Histoire : réformer aussi le contenu

Histoire : réformer aussi le contenu

Dans le n° 1001, Gaël Nofri a fait ressortir, à juste titre, l’urgente né­cessité d’un enseignement de l’histoire cohérent et logique.
Deux autres contraintes, pour le moins, s’imposent, portant sur le contenu de cet enseignement : l’objectivité et « l’accroche-cœurs ».
Certes, la bien-pensance a érigé en dogme qu’il ne saurait y avoir d’histoire officielle – en somme, que tout un chacun peut enseigner n’importe quoi ou encore se limiter aux seuls « événements » en conformité avec son idéologie.
Sous prétexte de « mémoires coloniales blessées », on met l’accent sur le scandale de la traite négrière… mais on camoufle que l’esclavage n’est pas un « sous-produit » de la colonisation et qu’au contraire, le premier de ces « sous-produits » fut son abolition, là où il sévissait de toute antiquité.
Amateur de revues du XIXe siècle, tel « Le Tour du Monde » ou encore « Le Journal des Voya­ges », je conseille leur lecture à ceux qui enseignent l’histoire ou même seulement veulent s’informer d’une façon impartiale (et tout un chacun peut le faire en consultant le site de la Bibliothèque nationale de Fran­ce).
Voici, par exemple, repris du journal de marche de la Mission Niger, ce qui peut se lire dans le numéro du 16 mai 1897 du « Journal des Voyages » : « En aval de Say pendant près de 100 kilomètres est une région presque absolument déserte, dévastée par la guerre qui n’a cessé de régner depuis près d’un siècle entre Say et Dendi ». Ou encore, à la date du 26 décembre, à propos de Samory : « La disparition de ce chasseur d’hommes mettrait un terme aux razzias et au commerce d’esclaves qui déshonorent le Soudan [le Mali, dirions-nous de nos jours] ».
Que la colonisation ait eu des aspects positifs, les Africains impartiaux le reconnaissent, tel le professeur Ki Zerbo. Il s’exprimait ainsi, lors d’un colloque tenu à Ouagadougou en décembre 1993 : « L’Afrique était-elle condamnée à être colonisée ? Souffrait-elle de colonisabilité ? On pourrait presque l’admettre quand on constate le degré de décomposition des structures politiques, ou du moins de crises plus ou moins aiguës, plus ou moins larvées des pouvoirs et des sociétés. L’impact colonial servira de révélateur pour ces processus de décadence avancée… »
En conclusion, il souhaitait que son exposé puisse contribuer « à faire disparaître tout ce que la colonisation a eu de négatif, étant entendu qu’elle a eu aussi beaucoup d’aspects positifs ».
Que les fils de France le sachent : la colonisation ne fut pas seulement une forme d’impérialisme, ce fut aussi une « assistance à peuples en danger ».
Ne pas l’enseigner, c’est fausser la perception de notre passé national et induire des réactions (vécues) du genre :
Nous aurions dépossédé de leur pays des indigènes dignes, développés, civilisés à leur façon. Nous aurions réduit en esclavage lesdits indigènes (comme si ce n’était pas les puissances coloniales qui avaient mis fin à l’esclavage).
Notre progrès serait la résultante de nos pillages (comme s’il y avait eu quelque chose à piller dans des pays comme le Mali, le Burkina ou le Tchad !).
Nous aurions semé la zizanie ethnique par nos découpages administratifs et notre politique (comme si n’existait pas en beaucoup d’endroits de l’Afri­que une balkanisation pire que celle des Balkans, avec jusqu’à 21 langues différentes dans un même pays).
Nous aurions attenté à la santé des indigènes en méprisant leurs médecines (comme si la colonisation n’était pas à l’origine d’un considérable mieux-être sanitaire des populations locales)…
Vous qui faites les livres d’histoire, vous qui enseignez l’histoire de France, veillez à la présenter d’une façon objective et positive !
Arrêtez de polariser nos jeunes sur des balivernes.
Apprenez-leur plutôt l’impact de la France sur l’histoire de l’humanité. Apprenez-leur no­tamment qu’en Afrique, la colonisation apporta la paix, organisa l’instruction, créa des infrastructures, mit en place des structures de santé…
À l’heure actuelle, nos jeunes ont une vision faussée de notre histoire. Que certains en viennent à cracher à la figure de leurs maîtres ou encore à mépriser nos institutions, ne nous en étonnons pas…

Michel Nouaille-Degorce

Partager cette publication

Comments (15)

  • Spartacus Répondre

    En ce qui concerne les “indiens” nord américains, ils était moins de 2 millions lors de l’arrivée des “blancs”. Sans vouloir oublier les massacres, la vérité est que les maladies sont à l’origine de la plus grande partie des morts, difficile d’en tenir les colonisateurs responsables. Malgré cela les indiens (métissés ou pas) sont environ 4.5 millions de nos jours.
    Concernant les apports, les indiens vivaient à l’age de pierre. Ils ne connaissaient pas la roue, l’écriture, les animaux domestiques, le tissage.
    Contrairement à la légende, ils étaient aussi belliqueux que tous les autres peuples de la terre.

    6 août 2015 à 12 h 07 min
    • Spartacus Répondre

      ils “étaient”

      6 août 2015 à 12 h 08 min
    • Jaures Répondre

      Votre chiffre de 2 millions est éminemment contestable. On parle plutôt de 5 à 10 millions.
      Les maladies n’ont jamais exterminé un peuple. Il y a eu en Europe de nombreuse épidémies décimant des millions d’âmes sans que le peuple soit éradiqué.
      Il faut pour cela la conjonction de plusieurs faits: les guerres, les maladies, les persécutions et les déportations.
      C’est ce qu’ont subi les autochtones américains et australiens comme les juifs, heureusement pour ces derniers pas assez longtemps pour les éradiquer d’Europe.

      6 août 2015 à 12 h 57 min
  • genau Répondre

    @ Jaures
    Vous avez en grande partie raison, mais dans l’absolu seulement. EN effet, la colonisation est tout, sauf une politique de droite; elle est de consentement et d’utilité nationaux.
    Toute société procède par conquêtes, plus ou moins justifiées, sous un fonctionnement purement politique, mais souvent voilé de religieux. On pourrait en discuter, vous le dites, à l’infini.
    C’est pourquoi le fait que les populations africaines n’aient rien demandé n’améliore pas le débat, c’est un truisme.
    Si Hitler avait limité sa conquête à la France, et attendu sagement de conforter ses positions, pour modifier la mentalité et introduire ses valeurs, nous parlerions aujourd’hui un sabir germanique.
    C’est donc bien de la qualité de la conquête qu’il faut débattre. Or, la France, en cette matière, est certainement une des moins mauvaises colonisatrices, l’Allemagne, en revanche, au Togo, n’a strictement rien compris.
    La France possédait une administration spécifique, une faculté de médecine particulière qui ne servait pas qu’aux français blancs, mais a permis d’éradiquer bien des maux, et a apporté dans son domaine une paix interne durable.
    Tout cela supporte à l’infini les critiques car il n’est pire sourd qui ne veuille entendre,
    .Les phénomènes américain, australien peut s’assimiler rebus sic stantibus aux invasions romaines, sauvages comme l’époque, mais formatrices et fournisseurs de connaissances, au contraire des conquêtes grecques qui commençaient par la destruction.
    Et que dire du processus soviétique loué et encensé par nos communistes locaux.
    De tout cela, je retire que la haine manifestée à l’encontre de la France par les politiciens soucieux de renommée est une forme perverse de colonisation sur leurs propres ressortissants.

    6 août 2015 à 11 h 10 min
    • Jaures Répondre

      Je n’ai jamais écrit que la colonisation serait “de droite”.
      Je ne sais pas ce que vous appelez “qualité de conquête”. Celle de l’Algérie a débuté comme partout, par des batailles et des massacres. les autochtones se sont vus ensuite imposer le statut de l’indigénat qui faisait d’eux dans leur propre pays des citoyens de seconde zone, aux droits limités, soumis à l’arbitraire des expulsions et des peines collectives.
      Vous avez raison de dire que l’histoire est une suite de conquêtes mais il importe de les énoncer comme telles et non pas les travestir sournoisement en quasi actions humanitaires.
      Quant aux conquêtes américaines ou australiennes, je me demande en quoi elles ont servi les populations autochtones puisque la colonisation les a fait disparaitre en quelques décennies.

      6 août 2015 à 12 h 51 min
  • Philiberte Répondre

    “les aborigènes ont été éradiqués.”
    Ils vont être contents d’apprendre qu’ils n’existent plus.

    Vous oubliez la colonisation passive. Si vous ne savez pas ce que c’est, ouvrez un oeil (les deux si vous êtes courageux!) et regardez ce qui se passe autour de vous, en France et en Europe.

    mais ça se passe de moins en moins passivement.

    6 août 2015 à 8 h 21 min
    • Jaures Répondre

      Les aborigènes étaient à l’arrivée de Cook en 1788 environ un million d’individus répartis en plusieurs centaines de tribus nomades et autant de langues et de cultures qui vivaient sur le continent austral depuis plus de 40 000 ans.
      En un siècle, leur nombre sera réduit à 60 000.

      6 août 2015 à 9 h 38 min
      • Philiberte Répondre

        Donc ils ne sont pas “éradiqués”. Parlez de génocide, pas d’éradication.

        6 août 2015 à 14 h 59 min
        • Jaures Répondre

          Oui, c’est une nuance qui leur serait probablement allée droit au coeur !

          6 août 2015 à 19 h 13 min
          • Philiberte

            Ce n’est pas parce que vous voulez avoir raison que vous avez raison. L’éradication est la disparition complète. Ne vous en déplaise.

            7 août 2015 à 7 h 33 min
          • Jaures

            Ce n’est pas cela qui me surprend, Philiberte. Je vous accorde volontiers cette nuance.
            Ce qui m’afflige c’est que pour vous, l’important n’est pas qu’un peuple soit exterminé à 95%, mais que l’on qualifie cela d’éradication alors que, quand même, on en a laissé 5% !
            Ce Jaurès, il exagère tout !

            7 août 2015 à 14 h 56 min
          • Philiberte

            j’appelle un chat un chat.
            mais je vous laisse le dernier mot, ça a l’air de vous faire tellement plaisir…

            7 août 2015 à 18 h 06 min
  • verdad Répondre

    e même, loin d’apporter la paix, les colonisateurs ont importé leurs propres conflits dans les pays colonisés ou piocher dans les populations une partie de la chair à canon dont ils avaient besoin.
    *********************************************************************
    Optique bizarroïde de l’HISTOIRE
    Quant à la chair à canon ????
    Dites plutôt, des gens très portés sur le guerres interns,
    n’étaient pas mobilisés pour, simplement ils s’engageaient
    volontairement avec la dure intention de se battre, ils étaient
    tout simplement, non pour défendre la patrie mais,
    en tant que mercenaires, tout comme les Légionnaires
    qui eux ne se plaignent pas car, non Politisés !

    6 août 2015 à 8 h 07 min
  • DE SOYER Répondre

    Les “jeunes” en question sont des immigrés. Que font-ils là?
    Pourquoi ne les renvoie-t-on pas chez eux? Ils bénéficieraient ainsi du niveau de vie élevé dont ces pays profitent depuis plus de 50 ans qu’ils se gouvernent eux-même?

    5 août 2015 à 19 h 19 min
  • Jaures Répondre

    Ne discutons pas ici de ce qu’aurait ou non apporté la colonisation à tel ou tel pays, ce qui amènerait une polémique sans fin.
    L’essentiel est que ces pays n’avaient rien demandé.

    Et que les descendants autochtones existent encore relève du pur hasard.
    La colonisation en Amérique s’est soldée par la disparition de civilisations entières. En Australie, les aborigènes ont été éradiqués.
    Il faut admettre que le fait colonial est d’abord un coup de force imposé à un peuple par un autre peuple qui a toujours commencé par des massacres, des déportations et des appropriations arbitraires.

    L’apport de la “civilisation” n’a jamais été qu’un prétexte et les autochtones n’ont jamais reçu la considération de citoyens à l’égal de leurs envahisseurs. Les infrastructures et aménagements mis en place par les colons l’ont été avant tout pour eux-mêmes, pas par humanisme désintéressé.

    Les seuls faits coloniaux accomplis ont été ceux où les autochtones ont disparu sous les coups simultanés des massacres, déportations et épidémies. Quand cela n’a pas suffit, il a bien fallu s’arranger avec la réalité et subir les guerres de décolonisation.
    De même, loin d’apporter la paix, les colonisateurs ont importé leurs propres conflits dans les pays colonisés ou piocher dans les populations une partie de la chair à canon dont ils avaient besoin.

    Reconnaitre le fait colonial n’est en rien cracher sur nos institutions. Bien au contraire ! L’intérêt de la démocratie est la liberté de porter un regard critique sur l’Histoire. Nous ne sommes en rien responsables des faits et méfaits de nos ancêtres. Sinon, imaginez les tonnes de culpabilité que devraient endurer, par exemple, nos voisins Allemands.

    5 août 2015 à 17 h 34 min

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *