L’Abbé Pierre : cinquante années d’imprécations politiques

L’Abbé Pierre : cinquante années d’imprécations politiques

Henri Grouès, 91 ans, « frère Philippe » chez les Capucins, dit l’Abbé Pierre pour tous les Français, est aussi, depuis cinquante ans, le premier de nos imprécateurs politiques. Il connaît d’ailleurs fort bien la vie politique pour avoir lui-même siégé, entre 1945 et 1951, à l’Assemblée nationale, comme député MRP de Meurthe et Moselle.

Avec une sincérité que nul ne lui conteste, il dénonce inlassablement le scandale que constitue l’étalement d’une misère qui contraste avec un autre étalement, celui des richesses. Et, avec ses compagnons, il s’efforce de rassembler des moyens pour venir en aide au plus grand nombre possible de ceux qui viennent frapper à la porte de ses refuges.

Jusque-là, rien à dire. Son combat est juste, même si les chiffres qu’il avance pourraient être critiqués (« 3,7 millions de personnes survivent en France avec moins de 579 euros par mois »…). Et son œuvre charitable inspire évidemment le respect. Mais son discours – celui qu’il a prononcé dimanche dernier sur l’esplanade du Trocadéro à Paris, comme celui qu’il tenait déjà le 1er février 1954 – est avant tout politique. Il s’adresse aux élus, à ses ex-collègues politiciens, et il somme ses interlocuteurs de se mobiliser pour faire pression à leur tour sur les élus. Pour que soit mise en œuvre « une autre politique ». Sur laquelle il reste assez flou mais dont on peut néanmoins deviner les contours.

L’Abbé Pierre se veut en particulier le chantre du logement social. Qu’il tient pour un nouveau droit-de-l’homme. Pourtant, depuis cinquante ans, cette politique dite de logement social a mobilisé des ressources considérables, largement prélevées autoritairement sur les revenus des Français. Près d’un ménage sur deux, bientôt, sera logé dans un logement dit social. Et comme toujours quand on est dans un système de redistributions, plus grande est l’offre, plus forte est la demande. Et plus on demande, plus il est difficile de satisfaire à l’offre…

Une autre politique du logement serait possible, qui libérerait les terrains à bâtir, alors que la plupart des communes les bloquent, qui allégerait les contraintes d’urbanisme, qui favoriserait la productivité et libéraliserait le marché. Faisant donc confiance à l’efficacité du droit de propriété. L’Abbé Pierre est un idéologue partisan au contraire d’abolir le droit de propriété.

On aura noté que Jacques Chirac, qui reçoit fréquemment l’Abbé, s’est déclaré une nouvelle fois partisan de la réquisition de tout logement vacant. Dans le but sans doute de profiter un peu d’une si enviable notoriété…

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Comments (7)

  • HC Répondre

    Je vous ai posé une question hier sur une soi disant position indéfendable de cet ex député. Comme réponse, vous vous contentez de faire paraitre ma question. Je suis votre abonné et suis habitué de votre part à plus de rigueur : avez vous pu, oui ou non, vérifier cette rumeur?

    12 février 2004 à 10 h 24 min
  • Henri CALMON Répondre

    Est-il exact que ce brave abbé Pierre, connu comme député MRP au lendemain de la Libé se soit élevé contre l’insuffisance répression menée par Teitgen contre les collabos ? Il aurait même dit que, tant qu’à les fusiller, il vaudrait mieux faire leur affaire aussi à leurs femmes et enfants. Si vous avez accès aux Journal des Débats, vous pouvez vérifier …

    11 février 2004 à 19 h 34 min
  • Shannon Répondre

    “Tout bien que tu detiens est un souci qui te retient… alors donnez nous vos biens et nous nous chargerons d’apaiser vos soucis”… c’etait dans un sketch des Inconnus ou ils jouaient les adeptes d’une secte. L’abbe Pierre pourrait peut-etre reprendre ce leitmotiv pour un vrai grand partage des richesses. “La propriete c’est du vol” sonne pas mal non plus… “Volez aux riches pour donner aux pauvres”…. Pour l’instant on emploie la methode douce avec les impots… D’autres idees ?…

    10 février 2004 à 9 h 45 min
  • La Verité Répondre

    Personnellement, je déteste cet individu et tout ce qu’il représente : la “solidarité” obligatoire étatique à la française ou le communisme déguisé en agneau. Quel autre pays au monde fait payer aux possesseurs de logements vacants un taxe ? Autrement dit, l’Etat vous oblige à louer vos logements pour ensuite ratisser la quasi-intégralité du revenu sous forme de taxes, impôts, etc. Lorsque la Maison Chirac chutera, j’espère que le communisme de droite qui l’a caractérisée disparaîtra aussi dans un grand nuage de fumée. Nous aurons alors affaire au communisme de gauche, qui lui, a le mérite de ne pas se cacher. On lui règlera alors son compte aussi.

    9 février 2004 à 17 h 07 min
  • isocrate Répondre

    Monsieur l’Abbé Pierre est le type même du sophiste grec – le “look” en moins. Beau discours, inlassable, périodique,…depuis 50 ans, comme si rien n’avait changé depuis. Seulement, comme chez Gorgias ou Hippias, ce discours, apparemement logique, mais rigoureusement faux, rapporte, ici, honneurs, admiration des modestes, considération des grands, et qui sait? une bonne place dans l’au delà! quand il est délivré au bon moment (le kairos). C’était le mécanisme même de la sophistique, tant villipendée par Isocrate. Cette technique rhétorique est la base même de tout discours politique depuis l’Antiquité, mais les marxistes, dont l’ultime avatar est l’abbé Pierre, l’ont vraiment porté aux sommets que l’on sait.

    9 février 2004 à 10 h 06 min
  • BABEUF Répondre

    En admettant même que l’abbé Pierre soit vraiment sincère (mais qu’est-ce que la sincérité? Quelles sont les causes profondes d’un parcours apparemment aussi altruiste? Pour ne pas verser dans la psychologie de bazar, je ne m’attarderai pas sur cet aspect des choses, mais, quand même, le cas de notre homme est loin d’être clair sur le plan psychanalytique, il en fait trop…), les idées qu’il propage sont catastrophiques. Je n’en prendrai qu’une, qu’il rabâche depuis un demi-siècle : “la réquisition des logements vacants” (sic). Croit-on vraiment que c’est en spoliant, une fois de plus, les propriétaires fonciers de leurs biens – et, après l’expérience désastreuse de la loi de 1948, cette-fois en toute connaissance de cause – qu’on va les inciter à investir? A mmoins bien sûr qu’en matière de logements on ne renonce une fois pour toute à l’investissement privé et qu’on s’en remette à l’Etat, aux collectivités territoriales, aux OPHLM, etc… à cette société de termitières chère à l’abbé, il est vrai loin “du luxe, du calme et de la volupté” qui conduisent, selon notre imprécateur national, tout droit à l’enfer. Et c’est là que l’abbé pointe l’oreille : la société idéale, pour lui, c’est celle où tout le monde est pauvre, mais qu’importe, pourvu que ce soit vraiment TOUT LE MONDE. Ce n’est pas soulager les pauvres qui l’intéresse, mais pourfendre “les riches”. “Les riches” sont pour l’abbé Pierre ce qu’étaient les juifs pour Hitler (et sans doute aussi le cas pour son ami Roger Garaudy, communiste défroqué, puis islamiste frénétique et antisémite notoire). Au risque de choquer, j’estime pour ma part cet individu profondément malfaisant et son action particulièrement néfaste.

    8 février 2004 à 11 h 41 min
  • alain D Répondre

    Dans mon hit perso des grandes figures françaises qui donnent la nausée, l’abbé Pierre est dans le tiercé. Son grand copain révisionniste Garaudy, son parti-pris dans le conflit israëlo-arabe, ses petits compagnons qui font de l’humanitaire dans les quartiers difficiles avec le keffieh autour du cou et son accoutrement avec sa barbe qui n’est pas sans rappeler le look des “frères musulmans”, sont des indices suffisemment sérieux à mes yeux pour désacraliser ses fameux “compagnons d’Emmaüs” dont l’idéologie se révèle progressivement au grand jour depuis le début des années 90: tiers mondisme, anti-sionisme ( alias anti-sémitisme), anti-américanisme, pacifisme , pro-islamisme , anti-occidentalisme… bref dans la droite ligne de Durban… Bref acheter à Emmaüs, pourquoi pas mais au meilleur prix, et après marchandage…et si vraiment l’occas elle est bonne!

    8 février 2004 à 0 h 07 min

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