Le syndrome du fruit défendu

Le syndrome du fruit défendu

Lorsque Parmentier, qui a laissé son nom au fameux hachis, a voulu répandre la pomme de terre venue d’Amérique, un migrant en somme, le Gaulois de l’époque, qui était déjà réfractaire et méfiant au regard de ce qu’on voulait lui imposer, ne se précipita pas pour adopter ce tubercule, suspect à ses yeux.

Toutefois, connaissant la psychologie dudit Gaulois, Parmentier fit planter des champs de pommes de terre gardés par des hommes en armes, mais le jour seulement.

Cependant le Gaulois, comme le blaireau, sort la nuit pour éventuellement chaparder, et ainsi, ayant goûté à la pomme de terre, il l’adopta.

On connaît la suite et notre gastronomie ne serait pas ce qu’elle est, si elle n’avait été bonifiée par cette richesse venue d’ailleurs.

L’essor et le succès de la pomme de terre sont dus au syndrome du fruit défendu en quelque sorte.

Eh bien, on peut constater un phénomène assez ressemblant aujourd’hui, à savoir l’engouement, improbable il y a encore quelques mois, pour le vaccin contre le covid-19.

Le Gaulois du XXIe siècle a vite compris que la stratégie gouvernementale face à la crise sanitaire était orientée vers le vaccin. D’où une certaine réserve, voire une franche réticence, pour se faire vacciner.

En plus, la synergie entre certains doutes, réels ou fantasmés, concernant la fiabilité des vaccins d’une part, et d’autre part, les difficultés logistiques dont on ne voit pas la fin : approvisionnements, conserva­tion, manque d’aiguilles, répartition en fonction des besoins, manque de personnels compétents, ont engendré une véritable crainte face à la solution gouvernementale perçue comme voulant être imposée.

On peut alors se demander si tous ces inconvénients, dont on ne fera le procès d’intention à personne de les avoir suscités, n’ont pas été une opportunité pour que le Gaulois, qui a ainsi l’eau à la bouche, en arrive à souhaiter, et même vouloir à tout prix, se faire vacciner.

D’autant plus qu’il est toujours égal à lui-même et se révèle tel qu’il est.

En effet, il y a des personnes à risque, prioritaires, les soignants en première ligne qu’il faut protéger au mieux et puis un classement selon l’âge, les plus de 75 ans, puis de 70, puis de 50 et les moins de 16 ans, un vrai Sudoku pour les béotiens qui attendent maintenant leur tour avec une impatience exacerbée par les difficultés elles-mêmes.

Et, cerise sur le gâteau, on vient d’annoncer que tous les Gaulois pourraient bientôt «tenter leur chance» pour se faire vacciner quel que soit leur âge si, après 16 heures, des vaccins sont restés disponibles car non utilisés.

Il n’est donc plus nécessaire d’essayer de tricher pour passer avant son tour.

Là encore, le syndrome du fruit défendu.

À la vue des files d’attente en certains lieux de vaccination, on ne peut s’empêcher de se souvenir de celles qui se tenaient devant la célèbre boulangerie de Poilâne dont le nom devint aussi fameux que son pain.

D’ailleurs à la grande époque de la toute-puissante Union soviétique, un journaliste d’investigation polonais à la concurrence improbable chez nous, écrivit un article illustré par une photo de la Rolls des boulangeries avec ses queues interminables, portant en légende: «Il n’y a pas qu’en Pologne qu’on fait la queue devant les boulangeries.»

Sauf qu’un très récent sondage sur le vaccin obligatoire révèle que plus de 87% des Gaulois y restent défavorables.

Comme quoi, un Gaulois peut en cacher un autre!

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