Bébés génétiquement modifiés

Bébés génétiquement modifiés

Un scientifique chinois vient d’annoncer la naissance de deux filles jumelles dont il a modifié le génome.

Cette annonce a suscité un tollé international, non sans raison :

– La communauté scientifique elle-même avait décidé d’un moratoire sur la modification d’embryons il y a trois ans.

– L’annonce ne s’accompagne à ce stade d’aucune publication scientifique permettant une vérification par les pairs.

– La technique utilisée pour modifier le génome est loin d’être complètement maîtrisée. Il s’agit des fameux « ciseaux génétiques à tête chercheuse » CRISPR-CAS9.

– La recherche a été menée plus ou moins dans le secret, en contradiction avec la réglementation chinoise.

Mais le plus grave, c’est que, pour la première fois, la science a utilisé comme cobaye l’être humain dans ce qu’il a de plus intime et fondamental, son ADN.

Sans leur consentement, des êtres humains sont « mutilés » de façon irréversible.

La modification ne touche pas seulement une partie de ces êtres humains, mais toutes leurs cellules (en principe).

On est incapable de mesurer l’impact d’une telle modification à terme sur leur physiologie, leur psychologie – et, a fortiori, on ne peut, bien entendu, pas leur garantir qu’on saura résoudre les éventuels problèmes qui en résulteraient.

La modification génétique étant transmissible à la descendance de ces filles, elle introduit dans la lignée humaine un élément nouveau dont les conséquences peuvent être dramatiques (ex : support de nouveaux virus, de nouvelles maladies, etc.).

La gravité des faits ne semble pas avoir échappé à la plupart des scientifiques.

En particulier, les organisateurs du Sommet International pour l’Édition du Génome qui vient de se tenir à Hong Kong ont dénoncé « un pas en arrière ». La communauté scientifique chinoise a condamné ces travaux. Les académies nationales américaines des sciences et de médecine (NAM) ont fait part de leur inquiétude. Leurs homologues françaises aussi.

Tout cela est plutôt rassurant. Sauf que nos académies ajoutent : « Si cette démarche était entreprise dans l’avenir, ce ne devrait l’être qu’après approbation du projet par les instances académiques et éthiques concernées et un débat public approfondi. »

Autrement dit, elles sont « contre » aujourd’hui mais potentiellement « pour » demain !

Par ailleurs, force est de constater que l’autorégulation par la communauté scientifique n’a pas fonctionné.

Il faut dire que la banalisation de techniques comme CRISPR­CAS9, accessible à bas coût, rend difficile le contrôle des pratiques par les États comme par les communautés professionnelles.

La motivation de l’acte est, à mon sens, sans incidence sur les problèmes éthiques qu’il soulève ; elle mérite néanmoins quelques commentaires.

L’objectif revendiqué (immunité au VIH) pouvait apparemment être atteint par d’autres moyens.

Les embryons modifiés étaient sains au départ ; il ne s’agissait nullement de les « guérir ».

La « compassion » invoquée par le chercheur (en l’occurrence la compassion vis-à-vis de ces familles touchées par le VIH) est un argument passe-partout, malheureusement utilisé de plus en plus pour justifier n’importe quelle transgression éthique.

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Comments (4)

  • HansImSchnoggeLoch Répondre

    La première description de ce que l’on appela plus tard “CRISPR” fut faite à l’Université japonaise d’Osaka par “Yoshizumi Ishino et al” en 1987.
    Comme toujours les Chinois copient et “améliorent” suivant les prescriptions du Dr.Frankenstein.
    On peut s’attendre au pire.

    5 décembre 2018 à 10 h 56 min
    • quinctius cincinnatus Répondre

      à une époque pas si lointaine on disait déjà cela des … Japonnais qui depuis nous ont largement dépassés pour ce qui est de l’ innovation

      en parlant de Frankenstein , personnage germanique et masculin cela va de soi, saviez vous qu’ avant d’ être logée, avec son époux richissime industriel ” spolié “, au Panthéon , l’ icône morale de toute une époque et ministre de la Santé, Simone Veil, était la locataire d’ un luxueux appartement parisien dont le propriétaire n’ était autre que l’ Assurance … Maladie ?

      8 décembre 2018 à 9 h 26 min
      • HansImSchnoggeLoch Répondre

        Détails vitaux qui m’avaient bien sûr échappé:
        a) les Japonais nous ont dépassé? C’est qui “nous”?
        b) Frankestein, personnage germanique? Ah bon je le croyais arabe.

        Les Suisses sont fiers du logo “swiss made”, sur les 4V nous avons le label “QC certified”.
        Ouf l’essentiel de mon commentaire est sauvé!

        8 décembre 2018 à 9 h 53 min
  • BRENUS Répondre

    Certains “scientifiques” ont du trop regarder les séries X-MEN et ont voulu s’amuser un peu. A vous magnéto….

    5 décembre 2018 à 0 h 27 min

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