Le verbe, l’image et la réalité

Le verbe, l’image et la réalité

Conscients d’avoir été mal gouvernés depuis trente ans au moins, les Français dans leur grande majorité font confiance au nouveau Président pour résoudre les problèmes restés sans solution ou tout simplement créés depuis trois décennies.

Le slogan fameux « Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts » et, ajouterai-je, « les plus malins » constamment pensé et répété depuis soixante-dix ans, reste plus que jamais d’actualité. L’ennui est que la réalité est là et elle est très différente de ce que l’on dit.
Personnellement, je souhaite que Nicolas Sarkozy réussisse, mais les choses étant ce qu’elles sont, je ne discerne pas comment il peut parvenir au succès. Je crains que les réformes adoptées – des demi-mesures parfois très complexes – non seulement ne stabilisent pas les problèmes mais n’empêchent pas qu’ils s’aggravent.

Prenons quelques cas précis. La dette nationale s’élève à quelque 2 000 milliards d’euros, provision pour retraite incluse. Le déficit pour 2007 ne sera « que de 36 milliards d’euros », claironne-t-on, au lieu des 42 milliards inscrits dans la loi de finances initiale et l’on considère cela comme une victoire en nous faisant croire qu’un déficit s’ajoutant à la dette n’augmente pas ladite dette.

Le ministre de la Défense a reconnu que 6 milliards d’euros supplémentaires seront nécessaires sur les cinq annuités de la prochaine loi de programmation militaire pour maintenir l’armée à niveau. Quant au deuxième porte-avions, il reste du domaine verbal.

Pour les seules prisons surpeuplées où les conditions d’existence sont souvent tout à fait contraires aux droits de l’homme que l’on proclame à tout bout de champ, il faut trouver, immédiatement, pour éviter le pire, un milliard d’euros de crédit immobilier, engager 4 500 nouveaux fonctionnaires et dégager par an 150 millions de plus de crédit de fonctionnement.

S’agissant du nombre global des fonctionnaires (6 millions), Éric Woerth, ministre du Budget, a précisé le 21 juin que 30 000 à 40 000 d’entre eux ne seront pas remplacés en 2008. L’économie qui en découlerait serait de 1,4 à 1,7 milliard d’euros, mais le départ d’un fonctionnaire ne signifie pas que celui-ci n’émarge plus au budget de l’État qui, d’employeur devient Caisse de retraite. Substituer des pensions à des salaires ne représente donc pas une réelle diminution des coûts et comme il faudra bien recruter des jeunes, il est prévu d’en engager 60 000 en 2010.

Ne parlons pas de la Sécurité sociale dont les déficits cumulés s’élèvent à 120 milliards d’euros. Pour autant, on sait dans quel état sont nos hôpitaux. Et voici que l’on annonce la construction de 500 000 nouveaux logements par an. Sur quels crédits ?

En fait, la France est devenue le pays européen où les dépenses publiques sont les plus élevées en proportion de la richesse nationale : 53,2 % du PIB ! C’est ce qu’à fort bien dit le Président de la Cour des comptes qui vient de déclarer en totale contradiction avec la parole officielle : « C’est l’ensemble des finances publiques qui va se détériorer en 2007. L’INSEE vient de révéler l’augmentation de la dette publique de 33,7 milliards d’euros durant le seul premier trimestre de 2007… Nous constatons, souligne Philippe Seguin, une aggravation de la situation de l’État et celle de la Sécurité sociale et la poursuite d’une vive progression des dépenses des collectivités territoriales ».

Bref, ce que je veux dire, c’est que Nicolas Sarkozy ne pourra pas tenir le dixième de ses promesses sans augmenter encore les impôts.
Pour terminer, un petit mot d’espoir tout de même. À l’occasion de la fête nationale du 14 juillet, « il n’a été brûlé sur la voie publique que 199 véhicules » contre 200 en 2006 ! Mais aussi, un autre petit mot engageant à la prudence : le préfet de Seine-Saint-Denis, Jean-François Cordet, auteur de la note qui décrit les délits en augmentation, les policiers démotivés et les islamistes mobilisés sous le signe de l’immigration dans son département vient d’être placé en position « hors-cadre ». Un haut fonctionnaire disant la vérité, c’est inadmissible, il fallait le sanctionner. C’est fait.

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Comments (1)

  • Luc SEMBOUR Répondre

    La France de Sarkozy est un bateau qui lui a été confié pour faire un beau voyage. Le capitaine a pointé le navire dans la bonne direction. Tout l’équipage est sur la brèche. Le pacha sympathique paie de sa personne,  court partout du pont supérieur à la machine, dévalant les escaliers, encourageant tout le monde, officiers et matelots.

    Sur le quai, les badauds ne remarquent qu’une chose: de vagues remous sous la coque indiquent tout au plus que les hélices ne sont pas encore tombées au fond du port. Mais rien ne laisse imaginer un départ imminant ni même projeté. Tout ressemble à un magnifique exercice de départ avec ordre absolu de ne surtout pas partir. Les amarres ont d’ailleurs été renforcées partout, après avoir fait semblant de larguer les anciennes qui menaçaient de lâcher toutes seules, sous la seule action de la houle.

    M. SARKOZY n’a pas de culture économique. Il travaille à l’instinct. I a toujours eu vaguement l’impression que c’est dans les idées de droite que réside son salut politique (et peut-être le salut économique du pays), mais il ne peut résister à l’idée que la priorité des priorités n’est pas de faire machine avant toute dans cette direction, mais bien plutôt de savamment désamorcer toute opposition à son pouvoir.

    Résultat : une énergie créative débordante mise au service de la neutralisation des hommes et des systèmes politiques qui pourraient le gêner à FAIRE mais rien de significatif pour effectivement FAIRE, c’est-à-dire stopper la dérive douce mais catastrophique des finances, de la démographie, de la criminalité, etc…Comme il ne sait finalement pas ce qu’il faut FAIRE, tout ce qu’il fait s’apparente à de médiatiques emplâtres sur des jambes de bois, prodigués avec une touchante débauche d’expertise et de soins méticuleux.

    Neutraliser les hommes est tellement plus facile que de neutraliser les faits. A court terme sa politique donne le change, achète du temps. A long terme elle est plus que désastreuse: mortelle.

    Sarkozy échoue en beauté là sous nos yeux. C’est horrible et désolant.   

     

    13 août 2007 à 15 h 43 min

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