Un régime à bout de souffle

Un régime à bout de souffle

L’arrivée de Dominique de Villepin au poste de Premier ministre, son discours incantatoire où il s’agit tout à la fois de préserver le « modèle français » et de faire preuve de « volontarisme » face au chômage, la composition d’un gouvernement imprégné de ce mélange de vide, d’immobilisme et de médiocrité qui est la marque du chiraquisme, tout cela sent la fin de règne et la fin de parcours pour une majorité à bout de souffle.
On se demanderait ce que Nicolas Sarkozy vient faire dans cette galère si le principal intéressé n’avait répondu lui-même qu’il valait mieux pour lui veiller, de l’Intérieur, à ce que nulle officine ne monte contre lui des coups tordus.
En fait, c’est tout l’édifice politique français qui se trouve ébranlé : jamais l’écart entre la population et la classe politique n’a paru si grand. Aucun homme politique actuel n’incarne une ligne claire et réaliste pour l’avenir. Aucun parti politique n’est porteur d’un projet viable et dynamique. Nous payons ainsi le cadenassage du système politique français, mais aussi le cadenassage des médias dans une médiocrité presque uniforme et une pensée unique quasiment aveugle aux réalités de l’économie et de la géopolitique  planétaires.
Ailleurs dans le monde développé, les partis socialistes ont su devenir des partis sociaux-démocrates modernes; pas en France où l’ombre du paléo-marxisme plombe encore l’horizon. Ailleurs dans le monde développé, existe une droite libérale et conservatrice; pas en France où la silhouette épuisée du gaullisme (ou de ce qui en reste: une apparence vide) constitue le facteur essentiel d’asphyxie.
J’aimerais espérer un sursaut, mais je ne vois rien venir. Je vois plutôt l’effondrement se poursuivre. Comme le disait voici quelques jours un journaliste américain, la France est le seul pays développé où le libéralisme classique serve de repoussoir, où la social-démocratie à l’anglaise soit ressentie comme un tabou et où on débat encore des bienfaits et des méfaits de la mondialisation, comme si celle-ci n’était pas essentiellement une réalité.
La crise spécifiquement française mise au jour de façon flagrante par les débats qui ont précédé le référendum, par le résultat lui-même et par les pathétiques réponses apportées à ce résultat, va de pair avec la crise de l’Europe qui se construisait jusque là. Le « non » français a eu les dimensions d’une révolte sans véritable boussole. Le non néerlandais et celui qui se propage ailleurs en Europe aujourd’hui sont d’une autre essence, et pointent plus clairement le cœur du problème.
Les déficits démocratiques de l’Europe étaient de plus en plus flagrants. La dimension absolutiste du projet européen était de plus en plus obscène. L’arrogance des élites politiques, intellectuelles et médiatiques soutenant l’ « européisme », faute de contre-poids, se faisait de plus en plus pesante. C’est un refus global de tout cela qui vient peu à peu. Les peuples européens demandent à avoir voix au chapitre. Ils n’entendent pas voir, sous forme d’eurocrates, une nouvelle noblesse façon ancien régime s’installer au-dessus de leur tête. Ils en ont assez de la fatuité de ceux qui prétendent savoir mieux qu’eux ce qui est bon pour eux.
La construction économique n’a rimé pour eux ni avec croissance forte, ni avec plein emploi; le vieillissement des populations se poursuit; la dissémination de l’islam militant aussi. Des réglementations absurdes et hautaines tombent de Bruxelles. Construire une « Europe puissance », à même de «compter politiquement », ne les fait plus rêver, dès lors que le rêve doit se payer d’une vie quotidienne chaque jour plus difficile.
Une Europe absolutiste, technocratique, tournée vers la construction d’une puissance supra-nationale est en train de mourir sous nos yeux. L’Union Soviétique Européenne dont parlait voici peu Vladimir Boukovsky ne verra pas le jour. L’Europe qui va émerger sera plus humble, plus empirique, plus anglaise, plus atlantique, plus libérale économiquement. L’Occident ne sera pas cassé en deux. Les peuples  préserveront leurs identités et leurs souverainetés tout en passant accords et alliances.
C’est une victoire de la liberté. Il va falloir en Europe penser enfin la situation planétaire. Il va falloir, en France, éviter le pire, si c’est encore possible. C’est plus que jamais le moment de mener le combat des idées.

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Comments (5)

  • Thierry Répondre

    (En espérant que cette fois ci cela passera) Les lamentations de G.Millière ne servent en rien la cause libérale. De même sa mise en cause perpétuelle des “médias” est contre productive. Un seul article de E le Boucher dans “Le Monde” fait plus pour le libéralisme que les oeuvres complètes de notre universitaire énervé. A ce sujet, il fut un temps où celui ci était moins regardant quand il nous brandissait rosissant d’aise et bombant le torse les articles élogieux, mérités à l’époque, parus dans la presse sur ses derniers ouvrages.

    14 juin 2005 à 12 h 55 min
  • Florent Répondre

    Je ne serai certe pas originale mais, tant pis, je tenais juste à réaffirmer mon admiration pour Guy Millière qui fait partie de ces rares érudits ayant autant la conscience de leurs responsabilités que le courage d’assumer leurs idées ( on peut y ajouter Jean Sévilla, Ivan Rioufol, Denis Tillinac ).Bref, en deux mots: Millière président!

    13 juin 2005 à 19 h 16 min
  • sas Répondre

    c’est vous mr millière et votre emloyeur “l’éradication nationale” eu pardon l education nationale qui êtes àA BOUT DE SOUFFLE… continuez vos formations professionnelles faites par des intermittants du spectable(jt de 13 h 00 du mois de mai…sérieusement)…vous êtes tous pathétique et vous avez tué la france. SAS

    13 juin 2005 à 15 h 04 min
  • alain Répondre

    Certes, Milliere a raison; rien ne change, le niais de Matignon parle encore d’un traitement “volontariste” du chomage ! Mais que peut faire un gouvernement au sujet du chômage ? Ne sont ce pas les entreprises qui créent les richesses, les PME/PMI qui fournissent du travail et les citoyens qui gaspillent leur énergie et leur attention à entendre pareilles fariboles ? Lorsque, à l’étranger, on me demande, l’air aimable : “alors, en france (avec un petit “f”) ? – je réponds invariablement : ” Ah monsieur, le pays est obscène, tout là bas est pathétique ! “. Qu’il y aît des gens qui veulent encore se battre là, je tire mon chapeau

    13 juin 2005 à 12 h 21 min
  • Le celte Répondre

    Guy Millière est à l’image de Jean-François revel, et de Raymond Aron, mieux encore, à l’image de Karl Popper il est le dernier des philosophes qui défend en France la liberté et la société ouverte contre ses ennemis il est comme la bougie, comme une lueur au loin d’une vague espérance, une lumière du temps des lumières Que Dieu protège son âme “L’homme existe je l’ai rencontré” comme disait un célèbre humouriste Merci !!

    12 juin 2005 à 10 h 54 min

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