Le pouvoir culturel veut dicter sa loi

Le pouvoir culturel veut dicter sa loi

Les États-Unis étant à ce jour, et sans doute pour longtemps encore, le pays le plus puissant du monde, aux plans économique et militaire, notamment, il est normal que leur élection présidentielle, une fois tous les quatre ans, soit un événement majeur, non seulement pour les citoyens américains, mais également pour l’opinion publique mondiale. Compte-tenu de la mondialisation, qui se traduit par une sorte de rétrécissement de la planète, l’élection de novembre prochain sera donc un événement planétaire.
Dans ces conditions, on s’attendrait à ce que les médias français assurent d’ores et déjà une couverture importante de l’événement. En suivant de près, dans tous les États de l’Union, les élections primaires, si caractéristiques de la démocratie américaine. En prenant le pouls de l’opinion, en cherchant à identifier ses grandes tendances et ses mouvements. En mesurant sa diversité. En faisant aussi, bien sûr, le bilan de l’administration de George Bush, du point de vue de sa politique intérieure comme de sa politique extérieure, qui ne peut être ramenée au seul problème irakien…
Au lieu de quoi, nos médias préfèrent se placer sur le terrain de la pure propagande. La détestation générale de la presse française pour George Bush n’a d’égal que celle qu’elle a si bien manifestée en avril 2002 à l’égard de Jean-Marie Le Pen.
L’arme favorite de la propagande, depuis toujours, est celle de la caricature. Le Président des États-Unis est donc, chez nous, presque unanimement décrit comme un simple benêt.
C’est dans cette ambiance que le jury du Festival de Cannes, 57e édition, vient d’accorder sa Palme d’or au plus gauchiste des réalisateurs américains, Michael Moore, pour « Fahrenheit 9/11 », un film qualifié de « documentaire », mais qui, aux dires de tous ceux qui l’ont vu, y compris de ceux qui l’ont applaudi, est plutôt un simple montage, détournant des images de leur contexte, leur faisant dire l’inverse de la vérité, pour aboutir à une simple bouffonnerie anti-Bush.
Ce jury – emmené par le réalisateur Quentin Tarantino, 41 ans, autodidacte et déjanté, nouvelle coqueluche des nihilistes – a profité de l’occasion, et de la présence sur la croisette de milliers de journalistes et de caméras, pour apporter sa contribution à une campagne politique mondiale.

ÊEtre de droite n’est pas correct !

Au plan artistique, il s’agit d’un simple détournement. Une forme nouvelle de happening. Car le film de Michael Moore, aussi réussi et efficace soit-il, peut-être, n’est certainement pas le chef-d’œuvre qu’on peut s’attendre légitimement à voir primé à Cannes. Le spectacle n’était pas à l’écran mais sur la scène, dans la salle, quand Michael Moore, rappelé d’urgence des États-Unis où il était retourné après la présentation de son film, fut invité à venir recevoir son trophée, avant de tenir une conférence de presse et s’exprimer ensuite sur les télévisions du monde entier.
Cet événement marque une nouvelle étape dans la voie de la politisation unilatérale de la culture, mise au service d’une idéologie qui, pour se vouloir révolutionnaire, n’en est pas moins minoritaire et peu démocratique. On devine que si George Bush est battu, en novembre prochain, les Américains auront « bien voté », tandis que s’il est réélu, le peuple aura tort. Comme il a eu tort, en France, le 22 avril 2002…
Sauf erreur, à ce jour, aucune voix autorisée ne s’est élevée contre cette manipulation. De même qu’après les élections présidentielles de 2002, il a fallu plusieurs mois avant que certains médias amorcent un début de timide mea culpa et reconnaissent qu’ils s’étaient conduits comme de simples propagandistes…

Un nouveau soviétisme

Le même phénomène est à l’œuvre en France dans l’édition.
On sait que le groupe Hachette a finalement été contraint par les autorités de Bruxelles, en charge de faire respecter les règles de la concurrence, de revendre 60 % de l’ensemble des sociétés d’édition regroupées provisoirement dans une entité dénommée Éditis. Ayant fait la meilleure offre financière, aux alentours de 650 millions d’euros, le groupe de Wendel s’est vu normalement offrir une option prioritaire. Mais comme ce groupe est présidé par un certain Ernest-Antoine Seillière, par ailleurs président (jusqu’à l’année prochaine) du Medef, réputé « de droite », on a vu fleurir ici et là, sous des plumes réputées sérieuses, des articles posant la question de savoir si une grande maison d’édition, publiant en particulier des livres scolaires, pouvait être, ou non, la propriété d’un groupe dont le principal dirigeant a des idées politiques si peu correctes.
De même, une majorité de journalistes du « Figaro » ne se gêne pas de dire que leur nouveau propriétaire Serges Dassault, par ailleurs élu UMP, est un affreux réactionnaire.
On croit rêver. Mais c’est ainsi. En 2004. Dans la république socialiste française.

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Comments (8)

  • R. Ed. Répondre

    Ben Chirachmed :je ne suis ni pour ni contr, bien au contraire ! Et il faut mettre un frein à l’immobilisme !

    3 juin 2004 à 10 h 02 min
  • Stephane Répondre

    Pas absurde du tout! Non seulement c’est credible, mais en plus de tels renversements ideologiques s’observent ailleurs. Ainsi, a Taiwan, l’ancien president nationaliste Lee Teng hui a créé un parti independantiste encore plus farouche que celui du president actuel Chen Hsui Bian. Virage a 180 degres. Et comme Chirac, il a tout fait pour faire perdre les elections a son camp. J’ajouterais que Chirac a aussi recemment dit ne pas vouloir faire de politique liberale. En fait, Chirac se distingue surtout par son manque de convictions profondes. Il suit l’opinion des Francais au lieu de les conduire et dirait tout et son contraire pour rester au pouvoir.

    3 juin 2004 à 7 h 14 min
  • révélation Répondre

    Question absurde : Chirac est-il communiste ? Si Chirac n’est pas un communiste, alors comment expliquer tout cela ? – Chirac vendait le journal L’Humanité avant de rentrer en politique. – Chirac n’a jamais critiqué le parti communiste de toute sa vie politique, 40 ans, par contre ne cesse de diaboliser le Front National dont il devrait pourtant être plus proche en théorie. – Chirac a fait battre Giscard en 1981, pour permettre l’arrivée au pouvoir de Mitterrand et son programme communiste de 110 propositions. – Chirac a fait financer plusieurs fois L’Humanité, et plus récemment la grande manifestation altermondialiste du Forum Social Européen en 2003. – Chirac n’a jamais critiqué le programme communisant de Jospin quand celui-ci était au pouvoir de 1997 à 2002, notamment la loi tristement célèbre sur les 35h. – Chirac n’a jamais remis en question la pensée unique totalitaire de gauche dans les médias, à la télévision, à l’éducation nationale, dans les écoles de journalisme… – Chirac entretient de très bons contacts avec tous les hommes politiques de gauche, et leur demande même de le tutoyer en dehors des caméras de la télévision. – Chirac lit comme unique journal « Le Monde » quand il voyage en avion. – Chirac n’a appliqué aucune de ses très rares promesses de diminution d’impôt de son programme politique de 2002 (suppression de la redevance télé, diminution de 30% de l’impôt sur le revenu) et dans le même temps a multiplié toutes sortes d’impôts et de taxes. – Chirac n’a rien fait depuis 2 ans qu’il est au pouvoir, pour rendre de la liberté aux Français, de même qu’il n’avait rien fait chaque fois qu’il a été au pouvoir de 1986 à 1988, de 1995 à 1997. – Après son élection en 2002, Chirac a attendu 6 mois environ avant de commencer les premières pseudo-réformes qui n’en sont pas, sachant que les experts sont tous d’accord pour dire qu’il faut faire les grandes réformes dans les 3 premiers mois. Etc… Les Exemples sont très nombreux. Et si tous nos problèmes, en France, ne venaient pas de Chirac et des apparatchiks crypto-socialo-communistes qui contrôlent l’UMP ? Dès lors, n’est-ce pas absurde de continuer à voter pour un parti, l’UMP, qui est dirigé par des communistes ou des sympathisants des communistes ? Quand les électeurs de droite cesseront de voter pour ce parti, mais pour d’autres partis à droite, les choses commenceront peut-être à changer en France.

    31 mai 2004 à 23 h 27 min
  • christophoros Répondre

    La médiocrité du “personnel politique” des pays voisins n’a en général rien à envier à celui de la France. Considérez Tony Blair et Gerhard Schrôder, voir Zapatero et Asnar. Bof. Gerhard SchrÖder, entre autres, est une sorte de “Bel Ami” ( merci Maupassant ) qui après chacun de ses quatre mariages est monté dans l’échelle sociale ( d’où sa prédilection pour une certaine marque automobile ). Où sont donc les De Gaulle, Adenauer, Churchill, Roosevelt… Les USA vont avoir le choix entre l’inénarable Kerry flanqué de la veuve quetchup et l’homme des Bretzel et autres VTT.Quelle classe !

    31 mai 2004 à 1 h 09 min
  • TL Répondre

    Quand on voit le mal que s’est donné Mr donnadieu de vabres pour que les intermittents du spectacle ne gachent pas sa petite sauterie de Cannes, pour que ces derniers nous pondent ce “palmares” d’anthologie….C’est sans doute cela la démocratie, des types défilent pour nous piquer du pognon sans travailler(ou si peu), et à la première occasion, ils nous crachent à la figure en détournant l’art de sa mission. On comprend mieux pourquoi eux sont “les intelligents”, et nous la masse inculte des cochons de payants

    30 mai 2004 à 20 h 56 min
  • R. Ed. Répondre

    La France a longtemps été un pays “phare” en ce qui concerne beaucoup de sujets :les droits de l’Homme, la sécu, les indemnités de chomage, la justice, la liberté d’expression, de pensée, etc, etc…Maintenant c’est devenu une République Bananière (royaume, empire, au choix) La devise électorale française ” Mieux un escroc qu’un fascho” Quel choix restreint quand-même !

    30 mai 2004 à 20 h 40 min
  • Martel Répondre

    Vous avez tout à fait raison, M. Dumait. La France, un pays démocratique? Quand on voit les Verts – qui font 5% – présents à l’Assemblée et le FN – qui fait 16% – exclu de l’Assemblée, on peut en douter. La France, un pays occidental? Quand on voit l’antiaméricanisme pathologique de nos médias et de nos dirigeants, on peut encore en douter. La France, marxiste et islamisée, n’est plus que l’ombre d’elle-même. Merci, M. Chirac. Les puissances occidentales le savent, et ne nous prennent même plus au sérieux.

    30 mai 2004 à 1 h 49 min
  • Jacques TOURNEUR Répondre

    En ce qui concerne le Festival de Cannes, il n’y avait rien de bon à en attendre dès lors que les soviets d’intermittents du spectacle le laissaient se dérouler. Il est bien évident qu’il y a eu un marchandage du type : je te laisse continuer, mais la palme d’or doit être “révolutionnaire”. Acta est fabula. Mais que devient le cinéma quand la palme est attribuée à un simple documentaire, fût-ce un brûlot (au demeurant médiocre) ? Que devient le cinéma dans tout ça ? Encore un ou deux “coups” comme ça et le festival sera relégué au rang d’un simple comice agricole. Tout ceux qui en vivent pleureront alors, mais ne l’auront-ils pas un peu cherché?

    29 mai 2004 à 22 h 10 min

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