivi (y compris les hautes technologies).

La situation de la France n’est pas la pire, mais la croissance y a baissé de 3,9 % en 1975 à 0,3 % en 2012 ; les emplois industriels ont décru de plus de 2,5 millions ; le nombre de sans-emplois est passé d’environ 750 000 (dont 630 000 secourus) à près de 5 millions (dont 3,2 secourus)…

Pour compenser l’insuffisance des cotisations de chômage et l’affaissement du pouvoir d’achat, on a creusé les déficits publics, malgré une pression fiscale tous azimuts.

Dès l’arrivée de l’euro, le déséquilibre des échanges commerciaux nous a rendus incapables de financer nos importations par nos exportations, le déficit augmente chaque année, et a fortement contribué à une dette de 1 800 milliards.

Internationale à 65 %, cette dette ne sera jamais remboursée et nous nous épuiserons à en payer les seuls intérêts.

« Plaie d’argent n’est pas mortelle », dit la sagesse populaire. L’ennui est qu’il y a pire : la di­vergence des évolutions sociales.

Le système capitaliste est le seul qui ait réussi à augmenter continuellement le niveau de vie des pays qui l’ont adopté, en bénéficiant, même inégalement, à toutes les catégories sociales.

Aujourd’hui, tout se passe comme si on était parvenu à le dévoyer : alors que la condition du plus grand nombre se dégrade, celle des bénéficiaires (hauts fonctionnaires, cadres supérieurs et dirigeants des grandes entreprises) ne fait que s’améliorer. Sans oublier les médias qui soutiennent le système.

Tout se passe donc comme si l’on était en train de valider la théorie marxiste de la paupérisation tendancielle.

Certains pourront négliger l’as­pect moral, mais personne ne peut négliger le risque de déstabilisation.

L’Histoire enseigne que les dirigeants doivent un jour rendre compte d’une injustice sociale forte et avérée.

La structure politico-sociale de l’Ancien Régime, qui maintenait les masses populaires dans une position économique inférieure au profit de la classe dirigeante, était justifiée historiquement par la mission de protection que celle-ci exerçait. C’est lorsque cette mission a disparu que les masses se sont révoltées, et l’occasion en a été… une crise financière et fiscale.

Aujourd’hui, le plus grand nombre est de plus en plus exposé, alors que les élites vivent de mieux en mieux… et la « com » va plus vite qu’en 89.

Les citoyens qui ont fait confiance au projet européen, audacieux et enthousiasmant, doivent comprendre qu’ils ont été menés en bateau. Que l’objectif réel leur a été dissimulé car irréaliste (clairement exposée, la création d’un État européen était incapable de réunir une majorité). Que les moyens mis en œuvre nous éloignent cha­que mois des promesses de départ, pour un coût exorbitant. Qu’ils ont servi d’idiots utiles à une oligarchie irresponsable. Que la grande majorité de la population est prise au piège de l’appauvrissement, et qu’il est temps d’arrêter cette chute désastreuse.

Quelle époque a vu des dirigeants mener sciemment leurs peuples à la ruine ?

Qui va se charger de poser la question, et d’obtenir une ré­ponse crédible ?

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Comments (6)

  • REDNES Répondre

    Je suis extrêmement étonné des commentaires que je lis dans votre journal. En effet, de multiples raisons sont données au déclin de l’Europe et des pays qui la compose sans que personne ne mette en cause la raison principale de ce déclin : L’Europe comme la plupart des pays qui la compose sont aux mains des FONCTIONNAIRES, ENARQUES et AUTRES Oligarches dont deGaulle deisait à leur propos qu’ils sont incapables de s’occuper des affaires publiques car il leur manque un ingrédient essentiel : le se’ns des réalités ! ! ! !

    16 mai 2013 à 20 h 04 min
    • quinctius cincinnatus Répondre

      Qui a créé l’E.N.A. ? Qui à créé Frankenstein ? Qui a inspiré les ordonnances de 1946 ? bref Qui est à l’ORIGINE de notre déclin ?

      17 mai 2013 à 7 h 25 min
  • Heinz KLAUS Répondre

    Que dire d’appeler aujourd’hui Sarkozy, un ancien président responsable de l’ouverture néfaste, après avoir perdu cinque élections sans se poser une seule question et d’avoir dilapidé pendant son règne plus de 500 milliard sans s’attaquer aux sources: l’Etat obèse et le marché de travail digne d’un pays communiste.

    16 mai 2013 à 9 h 35 min
  • Hommet Répondre

    Qu’ajouter à cette brillante synthèse digne de Maurice Allais. “Qui va se charger de poser la question et d’obtenir des réponses crédibles “? Evidemment pas ceux qui sont responsables de cette situation c’est à dire l’UMPS. Mais l’enracinement est si profond et si étendu, les naïvetés et les compromissions si vastes que le risque d’une solution tragique ne soit recherchée par des peuples desespérés.

    15 mai 2013 à 12 h 33 min
  • PIGIS Yves Répondre

    Dommage que vous ayez mis 20 ans pour vous en apercevoir.

    15 mai 2013 à 10 h 57 min
    • Hommet Répondre

      J’ignore à qui s’adresse ce reproche d’une attente de 20 ans pour clairvoyance, mais personnellement je militais activement dans le Mouvement pour la France de Philippe de Villiers dès les années 80. Le programme économique du MPF de Ph. de Villiers est inspiré directement des études de Maurice Allais. Celui du FN aussi. Il est à remarquer que Maurice Allais qui est décédé il y a quelques mois, bien que seul Prix Nobel d’économie que la France ait emporté, a toujours fait l’objet d’un silence assourdissant dans tous les médias

      16 mai 2013 à 16 h 36 min

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